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22/07/2024 | FRANCE | N°22/05531

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, 1ère ch. - sect. 2, 22 juillet 2024, 22/05531


- N° RG 22/05531 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CC4PD
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
1ERE CHAMBRE



Date de l'ordonnance de
clôture : 11 Mars 2024

Minute n°24/00669

N° RG 22/05531 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CC4PD





le

CCC : dossier

FE :
Me François ILANKO
Me Laetitia JOFFRIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


JUGEMENT DU VINGT DEUX JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE



PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE

S.C.I. SCI ROBERT SCHMITT
[Adresse 3]
[Localité 5]
reprÃ

©sentée par Maître Fabrice LEPEU de l’AARPI KLP AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, Me Laetitia JOFFRIN, avocat au barreau de MEAUX, avocat postulant


DEFENDE...

- N° RG 22/05531 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CC4PD
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
1ERE CHAMBRE

Date de l'ordonnance de
clôture : 11 Mars 2024

Minute n°24/00669

N° RG 22/05531 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CC4PD

le

CCC : dossier

FE :
Me François ILANKO
Me Laetitia JOFFRIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU VINGT DEUX JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE

PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE

S.C.I. SCI ROBERT SCHMITT
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Maître Fabrice LEPEU de l’AARPI KLP AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, Me Laetitia JOFFRIN, avocat au barreau de MEAUX, avocat postulant

DEFENDEURS

Madame [G] [E] [S] épouse [I]
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me François ILANKO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Monsieur [X] [N] [I]
[Adresse 1]
[Localité 6]
représenté par Me François ILANKO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré : Mme BASCIAK, Juge statuant comme Juge Unique

DEBATS

A l'audience publique du 30 Avril 2024,
GREFFIER

Lors des débats et du délibéré : Mme BOUBEKER, Greffière

JUGEMENT

contradictoire, mis à disposition du public par le greffe le jour du délibéré, et après prorogation du délibéré initialement prévu au 02 juillet 2024,  Mme BASCIAK, Président, ayant signé la minute avec Mme BOUBEKER, Greffière ;

****

EXPOSE DU LITIGE

Avec le concours de l’agence Stéphane Plaza Immobilier [Localité 8] (ci-après l’agence immobilière), M. [X] [I] et Mme [G] [S] épouse [I] (ci-après les époux [I]) ont visité une maison sise [Adresse 4] à [Localité 8], aux fins d’acquisition.

L’annonce immobilière mentionnait que des travaux étaient à prévoir au sein du bien mis en vente.

Les époux [I] déclarent n’avoir pu effectuer qu’une seule visite.

Le 14 octobre 2021, la SCI ROBERT SCHMITT et les époux [I] ont signé électroniquement une promesse synallagmatique de vente portant sur la propriété visitée, cadastrée section AO [Cadastre 2] sise [Adresse 4] à [Localité 8], comprenant un corps de bâtiment élevé sur cave, avec un rez-de-chaussée comprenant un séjour salle à manger, cuisine, salle de bains avec WC et couloirs, un premier étage comprenant quatre chambres, une petite cuisine, une salle d’eau avec WC et couloirs, un grenier, un garage en parpaings et une dépendance avec buanderie et grenier.

La promesse synallagmatique de vente a été conclue moyennant le prix de 240 000 euros, sous condition suspensive d’obtention d’un prêt de 203 600 euros sur une durée de 25 ans, au taux maximum de 2 % (hors assurance) au plus tard le 15 décembre 2021.

La réitération de la vente par acte authentique devait intervenir au plus tard le 15 janvier 2022.

Les époux [I] ont renoncé à l’acquisition du bien déclarant avoir signé le compromis de vente dans l’ignorance de sa portée contractuelle et des désordres affectant le bien en cause.

Par lettre recommandée du 13 avril 2022, Me [C], notaire chargée de la réitération du consentement par acte authentique, a mis en demeure les époux [I] de justifier de l’obtention ou du refus d’un prêt.

En l’absence de réponse, Me [M], conseil de la SCI ROBERT SCHMITT, a mis en demeure les époux [I] d’exécuter le compromis de vente conclu le 14 octobre 2021, par lettre recommandée des 10 et 30 mai 2022.

