TRIBUNAL JUDICIAIRE
de MEAUX
Pôle Social
Date : 02 septembre 2024
Affaire :N° RG 22/00434 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CCXOF
N° de minute : 24/00517
RECOURS N° :
Le
Notification :
Le
A
1 CCC à Me LE CORRE
1 CCC aux parties
JUGEMENT RENDU LE DEUX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
PARTIES EN CAUSE
DEMANDEURS
Monsieur [W] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Maître Bertrand LE CORRE, avocat au barreau de PARIS,
Madame [I] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Maître Bertrand LE CORRE, avocat au barreau de PARIS,
DEFENDERESSE
MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES DE LA SEINE ET MARNE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Madame [V] [J] (Agent audiencier)
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DE L’AUDIENCE
Présidente : Madame Murielle PITON, Juge
Assesseur : Madame Cristina CARRONDO,
Assesseur : Monsieur Didier AOUIZERATE,
Greffier : Madame Emilie NO-NEY lors des débats et Madame Diara DIEME Adjointe administrative faisant fonction de greffier lors du délibéré,
DÉBATS
A l'audience publique du 10 juin 2024.
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EXPOSE DU LITIGE
Le 13 décembre 2021, Monsieur [W] [H] et Madame [I] [H], agissant en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur, [K] [H], ont déposé un dossier de demande auprès de la Maison départementale des personnes handicapées de la Seine-et-Marne (ci-après, la MDPH).
Par décision du 15 mars 2022, notifiée le 16 mars suivant, la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) a, notamment, rejeté la demande de carte mobilité inclusion (CMI) mention Invalidité ou Priorité, présentée par Monsieur [W] [H] et Madame [I] [H], et leur a attribué l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) pour la période du 1er mars 2021 au 31 août 2023, assortie d'un complément de catégorie 4.
Le 09 mai 2022, Monsieur [W] [H] et Madame [I] [H] ont formé un recours administratif préalable obligatoire à l'encontre de cette décision.
Par décision du 16 juin 2022, notifiée le 22 juin suivant, la CDAPH a confirmé le refus de CMI mention Invalidité ou Priorité.
Par courrier recommandé expédié le 18 juillet 2022, Monsieur [W] [H] et Madame [I] [H] ont saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Meaux du litige les opposant à la MDPH.
L'affaire a été appelée à l'audience de mise en état du 16 février 2023 et renvoyée à l'audience de plaidoiries du 25 septembre 2023.
Par jugement avant-dire droit rendu le 27 novembre 2023, le tribunal, statuant à juge unique, a notamment :
- Ordonné une consultation médicale de l'enfant [K] [H] ;
- Commis pour y procéder le Docteur [U] [X], ayant pour mission de déterminer le taux d'incapacité de l'enfant [K] [H] le 13 décembre 2021 et, dans l'hypothèse d'un taux d'incapacité compris entre 50% et 80%, dire si ladite incapacité rend sa station debout pénible ;
- Sursis à statuer sur l'ensemble des demandes, dans l'attente du dépôt du rapport écrit ;
- Réservé les dépens.
Au terme de son rapport d'expertise déposé le 07 février 2024, le docteur [U] [X] conclut, en substance, à un taux d'incapacité compris entre 50% et 80%, ainsi qu'à une station debout pénible.
L'affaire a été rappelée à l'audience du 10 juin 2024.
Dans leurs conclusions soutenues oralement par l'intermédiaire de leur conseil, les requérants sollicitent de la juridiction de :
- Déclarer Monsieur [K] [H] recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
- Dire et juger qu'il a un taux d'incapacité de 80%,
- Confirmer en conséquence l'éligibilité à la carte mobilité inclusion mention invalidité
- Subsidiairement,
- Confirmer qu'il disposera de la carte " station debout pénible ".
Les requérants soutiennent que le taux d'incapacité retenu par la MDPH est sous-estimé dans la mesure où les crises de Monsieur [K] [H] sont fréquentes et soutiennent qu'il peut donc prétendre à la carte mobilité dite invalidité.
En défense, au terme de ses conclusions n°2 après expertise, la MDPH demande au tribunal de :
- La dire recevable et bien fondée en ses présentes écritures ;
- Confirmer le taux d'incapacité inférieur à 80% ;
- Confirmer en conséquence l'absence d'éligibilité à la CMI mention Invalidité ;
- Confirmer l'absence de station debout pénible et confirmer en conséquence l'absence d'éligibilité à la CMI mention Priorité ;
- Dire bien fondée et confirmer la décision prise par la CDAPH le 15 mars 2022 ;
- Dire bien fondée et confirmer la décision prise par la CDAPH le 16 juin 2022 ;
- Débouter Monsieur [W] [H] et Madame [I] [H], agissant ès qualité de représentants légaux de leur enfant [K] [H], de l'intégralité de leurs demandes ;
- Condamner Monsieur [W] [H] et Madame [I] [H] aux entiers dépens.
