La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2024 | FRANCE | N°20/00099

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, Ctx protection sociale, 17 juin 2024, 20/00099


TRIBUNAL JUDICIAIRE

de MEAUX

Pôle Social


Date : 17 Juin 2024

Affaire :N° RG 20/00099 - N° Portalis DB2Y-W-B7E-CBYXS

N° de minute : 24/00419





RECOURS N° :
Le



Notification :
Le
A
1 CCC aux parties
1 titre exécutoire à Me CALAMARI
1 CCC à Me FLORY


JUGEMENT RENDU LE DIX SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE



PARTIES EN CAUSE

DEMANDEUR

Monsieur [I] [V]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

représenté par Maître CALAMARI de la SCP IEVA-GUENOUN/PAIN, avocats au b

arreau de MEAUX,

DEFENDEURS

S.A.S. [5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représentée par Maître Bénédicte FLORY, avocat au barreau de PARIS,
avec dispense de comparution acceptée

CAISSE PRIM...

TRIBUNAL JUDICIAIRE

de MEAUX

Pôle Social

Date : 17 Juin 2024

Affaire :N° RG 20/00099 - N° Portalis DB2Y-W-B7E-CBYXS

N° de minute : 24/00419

RECOURS N° :
Le

Notification :
Le
A
1 CCC aux parties
1 titre exécutoire à Me CALAMARI
1 CCC à Me FLORY

JUGEMENT RENDU LE DIX SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

PARTIES EN CAUSE

DEMANDEUR

Monsieur [I] [V]
[Adresse 1]
[Adresse 1]

représenté par Maître CALAMARI de la SCP IEVA-GUENOUN/PAIN, avocats au barreau de MEAUX,

DEFENDEURS

S.A.S. [5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représentée par Maître Bénédicte FLORY, avocat au barreau de PARIS,
avec dispense de comparution acceptée

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 10]
[Localité 4]

représentée par Madame [B] [U], agent audiencier

Maître [J] [W] en qualité de mandataire liquidateur de la Société [5]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

non comparant, non représenté,

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DE L’AUDIENCE

Présidente : Madame Murielle PITON, Juge
Assesseur : Monsieur Daniel ELALOUF, Assesseur Pôle social
Assesseur : Monsieur Serge JOSEPH, Assesseur pôle social
Greffier : Madame Emilie NO-NEY, greffier

DÉBATS

A l'audience publique du 22 Avril 2024

=====================

EXPOSE DU LITIGE

Selon le formulaire de déclaration d’accident du travail complété le 29 juillet 2016 par la société [5], la veille, à 10h00, l’un de ses salariés, monsieur [I] [V], peintre-ravaleur, a fait une chute d’un échafaudage après que celui-ci a basculé alors qu’il se trouvait sur un chantier situé à [Localité 6]. Monsieur [I] [V] a été transporté au centre hospitalier de [Localité 9].

Un certificat médical initial a été délivré à monsieur [I] [V], le 29 juillet 2016, lui prescrivant un arrêt de travail jusqu’au 30 octobre 2016 et mentionnant une “fracture C6".

La Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 8] (ci-après la Caisse) a reconnu le caractère professionnel de cet accident le 25 août 2016.

Monsieur [I] [V] a perçu des indemnités journalières au titre de cet accident du travail du 29 juillet 2016 au 17 mai 2019, date à laquelle son état a été considéré consolidé par le médecin conseil près la Caisse.

Par décision notifiée le 16 juillet 2019, monsieur [I] [V] s’est vu attribuer un taux d’incapacité permanente de 8% au titre de “séquelles indemnisables d’un traumatisme crânien consistant en un syndrome post-commotionnel avec sensation d’instabilité, troubles mnésiques antérogrades et troubles anxieux. Absence de séquelles indemnisables d’un traumatisme cervical avec fracture C6 traitée médicalement.”

Par courrier daté du 18 juillet 2019, le conseil de monsieur [I] [V] a informé la Caisse de sa décision de faire reconnaître la faute inexcusable de la société [5].

A défaut de conciliation, monsieur [I] [V] a, le 07 février 2020, saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Meaux aux fins de faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur.

L’affaire a été appelée à l’audience de mise en état du 20 mai 2021, renvoyée à celle du 16 septembre 2021 puis à l’audience de plaidoiries du 25 octobre 2021.