En l’absence d’avis de réception, Me [M] a fait signifier ladite mise en demeure des époux [I], à leur domicile le 3 juin 2022.

Le 6 octobre 2022, les époux [I] refusant de réitérer leur consentement, ont fait intervenir
Me [T], commissaire de justice à [Localité 7], aux fins de constat des désordres allégués.

C’est dans ces conditions que, par acte d’huissier de justice du 14 décembre 2022, la SCI ROBERT SCHMITT a fait assigner les époux [I] devant le tribunal judiciaire de Meaux aux fins d’obtenir leur condamnation à lui verser la somme de 24 000 euros en application du compromis de vente du 14 octobre 2021, dont la somme de 5000 euros séquestrée par le notaire à titre d’acompte et la somme de 19 000 euros à lui verser en complément en application du compromis de vente du 14 octobre 2021.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 décembre 2023, la SCI ROBERT SCHMITT demande au tribunal de :

« Recevoir les demandes de la SCI ROBERT SCHMITT et les dire bien fondées ;

Débouter les époux [I] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner les Consorts [I] à payer à la SCI ROBERT SCHMITT la somme de 24 000 Euros conformément aux termes du compromis de vente signé le 14 octobre 2021 ;

En conséquence :

Ordonner le versement à la SCI ROBERT SCHMITT de la somme de 5 000 séquestrée par le notaire à titre d’acompte aux termes du compromis de vente signé le 14 octobre 2021 ;

Condamner les Consorts [I] à payer à la SCI ROBERT SCHMITT le solde restant, soit la somme de 19 000 Euros conformément aux termes du compromis de vente signé le 14 octobre 2021

Condamner les Consorts [I] à verser à la SCI ROBERT SCHMITT la somme de 3 000 Euros au titre de l’article 700 du CPC ;

Condamner les Consorts [I] aux entiers dépens. »

La SCI ROBERT SCHMITT se fonde sur les articles 1231-5 et 1304-3 du code civil et, soutient que l’ensemble des conditions suspensives de droit commun a été réalisée contrairement à la condition suspensive de financement.

Elle explique que les époux [I] n’ont jamais justifié de l’obtention, ou de la non obtention d’un financement bancaire, ni même des diligences accomplies en vue de son obtention.

Elle estime que la négligence des époux [I] est manifeste, en raison du non-respect des délais accordés, pour justifier d’un financement, notamment le délai de 10 jours à compter de la première présentation de la demande et, obtenir un prêt au plus tard le 15 décembre 2021.

La SCI ROBERT SCHMITT soutient également, qu’elle est bien fondée dans sa demande en paiement de la clause pénale, au regard des stipulations contractuelles et des mises en demeures transmises aux époux [I], restées vaines.

Elle souligne qu’il est incontestable que les époux [I] ont consenti à signer le compromis de vente, tant ils ne rapportent pas la preuve des difficultés rencontrées avec la compréhension de la langue française. Elle ajoute que, l’agent immobilier en charge de la vente leur a présenté et expliqué le compromis avant signature.

La SCI ROBERT SCHMITT se prévaut de la signature électronique du compromis de vente conclu le 14 octobre 2021 pour soutenir que ses clauses n’ont pas besoin d’être paraphées par les parties dès lors que la signature électronique entraîne signature des 118 pages du compromis.

Elle indique que le refus d’une seconde visite du bien litigieux, par l’agence immobilière, n’est pas démontré par les défendeurs et, que l’annonce du bien mentionnait « travaux à prévoir ».

La SCI ROBERT SCHMITT estime que le montant de la clause pénale n’est pas excessif, au regard du taux d’intérêt qui augmente sur le marché immobilier.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 novembre 2023, les époux [I] demandent au tribunal de :

« A titre principal,

- D’annuler la promesse de vente en date du 14 octobre 2021 intervenue entre, d’une part, Monsieur [I] [X] [N] et Madame [S] [G] [E], et d’autre part, la SCI ROBERT SCHMITT, pour inexistence du consentement des bénéficiaires, consécutive à leur incompréhension de la teneur, le sens et la portée de l’acte, ainsi que pour vice de consentement sur l’objet du contrat, à tout le moins, sur une qualité essentielle de cet objet à savoir l’habitabilité immédiate du bien ;

