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19/06/2024 | FRANCE | N°24/00173

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, 1ère chambre - référés, 19 juin 2024, 24/00173


- N° RG 24/00173 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDNBQ

Date : 19 Juin 2024

Affaire : N° RG 24/00173 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDNBQ

N° de minute : 24/00364














Formule Exécutoire délivrée
le :21-06-2024

à :Me Guillaume BAI + dossier



Copie Conforme délivrée
le :21-06-2024

à :Me Serge BRIAND
Me Stanislas DE JORNA,
Me Haciali DOLLER + dossier
Me Jade GUICHERD + dossier
Régie
Service Expertise





TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX


ORDONN

ANCE DE RÉFÉRÉ



Par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées, a été rendue, le DIX NEUF JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE, par M. Balia BATIONO, Premier Vice-Présid...

- N° RG 24/00173 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDNBQ

Date : 19 Juin 2024

Affaire : N° RG 24/00173 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDNBQ

N° de minute : 24/00364

Formule Exécutoire délivrée
le :21-06-2024

à :Me Guillaume BAI + dossier

Copie Conforme délivrée
le :21-06-2024

à :Me Serge BRIAND
Me Stanislas DE JORNA,
Me Haciali DOLLER + dossier
Me Jade GUICHERD + dossier
Régie
Service Expertise

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

Par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées, a été rendue, le DIX NEUF JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE, par M. Balia BATIONO, Premier Vice-Président au Tribunal judiciaire de MEAUX, assisté de Madame Béatrice BOEUF, Greffière lors des débats et du délibéré, l’ordonnance dont la teneur suit :

Entre :

DEMANDERESSE

SCCV [Localité 55] BOURGOGNE
[Adresse 17]
[Localité 43]

représentée par Me Guillaume BAI, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDERESSES

S.A.R.L. COREDIF
[Adresse 10]
[Localité 34]

représentée par Me Haciali DOLLER, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, avocat plaidant

SOCIETE CABINET S2D
[Adresse 18]
[Localité 32]

représentée par Me Stanislas DE JORNA, avocat au barreau de MEAUX, avocat plaidant

S.A.S.U. ADS PRO
[Adresse 3]
[Localité 52]

non comparante

S.A.S. GERFA ILE DE FRANCE
[Adresse 22]
[Localité 28]

non comparante

S.A.R.L. MG BAT
[Adresse 4]
[Localité 33]

non comparante

S.A.R.L. SOCIETE NOUVELLE DE POSE
[Adresse 5]
[Localité 39]

non comparante

S.A.S. CHAMPEAU
[Adresse 53]
[Adresse 53]
[Localité 38]

représentée par Me Stéphane CHAGNAUD, avocat au barreau de LIMOGES, avocat plaidant,
Me Jade GUICHERD, avocat au barreau de MEAUX, avocat postulant

S.A.S. SOCIETE FRANCILIENNE DE BARDAGE CHARPENTE ET COUVERTURE (FBCC)
[Adresse 12],
[Adresse 11]
[Localité 48]

non comparante

S.A.R.L. SEBAC
[Adresse 27]
[Localité 51]

non comparante

E.U.R.L. MENUISIER DES BOSQUETS
[Adresse 19]
[Localité 44]

non comparante

S.A.R.L. RAVALSA
[Adresse 59]
[Adresse 59]
[Localité 42]

non comparante

S.A.S. LES MENUISERIES DE L’OUEST
[Adresse 8]
[Localité 16]

non comparante

S.A.S. EGI
[Adresse 13],
[Adresse 6]
[Localité 31]

non comparante

S.A.S. SOMLE LE PLAQUISTE
[Adresse 9]
[Localité 46]

non comparante

S.A.S.U. BAT & DECO
[Adresse 20]
[Localité 41]

représentée par Me Stanislas DE JORNA, avocat au barreau de MEAUX, avocat plaidant

S.A.R.L. KAZA-NET-NETTOYAGE
[Adresse 15]
[Localité 49]

non comparante

S.A.S. ARZAA
[Adresse 29]
[Localité 47]

non comparante

S.A.S.U. SIS
[Adresse 14]
[Localité 50]

non comparante

S.A. SCHINDLER
[Adresse 23]
[Adresse 23]
[Localité 36]

représentée par Me Serge BRIAND, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

