La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2024 | FRANCE | N°22/00644

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, Ctx protection sociale, 17 juin 2024, 22/00644


TRIBUNAL JUDICIAIRE

de MEAUX

Pôle Social


Date : 17 Juin 2024

Affaire :N° RG 22/00644 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CC3MI

N° de minute : 24/00429





RECOURS N° :
Le



Notification :
Le
A
1 CCC aux parties
1 titre exécutoire à Me BAUDIN VERVAECKE


JUGEMENT RENDU LE DIX SEPT JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE



PARTIES EN CAUSE


DEMANDERESSE

Madame [V] [W]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Nathalie BAUDIN-VERVAECKE, avocat au barreau de MEAUXr>

DEFENDERESSE


CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE SEINE ET MARNE
[Adresse 3]

Représentée par Madame Madjiwei NGARLEM, agent audiencier



COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DE L’AUDI...

TRIBUNAL JUDICIAIRE

de MEAUX

Pôle Social

Date : 17 Juin 2024

Affaire :N° RG 22/00644 - N° Portalis DB2Y-W-B7G-CC3MI

N° de minute : 24/00429

RECOURS N° :
Le

Notification :
Le
A
1 CCC aux parties
1 titre exécutoire à Me BAUDIN VERVAECKE

JUGEMENT RENDU LE DIX SEPT JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE

PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE

Madame [V] [W]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Nathalie BAUDIN-VERVAECKE, avocat au barreau de MEAUX

DEFENDERESSE

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE SEINE ET MARNE
[Adresse 3]

Représentée par Madame Madjiwei NGARLEM, agent audiencier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DE L’AUDIENCE

Présidente : Madame Murielle PITON, Juge
Assesseur : Monsieur Daniel ELALOUF, Assesseur Pôle social
Assesseur : Monsieur Serge JOSEPH, Assesseur pôle social
Greffier : Madame Emilie NO-NEY,

DÉBATS

A l'audience publique du 22 Avril 2024

=====================

EXPOSE DU LITIGE

Le 06 septembre 2021, Madame [V] [W], assistante dentaire au sein d'un cabinet médical, a effectué une demande de reconnaissance de maladie professionnelle.

Le certificat médical initial, daté du 5 janvier 2021, constatait: " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs droite confirmée par IRM. Tableau 57 ".

Le 16 mai 2022, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) d'Ile-de-France a émis un avis défavorable à sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, au motif de l'absence de lien direct entre le travail habituel de l'assurée et la maladie mentionnée sur le certificat médical initial du 5 janvier 2021.

Par décision du 20 mai 2022, la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-et-Marne (ci-après, la Caisse) a notifié à Madame [V] [W] un refus de reconnaissance d'une maladie professionnelle, à la suite de l'avis défavorable du CRRMP.

Par courrier daté du 24 juillet 2022, Madame [V] [W] a contesté cette décision devant la Commission de recours amiable.

Puis, par recours reçu au greffe le 7 novembre 2022, Madame [V] [W] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Meaux en contestation de la décision implicite de rejet de la Commission de recours amiable.

L'affaire a été appelée à l'audience du 27 février 2023.

Par jugement avant-dire droit du 02 mai 2023, le tribunal a notamment :

-Ordonné la saisine du CRRMP des Hauts-de-France, aux fins qu'il donne son avis sur l'existence d'un lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée (certificat médical 05/01/2021) et l'exposition professionnelle de Madame [V] [W] ;
-Réservé les dépens.

Le 10 octobre 2023, le CRRMP de la région Hauts-de-France a émis un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, au motif que : " A la lecture attentive des pièces médicales et administratives du dossier, et en l'absence de toute pièce supplémentaire contributive fournie à l'appui du recours, aucun élément ne permet d'émettre un avis contraire à celui du CRRMP précédent. C'est pourquoi, il ne peut être retenu de lien direct entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle."

L'affaire a été rappelée à l'audience du 22 avril 2024.

Madame [V] [W] et la Caisse étaient toutes deux représentées.

Au terme de ses conclusions, soutenues par son conseil, Madame [V] [W] demande au tribunal de :
À titre principal,
-Ordonner la prise en charge de la maladie " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs droite confirmée par IRM " qu'elle a déclarée, au titre du tableau n°57 ;
À titre subsidiaire,
-Juger la maladie " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs droite confirmée par IRM " qu'elle a déclarée, en lien avec l'activité professionnelle ;
En conséquence,
-Ordonner la prise en charge de la maladie " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs droite confirmée par IRM " qu'elle a déclarée, au titre de la législation sur les risques professionnels ;
En tout état de cause,
-Ordonner l'exécution provisoire ;
-Condamner la Caisse à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-Condamner la Caisse aux entiers dépens.

En défense, la Caisse, par l'intermédiaire de son agent audiencier, sollicite oralement l'entérinement de l'avis du CRRMP et s'oppose à la demande relative à l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

À l'issue des débats, les parties ont été avisées que l'affaire était mise en délibéré au 17 juin 2024, date du présent jugement.

MOTIFS DE LA DECISION

L'article L.461-1 du code de la sécurité sociale dispose que " les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, est assimilée à la date de l'accident :
1° La date de la première constatation médicale de la maladie ;
2° Lorsqu'elle est postérieure, la date qui précède de deux années la déclaration de maladie professionnelle mentionnée au premier alinéa de l'article L. 461-5 ;
3° Pour l'application des règles de prescription de l'article L. 431-2, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.
Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.
Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.
Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.
Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d'origine professionnelle, dans les conditions prévues aux septième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire ".