- De dire, en conséquence, que cette promesse est nulle, invalide et de nul effet ;

- De débouter, dès lors, la SCI ROBERT SCHMITT de l’ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions ;

A titre subsidiaire,

- De constater que la clause pénale n’a pas été paraphée par Monsieur [I] [X] [N] et Madame [S] [G] [E], contre lesquels elle est invoquée ;

- De dire, en conséquence, que clause pénale prévoyant le paiement d’une indemnité forfaitaire de 24 000euros est totalement inopposable à Monsieur [I] [X] [N] et à Madame [S] [G] [E] ;

- De rejeter, par suite, les prétentions de la SCI ROBERT SCHMITT ;

A titre très subsidiaire,

-De dire n’avoir lieu à l’application de la clause pénale stipulée dans la promesse de vente date du 14 octobre 2021, dès lors que les diligences mises à la charge des bénéficiaires ont été accomplis en temps et en heure par ces derniers ;

-De débouter, par conséquent, la SCI ROBERT SCHMITT de l’ensemble de ses demandes ;

A titre infiniment subsidiaire,

- De diminuer la pénalité stipulée dans la promesse de vente à 10% de son montant, soit à 2 400 euros, compte tenu de son caractère manifestement excessif et du défaut d’empressement de la SCI ROBERT SCHMITT à recouvrer son entière liberté ; En tout état de cause,

- De dire infondées les prétentions de la SCI ROBERT SCHMITT et de l’en débouter totalement ;

- D’ordonner la libération des fonds séquestrés chez le notaire et leur restitution à Monsieur [I] [X] [N] et à Madame [S] [G] [E] ;

- De condamner la SCI ROBERT SCHMITT à payer à Monsieur [I] [X] [N] et à Madame [S] [G] [E], la somme de 2 500euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- De condamner la même aux entiers dépens de l’instance ».

Les époux [I] se fondent sur les articles 1128, 1129, 1112-1 et 1231-5 du code civil pour soutenir qu’à défaut d’un consentement libre, plein et éclairé, le compromis de vente non traduit avant signature leur est inopposable.

Ils ajoutent qu’en l’absence de paraphes des pages du compromis, la clause d’indemnité d’immobilisation est inopposable.

Les époux [I] estiment que leur consentement est vicié, en raison du manque d’information de la fiche commerciale du bien litigieux concernant les travaux.

A titre subsidiaire, les époux [I] soutiennent que la clause pénale n’est pas applicable en ce qu’ils ont bien accompli les diligences nécessaires afin d’obtenir un prêt dans les délais impartis contractuellement.

Ils justifient leur renonciation à la vente par l’état insalubre et non habitable du bien litigieux, alors qu’ils envisageaient d’acquérir ledit bien pour y habiter, et non entreprendre des travaux de gros œuvres.

Par application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures susvisées des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 mars 2024.

L’affaire a été évoquée à l’audience de plaidoirie du 30 avril 2024 et mise en délibéré au 2 juillet 2024, prorogée au 22 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de nullité de la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021

Aux termes du premier alinéa de l’article 1589 du code civil, la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix.
En application de l’article 1128 du code civil, sont nécessaires à la validité d'un contrat : le consentement des parties, leur capacité de contracter et un contenu licite et certain.
L’article 1129 du code civil dispose :
« Conformément à l'article 414-1, il faut être sain d'esprit pour consentir valablement à un contrat. »
Aux termes de l’article 1130 du même code, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
En application de l’article 112-1 du code civil, celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation.

Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.

Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l’espèce, la SCI ROBERT SCHMITT produit le compromis de vente conclu le 14 octobre 2021 avec les époux [I], la fiche commerciale correspondant au bien en vente, l’attestation de M. [W] [D], directeur de l’agence immobilière, en date du 6 décembre 2023.

Il ressort de ces éléments que le consentement par voie électronique de la SCI ROBERT SCHMITT et les époux [I], à la vente du bien sis [Adresse 4] à [Localité 8] (77270), moyennant 240 000 euros, est intervenu après la visite du bien par les époux [I].