S.A.S. REGULATION PLOMBERIE CHAUFFAGE SANITAIRE RCPS
[Adresse 26]
[Localité 30]

non comparante

S.A.S.U. CORALEC
[Adresse 24]
[Localité 49]

non comparante

S.A.S. EPAREV GROUPE LOISELEUR GRAND PARIS EST
[Adresse 7]
[Localité 35]

non comparante

S.A.S.U. INVIA TP [Adresse 37] prise en la personne de la SELARLU BALLY MJ en sa qualité de liquidateur judiciaire
[Adresse 25]
[Localité 45]

non comparante

=====================
Après avoir entendu les parties lors de l’audience de plaidoirie du 29 Mai 2024 ;

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SCCV [Localité 55] Bourgogne a entrepris, en qualité de maître d’ouvrage, la construction d’un ensemble immobilier, dénommé [Adresse 57], sur un terrain situé [Adresse 56], sous la maîtrise d’oeuvre de la société Cabinet S2D.

- N° RG 24/00173 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDNBQ
Elle a confié à la société Coredif, entreprise générale, la réalisation des travaux.

La société Coredif a sous-traité l’exécution des travaux notamment à :
- la société ADS Pro, la société Gerfa Ile-de-France et la société MG Bat, lot gros-oeuvre ;
- la société SNP, armatures ;
- la Société Francilienne de bardage Charpente et Couverture, la société Champeau et la société Sebac, lot étanchéité charpente et couverture ;
- la société Ravalsa et à la société Menuisiers des Bosquets, lot revêtement de façades ;
- la société les Menuiseries de l’Ouest, lot menuiserie extérieure ;
- la société EGI, lot métallerie - serrurerie ;
- la société Somle le Plaquiste, lot cloisons-doublage ;
- la société Menuisiers des Bosquets ;
- la société Bat & Deco, lot revêtement lot sol dur ;
- la société Bat & Déco, lot revêtement sol souple ;
- la société Arzaa, la société Kaza-Net et la société SIS, lot peinture ;
- la société Schindler, lot appareils élévateurs ;
- la société Régulation Plomberie Chauffage Sanitaire (RCPS), lot plmoberie - chauffage ;
- la société Coralec, lot électricité ;
- la société Eparev Groupe Loiseleur Grand Paris Est et la société Invia TP, lot VRD.

Les lots de l’ensemble immobilier ont été vendus en état futur d’achèvement et celui-ci a été soumis au régime de la copropriété.

Un syndicat des copropriétaires s’est constitué.

La réception est intervenue le 14 février 2023.

Par actes d’huissier en date du 12 février 2024, la SCCV [Localité 55] Bourgogne a fait assigner devant la présente juridiction la société Coredif et la société Cabinet S2D pour voir ordonner une mesure d’expertise, arguant que la société Cordefi n’a toujours pas levé l’intégralité des réserves.

Suivant actes de commissaire de justice en date du 12 avril 2024, la société Coredif a fait assigner devant la présente juridiction la société ADS Pro (prise en la personne de la Selarl MMJ en sa qualité de liquidateur judiciaire), la société Gerfa Ile-de-France, la société MG Bat, la Société Nouvelle de Pose, la société Champeau, la Société Francilienne de Bardage Charpente et Couverture (FBCC), la société Sebac, la société Menuisier des Bosquets, la société Ravalsa, la société Les Menuiseries de l’Ouest, la société EGI, la société Somle le Plaquiste, la société Bat & Deco, la société Kaza-Net-Nettoyage, la société Arzaa, la société SIS, la société Schindler, la société regulation Plomberie Chauffage Sanitaire RPCS, la société Coralec, la société Eparev Groupe Loiseleur Grand Paris Est, la société Invia TP pour voir joindre la présente procédure avec celle initiée par la SCCV [Localité 55] Bourgogne et rendre commune et opposable à l’ensemble des sociétés assignées la mesure d’expertise judiciaire demandée par la SCCV [Localité 55] Bourgogne.

