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06/08/2024 | FRANCE | N°24/03386

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, 1ère ch. - sect.4, 06 août 2024, 24/03386


Min N° 24/00666
N° RG 24/03386 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDUCZ

Mme [U] [L]
Mme [G] [L]
Mme [I] [L]

C/

Mme [J] [L]
M. [K] [L]
M. [C] [L]



TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION

JUGEMENT DU 06 août 2024




DEMANDERESSES :

Madame [U] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Madame [G] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Madame [I] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Comparantes et assistées de Maître Cynthia NERESTAN, avocat au

barreau de MEAUX, avocat plaidant


DÉFENDEURS :

Madame [J] [L]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Monsieur [K] [L]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Monsieur [C] [L]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
...

Min N° 24/00666
N° RG 24/03386 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDUCZ

Mme [U] [L]
Mme [G] [L]
Mme [I] [L]

C/

Mme [J] [L]
M. [K] [L]
M. [C] [L]

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION

JUGEMENT DU 06 août 2024

DEMANDERESSES :

Madame [U] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Madame [G] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Madame [I] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

Comparantes et assistées de Maître Cynthia NERESTAN, avocat au barreau de MEAUX, avocat plaidant

DÉFENDEURS :

Madame [J] [L]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Monsieur [K] [L]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Monsieur [C] [L]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

Comparants et assistés de Maître Marc POTIER, avocat au barreau de MEAUX, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame COLLANGE Elisabeth, Juge
Greffier : Madame DE PINHO Maria, Greffière

DÉBATS :

Audience publique du : 06 août 2024

Copies délivrées le 6 août 2024
à : Maître Cynthia NERESTAN
Maître Marc POTIER
Monsieur le Maire de [Localité 7]
Madame [U] [L]
Madame [G] [L]
Madame [I] [L]
Madame [J] [L]
Monsieur [K] [L]
Monsieur [C] [L]

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [T] [L] est décédé le [Date décès 2] 2024 à [Localité 7].

Par requête reçue au greffe le 1er août 2024, Mesdames [U], [G] et [I] [L] ont saisi le tribunal judiciaire de Meaux aux fins de voir statuer sur les conditions des funérailles de leur père.

Par ordonnance du même jour, elles ont été autorisées à faire assigner la partie adverse à l'audience du 6 août 2024 à 10 heures.

Par acte de commissaire de justice du 5 août 2024, Mesdames [U], [G] et [I] [L] ont fait assigner Madame [J] [L], Monsieur [K] [L] et Monsieur [C] [L] aux fins de voir statuer sur le lieu des funérailles de Monsieur [T] [L].

A l'audience du 6 août 2024, Mesdames [U], [G] et [I] [L] comparaissent en personne, assistées de leur conseil. Elles demandent à ce que leur père soit inhumé sur la commune de [Localité 7].

Elles soulignent qu'elles ont toujours maintenu des liens avec leur père, lequel a construit dans le même temps une famille avec Madame [J] [L], avec laquelle il s'est marié et a eu deux fils, et leur mère, Madame [A] [X], avec laquelle il vivait la moitié du temps. Elles expliquent que durant les deux dernières années de sa vie, leur père vivait exclusivement chez leur mère et qu'elles se relayaient pour assurer une présence permanente à ses côtés sachant qu'il était malade et souffrait d'une importante perte d'autonomie, sans troubles cognitifs manifestes. Elles expliquent que leur père avait exprimé le souhait de rester à [Localité 7] auprès de leur mère, dans un bien immobilier qu'ils ont acquis en 2007 et qu'il n'avait nullement l'intention de retourner à [Localité 8] auprès de son épouse. Elles soulignent qu'il n'abordait pas le sujet de la mort avec elles, que c'était tabou, et qu'il n'a jamais exprimé auprès d'elles la volonté d'être enterré ni à [Localité 7] ni ailleurs ; et aucun écrit, testament ou contrat d'obsèques ne permet non plus d'attester d'une telle volonté. Il avait simplement dit auprès d'un ami il y a quelques années ne pas vouloir être enterré dans son pays d'origine avec lequel il n'avait plus d'attache. Elle ajoute à ce titre que son père résidait en France depuis ses 23 ans, qu'il a acquis la nationalité française, qu'il a fait toute sa carrière en France, y a acquis un bien immobilier, y a eu ses enfants ; il retournait très peu au Congo et n'avait aucune intention de retourner vivre là-bas. Il avait au contraire des attaches privilégiées avec la France et en particulier avec [Localité 7] où il a vécu maritalement avec leur mère, a passé les deux dernières années de sa vie avec l'intention d'y rester, et où il a travaillé durant toute sa carrière.

Madame [J] [L], Monsieur [K] [L] et Monsieur [C] [L], assistés de leur conseil, se réfèrent oralement aux conclusions visées à l'audience par lesquelles ils demandent à ce que le lieu des funérailles de Monsieur [T] [L] soit fixé dans son village à [Localité 6] au Congo, et à titre subsidiaire, à [Localité 8], outre le débouté des demandes de Mesdames [U], [G] et [I] [L] et leur condamnation au paiement d'une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Ils affirment être certains de la volonté de Monsieur [L] d'être enterré à [Localité 6] au Congo, même s'ils reconnaissent que Monsieur [L] n'avait jamais exprimé verbalement ce souhait. Ils mettent en évidence les attaches de ce dernier avec son pays d'origine, qu'il a quitté au début des années 70 pour s'établir en France. S'il s'y rendait très peu, il avait néanmoins des contacts quotidiens par téléphone avec la famille restée là-bas, notamment un frère. Ils expliquent que le village de [O] se trouve à quelques kilomètres de la ville où a grandi Monsieur [L] et que s'y trouve un cimetière familial où sont notamment enterrés les parents du défunt ; certains membres de la famille habitent également ce village.