M. [W] [D], directeur de l’agence immobilière, atteste qu’après la visite du bien, il y’a eu une négociation du prix entre les parties, en raison de l’état du bien et des travaux nécessaires, mentionnées sur la fiche commerciale, ce qui résulte également de la différence de prix entre celui figurant sur l’annonce et celui stipulé dans la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021.

Les travaux nécessaires, constituant le motif de la baisse du prix de vente après visite dudit bien, ne pouvaient donc être ignorés par les époux [I].
D’ailleurs, les époux [I] ne démontrent pas avoir formulé de contestation suite à la visite du bien
Aussi, les moyens tirés du manque d’information de la fiche commerciale concernant les travaux soulevés par les époux [I] ne sont pas fondés.

De plus, aucun des documents versés aux débats ne permet de déterminer que les époux [I] recherchaient effectivement un bien habitable tout de suite. En toute hypothèse, le constat d’huissier du 6 octobre 2022 produit par les époux [I] ne portant que sur les défauts extérieurs dudit bien, il ne permet pas d’évaluer l’étendu des travaux nécessaires pour habiter ledit bien et donc déterminer sa compatibilité avec les critères de recherche des époux [I]. En outre, ledit constat ne comporte aucune mention sur l’intérieur ou la salubrité du bien litigieux.

Les époux [I] ne démontrent pas que l’agence immobilière ne leur a pas expliqué la teneur et la portée de l’acte. De même, il n’appartenait pas à l’agence immobilière mais aux époux [I] de mobiliser un interprète assermenté en langue tamoule pour lire et traduire l’acte au moment de la signature s’ils rencontraient des difficultés dans la compréhension de la langue française.

Il en résulte que les époux [I] ne peuvent soutenir avoir signé le compromis de vente sans leur assentiment plein et éclairé.

Dès lors, les époux [I] échouent à démontrer que la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021 est entachée de nullité.

En conséquence, les époux [I] seront déboutés de leur demande de voir constater la nullité de la promesse synallagmatique de vente en date du 14 octobre 2021.

Sur la demande en paiement de la somme de 24 000 euros formée par la SCI ROBERT SCHMITT au titre de la clause pénale

Sur l’inopposabilité de la clause pénale soulevée par les époux [I]
Les époux [I] soutiennent que la clause pénale est inopposable en l’absence de paraphes de la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021.
Toutefois, aucune disposition légale ne prévoit de règle de forme spéciale qui impose le paraphe des pages d’un acte sous seing privé.
En l’espèce, la promesse de vente a été signée de manière électronique le 14 octobre 2021 et elle comporte un certificat de signature électronique qui mentionne que la signature vaut pour tous les documents et ses quatre annexes.
Dès lors, les époux [I] seront déboutés de leurs demandes subsidiaire de voir constater l’inopposabilité de la clause pénale.

Sur l’absence de réalisation de la condition suspensive du fait de la défaillance des époux [I]

Aux termes du premier alinéa de l’article 1589 du code civil, la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix.

L’article 1304 du code civil dispose que l’obligation est conditionnelle lorsqu’elle dépend d’un événement futur et incertain. La condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l’obligation pure et simple. Elle est résolutoire lorsque son accomplissement entraîne l’anéantissement de l’obligation.

Aux termes de l’article 1304-3 du code civil, la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement.

La condition résolutoire est réputée défaillie si son accomplissement a été provoqué par la partie qui y avait intérêt.

La promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021 indique que le financement de l’acquisition sera réalisé avec l'aide d'un ou plusieurs prêts pour un montant total de 203 600 euros régi par les articles L. 313-1 et suivants du Code de la consommation, sur une durée maximum de 25 ans et au taux maximum de 2% (hors assurances et le surplus sans l'aide d'aucun prêt.

Le contrat du 14 octobre 2021 stipule une condition suspensive relative au financement qui prévoit :

« Que l’acquéreur s’engage à déposer dans les plus brefs délais des dossiers complets de demandes de prêts répondant aux caractéristiques ci-avant définies auprès de tout organisme prêteur ayant son siège social en France et dans au moins un établissement financier ou banque et à en justifier au VENDEUR et au rédacteur des présentes dans un délai maximum 10 jours à compter du dépôt de la demande.