Le juge des référés a prononcé la jonction de cette dernière instance à celle engagée par la SCCV [Localité 55] Bourgogne.

Dans des conclusions notifiées par voie électronique le 27 mai 2024 et soutenues oralement à l’audience, la société Coredif demande de :
Débouter la SCCV [Localité 55] Bourgogne de ses demandes, fins et conclusions portant sur les réserves à réception ;
En conséquence, exclure de la mission de l’expert judiciaire les réserves à réception invoquées par la SCCV [Localité 55] Bourgogne ;
Pour le surplus, prendre acte des protestations et réserves d’usage de la Sarl Coredif sur la demande d’expertise judiciaire de la SCCV [Localité 55] Bourgogne ;
Compléter la mission de l’expert judiciaire en ces termes : dire si les désordres invoqués pendant l’année de parfait achèvement étaient apparents ou pas le jour de la réception ;
Rendre commune et opposable à l’ensemble des sociétés assignées la mesure d’expertise judiciaire demandée par la SCCV [Localité 55] Bourgogne ;
Débouter la société Champeau et la société Schindler de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
Condamner la SCCV [Localité 55] Bourgogne à garantir la Sarl Coredif de toute condamnation en faveur de la société Champeau concernant le chantier situé à [Localité 55] au [Adresse 54], dénommé [Adresse 57] ;
Réserver les dépens.

