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16/05/2024 | FRANCE | N°20/01521

France | France, Tribunal judiciaire de Nantes, 8eme chambre, 16 mai 2024, 20/01521


MM

G.B


LE 16 MAI 2024

Minute n°24/164

N° RG 20/01521 - N° Portalis DBYS-W-B7E-KTPL




[H] [Z]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/001371 du 21/02/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NANTES)


C/

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES

NATIO 20-17






copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à


copie certifiée conforme
délivrée à
PR (3)
Me S. RODRIGUES DEVESAS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
-

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HUITIEME CHAMBRE


Jugement du SEIZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE



Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Mari...

MM

G.B

LE 16 MAI 2024

Minute n°24/164

N° RG 20/01521 - N° Portalis DBYS-W-B7E-KTPL

[H] [Z]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/001371 du 21/02/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NANTES)

C/

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES

NATIO 20-17

copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à

copie certifiée conforme
délivrée à
PR (3)
Me S. RODRIGUES DEVESAS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
----------------------------------------------

HUITIEME CHAMBRE

Jugement du SEIZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président :Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,
Assesseur :Géraldine BERHAULT, Première Vice-Présidente,
Assesseur :Florence CROIZE, Vice-présidente,

GREFFIER : Caroline LAUNAY, lors des débats et Mélanie MARTIN, lors de la mise à disposition

Débats à l’audience publique du 16 FEVRIER 2024 devant Marie-Caroline PASQUIER, vice-présidente, siégeant en juge rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

Prononcé du jugement fixé au 16 MAI 2024, date indiquée à l’issue des débats.

Jugement prononcé par mise à disposition au greffe.

---------------

ENTRE :

Monsieur [H] [Z], demeurant [Adresse 1]
Rep/assistant : Me Stéphanie RODRIGUES-DEVESAS, avocat au barreau de NANTES, avocat plaidant

DEMANDEUR.

D’UNE PART

ET :

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES
représenté par Fabienne BASSET, vice-procureur

DEFENDEUR.

D’AUTRE PART

EXPOSÉ DU LITIGE ET DES DEMANDES

Par acte d’huissier du 9 avril 2020, [H] [Z] a fait assigner le procureur de la République devant le tribunal judiciaire de Nantes afin de contester la décision du directeur des services de greffe judiciaire du tribunal d’instance de Saint-Nazaire du 19 décembre 2019 refusant l’enregistrement de la déclaration qu’il avait souscrite le 28 novembre 2019 en application de l’article 21-12 du code civil, en tant que mineur confié au service de l’aide sociale à l’enfance.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 décembre 2022, [H] [Z] [E] [F] demande au tribunal de :

- annuler la décision de refus d’enregistrement de la déclaration de nationalité souscrite par [H] [Z] ;
- dire que [H] [Z], né le 23 décembre 2001 à [Localité 2] (Cameroun) est de nationalité française
- ordonner la mention prévue à l’article 28 du code civil ;
- Laisser les dépens à la charge du trésor public.

Il expose avoir été pris en charge le 14 novembre 2016 par l’aide sociale à l’enfance dès son arrivée sur le territoire français en qualité de mineur isolé, puis avoir bénéficié d’une tutelle complète jusqu’à la veille de sa majorité, le 22 décembre 2019. Il constate que le ministère public ne soulève plus de difficulté quant à la durée de trois ans du recueil.
S’agissant de son état civil, il indique produire un acte de naissance et non un extrait, de sorte qu’il est possible d’en contrôler la régularité et la certification conforme par le vice-consul vient conférer à cette copie de l’acte une force probante équivalente. A la suite des observations du ministère public, il verse un certificat de conformité d’existence de souche et de lieu de naissance ainsi qu’une copie certifiée conforme établi par la mairie qu’il estime parfaitement lisible contrairement aux affirmations du parquet.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 novembre 2022, le ministère public requiert de :
- constater que le récépissé prévu par l’article 1040 du code de procédure civile a été délivré ;
- débouter [H] [Z] de l’intégralité de ses demandes ;
- dire et juger que [H] [Z], se disant né le 23 décembre 2001 à [Localité 2] (Cameroun), n’est pas de nationalité française ;
- ordonner la mention prévue par les articles 28 du code civil ;
- Statuer ce que de droit sur les dépens.