Pour son information, il lui est rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article 1304-3 du Code civil, « LA CONDITION SUSPENSIVE EST REPUTEE ACCOMPLIE SI CELUI QUI Y AVAIT INTERET EN A EMPECHE L'ACCOMPLISSEMENT ». (…)

REALISATION DE LA CONDITION

Chaque prêt sera réputé obtenu et la condition suspensive sera réalisée par l'envoi par la banque à l'ACQUEREUR d'une offre écrite, ferme et sans réserve, de consentir le crédit aux conditions principales sus-énoncées dans le délai de réalisation des présentes et, le cas échéant, par l'obtention de l'agrément définitif de l'emprunteur par une compagnie d'assurance aux conditions exigées par la banque.

La réception de cette ou de ces offres de prêt devra intervenir au plus tard 15 décembre 2021.

L'ACQUEREUR s'oblige à en informer sans délai l'AGENCE par tout moyen constituant un support durable, laquelle en informera à son tour le VENDEUR.

NON-OBTENTION DU FINANCEMENT
L'ACQUEREUR s'engage à notifier à l'AGENCE, qui en informera sans délai le VENDEUR, la non-obtention d'un prêt par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date, telle que la lettre recommandée électronique qualifiée) adressée au plus tard le dernier jour du délai de réception stipulé ci-dessus. Il devra, dans ce cas, justifier des diligences accomplies par lui pour l'obtention du ou des prêts mentionné(s) ci-dessus par la production de 2 refus de prêts émanant du ou des organismes sollicités et en précisant, pour chacun d'eux, la date du dépôt de la demande de prêt, ainsi que le montant, la durée et le taux du prêt sollicité.
A défaut, le VENDEUR pourra mettre en demeure l'ACQUEREUR de lui justifier sous huitaine la réalisation ou la défaillance de la condition. La réponse de l'ACQUEREUR devra être adressée sous les mêmes formes et délai au domicile du VENDEUR indiqué en tête des présentes.

Passé ce délai de huit (8) jours, et en l'absence de réponse de l'ACQUEREUR, la condition suspensive sera censée défaillie et les présentes seront caduques de plein droit, sans autre formalité, le VENDEUR retrouvant son entière liberté.

Pour sa part, l'ACQUEREUR devra justifier des diligences accomplies par lui pour l'obtention du ou des prêts mentionné(s) ci-dessus en produisant les refus de prêts émanant du ou des organismes sollicités et en précisant, pour chacun d'eux, la date du dépôt de la demande de prêt, ainsi que le montant, la durée et le taux du prêt sollicité (…)

NON-REALISATION DE LA CONDITION

Si la présente condition suspensive n'est pas réalisée, les présentes seront, sans autre formalité, caduques de plein droit le VENDEUR et l'ACQUEREUR retrouvant leur entière liberté, et l'acompte versé par l'ACQUEREUR lui étant restitué sans délai.

Toutefois, si le défaut de réalisation de la condition suspensive est imputable exclusivement à l'ACQUEREUR en raison, notamment, de la faute, la négligence, la mauvaise foi, d'un abus de droit de ce dernier, le VENDEUR pourra demander le bénéfice des dispositions de l'article 1304-3 du Code civil et faire déclarer la condition réalisée et ce, sans préjudice de l'attribution de dommages-intérêts. Dans cette éventualité, l'ACQUEREUR devra également indemniser le mandataire du préjudice causé.

En tout état de cause, en cas de contestation relative à la restitution à l'ACQUEREUR de l'acompte qu'il a, le cas échéant, versé ou à son attribution au VENDEUR, le séquestre ne pourra se dessaisir des sommes qu'en vertu d'un accord amiable signé des deux parties ou d'une décision de justice ».

En l’espèce, les époux [I] ne démontrent pas avoir effectué de demandes de prêts conformes aux stipulations contractuelle de la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021. Ils ne justifient pas non plus de l’obtention, ou de la non obtention d’un financement bancaire, ni même des diligences accomplies en vue de son obtention.