Elle soutient que :
- les réserves à réception doivent être contradictoirement constatées au moment de la réception ;
- il appartient au maître d’ouvrage d’apporter la preuve des réserves constatées contradictoirement au moment de la réception ;
- or, en l’espèce, la SCCV [Localité 55] Bourgogne verse aux débats un procès-verbal de réception dont la page de garde seule est signée par l’ensemble des intervenants à la réception : le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre et l’entreprise générale ;
- les pages suivantes censées lister les réserves à réception n’ont fait l’objet d’aucune signature ;
- aucun élément ne permet de prouver que les réserves visées en pièce 4 adverse sont bien celles constatées lors de la réception ;
- faute pour la SCCV [Localité 55] Bourgogne d’apporter cette preuve, il conviendra d’exclure de la mission de l’expert les prétendues réserves à réception invoquées ;
- s’agissant des désordres signalés au cours de l’année de parfait achèvement, il convient de préciser que les désordres apparents n’ayant pas fait l’objet de réserve au moment de la réception sont purgés ;
- dès lors, il appartiendra à l’expert judiciaire de préciser si les désordres présentés par la SCCV [Localité 55] Bourgogne comme dénoncés pendant l’année de parfait achèvement n’étaient pas apparents au moment de la réception ;
- ainsi, il conviendra de compléter la mission de l’expert judiciaire en indiquant qu’il aura également pour mission de dire si les désordres invoqués pendant l’année de parfait achèvement étaient apparents ou pas le jour de la réception ;
- la SCCV [Localité 55] Bourgogne, la société Coredif et le maître d’œuvre ont signé un PV de réception faisant référence à des annexes dont les pages de garde ont également été signées ;
- les réserves auraient été enregistrées contradictoirement entre les parties lors de la réception des travaux dans un logiciel Kaliti dont la liste a été jointe au procès-verbal ;
- elle n’aurait jamais contesté l’existence de réserves;
- il est vrai qu’un procès-verbal d’exception a été régularisé par les parties le 12 février 2023 accompagné d’une page de garde également signée par les mêmes parties ;
- or, il appartient à la SCCV [Localité 55] Bourgogne de rapporter la preuve des réserves prétendument constatées contradictoirement lors de la réception ;
- la preuve de ce constat contradictoire passe nécessairement par la contresignature de la liste de réserves par l’ensemble des parties ;
- s’agissant du logiciel Kaliti invoqué par la SCCV [Localité 55] Bourgogne, il sera précisé que celui-ci n’a aucune valeur légale et donc aucune valeur juridique ;
- seul le promoteur a la main sur ledit logiciel et il peut ainsi, selon son bon vouloir, ajouter ou supprimer des réserves ;
- d’ailleurs, la fiabilité dudit logiciel peut être remise en cause ce qui explique le besoin exprimé par la SCCV de faire signer des pages de garde ;
- si le logiciel Kaliti permettait d’assurer le caractère contradictoire du constat des réserves au moment de la réception, la SCCV [Localité 55] Bourgogne n’aurait pas procéder à la signature des pages de garde ;
- elle verse aux débats un courrier du 24 janvier 2024 matérialisant justement sa contestation ;
- en outre, il ne lui appartient pas de rapporter la preuve des réserves effectuées lors de la réception ;
- la charge de cette preuve incombe à la SCCV [Localité 55] Bourgogne laquelle est manifestement défaillante au regard des éléments versés aux débats ;
- il est prématuré de mettre hors de cause la société Champeau sans que l’expert judiciaire n’ait été amené à se prononcer, d’une part, sur le bien fondé des griefs du demandeur principal et sur les éventuelles responsabilités des uns et des autres ;
- la société Champeau sollicite le paiement d’une somme de 15.071,41 euros et de 17.945,25 euros ;
- contrairement à ce qui est soutenu, la demande portant sur la somme de 15.071,41 euros ne porte pas sur l’opération considérée mais sur celle dont le maître d’ouvrage est la SCCV [Localité 55] Pasteur (affaire enrôlée sous le n°RG 24/00176 et plaidée le 15 mai 2024) ;
- en outre, ces demandes sont sérieusement contestables ;
- en effet, les pièces fournies pour justifier de ces demandes ne comportent aucune validation tant d’elle que du maître d’œuvre d’exécution ;
- il sera aussi observé que la pièce n°1 adverse fait mention du lot électricité ;
en outre, les prestations de la société Champeau ont fait l’objet d’une délégation de paiement avec le maître de l’ouvrage respectif de chacune des opérations ;
- le débiteur du paiement n’est pas elle mais la SCCV [Localité 55] Pasteur pour l’opération [Localité 55] Pasteur et la SCCV [Localité 55] Bourgogne pour l’opération [Localité 55] Bourgogne ;
- les bons de paiement pour ce sous-traitant ont d’ailleurs été transmis à la SCCV [Localité 55] Bourgogne et à la SCCV [Localité 55] Pasteur le 23 janvier 2024 ;
- si par impossible la présente juridiction devait la condamner à payer une quelconque somme en faveur de la société Champeau, il conviendra de condamner la SCCV [Localité 55] Bourgogne à la garantir de toute condamnation concernant le chantier dont elle est le maître d’ouvrage ;
- la société Schindler est bel et bien intervenue dans la construction de cette opération ;
- sous réserve des contestations qu’elle a soulevées, il est prématuré de mettre hors de cause la société Schindler sans que l’expert judiciaire n’ait été amené à se prononcer, d’une part, sur le bien fondé des griefs du demandeur principal et sur les éventuelles responsabilités des uns et des autres.

Dans des conclusions notifiées par voie électronique le 14 mai 2024 et soutenues oralement à l’audience, la société Champeau demande de :
Vu l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile,
Débouter la société Coredif des demandes dirigées à l’encontre de la SAS Champeau ;
Statuant sur la demande reconventionnelle de la SAS Champeau,
Condamner la société Coredif à payer à la SAS Champeau 15.071,41 € et 17.945,25 € à titre de provision ;
Condamner la société Coredif à payer à la SAS Champeau la somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les entiers dépens de l’instance.

Elle fait valoir que :
- il ne résulte pas des éléments versés au dossier que le lot « charpente » dont elle avait la charge ait fait l’objet de réserves à réception ;
- aucun désordre affectant l’ouvrage de charpente n’est d’ailleurs allégué ;
- ni la SAS [Localité 55] Bourgogne, ni la société Coredif n’explicitent les raisons pour lesquelles la SAS Champeau devrait être attraite à des opérations d’expertise judiciaire, alors que son lot a été réceptionné et qu’il n’est allégué d’aucun désordre affectant ses ouvrages ;
- elle est créancière, au titre de l’opération considérée des sommes de 15.071,41 € et 17.945,25 € ;
- il ne semble pas que la société Coredif ait contesté le montant des sommes dues, les certificats de paiement n’ayant pas fait l’objet d’opposition.