Le ministère public indique que la charge de la preuve d’établir qu’il remplit toutes les conditions requises par la loi incombe au requérant.
Il rappelle que nul ne peut se voir la nationalité française, à quelque titre et sur quelque fondement que ce soit, s’il ne justifie pas de façon certaine de son état civil par la production d’un acte de naissance répondant aux exigences de l’article 47 du code civil.
Il ne remet plus en cause la durée de trois ans durant laquelle, [H] [Z] a été recueilli en qualité de mineur isolé.
Il fait valoir qu’en application de l’article 22 de la convention franco-camerounaise du 12 février 1974 en matière judiciaire prévoit que les actes de l’état civil doivent être revêtus de la signature et du sceau officiel de l’autorité ayant qualité pour les délivrer et, s’il s’agit d’expéditions, être certifiées conformes à l’original par ladite autorité.
Il en déduit que la copie certifiée conforme par le vice-consul n’est pas recevable en France car elle n’a pas été délivrée par un officier de l’état civil de la commune de provenance.
Sur les dernières pièces produites, il indique que la photocopie d’un certificat de conformité d’existence de souche et de lieu de naissance, à la supposer recevable bien que le tampon de l’autorité qui l’a émis et le signature ne sont pas lisibles, est insuffisante car seul un acte de l’état civil peut apporter la preuve de l’événement qu’il atteste et un tel certificat n’est pas un acte de l’état civil.
S’agissant de la copie, certifiée conforme à l’original le 17 août 2022, de la copie simple, délivrée sans date, de l’acte de naissance n°99/2001 dressé le 31 décembre 2001, le ministère public fait valoir qu’il ne s’agit pas d’une copie recevable car la copie délivrée certifie conforme une copie, dont certaines mentions ainsi que les signataires sont illisibles. Il ne s’agit pas d’une copie délivrée par l’officier de l’état civil détenteur du registre, ce qui n’est pas conforme avec l’article 22 de l’accord entre la France et le Cameroun.
Enfin, les noms de l’officier de l’état civil et du secrétaire qui ont dressé l’acte et l’ont signé, ne sont pas lisibles, ce qui ne permet pas de vérifier que l’acte a été établi en conformité avec l’article 14 de l’ordonnance en vigueur sur l’état civil au Cameroun.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le récépissé prévu par l’article 1043 du code de procédure civile
Aux termes des dispositions de l’article 1043 du code de procédure civile, dans sa version applicable à la présence instance, dans toutes les instances où s’élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l’assignation, ou le cas échéant une copie des conclusions soulevant la contestation, sont déposées au ministère de la justice qui en délivre récépissé.
Le ministère de la justice a reçu le 27 juillet 2020 copie de l’assignation selon récépissé du 6 août 2020.
Il est ainsi justifié ainsi de l’accomplissement des formalités de l’article 1043 du code de procédure civile.
La procédure est dès lors régulière.

Sur les demandes au fond

L’article 21-12 alinéa 3 1° du code civil dispose que l’enfant, qui depuis au moins trois années, est confié aux services de l’aide sociale à l’enfance, peut, jusqu’à sa majorité, déclarer qu’il réclame la qualité de Français, pourvu qu’à l’époque de sa déclaration il réside en France.

Il convient de rappeler qu’en application de l’article 47 du code civil, « Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française. »

En matière de nationalité, quelque que soit le fondement de la demande, il est exigé de justifier de façon certaine de son état civil par la production d’un acte d’état civil conforme aux exigences de l’article 47 du code civil.

L’article 30 du code civil prévoit que “la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause”.