La MDPH s'oppose aux demandes des requérants et sollicite que les conclusions de l'expert soient confirmées s'agissant du taux. Elle soutient que la simple présence de crises ne permet pas à elles seules de justifier un taux supérieur à 80% dans la mesure où elles n'ont pas un caractère permanent. Elle ajoute que la présence de crises ne suffit à justifier une station debout reconnue pénible et sollicite donc le rejet de la carte mobilité inclusion mention priorité.
Le délibéré a été fixé au 23 septembre 2024 et avancé au 2 septembre 2024.
MOTIFS :
En vertu de l'article L 241-3 du code de l'action sociale et des familles, la carte mobilité mention " invalidité " est attribuée à toute personne dont le taux d'incapacité est supérieur à 80 %. La carte mobilité inclusion mention " priorité " est attribuée à toute personne dont le taux d'incapacité est inférieur à 80 % mais pour qui la station debout est pénible, ces deux critères étant cumulatifs.
Il ressort de l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles, que le taux de 50% correspond à une entrave de la vie sociale de la personne, entrave constatée en pratique ou compensée au prix d'efforts importants ou d'une compensation spécifique ; tandis que taux de 80% correspond à l'atteinte de l'autonomie individuelle, dès lors que pour les actes de la vie quotidienne qualifiés d'essentiels, la personne doit être aidée totalement ou partiellement, surveillée ou qu'elle ne les effectue qu'avec les plus grandes difficultés. Également en cas d'abolition d'une fonction, de contraintes thérapeutiques majeures ou si indications explicites du barème.
En l'espèce, par décision avant-dire droit, la juridiction a ordonné une expertise médicale, confiée au Docteur [X].
Ce dernier a retenu en substance :
- Que Monsieur [K] [H] n'a pas de trouble de la perception ni du langage,
- Qu'il n'a pas de trouble du comportement,
- Qu'il soufre de troubles de la vigilance parasités par des douleurs spastiques qui surviennent de façon aléatoire,
- Qu'il parvient à se lever, à se coucher, à se déplacer, à prendre les transports en commun, à boire, manger, s'habiller, se déshabiller, faire sa toilette et contrôle l'excrétion urinaire et fécale,
L'expert relève que les symptômes invalidants dans les actes de la vie quotidienne sont très fréquents, mais non permanents. Il relève également:
- Que malgré le traitement, il présente encore des crises d'épilepsie,
- Qu'il a des crises plusieurs fois par semaine et qu'au moment des crises, il perd l'autonomie pour les actes essentiels de la vie dans la mesure où il ne peut plus se concentrer ou marcher,
- Que les crises surviennent à l'improviste,
L'expert conclut que : " l'enfant a des contraintes thérapeutiques mais elles ne sont pas majeures, elles sont significatives et plurihebdomadaires et il doit prendre quotidiennement le traitement antiépileptique. Dans ce contexte, devant l'absence d'atteinte pour les actes de la vie quotidienne en permanence, malgré la contrainte de prendre le traitement antiépileptique quotidiennement mais l'absence d'abolition d'une fonction, nous retenons un taux d'incapacité supérieur à 50% et inférieur à 80% ".
Il convient de relever que l'expertise judiciaire est claire et documentée, l'expert ayant pris connaissance de l'ensemble des éléments médicaux produits par les parties. Dès lors, les conclusions de l'expert s'agissant du taux seront confirmées par la présente juridiction.
S'agissant de la station debout pénible, l'expert indique : " l'enfant doit bénéficier de la carte de priorité en raison d'une station debout pénible puisque plusieurs fois par semaine, il a des douleurs spastiques au niveau des membres inférieurs qui l'empêchent de marcher et dans ces contextes, ce sont les parents qui doivent venir le chercher rapidement pour l'emmener à la maison, soulager ses douleurs et lui permettre de se reposer, ainsi, l'état de santé de l'enfant nécessite la carte priorité pour station débout pénible ".
Eu égard aux conclusions de l'expert motivées, la station debout dite pénible sera retenue par la présente juridiction et partant, il sera accordé à Monsieur [K] [H] la carte mobilité mention priorité.
Dès lors, la MDPH qui succombe sera condamnée aux éventuels dépens d'instance.
PAR CES MOTIFS :
Le tribunal, statuant par décision contradictoire et en premier ressort :
DIT que le taux de Monsieur [K] [H] est compris entre 50 et 80% ;
DIT que Monsieur [K] [H] doit bénéficier de la carte mobilité mention priorité ;
CONDAMNE la Maison Départementale des Personnes Handicapées de la Seine et Marne aux dépens ;
RAPPELLE que cette décision est susceptible d’appel dans un délai d’un mois à compter de sa notification.
Ainsi jugé par mise à disposition au greffe du tribunal le 2 septembre 2024 , et signé par la présidente et la greffière.
LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE
Diara DIEME Murielle PITON