Dans des conclusions notifiées par voie électronique le 7 mai 2024 et soutenues oralement à l’audience, la SCCV [Localité 55] Bourgogne demande notamment de rejeter la demande de la société Coredif d’exclure de la mission de l’expert les réserves à la réception.

- N° RG 24/00173 - N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDNBQ
Elle indique que :
- la société Coredif est tenue à une obligation de lever les réserves par application de l’article 1792-6 du code civil ;
- le vendeur en état d’achèvement est seul titulaire de l’action en garantie de parfait achèvement prévue à l’article 1792-6 du code civil ;
- la société Coredif a l’obligation de lever les réserves mentionnées à la réception et les désordres signalés au cours de l’année de parfait achèvement ;
- sa responsabilité contractuelle de droit commun peut également être recherché à ce titre ;
- il est communiqué un rapport Kaliti du 12 janvier 2024 pour les réserves relatives à l’ensemble des logements ;
- outre la présence de la société Coredif, le maître d’œuvre devra participer aux opérations d’expertise, certaines problématiques pouvant relever de sa responsabilité ;
- le contrat du maître d’œuvre prévoit notamment qu’il doit veiller à la levée des réserves de réception ou livraison ;
- elle, la société Coredif et le maître d’œuvre ont signé un procès-verbal de réception faisant référence à des annexes dont les pages de garde ont également été signées ;
- les pages de garde des annexes (jointes au procès-verbal de réception) comprennent le nombre de réserves identifiées ;
- s’agissant des réserves, elles sont enregistrées contradictoirement entre les parties, lors de la réception des travaux, dans un logiciel Kaliti dont la liste a été jointe au procès verbal de réception ;
- tout au long de l’opération, les parties ont accès à ce logiciel qui évolue (ajout de réserves de GPA, retrait des réserves levées) ;
- ayant un accès permanent à ce logiciel, la société Coredif n’a jamais contesté les réserves mentionnées comme émises à la livraison/réception des appartements ;
- la société Coredif n’a pas non plus contesté l’existence de réserves suite aux mises en demeure d’avoir à les lever ;
- elle dispose donc d’un motif légitime à faire établir les désordres et réserves qu’elle allègue.

Dans des conclusions déposées à l’audience et soutenues oralement, la société Schindler demande de :
Vu l’assignation délivrée le 12 avril 2024,
Vu l’article 145 du code de procédure civile,
Vu l’article 1792-6 du code civil,
Vu les pièces communiquées,
A titre principal,
- Débouter la société Coredif de sa demande d’expertise formulée à son encontre ;
- Prononcer la mise hors de cause de la société Schindler au titre de la présente procédure ;
A titre subsidiaire,
- Donner acte à la société Schindler de ses protestations et réserves sur la demande d’expertise et sur la demande de jonction ;
En tout état de cause,
- Condamner la société Coredif ou à défaut tout succombant, au besoin in solidum, au paiement de la somme de 2 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure.

Elle expose à l’appui de ses prétentions :
- il ressort de la lecture du rapport établi par la société Inter Construction en date du 12 janvier 2024 qu’aucune réserve ne concerne ses travaux limités au lot n° 12 ;
- elle a parfaitement exécuté son marché et aucune des réserves au moment de la réception ne concernait son intervention ;
- aucun désordre sur les appareils élévateurs n’est en tout état de cause allégué ;
- la mesure sollicitée à son encontre se heurte à une absence d’intérêt légitime dans la mesure où aucune des réserves dénoncées par la SCCV [Localité 55] Bourgogne n’est susceptible de présenter un quelconque lien avec son intervention ;
- sa mise en cause ne présente en outre aucun intérêt et n’est pas utile à la solution du litige.

La société Cabinet S2D a formé des protestations et réserves.

Les autres parties n’ont pas comparu.

SUR CE,

Sur la demande d’expertise

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, “S'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.”

