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30/05/2024 | FRANCE | N°23/04394

France | France, Tribunal judiciaire de Meaux, 1ère ch. - sect. 3, 30 mai 2024, 23/04394


- N° RG 23/04394 - N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDG7Y
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
1ERE CHAMBRE



Date de l'ordonnance de
clôture : 27 Novembre 2023

Minute n°24/517
N° RG 23/04394 - N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDG7Y





le

CCC : dossier

FE :
-Me DEGRAND

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


JUGEMENT DU TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE



PARTIES EN CAUSE

DEMANDEURS

Monsieur [B] [X] [M]
Madame [T] [S] épouse [M]
[Adresse 2]
représentés par Maître Sarah DEGRAND

de la SCP FGB, avocats au barreau de MELUN, avocats plaidant

DEFENDEUR

Monsieur [Z] [U]
[Adresse 3]
défaillant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré : Mm...

- N° RG 23/04394 - N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDG7Y
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
1ERE CHAMBRE

Date de l'ordonnance de
clôture : 27 Novembre 2023

Minute n°24/517
N° RG 23/04394 - N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDG7Y

le

CCC : dossier

FE :
-Me DEGRAND

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

PARTIES EN CAUSE

DEMANDEURS

Monsieur [B] [X] [M]
Madame [T] [S] épouse [M]
[Adresse 2]
représentés par Maître Sarah DEGRAND de la SCP FGB, avocats au barreau de MELUN, avocats plaidant

DEFENDEUR

Monsieur [Z] [U]
[Adresse 3]
défaillant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré : Mme ZEDDOUN, Vice-présidente statuant comme Juge Unique

DEBATS

A l'audience publique du 02 Avril 2024,
GREFFIERE

Lors des débats et du délibéré : Mme CAMARO, Greffière

JUGEMENT

réputé contradictoire, mis à disposition du public par le greffe le jour du délibéré, Mme ZEDDOUN, Présidente, ayant signé la minute avec Mme CAMARO, Greffière ;

****

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé établi par l’agence immobilière l’Adresse Val d’Europe, le 18 septembre 2022, M. [B] [M] et Mme [T] [M] ont conclu avec M. [Z] [U] un compromis de vente portant sur un appartement situé [Adresse 1] dépendant d’un ensemble immobilier soumis au régime de la copropriété, pour un prix de 320.000 euros, sous condition suspensive d'obtention d'un prêt.

Il est stipulé dans le compromis de vente que la réitération de la vente par acte authentique devra intervenir au plus tard le 20 décembre 2022, une clause pénale étant convenue en cas de non-réalisation de la vente à hauteur de 32.000 euros.

Estimant que l’acquéreur avait manqué à ses obligations contractuelles, M. [B] [M] et Mme [T] [M] ont, par acte d'huissier en date du 29 septembre 2023 fait assigner M. [Z] [U] devant le tribunal judiciaire de Meaux en indemnisation de leur préjudice.

Aux termes de leur acte introductif d’instance, M. [B] [M] et Mme [T] [M] demandent au tribunal, au visa des articles 1194, 1217, 1221, 1231-5 et 1304-3 du code civil de :
condamner M. [Z] [O] à leur payer la somme de 32.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2023, date de la mise en demeure,condamner M. [Z] [O] à leur payer la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts,condamner M. [Z] [O] à leur payer la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,condamner « la société Spirit Immobilier » aux entiers dépens.
M. [Z] [U] a été cité sur procès-verbal de recherches infructueuses à sa dernière adresse connue, l’huissier ayant accompli les diligences prévues par l’article 659 du code de procédure civile. Le présent jugement, susceptible d’appel, sera en conséquence réputé contradictoire.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 27 novembre 2023.

L’affaire a été plaidée à l’audience du juge unique du 05 décembre 2023, et mise en délibéré au 09 février 2024. La décision a conduit à la révocation de l'ordonnance de clôture et les époux [M] invités à produire le compromis de vente reçu par l’agence immobilière l’Adresse Val d’Europe comportant la date et les signatures des parties ou la preuve des signatures électroniques.

Le document demandé a été produit et les époux [M] réitèrent leur demande.