En application de l'article R.142-17-2 du code de la sécurité sociale, " lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie relevant d'un des tableaux annexés à la partie réglementaire du code de la sécurité sociale dont l'une ou plusieurs conditions ne sont pas remplies, il incombe au tribunal de recueillir préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse. Le tribunal désigne alors le comité d'une des régions les plus proches.
Il est constant en l'espèce que Madame [V] [W] était employée en qualité d'assistante dentaire lorsqu'elle a complété le 06 septembre 2021 une déclaration de maladie professionnelle, accompagnée d'un certificat médical initial en date du 05 janvier 2021 faisant mention d'une " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs droite confirmée par IRM ".

Cette maladie figure au tableau n° 57 des maladies professionnelles, lequel prévoit un délai de prise en charge de six mois, sous réserve d'une durée d'exposition de six mois.

Le 16 mai 2022, le CRRMP d'Ile-de-France a émis un avis défavorable à sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, au motif que " l'analyse du dossier médical et de l'enquête administrative ne permet pas de retenir l'existence d'un lien direct entre le travail habituel de l'assurée et la maladie mentionnée sur le certificat médical initial du 05/01/2021. "

Le 10 octobre 2023, le CRRMP de la région Hauts-de-France, désigné par jugement avant-dire droit du 02 mai 2023, a considéré que Madame [V] [W] cessait toute exposition au risque le 04 janvier 2021. À ce titre, il a également émis un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, au motif suivant : " Elle présente une tendinopathie chronique non rompue, non calcifiante droite objectivée par IRM et constatée le 07.11.20.
Le dossier nous est présenté pour un non respect de la durée minimale d'exposition au risque (5 mois, 7 jours au lieu des 6 mois requis).
A la lecture attentive des pièces médicales et administratives du dossier, et en l'absence de toute pièce supplémentaire contributive fournie à l'appui du recours, aucun élément ne permet d'émettre un avis contraire à celui du CRRMP précédent.
C'est pourquoi, il ne peut être retenu de lien direct entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle. "

Madame [V] [W] soutient qu'elle justifie de plus de six mois d'exposition au risque.

À l'appui de ses prétentions, elle produit, notamment, l'ensemble de ses contrats de travail et attestations d'employeur, laissant apparaître qu'elle a travaillé comme assistante dentaire durant les périodes suivantes :

-Du 5 décembre 2018 au 1er février 2019 chez la société [5], à temps plein,
-Du 19 octobre 2018 au 19 avril 2019, auprès du Docteur [B] [Z], à raison de 6 heures hebdomadaires,
-Le 06 juin 2019, du 09 au 23 juillet 2019, du 10 au 17 juillet 2019, le 19 juillet 2019, du 08 au 10 octobre 2019, du 21 au 25 octobre 2019, du 30 octobre au 09 décembre 2019, le 29 novembre 2019, du 11 au 20 décembre 2019, du 06 février au 20 mars 2020, du 25 au 29 mai 2020, les 03, 10, 17 et 24 juin 2020, les 1er, 08 et 29 juillet 2020, les 16, 23 et 30 septembre 2020, et le 21 octobre 2020, pour la société [6],
-Du 1er juin 2020 au 10 avril 2021, auprès du Docteur [U] [X], à temps plein,
-Du 1er au 30 juillet 2021 et du 23 août 2021 au 03 septembre 2021, auprès de la SCM [Adresse 4], à temps plein.

Ces justificatifs peuvent ainsi être de nature à établir que Madame [V] [W] a bien été exposée au risque durant une période supérieure à six mois.

En effet, si le CRRMP des Hauts-de-France considère que l'assurée n'a été exposée au risque que du 1er juin 2020 au 07 novembre 2020, force est cependant de constater qu'elle exerçait déjà la profession d'assistante dentaire dans des conditions similaires, lors de sa précédente activité professionnelle. Or, comme le relève son conseil, les deux CRRMP ne contestent nullement la réalité des travaux effectués par Madame [V] [W] au cours de son activité professionnelle d'assistante dentaire.

Dans ces circonstances, il s'ensuit que tant la condition relative à la liste limitative des travaux, que celles relatives au délai de prise en charge de la pathologie et la durée d'exposition au risque, peuvent être tenues pour établies.

Par suite, il y a lieu de considérer que Madame [V] [W] répond à l'ensemble des conditions posées par le tableau n°57 des maladies professionnelles, de telle sorte que sa maladie " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs droite confirmée par IRM " constatée par certificat médical initial du 05 janvier 2021 peut être reconnue comme étant d'origine professionnelle et prise en charge au titre dudit tableau n°57.

Sur la demande de frais irrépétibles :

L'article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

En l'espèce, il y a lieu de condamner la Caisse à verser à Madame [V] [W] la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Sur les dépens :

Succombant à l'instance, la Caisse sera condamnée aux éventuels dépens exposés, sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile.

Sur l'exécution provisoire :

Aux termes de l'article R.142-10-6 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, le tribunal peut ordonner l'exécution par provision de ses décisions.

En l'espèce, il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire de Meaux, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par décision contradictoire, rendue en premier ressort,

DIT QUE la pathologie " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs droite confirmée par IRM " présentée par Madame [V] [W] et constatée par certificat médical initial du 05 janvier 2021 peut être prise en charge au titre du tableau n°57 des maladies professionnelles ;

CONDAMNE la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-et-Marne à verser à Madame [V] [W] la somme de 1.000 euros (MILLE EUROS) au titre l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-et-Marne aux entiers dépens ;

DIT QU'IL n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;

RAPPELLE QUE ce jugement est susceptible d'appel dans le délai d'un mois à compter de sa notification aux parties.

Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal le 17 juin 2024, et signé par la présidente et la greffière.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE
Emilie NO-NEY Murielle PITON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/00644
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;22.00644 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award