- N° RG 24/00710 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDUPK
Date : 19 Août 2024
Affaire : N° RG 24/00710 -
N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDUPK
N° de minute :
Formule Exécutoire délivrée
le : 19 août 2024
à : Me François MEURIN
Copie Conforme délivrée
le :
à :
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
Par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées, a été rendue, le DIX NEUF AOUT DEUX MIL VINGT QUATRE, par Mme Cécile VISBECQ, Juge au Tribunal judiciaire de MEAUX, assistée de Mme Laurence MATHIEU-VANDEWOORDE, Greffier lors des débats et du prononcé de la décision, l’ordonnance dont la teneur suit :
Entre :
DEMANDERESSE
S.A. PLACOPLATRE
RCS Nanterre n° 729 800 706
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Adeline MUSSAT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, substituée par Me MENDES MONTEIRO (SELAS SERY CHAINEAU) et Me François MEURIN (SELARL TOURAUT AVOCATS), avocat au barreau de MEAUX, avocat postulant,
DEFENDEURS
Monsieur [S] [EE]
Monsieur [FM] [D]
Monsieur [K] [A]
Monsieur [HP] [G]
Monsieur [Z] [FU]
Monsieur [V] [CW]
Monsieur [F] [HC]
Monsieur [I] [H]
Monsieur [T] [EZ]
Madame [BY] [B]
Madame [MJ] [J] [L]
Madame [IK] [E]
Madame [M] [DG]
Madame [X] [Y]
Monsieur [AB] [EE]
Madame [AY] [U]
Madame [R] [W]
Monsieur [AB] [FU]
Monsieur [AU] [LW]
Madame [UA] [C]
Monsieur [GH] [TF]
Monsieur [JF] [TF]
Monsieur [JF] [ES]
Madame [O] [N]
Monsieur [GH] [EZ]
Terrain cadastré D[Cadastre 3]
[Localité 4]
non comparants
EXPOSÉ DU LITIGE
Par ordonnance du 12 août 2024 rendue sur le fondement du deuxième alinéa de l’article 485 du code de procédure civile, le juge délégué par le président du tribunal judiciaire de Meaux a autorisé la SA PLACOPLATRE à assigner les défendeurs cités en tête des présentes en référé à l’audience du 16 août 2024 à 10 heures, l’assignation devant être délivrée au plus tard le 13 août 2024 à 19 heures.
Par actes de commissaire de justice en date du 13 août 2024, la SA PLACOPLATRE a fait assigner ces défendeurs devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Meaux, aux fins, sur le fondement de l'article 835 du code de procédure civile, d'ordonner, au besoin avec le concours de la force publique, l'expulsion sans délai du terrain lui appartenant situé à [Localité 4], cadastré D996, de l'ensemble des défendeurs et de tous occupants de leur chef, d'autoriser la séquestration des biens meubles se trouvant sur les lieux après l'expulsion dans tout garde meuble au choix du commissaire de justice et ce aux frais, risques et périls des défendeurs et de les condamner à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens comprenant les frais du procès-verbal de constat dressé le 2 août 2024.
A l’audience du 16 août 2024 à laquelle l’affaire a été retenue, la SA PLACOPLATRE a maintenu ses demandes.
Elle indique qu’elle est propriétaire du terrain situé à [Localité 4] (77), cadastré D[Cadastre 3] qui est occupé par des gens du voyage.
Bien que régulièrement assignés, les défendeurs n’ont pas comparu.
L’affaire a été mise en délibéré au 19 août 2024, date de la présente ordonnance.
SUR CE,
En application de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande d’expulsion et celles qui en découlent :
Aux termes du premier alinéa de l'article 835 du code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le dommage imminent s'entend du « dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer » et le trouble manifestement illicite résulte de « toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit ».
En l’espèce, la SA PLACOPLATRE, qui justifie de la propriété du terrain occupé par le relevé de propriété qu’elle verse aux débats, produit un procès-verbal de constat établi le 6 août 2024 par Maître [LO] [P], commissaire de justice à [Localité 5] (77), qui s'est transporté sur les lieux litigieux où il a constaté la présence de caravanes et véhicules légers.
Le commissaire de justice relate que les pierres bloquant l'accès au terrain ont été déplacées à l'entrée, que des dépôts d'ordures ont été faits en plusieurs endroits à même le sol et que les véhicules légers et les caravanes sont stationnés sous les poteaux et lignes à haute tension. Il ajoute que des raccordements « sauvages » à l'eau et à l'électricité ont été effectués par des branchements par simple contacts de fils et qu'ils surplombent en hauteur la RD404 jusqu'au château d'eau géré par VEOLIA et un poteau avec transformateur, alors que cet axe routier est soumis à un passage intensif de camions et véhicules légers.
La mairie d'[Localité 4] a par ailleurs indiqué que le terrain est situé dans une zone orange, voire rouge, du plan de prévention des risques naturels mouvements de terrain liés à la présence d'anciennes carrières de gypse et qu'un risque de fontis ou d'effondrement de grande ampleur existe.