Au soutien de leurs demandes, ils font valoir que M. [Z] [U] a empêché la réalisation de la condition suspensive et qu’il y a lieu en conséquence de faire application de la clause pénale représentant 10% du prix de vente et de les indemniser en outre de leur préjudice.

Par application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à l’assignation pour un plus ample exposé des moyens.

L’ordonnance de clôture a été prononcée à l’audience de renvoi du 02 avril 2024.

L’affaire a été mise en délibéré au 30 mai 2024.

MOTIFS

Sur la non-réalisation de la condition suspensive :

Aux termes de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Selon l’article 1104 du même code, Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

Lorsqu'un compromis de vente est conclu sous la condition suspensive de la réalisation d'un événement, en application de l’article 1304-6 alinéa 3 du code civil, la défaillance de la condition suspensive entraîne la caducité de la vente.

Par ailleurs, en vertu de l'article 1304-3 alinéa 1 du code civil« La condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement ».

S'il appartient au créancier qui invoque l'application de ce texte de démontrer que le débiteur a commis une faute à l'origine de la défaillance de la condition suspensive, c'est au débiteur de l'obligation de prouver qu'il a accompli des diligences normales visant à l'accomplissement de ladite condition.

Il incombe donc au bénéficiaire du compromis de vente obligé sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt dans un délai déterminé de prouver qu'il a présenté à l'organisme de crédit, dans le délai contractuel, au moins une demande conforme aux caractéristiques prévues dans la promesse de vente.

En l’espèce, il ressort des éléments de la cause, qu'aux termes du compromis de vente du 18 septembre 2022, M. [Z] [U] s’est engagé à l'égard des vendeurs à effectuer toutes démarches nécessaires à l'obtention d'un prêt de 313.243 € d’une durée maximale de 25 ans, au taux d'intérêt maximum hors frais d’assurances de 3 % l'an (page 13 - paragraphe « Financement de l’acquisition»), le dépôt de ou des demandes de prêt répondant aux caractéristiques définies dans l’acte de vente devant intervenir dans les plus brefs délais auprès d’au moins deux établissements financiers et l’acquéreur devait en justifier aux vendeurs dans un délai maximum de 20 jours à compter du dépôt des demandes, et la réception de ou des offres de prêt devant intervenir au plus tard le 17 novembre 2022.

Il est précisé également à l’acte (p.15) que pour pouvoir bénéficier de la protection de la condition suspensive, l’acquéreur s’engage à “justifier des diligences accomplies par lui pour l’obtention du ou des prêts mentionnés ci-dessus par la productin de deux refus de prêts émanants du ou des organismes sollicités et en précisant pour chacun d’eux, la date du dépôt de la demande de prêt ainsi que le montant, la durée et le taux du prêt sollicité.
A défaut, le vendeur pourra mettre en demeure l’acquéreur de lui justifier sous huitaine la réalisation ou la défaillance de la condition. (…)Passé ce délai de huit jours et en l’absence de réponse de l’acquéreur, la condition suspensive sera censée défaillie et les présentes seront caduques de plein droit, sans autre formalité, le vendeur retrouvant son entière liberté ».

Il ressort des pièces produites aux débats que M. [Z] [U] a fourni quatre attestations de refus de crédits immobiliers sollicités entre le 6 octobre 2022 et le 7 novembre 2022, deux établis sur le papier à entête du Crédit Mutuel et deux sur le papier à entête de la banque Caixa Geral de Déopositos. Toutefois, aussi bien le Crédit Mutuel que la banque Caixa Geral de Déopositos ont certifié que les documents fournis n’émanaient pas de leur agence et qu’ils étaient des faux.

Monsieur [Z] [U] a également fourni un accord de principe de prêt immobilier émis par la BNP en date du 3 novembre 2022. Cependant, les époux [M] produisent un courrier de la Banque BNP en date du 21 décembre 2022 aux termes duquel cette banque affirme n’avoir jamais émis un accord de principe au profit de M. [Z] [U].

Enfin, par courrier simple du 17 janvier 2023 adressé à M. [Z] [U], l’assureur PACIFICA, mandaté par M [M] lui a rappelé ses défaillances dans l’exécution de ses obligations contractuelles et lui a réclamé le versement de la somme de 32 000 € en application de la clause pénale.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que M. [Z] [U] ne justifie pas avoir déposé un dossier de prêt en vue de l'obtention d'un prêt pour l'acquisition du bien conforme aux stipulations contractuelles dans la limite de validité de la condition suspensive de sorte que c'est bien l’acquéreur qui a empêché la réalisation de la condition suspensive et a commis une faute dans l'absence de réalisation de cette condition.