Il est acquis que l'article 145 du code de procédure civile est un texte autonome auquel les conditions habituelles du référé ne sont pas applicables. Il n'est ainsi pas soumis à la condition d'urgence ou à la condition d'absence de contestation sérieuse.

Ce texte suppose l'existence d'un motif légitime c'est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions et justifier que le litige potentiel n'est pas manifestement voué à l'échec et que la mesure est de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.

En l’espèce, la SCCV [Localité 55] Bourgogne n'a pas à démontrer l'existence des désordres ou fautes qu’elle invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir. Elle doit seulement justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions.

La SCCV [Localité 55] Bourgogne verse aux débats la lettre marché de la société Coredif, entreprise générale, et le contrat de maîtrise d’oeuvre du cabinet S2D.

Elle produit également le rapport de réserves Kaliti du 12 janvier 2024.

Au regard de ces éléments, la SCCV [Localité 55] Bourgogne dispose d'un motif légitime à faire établir les désordres allégués, un procès éventuel en responsabilité contre la société Coredif et le cabinet S2D n'étant pas manifestement voué à l'échec.

La société Coredif produit les contrats de ses sous-traitants, défendeurs.

La société Schindler et la société Champeau demandent leur mise hors de cause.

Il convient de rappeler la demande d’expertise de la SCCV [Localité 55] Bourgogne porte sur “l’ensemble des réserves, désordres et malfaçons allégués et détaillés dans le rapport Kaliti du 12 janvier 2024.”

Si les sociétés Schindler et Champeau sont intervenues dans la réalisation des travaux, c’est au titre de lots bien précis.

La société Coredif ne démontre pas que les réserves, désordres et malfaçons, objet de la demande d’expertise de la SCCV [Localité 55] Bourgogne, concernent les travaux des lots dont les sociétés Schindler et Champeau étaient attributaires.

Dans ces conditions, la société Coredif ne justifie d’aucun motif légitime à l’égard des sociétés Schindler et Champeau pour que celles-ci participent aux opérations d’expertise. Elles seront mises hors de cause.

Pour le reste, il résulte de ce qui précède que les conditions d’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile sont réunies et qu’il convient d’ordonner la mesure d’expertise requise, dans les termes du dispositif, en mettant à la charge de la SCCV [Localité 55] Bourgogne et de la société Coredif le paiement de la provision initiale.

Sur la demande reconventionnelle de provision

En vertu des dispositions de l’article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, dans le cas où l’existence de l’obligation du débiteur n’est pas sérieusement contestable.

La société Champeau produit à l’appui de sa demande de paiement des sommes de 15 071,41 euros et 17 945,25 euros deux bons de paiement sur lesquels il est indiqué que la société Coredif demande au maître de l’ouvrage le paiement des sommes objet desdits bons à son sous-traitant la société Champeau.

Il suit de là que la personne tenue à paiement est le maître de l’ouvrage.

Sur l’un des bons de paiement, le maître de l’ouvrage est la SCCV [Localité 55] Pasteur et la non la SCCV [Localité 55] Bourgogne.

Au regard de ces éléments, les contestations élevées par la société Coredif sont sérieuses.

La société Champeau échoue ainsi à rapporter la preuve de l’existence d’une obligation non sérieusement contestable de la société Coredif de lui payer les sommes de 15 071,41 euros et 17 945,25 euros. Il n’y a donc pas lieu à référé sur sa demande de provision.

Sur les demandes accessoires

La demande étant fondée sur l'article 145 du code de procédure civile, .es dépens devront demeurer à la charge de la SCCV [Localité 55] Bourgogne et de la société Coredif

En considération de l’équité, les demandes des sociétés Schindler et Champeau fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance de référé réputée contradictoire et en premier ressort, mise à disposition au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique,

Prononce la mise hors de cause des sociétés Schindler et Champeau ;

Ordonne une mesure d'expertise,

Désigne pour y procéder

Monsieur [L] [K]
[Adresse 21]
[Localité 40]
Tél : [XXXXXXXX01]
Port. : [XXXXXXXX02]
Email : [Courriel 58]

avec mission de :