Il résulte de ce qui précède que la condition suspensive de l’obtention d’un prêt a défailli du fait de la négligence des époux [I] bénéficiaires de la promesse, de sorte qu’il y a lieu de considérer que la condition suspensive d’obtention d’un prêt est réputée réalisée.
Sur l’application de la clause pénale
La promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021 stipule :
« Réitération par acte authentique
Sous la seule réserve de la réalisation des conditions suspensives qu'elles contiennent, les présentes lient les PARTIES définitivement.
Elles seront réitérées par acte authentique au plus tard le 15 janvier 2022 par Me [C], Notaire à [Localité 8], que les PARTIES choisissent à cet effet d'un commun accord.
Les PARTIES donnent tous les pouvoirs aux clercs ou employés de l'étude notariale pour effectuer les formalités préalables à la rédaction de cet acte et toutes les notifications ou déclarations d'aliéner exigées par la loi, notamment aux titulaires du droit de préemption, avec la faculté de signer les documents nécessaires.
La date ci-dessus mentionnée N'EST PAS EXTINCTIVE, mais CONSTITUTIVE DU POINT DE DEPART à partir duquel l'une des PARTIES pourra, si toutes les conditions suspensives sont réalisées, obliger l'autre à s'exécuter en lui adressant une lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
A défaut de s'être exécutée dans un délai de DIX JOURS suivant la date de première présentation de cette lettre, la partie non défaillante aura le choix entre :
- invoquer la résolution de plein droit des présentes sans qu'il soit besoin de la faire constater judiciairement. La partie défaillante lui versera, à titre d'indemnité forfaitaire et de clause pénale, la somme de vingt-quatre mille euros (24000 euros),
- ou poursuivre en justice la réalisation de la vente, la partie défaillante supportant tous les frais de poursuites ou de justice, augmentés du montant de l'indemnité forfaitaire prévue à l'alinéa ci-dessus.
Dans les deux cas, l'AGENCE aura droit à une indemnisation forfaitaire, à titre de clause pénale, d'un montant correspondant à ses honoraires prévu à l'article « Honoraires de l'AGENCE ».
Si les conditions suspensives ne sont pas toutes réalisées, les PARTIES reprendront chacune leur entière liberté. Si un acompte a été versé par l'ACQUEREUR, il lui sera alors restitué, le VENDEUR autorisant d'ores et déjà le séquestre à s'en dessaisir sans autre autorisation ».
Aux termes l’article 1231-5 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.
Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.
En l’espèce, la SCI ROBERT SCHMITT a mis en demeure les époux [I] de réitérer la vente par acte authentique dans un délai de 10 jours par courriers recommandés en date des 10 et 30 mai 2022 puis par une signification par voie d’huissier du courrier du 30 mai 2022 en date du 3 juin 2022, mises en demeure toutes restées sans effet.
La SCI ROBERT SCHMITT est donc fondée à invoquer la résolution de plein droit de la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021 et le versement à titre d'indemnité forfaitaire et de clause pénale de la somme de 24000 euros.
S’agissant d’une clause pénale, le juge du fond peut en modérer le montant si celui -ci présente un caractère manifestement excessif.

Pour apprécier le caractère excessif des clauses pénales, le juge doit se placer à la date de sa décision. La disproportion manifeste s’apprécie en comparant le montant de la peine conventionnellement fixée et celui du préjudice effectivement subi.

En l’espèce, la SCI ROBERT SCHMITT sollicite l’application de la clause pénale stipulée dans le compromis de vente du 14 octobre 2021 en raison de la durée de l’immobilisation et de la hausse des intérêts sur le marché.

Elle produit dans ses écritures un graphique démontrant l’augmentation du taux d’intérêts à l’habitat aux particuliers sur la période de 2001 à 2023.

De leur côté, les époux [I] indiquent que ce refus est motivé par l’état du bien, comme le confirme M. [D] précisant que : « dès début 2022, les époux [I] ont été fortement dissuadés d’acquérir le bien ».

La SCI ROBERT SCHMITT ne démontre pas l’existence d’un de lien de causalité entre la non réalisation de la vente et l’augmentation du coût des prêts, notamment par une baisse de leur activité dans le même secteur. Il apparaît au contraire que la difficulté, si elle était établie, à revendre le bien litigieux peut être justifiée par l’état du bien invoqué par les défendeurs.