En conséquence, il doit être retenu que la non-obtention du prêt prévue au compromis résulte du comportement fautif de M. [Z] [U], de sorte que la condition suspensive d'obtention du prêt est réputée accomplie en vertu des dispositions précitées.

Sur la demande en paiement au titre de la clause pénale :

Aux termes du compromis de vente (pp.15-16 “Reitération par acte authentique” ), il est prévu au titre “Réitération par acte authentique” une clause pénale libellée comme suit :
« Sous la seule réserve de la réalisation des conditions suspensives qu’elles contiennent, les présentes lient les parties. Elles seront réitérées par acte authentique au plus tard le 20 décembre 2022 par Maître [H], notaire à [Localité 4], que les parties choississent à cet effet d’un commun accord. (...)
La date ci-dessus mentionnée n’est pas extinctive mais constitutive du point de départ à partir duquel l’une des parties pourra, si toutes les conditions suspensives sont réalisées, obliger l’autre à s’exécuter en lui adressant une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
A défaut de s’être exécutée dans un délai de dix jours suivant la date de première présentation de cette lettre, la partie non défaillante aura le choix entre :
- invoquer la résolution de plein droit des présentes sans qu’il soit besoin de la faire constater judiciairement. La partie défaillante lui versera, à titre d’indemnité forfaitaire et de clause pénale, la somme de seize mille quatre cents euros (32.000 €).
- ou poursuivre en justice la réalisation de la vente, la partie défaillante suportant tous les frais de poursuites ou de justice augmentés du montant de l’indemnité forfaitaire prévue à l’alinéa ci-dessus.
Dans les deux cas, l’agence aura droit à une indemnisatoin forfaitaire, à titre de clause pénale, d’un montant correspondant à ses honoraires prévus à l’article “Honoraires de l’Agence”.

L'application de la clause pénale suppose donc le refus de l'une des parties de régulariser l'acte définitif de vente, après que l'autre l'a mise en demeure d'avoir à régulariser l'acte définitif.

Cette mise en demeure apparaît explicitement comme une condition préalable à l'application de la clause pénale.

En l'espèce, il ne résulte d'aucune pièce que les époux [M] ont mis en demeure M. [Z] [U] de régulariser la vente définitive, les vendeurs ne pouvant utilement invoquer le courrier adressé à l’acquéreur le 17 janvier 2020, lequel ne comporte aucune demande de réitérer la vente par acte authentique.

Il s'ensuit que l'une des conditions d'application de la clause pénale n'est pas remplie de sorte que les époux [M] ne sont pas fondés à demander paiement de l'indemnité prévue par cette clause.

Toutefois, il ressort des développements qui précèdent que la non-réalisation de la condition suspensive est imputable à l’acquéreur qui n'a pas exécuté ses obligations visant à l'accomplissement de ladite condition. Sa responsabilité est donc engagée.

Dès lors, les époux [M] sont fondés à solliciter à titre de dommages et intérêts la somme de 3.000 euros.

M. [Z] [U] sera donc condamné à payer aux époux [M] la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires :

* Sur l’exécution provisoire :

En application de l’article 514 du Code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Aucun élément ne justifie de faire échec à l’exécution provisoire de droit prévue par cet article.

* Sur les dépens :

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, M. [Z] [U], partie perdante, sera condamné aux dépens de l’instance.

* Sur les frais irrépétibles :

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

En l’espèce, l’équité commande de condamner M. [Z] [U] qui succombe à l’instance, à payer aux les époux [M] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe :

Condamne M. [Z] [U] à payer à M. [B] [M] et Mme [T] [M] la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts.

Rejette le surplus des demandes.

Condamne M. [Z] [U] aux dépens de l’instance.

Condamne M. [Z] [U] à payer à M. [B] [M] et Mme [T] [M] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Rappelle que l’exécution provisoire est de droit.


LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Meaux
Formation : 1ère ch. - sect. 3
Numéro d'arrêt : 23/04394
Date de la décision : 30/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-30;23.04394 ?
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