Selon le procès-verbal de constat dressé le 6 août 2024 par Maître [LO] [P], plusieurs immatriculations de caravanes et véhicules légers ont été relevées. Les propriétaires des caravanes et véhicules légers ont été identifiés par la Direction Départementale de la Sécurité Publique de Seine-et-Marne comme étant les défendeurs cités.
Il ressort ainsi avec l'évidence requise en référé que les défendeurs en tête des présentes occupent les terrains litigieux appartenant à la SA PLACOPLATRE, et ce sans leur autorisation.
Le droit de propriété, d'une personne publique comme privée, est un droit fondamental.
L'occupation sans droit ni titre d'un immeuble appartenant à autrui constitue un trouble manifestement illicite au sens du premier alinéa de l'article 835 du code de procédure civile.
Le droit au logement dont seul l'Etat est débiteur ne saurait ôter au trouble que constitue, dans les circonstances de l'espèce, leur occupation sans droit ni titre, son caractère manifestement illicite (voir, en ce sens, 2e Civ., 2 février 2012, pourvoi n° 11-14.729).
Toutefois, le droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile est un droit fondamental pour garantir à l'individu la jouissance effective des autres droits fondamentaux qui lui sont reconnus.
Dès lors, dans le cadre d'une procédure d'expulsion, les intéressés doivent bénéficier d'un examen de la proportionnalité de l'ingérence dans leur droit au respect de leur vie privée et familiale et de leur domicile conforme aux exigences de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
A cet égard, il est constant que les défendeurs se sont installés et maintenus sur ce terrain sans autorisation de la SA PLACOPLATRE.
Le mode de vie adopté par les défendeurs n’est pas en cause et la possibilité pour la juridiction des référés d’ordonner une expulsion d’occupants sans droit ni titre n’est pas contraire au principe constitutionnel de non discrimination, alors que les intéressés conservent la possibilité de déplacer leur habitation en un autre lieu, nonobstant les difficultés auxquelles ils se heurtent, mais dont la solution ne consiste pas dans la prolongation de leur séjour sur un terrain non aménagé à cet effet, présentant un risque pour les personnes et sans équipement sanitaire digne, de sorte que les conditions minimales de salubrité et de sécurité ne sont pas respectées.
Dans ces conditions, l'expulsion ordonnée n’est pas disproportionnée et le trouble manifestement illicite invoqué par les propriétaires des lieux est caractérisé.
Compte-tenu de l’occupation illicite, il convient de faire droit à la demande d’expulsion présentée contre les défendeurs et tous les occupants de leur chef, selon les indications figurant au dispositif, et d’autoriser la séquestration des biens meubles qui pourront être trouvés dans les lieux, aux frais et risques des expulsés.
Sur les demandes accessoires :
Les défendeurs, qui succombent sur la demande principale, supporteront la charge des dépens conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile. Ceux-ci ne comprendront pas le coût du procès-verbal de constat de commissaire de justice, qui relève des dispositions de l’article 700 et non des dépens.
En considération de l’équité, les défendeurs seront condamnés à payer à la SA PLACOPLATRE la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant en référé, par ordonnance réputée contradictoire, en premier ressort, mise à disposition au greffe le jour du délibéré après débats en audience publique,
Ordonne l’expulsion sans délai de Monsieur [S] [EE], Monsieur [FM] [D], Monsieur [K] [A], Monsieur [HP] [G], Monsieur [Z] [FU], Monsieur [V] [CW], Monsieur [F] [HC], Monsieur [I] [H], Monsieur [T] [EZ], Madame [BY] [B], Madame [MJ] [J] [L], Madame [IK] [E], Madame [M] [DG], Madame [X] [Y], Monsieur [AB] [EE], Madame [AY] [U], Madame [R] [W], Monsieur [AB] [FU], Monsieur [AU] [LW], Madame [UA] [C], Monsieur [GH] [TF], Monsieur [JF] [TF], Monsieur [JF] [ES], Madame [O] [N], Monsieur [GH] [EZ] et de tous occupants de leur chef, qui stationnent sur le terrain situé à [Localité 4], cadastré D[Cadastre 3], ainsi que l’enlèvement et le gardiennage des caravanes et véhicules se trouvant sur place au jour de l’expulsion, et ce avec l’assistance de la force publique et de tout garagiste ou dépanneur en cas de besoin ;
Autorise la séquestration des véhicules et des meubles pouvant se trouver encore sur les lieux après l’expulsion, dans tel garage ou garde meuble au choix du commissaire de justice et aux frais, risques et périls des parties expulsées ;
Condamne les défendeurs aux dépens de l’instance, non compris le coût du procès-verbal de constat de commissaire de justice ;
Condamne les défendeurs à payer à la SA PLACOPLATRE la somme de 1000 euros ;
Rappelle que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.
Le Greffier, Le Président