Sur leur demande subsidiaire, ils soulignent les attaches très fortes de leur proche avec la ville de [Localité 8], où il s'est établi à son arrivée en France et où ont grandi ses cinq enfants.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article 3 de la loi du 15 novembre 1887, toute personne majeure a le droit de décider librement des conditions de ses propres funérailles.

Il est de jurisprudence constante que le juge tient compte des dernières volontés du défunt et, à défaut, désigne la personne qu'il considère être le meilleur interprète de la volonté du défunt.

En l'espèce, Monsieur [T] [L] n'a pas formalisé par écrit ses intentions concernant le lieu de sa sépulture. Il n'est pas contesté que Monsieur [T] [L] n'a établi aucun testament ni souscrit de contrat d'obsèques faisant mention de ses dernières volontés à cet égard.

Ses proches s'accordent à dire à l'audience que Monsieur [T] n'évoquait jamais ce sujet, qui était tabou, et que, bien qu'il souffrait d'une perte d'autonomie importante durant les dernières années de sa vie, il n'avait pas anticipé l'organisation de ses funérailles.

Mesdames [L], filles du défunt, produisent une attestation de Monsieur [P] [M], ami et parrain d'[G] [L], lequel indique que lors de discussions avec le défunt il y a plusieurs années, ce dernier avait exprimé le souhait d'être enterré en France, où il a passé l'essentiel de sa vie et non dans son pays d'origine avec lequel il n'a plus d'attache. Cette attestation rapporte toutefois des déclarations anciennes de l'intéressé, non corroborées pas sa famille proche, chacun affirmant qu'il n'abordait jamais le sujet. En outre, elle ne démontre pas de volonté précise du défunt quant au lieu de sa sépulture.

Monsieur [L] avait manifestement des attaches personnelles, familiales et/ou professionnelles avec [Localité 7] et [Localité 8] mais également, bien qu'objectivement plus distendus, avec le Congo, son pays d'origine.

Au moment de son décès, Monsieur [L] résidait à [Localité 7] avec Madame [E] dans un bien acquis ensemble en 2007 et ce, depuis deux ans. Il s'y est installé afin que Madame [E] et leurs filles lui apportent les soins nécessités par sa maladie. Cet état de fait ne saurait suffire à présumer d'une volonté du défunt d'être inhumé dans cette commune.

Les éléments de la procédure ne permettent pas plus de présumer une volonté de Monsieur [L] d'être enterré au Congo ou à [Localité 8].

En l'absence de toute expression de volonté démontrée du défunt quant à l'organisation de ses obsèques, il convient de désigner la personne la mieux qualifiée pour décider du lieu d'inhumation.

Il est acquis que Madame [J] [L], son épouse, et ses fils n'avaient plus de contact avec leur proche depuis deux ans ; que durant cette période, Madame [X] et ses filles ont assuré sa prise en charge médicale, notamment dans le cadre d'une hospitalisation au domicile à sa sortie d'hospitalisation l'année dernière. Madame [U] [L] explique à l'audience comment a été organisée cette prise en charge au domicile de leur mère, et comment ses trois filles se sont relayées auprès de leur père pour assurer une assistance permanente.

Si Monsieur [L] a désigné Madame [X] comme personne digne de confiance auprès de l'hôpital de [Localité 7] en juin 2023, il ressort toutefois de l'audience qu'avant 2022, elle n'entretenait que des liens à distance avec Monsieur [L] ; en outre, elle n'est pas partie à la présente procédure et ce sont ses filles qui ont eu l'initiative de saisir le Tribunal.
Ses filles ont quant à elles toujours maintenu un lien avec leur père, malgré des difficultés relationnelles avec son épouse vivant à [Localité 8]. Elles ont d'ailleurs adapté depuis deux ans leur activité professionnelle pour s'occuper de leur père à tour de rôle et entretenait chacune des relations très régulières avec ce dernier sur les derniers instants de sa vie.

Aussi, il convient de désigner l'une des trois filles du défunt comme étant la meilleure interprète de ses dernières volontés.

Madame [U] [L] sera désignée à ce titre.

Compte tenu de la nature du litige et pour des raisons d'équité, chaque partie conservera la charge des dépens exposés et il sera dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, susceptible d'appel dans le délai de 24 heures ;

Désigne Madame [U] [L] pour décider du lieu des funérailles de Monsieur [T] [L], né le [Date naissance 4] 1953 à [Localité 5], et décédé le [Date décès 2] 2024 à [Localité 7],

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chaque partie conservera la charge des dépens exposés,

Dit qu'une copie de la présente décision sera notifiée au maire de la ville de [Localité 7] ;

Rappelle que la présente décision est exécutoire sur minute ;

Déboute les parties pour le surplus ;

Ainsi jugé le 6/08/24 à 15h00 minutes.

LE GREFFIER LE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : 1ère ch. - sect.4
Numéro d'arrêt : 24/03386
Date de la décision : 06/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-06;24.03386 ?
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