- entendre les parties et tous sachants ;

- prendre connaissance de tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission ;

- se rendre sur les lieux situés [Adresse 56], après y avoir convoqué les parties ;

- examiner les lieux objet du litige, dire s’ils sont affectés des désordres et des non conformités mentionnés par le rapport Kaliti du 12 janvier 2024 portant sur les logements de la [Adresse 57] ;

- dans l’affirmative, les décrire, en rechercher les causes et préciser pour chacun d’eux s’ils proviennent d’une erreur de conception, d’un vice des matériaux, d’une malfaçon dans leur mise en oeuvre, d’un non respect des règles de l’art, d’une négligence dans l’entretien ou l’exploitation des ouvrages ou de toute autre cause ;

- donner son avis sur les conséquences de ces dommages quant à la solidité, l'habitabilité, l'esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l'usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination ;

- dire si les désordres invoqués pendant l’année de parfait achèvement étaient apparents ou pas le jour de la réception ;

- fournir tout renseignement technique et de fait permettant au tribunal de statuer sur les éventuelles responsabilités encourues et d’évaluer les préjudices de toute nature éventuellement subis, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant du sinistre ;

- décrire les travaux nécessaires pour remédier aux désordres et aux non conformités constatés  ; en évaluer le coût poste par poste après avoir, le cas échéant, examiné et discuté les devis ou propositions chiffrées présentés par les parties dans le délai qu’il leur aura imparti ; préciser la durée des travaux préconisés ;

- donner son avis sur la solution économiquement la plus raisonnable ;

- donner tous éléments permettant d’apprécier les préjudices subis par la SCCV [Localité 55] Bourgogne du fait des désordres, des non conformités et des travaux de reprise à effectuer ; en proposer une évaluation chiffrée ;

- indiquer le montant de la dépréciation de l’immeuble pour le cas où il ne pourrait pas être remédié à certaines malfaçons ;

- s’il y a lieu, proposer un compte entre les parties ;

- d’une manière générale, faire toutes observations utiles au règlement du litige ;

Dit que pour procéder à sa mission l’expert devra :

- convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;

- se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés ;

- à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :

* en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
* en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent, sur le fondement de l'article 280 du code de procédure civile, et dont l'affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire de ce dernier au sens de l'article 269 du même code ;
* en fixant aux parties un délai impératif pour procéder aux interventions forcées ;
* en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

- au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte-tenu des délais octroyés devant rester raisonnable,

* fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
* rappelant aux parties, au visa de l’article 276, alinéa 2, du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai ;

Dit qu'en cas d'urgence ou de péril reconnu par l'expert, ce dernier pourra autoriser le demandeur à faire exécuter, à ses frais avancés et pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables par l'expert, sous la direction du maître d'œuvre du demandeur, par des entreprises qualifiées de son choix et que, dans ce cas, l'expert déposera un pré-rapport ou une note aux parties valant pré-rapport, précisant la nature, l'importance et le coût de ces travaux ;

Fixe à la somme de dix mille euros (10 000 euros) le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par la SCCV [Localité 55] Bourgogne à hauteur de la somme de trois mille euros (3 000 euros) et la société Coredif pour celle de sept mille euros (7 000 euros) à la Régie de ce tribunal au plus tard le 30 septembre 2024 ;

Dit que faute de consignation de la présente provision initiale dans ces délais impératifs, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l'article 271 du code de procédure civile ;

Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe du tribunal judiciaire dans les SIX MOIS de sa saisine, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge du contrôle ;

Dit que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du service du contrôle des expertises de ce tribunal, spécialement désigné à cette fin en application des article 155 et 155-1 du code de procédure civile ;

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de provision de la société Champeau ;

Laisse les dépens à la charge de la SCCV [Localité 55] Bourgogne et la société Coredif ;

Rejette les demandes des sociétés Schindler et Champeau fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : 1ère chambre - référés
Numéro d'arrêt : 24/00173
Date de la décision : 19/06/2024
Sens de l'arrêt : Désigne un expert ou un autre technicien

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-19;24.00173 ?
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