TRIBUNAL JUDICIAIRE
de MEAUX
Pôle Social
Date : 02 septembre 2024
Affaire :N° RG 22/00594 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CC2OA
N° de minute : 24/00526
RECOURS N° :
Le
Notification :
Le
A
1 CCC aux parties
JUGEMENT RENDU LE DEUX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
PARTIES EN CAUSE
DEMANDERESSE
Madame [B] [T] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 2] (77)
Comparante en personne
DEFENDERESSE
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE ET MARNE
[Localité 3]
Représentée par Madame [F] [K], agent audiencier
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DE L’AUDIENCE
Président : Madame Murielle PITON, Juge
Assesseur : Madame Cristina CARRONDO, Assesseur Pôle social
Assesseur : Monsieur Didier AOUIZERATE, Assesseur pôle social
Greffier : Madame Emilie NO-NEY lors des débats, et Madame Diara DIEME, adjointe administrative faisant fonction de greffier, lors du délibéré
DÉBATS
A l'audience publique du 10 Juin 2024.
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EXPOSE DU LITIGE
Le 18 juillet 2021, Madame [B] [T] [Y], aide-soignante de profession, a effectué une demande de reconnaissance de maladie professionnelle pour burn-out.
Après enquête administrative, la Caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (ci-après, la Caisse), s'agissant d'une affection hors tableau, a transmis son dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).
Le 3 mars 2022, le CRRMP a rendu un avis défavorable à sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, au motif que : " L'analyse des éléments médicaux et administratifs du dossier ne permet pas de retenir un lien direct et essentiel entre le travail habituel et la maladie déclarée par certificat médical du 10/03/2021. "
Par un courrier recommandé daté du 11 juin 2022, Madame [B] [T] [Y] a contesté la décision de la Caisse devant la commission de recours amiable.
Puis, par un courrier recommandé expédié le 12 octobre 2022, Madame [B] [T] [Y] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Meaux en contestation de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.
L'affaire a été appelée à l'audience du 30 janvier 2023.
Par jugement avant-dire droit rendu le 03 avril 2023, le tribunal a notamment :
- Ordonné la saisine du CRRMP des Hauts de France afin qu'il donne son avis sur l'existence d'un lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée et l'exposition professionnelle de Madame [B] [T] [Y] ;
- Renvoyé à l'audience du 11 septembre 2023 aux fins de conclusions des parties après dépôt de l'avis du comité ;
- Réservé les dépens.
Le 08 février 2024, le CRRMP des Hauts-de-France a émis un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, au motif que : " Après avoir étudié les pièces médico-administratives du dossier, les caractéristiques médicales ainsi que l'absence d'argument factuel qui permettrait d'analyser les différentes contraintes psychosociales et organisationnelles, ne permettent pas d'étayer un lien de causalité.
Par ailleurs, et en l'absence de toute pièce supplémentaire contributive fournie à l'appui du recours, aucun élément ne permet d'émettre un avis contraire à celui du CRRMP précédent.
En conséquence, il n'y a pas lieu de retenir de lien direct et essentiel entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle. "
L'affaire a été rappelée à l'audience du 10 juin 2024.
Lors de l'audience, Madame [B] [T] [Y], comparaissant en personne, maintient sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de sa pathologie.
Elle fait valoir qu'elle est toujours sous antidépresseurs et continue à voir son psychiatre régulièrement et soutient que sa maladie est directement en lien avec son activité professionnelle d'aide-soignante.
En défense, la Caisse, représentée par son agent audiencier, sollicite oralement l'entérinement de l'avis du CRRMP des Hauts-de-France et le débouté des prétentions adverses.
À l'issue des débats, les parties ont été avisées que l'affaire était mise en délibéré au 23 septembre 2024, avancé au 02 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
L'article L.461-1 du code de la sécurité sociale dispose que " les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, est assimilée à la date de l'accident :
1° La date de la première constatation médicale de la maladie ;
2° Lorsqu'elle est postérieure, la date qui précède de deux années la déclaration de maladie professionnelle mentionnée au premier alinéa de l'article L. 461-5 ;
3° Pour l'application des règles de prescription de l'article L. 431-2, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.
Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.
Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.
Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.
Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d'origine professionnelle, dans les conditions prévues aux septième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire ".
En application de l'article R.142-17-2 du même code lorsque le litige porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie non désignée dans un tableau de maladies professionnelles et entraînant une incapacité permanente prévisible supérieure à 25 %, il incombe au tribunal de recueillir préalablement l'avis d'un autre comité régional.
Il est constant que le 18 juillet 2021, Madame [B] [T] [Y], exerçant la profession d'aide-soignante, a effectué une demande de reconnaissance de maladie professionnelle pour la pathologie "burn-out”.
L'affection en cause ne figure sur aucun des tableaux de maladies professionnelles mais l'assurée présente une incapacité permanente partielle supérieure à 25%. Le dossier a donc été communiqué au CRRMP de la région Ile-de-France, lequel a émis un avis défavorable, le 03 mars 2022, considérant que " L'analyse des éléments médicaux et administratifs du dossier ne permet pas de retenir un lien direct et essentiel entre le travail habituel et la maladie déclarée par certificat médical du 10/03/2021. "
Sur saisine du tribunal, le CRRMP des Hauts-de-France a également rendu le 08 février 2024 un avis défavorable, au motif que : " Après avoir étudié les pièces médico-administratives du dossier, les caractéristiques médicales ainsi que l'absence d'argument factuel qui permettrait d'analyser les différentes contraintes psychosociales et organisationnelles, ne permettent pas d'étayer un lien de causalité.
Par ailleurs, et en l'absence de toute pièce supplémentaire contributive fournie à l'appui du recours, aucun élément ne permet d'émettre un avis contraire à celui du CRRMP précédent.
En conséquence, il n'y a pas lieu de retenir de lien direct et essentiel entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle. "
Si, en tout état de cause, le tribunal n'est pas lié par l'avis des CRRMP, il appartient au requérant de rapporter la preuve du lien direct et essentiel qu'il invoque entre sa pathologie et son travail.
Or, en l'espèce, Madame [B] [T] [Y] n'apporte pas d'éléments nouveaux qui permettrait de passer outre les deux avis défavorables des CRRMP.
Par conséquent, au vu de l'avis du CRRMP des Hauts-de-France, qui n'est contredit par aucun élément, le recours formé par Madame [B] [T] [Y] sera rejeté.
Succombant à l'instance, Madame [B] [T] [Y] sera condamnée aux éventuels dépens exposés, sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal judiciaire de Meaux, statuant par décision contradictoire, rendue en premier ressort,
DÉBOUTE Madame [B] [T] [Y] de son recours ;
DIT que la pathologie déclarée par Madame [B] [T] [Y] par certificat médical initial du 10 mars 2021 ne peut être prise en charge au titre de la législation professionnelle ;
CONDAMNE Madame [B] [T] [Y] aux dépens ;
RAPPELLE que ce jugement est susceptible d'appel dans le délai d'un mois à compter de sa notification aux parties.
Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal le 2 septembre 2024, et signé par la présidente et la greffière.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
Diara DIEME Murielle PITON