A cet égard, la SCI ROBERT SCHMITT ne produit aucun élément de nature à déterminer que le bien n’a toujours pas été revendu à la date du présent jugement ou qu’il fait l’objet d’un mandat de vente auprès d’une agence immobilière depuis juin 2022, date à laquelle elle a demandé aux époux [I] de lui verser la somme de 24 000 euros au titre de la clause pénale et donc renoncé à la vente forcée.

Il en résulte que la SCI ROBERT SCHMITT ne produit pas d’éléments suffisants permettant au tribunal d’évaluer le préjudice subi du fait du défaut de réalisation de la vente du bien sis [Adresse 4] à [Localité 8] (77270) avec les époux [I].

Il sera donc tenu compte d’une durée d’immobilisation de 8 mois imputable aux époux [I] pour évaluer le montant de la clause pénale due par ces derniers du fait de leur défaillance.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de réduire le montant de la clause pénale à la somme de 10 000 euros.

En outre, conformément aux stipulations contractuelles du 14 octobre 2021, les conditions suspensives étant réputées réalisées, l’acquéreur doit obtenir la restitution de son acompte de 5000 euros séquestré entre les mains de Me [C], de sorte qu’il y a lieu d’ordonner à ce dernier de libérer la somme de 5000 euros séquestrée entre ses mains au profit des époux [I].

En conséquence, les époux [I] seront condamnés solidairement à payer à la SCI ROBERT SCHMITT la somme de 10 000 euros au titre de la clause pénale stipulée au compromis de vente du 14 octobre 2021.

Il y a lieu d’ordonner à Me [C] de libérer la somme de 5000 euros séquestrée en son étude au titre de l’acompte versé dans le cadre de la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021 au profit des époux [I].

Sur les demandes accessoires

Les époux [I], parties perdantes, seront condamnés in solidum aux dépens de l’instance.

Il serait inéquitable de laisser les frais que la SCI ROBERT SCHMITT a été contrainte d'exposer pour la défense de ses intérêts en justice.

Les époux [I], seront par conséquent condamnés in solidum à payer à la SCI ROBERT SCHMITT la somme de 1000 euros en contribution à ses frais irrépétibles d’instance.

Ils seront déboutés de leur demande de condamnation de la SCI ROBERT SCHMITT à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Enfin, il sera rappelé qu’en application des dispositions de l'article 514 du code de procédure civile, la présente décision est exécutoire par provision.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant après débats publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et prononcé par mise à disposition du greffe :

DEBOUTE M. [X] [I] et Mme [G] [S] épouse [I] de leur demande de voir constater nullité du compromis de vente conclu le 14 octobre 2021 avec la SCI ROBERT SCHMITT immatriculée au registre des commerces et sociétés de Bobigny sous le numéro 811 488 808 ;

DEBOUTE M. [X] [I] et Mme [G] [S] épouse [I] de leur demande d’inopposabilité de la clause pénale du compromis de vente conclu le 14 octobre 2021 avec la SCI ROBERT SCHMITT, immatriculée au registre des commerces et sociétés de Bobigny sous le numéro 811 488 808 ;

CONDAMNE solidairement M. [X] [I] et Mme [G] [S] épouse [I] à payer à la SCI ROBERT SCHMITT, immatriculée au registre des commerces et sociétés de Bobigny sous le numéro 811 488 808, la somme de 10 000 euros, au titre de la clause pénale du compromis de vente conclu le 14 octobre 2021 ;

ORDONNE à Me [C] de libérer la somme de 5000 euros séquestrée en son étude au titre de l’acompte versée dans le cadre de la promesse synallagmatique de vente du 14 octobre 2021 au profit de M. [X] [I] et Mme [G] [S] épouse [I] ;

CONDAMNE in solidum M. [X] [I] et Mme [G] [I] aux dépens de l’instance ;

CONDAMNE in solidum M. [X] [I] et Mme [G] [S] épouse [I] à payer à la SCI ROBERT SCHMITT, immatriculée au registre des commerces et sociétés de Bobigny sous le numéro 811 488 808, la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE M. [X] [I] et Mme [G] [S] épouse [I] de leur demande de condamnation de la SCI ROBERT SCHMITT à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que la présente décision est exécutoire par provision ;

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : 1ère ch. - sect. 2
Numéro d'arrêt : 22/05531
Date de la décision : 22/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-22;22.05531 ?
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