Par jugement mixte rendu le 20 décembre 2022, le tribunal a notamment :

- déclaré monsieur [I] [V] recevable et bien fondé en son recours;
- dit que l'accident du travail dont il a été victime le 28 juillet 2016 est dû à la faute inexcusable de son employeur, la Société [5], prise en la personne de son liquidateur judiciaire ;
- fixé au taux maximum la majoration de l’indemnité en capital à laquelle monsieur [I] [V] peut prétendre ;
Et, avant-dire droit sur la liquidation des préjudices subis par monsieur [I] [V],
- ordonné une expertise judiciaire, en désignant pour y procéder le docteur [C] [K] ;
- dit que la Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 11] fera l’avance des frais d'expertise ;
- fixé à la somme de 2 000 (deux mille) euros le montant de la provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice de monsieur [I] [V] ;
- dit que la Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 8] versera directement à monsieur [I] [V] les sommes dues au titre de la majoration de l’indemnité en capital, de la provision et de l'indemnisation complémentaire ;
- dit que la Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 8] pourra recouvrer le montant des indemnisations, provision et majoration accordées à monsieur [I] [V] auprès de la société [5] et condamné Maître [J] [W], ès-qualité de Mandataire Liquidateur, à ce titre, ainsi qu'au remboursement du coût de l'expertise ;
- réservé les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- réservé toutes autres demandes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le docteur [C] [K] a établi son rapport définitif le 16 juin 2022.

L’affaire a été rappelée à l’audience du 31 octobre 2022 et renvoyée à celle du 03 avril 2023.

Par jugement rendu le 05 juin 2023, le tribunal a notamment :

- Déclaré recevables les demandes indemnitaires formées par Monsieur [I] [V] ;

- Fixé l’indemnisation complémentaire de Monsieur [I] [V], avec intérêts au taux légal, comme suit :

15 000 € au titre des souffrances endurées,1 000 € au titre du préjudice esthétique temporaire,1 000 € au titre du préjudice esthétique permanent,6 052,24 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,11 328 € au titre de l’assistance par une tierce personne,2 000 € au titre du préjudice sexuel,
- Déboute Monsieur [I] [V] de sa demande d’indemnisation d’un préjudice d’agrément et d’un préjudice résultant de la perte ou diminution de promotion professionnelle ;
- Dit que la Caisse versera directement à Monsieur [I] [V] les sommes dues au titre de l'indemnisation complémentaire, après avoir déduit la provision de 2 000 € allouée par jugement du 20 décembre 2021 ;
- Rappelé que la Caisse ne pourra exercer son action récursoire à l’encontre de la société [5], en liquidation judiciaire, que sous réserve de la déclaration de sa créance au passif de la liquidation judiciaire ;
- Fixé au passif de la société [5] la somme de 2.000,00 euros au profit de Monsieur [I] [V] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective ;
- Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision à hauteur des deux tiers des sommes allouées ;

Et, avant-dire droit, sur la question de l’indemnisation du préjudice fonctionnel permanent,

- Ordonné un complément d’expertise sur pièces, confié au docteur [C] [K], avec pour mission de chiffrer, par référence au “Barème indicatif des déficits fonctionnels séquellaires en droit commun” le taux éventuel de déficit fonctionnel permanent imputable à l’accident (excluant donc tout étant antérieur évoluant pour son propre compte), résultant de l’atteinte permanente d’une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation, le taux de déficit fonctionnel devant prendre en compte, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime mais aussi les douleurs physiques et morales permanentes qu’elle ressent, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après consolidation ; dans l’hypothèse d’un état antérieur, préciser en quoi l’accident a eu une incidence sur celui-ci et décrire les conséquences de cette situation; 
- Dit que la Caisse fera l’avance des frais du complément d'expertise ;
- Réservé la demande d'indemnisation formulée au titre du déficit fonctionnel permanent ;
- Ordonne l'exécution provisoire du complément d'expertise.

Au terme de son rapport d’expertise déposé le 1er novembre 2023, le Docteur [C] [K] conclut à un taux d’incapacité permanente de 4% résultant du déficit fonctionnel permanent.

L’affaire a été rappelée à l’audience du 22 avril 2024.

A cette audience, Monsieur [I] [V] sollicite de la juridiction de :

Dire Monsieur [I] [V] recevable et bien fondé en ses demandes ; Fixer l’indemnisation au titre du déficit fonctionnel permanent de Monsieur [I] [V] à la somme de 15.000 euros à titre principal, et à titre subsidiaire, à la somme de 5.200 euros ; Dire le jugement commun à la CPAM de [Localité 10] et opposable au mandataire liquidateur de la société ; Confirmer l’exécution provisoire ; Condamner in solidum la société [5] (et l’inscrire à son passif) et la CPAM de [Localité 10] à régler à Monsieur [V] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du CPC et aux entiers dépens, dont les frais d’expertise médicale ;
Il soutient qu’il a été examiné dans des conditions très particulières et qu’il n’était pas dans son état normal. Il soutient que les répercussions sur sa qualité de vie sont plus importantes que le taux de 4% retenu. Il sollicite qu’un taux de 10% soit retenu. Il dit avoir toujours des troubles du sommeil et un traitement, qu’il est sans activité et qu’il a été reconnu travailleur handicapé.