[H] [Z] n’étant pas titulaire d’un certificat de nationalité française , la charge de la preuve lui incombe.

L’article 22 de la convention franco-camerounaise signée entre les deux pays le 21 février 1974 prévoit que :
1° Sont admis, sans légalisation, sur les territoires respectifs de la République française et de la République Unie du Cameroun, les documents suivants établis par les autorités de chacun des deux Etats :
- les expéditions des actes de l’état civil tels qu’ils sont énumérés à l’article 21 ci dessus ;
- les expéditions des décisions écrites ou autres documents judiciaires enregistrés ou déposés dans ces tribunaux ;
- les actes notariés ;
- les certificats de vie des rentiers viagers.
2° Les documents énumérés ci-dessus doivent être revêtus de la signature et du sceau officiel de l’autorité ayant qualité pour les délivrer et, s’ils s’agit d’expéditions, être certifiés conformes à l’original par ladite autorité. En tout état de cause, ils sont établis matériellement de manière à faire apparaître leur authenticité.

L’article 21 liste notamment les actes de naissances.

L’ordonnance n°81-02 du 29 juin 1981 portant organisation de l’état civil camerounais et diverses dispositions relatives à l’état des personnes physiques prévoit :
Article 14 : les actes de naissances et de décès sont conjointement signés par l’officier d’état civil ou par le secrétaire du centre, au vu d’une déclaration du père, de la mère, du chef d’établissement hospitalier où a lieu la naissance ou le décès, ou de toute personne ayant eu connaissance de l’événement. Mention de la qualité du déclarant doit figurer sur l’acte.
Article 17 2) La délivrance par les services public compétents d’une copie, d’un extrait ou d’une fiche donne lieu à la perception d’un droit fixe conformément au code de l’enregistrement du timbre et de la curatelle.

***

En l’espèce, pour justifier de son état civil, [H] [Z] produit une copie de son acte de naissance certifiée conforme par le vice-consul du Consulat général de la République du Cameroun, lequel au regard de l’article 22 de la convention franco-camerounaise, n’est pas probant puisqu’il n’a pas qualité pour délivrer un acte d’état civil.

Il produit également la photocopie d’un certificat de conformité d’existence de souche et de lieu de naissance émis par la commune de [Localité 2], ce qui ne peut constituer un acte d’état civil.

Il produit enfin une photocopie d’une copie d’un acte de naissance n°99E/2001.
La mention “certifiée conforme à l’original le 17 août 2022" est apposée au milieu de la copie sans que ne soit indiqué quelle est la personne qui a certifié conforme cette copie. Il n’y a en outre aucune date de délivrance de la copie.
Il ne peut être considéré qu’en application de l’article 22 de la convention franco-camerounaise, que ce document est revêtu de la signature et du sceau officiel de l’autorité ayant qualité pour les délivrer, étant observé que la loi camerounaise prévoit la possibilité de délivrer des copies d’acte de naissance.

Ne pouvant justifier d’un acte de naissance probant, [H] [Z] ne peut rapporter la preuve de sa minorité au moment de la déclaration de souscription de la nationalité française, qui constitue l’une des conditions exigées par l’article 21-12 du Code civil.

Il sera en conséquence débouté de l’ensemble de ses demandes et il sera constaté qu’il n’est pas de nationalité française.

Succombant, le demandeur sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que le récépissé prévu par l’article 1043 du Code de procédure civile a été délivré ;

DÉBOUTE [H] [Z] de ses demandes ;

DIT que [H] [Z], se disant né le 23 décembre 2001 à [Localité 2] (Cameroun) n’est pas de nationalité française ;

ORDONNE la mention prévue par l’article 28 du Code civil ;

CONDAMNE [H] [Z] aux dépens.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT

Mélanie MARTINMarie-Caroline PASQUIER


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Nantes
Formation : 8eme chambre
Numéro d'arrêt : 20/01521
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;20.01521 ?
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