La société [5], représentée par Me [W] en qualité de mandataire liquidateur a indiqué par courrier du 19 avril 2024 s’en remettre aux conclusions de l’expert.

La Caisse a demandé la confirmation du rapport d’expertise, a indiqué s’en remettre sur l’indemnisation. Elle a sollicité le rejet de la demande formulée sur le fondement de l’article 700 du CPC.

Le délibéré a été fixé au 17 juin 2024.

MOTIFS :

Sur le déficit fonctionnel permanent :

Par deux arrêts en date du 20 janvier 2023, rendus en Assemblée Plénière, la Cour de Cassation a opéré un revirement de jurisprudence et juge désormais que la rente accident du travail ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.
Il convient de rappeler que le déficit fonctionnel permanent comprend l'atteinte à l'intégrité physique et psychique au sens strict, mais aussi les douleurs physiques et psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence.

En l’espèce, le Docteur [K] indique dans son expertise les éléments suivants : « en nous basant sur le barème du droit commun dit du concours médical, les séquelles imputables aux faits de l’instance nous permettent de retenir un taux de 4% pour le point douloureux au niveau du rachis cervical déclaré et un état de stress post-traumatique avec un syndrome post-commotionnel, sensation d’instabilité et troubles mnésiques ainsi que des troubles anxieux ».

Monsieur [I] [V] conteste l’évaluation réalisée par l’expert. Il soutient que le Docteur [K] aurait dû se reporter à son état indépendamment de son état psychologique en lien avec le décès de son fils, pour comprendre le retentissement des faits.

Pourtant, force est de constater que le Docteur [K] indique dans son expertise qu’il se place sur le plan psychique sur ses conclusions lors de l’expertise réalisée en 2022, soit son état de stress post traumatique avec un syndrome post-commotionnel, une sensation d’instabilité avec des troubles mnésiques et des troubles anxieux.

En outre, il relève que sur le plan somatique au jour de l’expertise, le déshabillage et le rhabillage s’effectuent sans aide technique ni humaine ; que l’examen du rachis cervical est similaire à celui réalisé en 2022 avec un point douloureux à la palpation au niveau du rachis cervical, la flexion-extension du rachis cervical sont conservées, et les inclinaisons latérales et les rotations latérales du rachis cervical sont conservées ; que l’examen des paires crâniennes est normal est symétrique ; que la marche s’effectue normalement sans aide technique ni humaine et sans boiterie.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il n’y a pas lieu de remettre en cause le taux fixé par l’expert.

Monsieur [I] [V] est âgé de 56 ans.

Dès lors, il sera alloué à Monsieur [I] [V] la somme suivante :
4%x 1.400 = 5.600 euros.

La Caisse fera l’avance de l’indemnisation, ainsi qu’il l’a été décidé par jugement définitif du 20 décembre 2021. Elle sera fondée à exercer son action récursoire à l’encontre de la société [5] représentée par Me [W], sous réserve de la déclaration de sa créance au passif de la liquidation judiciaire.

Il sera en outre alloué la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du CPC, étant précisé que la somme de 2.000 euros avait déjà été accordée dans le précédent jugement.
L’exécution provisoire sera ordonnée.
En outre, les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal judiciaire de Meaux, par décision contradictoire, rendue en premier ressort :

FIXE l’indemnisation de Monsieur [I] [V] en réparation de son déficit fonctionnel permanent à hauteur de 5.600 euros (CINQ MILLE SIX CENTS EUROS);

DIT que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de [Localité 7] versera directement à Monsieur [I] [V] ladite somme ;

RAPPELLE qu’elle pourra exercer son action récursoire à l’encontre de la société [5], en liquidation judiciaire, que sous réserve de la déclaration de sa créance au passif de la liquidation judiciaire ;

FIXE au passif de la société [5] la somme de 500 euros (CINQ CENTS EUROS) au profit de Monsieur [I] [V] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT QUE les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective ;

ORDONNE l’exécution provisoire de la décision ;

RAPPELLE aux parties que cette décision est susceptible d’appel dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe du tribunal le 17 juin 2024, et signé par la présidente et la greffière

LA GREFFIERELA PRESIDENTE
Emilie NO-NEYMurielle PITON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 20/00099
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;20.00099 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award