COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
JUGE DE L’EXECUTION
DOSSIER : N° RG 24/00319 - N° Portalis DBW3-W-B7I-4LCO
MINUTE N° : 24/
Copie exécutoire délivrée le 25/07/24
à Me HABERT
Copie certifiée conforme délivrée le 25/07/24
à Me BOUTIN
Copie aux parties délivrée le 25/07/24
JUGEMENT DU 25 JUILLET 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL
PRESIDENT : Mme BENHARKAT, Juge
GREFFIER : Mme RAMONDETTI, Greffier
L’affaire a été examinée à l’audience publique du 06 Juin 2024 du tribunal judiciaire DE MARSEILLE, tenue par Mme BENHARKAT, Juge de l’exécution par délégation du Président du Tribunal Judiciaire de Marseille, assistée de Mme KELLER, Greffier.
L’affaire oppose :
DEMANDERESSE
La SAS ACTIVITE ADOM SUD (anciennement dénommée VIADOM ACTIVITES AQUITAINE) inscrite sous le N°431 516 426 au RCS de Marseille, dont le siège social est situé [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège,
représentée par Maître Magali BOUTIN de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocats au barreau de NICE substituée par Maître Anne-Joséphine LEANDRI, avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDERESSE
Madame [F] [M] épouse [R]
née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 2] / FRANCE
représentée par Maître Sarah HABERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Maître Cyril PRIEUR, avocat au barreau de MARSEILLE
Al’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré. Le président a avisé les parties que le jugement serait prononcé le 25 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction.
NATURE DE LA DECISION : premier ressort et contradictoire
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par jugement en date du 30 septembre 2014, le conseil de prud’hommes de DAX a débouté Madame [R] des demandes qu’elle a introduite contre son ancien employeur, la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE.
Par arrêt en date du 2 février 2017, la cour d’appel de PAU a confirmé en toutes ses dispositions la décision du conseil de prud’hommes de DAX en date du 30 septembre 2014 condamnant la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE à l’égard de Madame [F] [R].
Par un arrêt en date du 3 juillet 2019, la cour de cassation a cassé sur deux moyens de droit l’arrêt précité de la Cour d’Appel de PAU et, l’annulant dans toutes ses dispositions, remettait en conséquence la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoyaient devant la Cour d’Appel de BORDEAUX. La société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE était condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
Par un arrêt en date du 11 mai 2022, la chambre sociale de la cour d’appel de BORDEAUX :
« - CONDAMNAIT la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE à payer à Madame [F] [R] les sommes suivantes :
• 8.061,19 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période d’avril à décembre 2008 et 806,12 euros bruts pour les congés payés afférents ;
• 11.583,93 euros bruts à titre de rappel de salaire pour l’année 2009 et 1.158,39 euros bruts pour les congés payés afférents ;
• 12.221,02 euros bruts à titre de rappel de salaire pour l’année 2010 et 1.222,10 euros bruts pour les congés payés afférents ;
• 360,74 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période du 18 au 29 février 2012 et 36,07 euros bruts pour les congés payés afférents ;
• 1.243,65 euros bruts au titre de la prime d’ancienneté outre 124,36 euros bruts au titre des congés payés afférents ;
• 2.019,20 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 201,92 euros bruts pour les congés payés afférents ;
• 4.245,26 euros au titre de l’indemnité spéciale de licenciement ;
• 20.000,00 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
• 6.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
- ORDONNAIT à la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE de délivrer à Madame [F] [R] un bulletin de salaire rectifié, année par année, en considération des condamnations de nature salariale prononcées par la présente décision ainsi que les justificatifs de la régularisation auprès des caisses de retraite (régime général et complémentaire) du paiement des cotisations afférentes et ce, dans le délai de trois mois à compter de la signification de la décision ;
- DEBOUTAIT les parties du surplus de leurs prétentions ;
- CONDAMNAIT la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE aux dépens ».
Cette décision a été signifiée le 30 août 2022 et le 20 septembre 2022 à l’étude.
Par acte du 26 septembre 2022, un commandement de payer aux fins de saisie vente a été signifié suivant procès-verbal de recherches infructueuses.
Par acte du 4 novembre 2022, une saisie-attribution sur le compte bancaire de la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE a été effectuée entre les mains de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne. Elle a été fructueuse à hauteur de 5 379,98 euros.
Elle a été dénoncée le 10 novembre 2022.
Par acte du 17 janvier 2023, une saisie-attribution sur le compte bancaire de la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE a été effectuée entre les mains de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne . Elle a été fructueuse à hauteur de 2 943,65 euros.
Elle a été dénoncée le 23 janvier 2023.
Par acte du 23 novembre 2023, une saisie attribution a été effectuée entre les mains de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne sur le compte bancaire de la société ACTIVITES ADOM SUD pour un montant de 70 299.86 euros. Elle a été fructueuse à hauteur de 2 533,02 euros.
Elle a été dénoncée le 28 novembre 2023.
Par acte en date du 22 décembre 2023, la société ACTIVITE ADOM SUD formait alors un recours devant le juge de l’exécution de MARSEILLE aux fins de :
«- Juger que la saisie attribution réalisée le 28 novembre 2023 sur les comptes bancaires de la société ACTIVITE ADOM SUD est nulle ;
- Prononcer la mainlevée de la saisie attribution sur les comptes bancaires de ACTIVITE ADOM SUD,
A titre subsidiaire,
- Juger que la saisie attribution est fondée sur des calculs erronés,
En conséquence,
- Prononcer la mainlevée de la saisie attribution sur les comptes bancaires de la société ACTIVITE ADOM SUD,
En tout état de cause :
- Condamner Madame [R] au versement à la société ACTIVITE ADOM SUD de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamner Madame [R] aux entiers dépens. »
En défense par conclusions communiquées par RPVA le 12 mars 2024, Madame [F] [R] sollicite le rejet des demandes adverses et que la demanderesse soit condamnée à titre reconventionnel au paiement d’une astreinte d’un montant de 500 euros par jour de retard suivant le prononcé de sa décision, de délivrer à Madame [R], un bulletin de salaire rectifié, année par année, en considération des condamnations de nature salariale prononcées par l’arrêt de la cour d’appel et les justificatifs de la régularisation auprès des caisses de retraite (régime général et complémentaire) du paiement des cotisations afférentes. Elle demande la condamnation de la demanderesse au paiement de la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts et de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
A l’audience du 6 juin 2024, les parties ont sollicité le bénéfice de leurs écritures.
L’affaire a été mise en délibéré au 25 juillet 2024.
MOTIFS
Sur la qualification de la décision :
En l’espèce, toutes les parties ont comparu. La présente décision sera donc contradictoire, conformément aux dispositions de l’article 467 du code de procédure civile.
Par ailleurs la présente décision est rendue en premier ressort.
Sur la recevabilité de la contestation :
En vertu de l'article R 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, à peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour, ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier qui a procédé à la saisie. L'auteur de la contestation en informe en informe le tiers saisi par lettre simple et en remet une copie, à peine de caducité de l'assignation, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience.
En l’espèce, la société ACTIVITE ADOM SUD a saisi la présente juridiction de sa contestation dans le mois à compter de la dénonciation de la saisie-attribution litigieuse.
Les dispositions du texte précité ont donc été respectées de sorte que la contestation est jugée recevable.
Sur la validité de la saisie :
Selon l’article L211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.
Aux termes des dispositions de l'article 503 du code de procédure civile les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, a moins que l'exécution n'en soit volontaire. En cas d'exécution au seul vu de la minute, la présentation de celle-ci vaut notification.
En l’espèce, les saisies-attribution querellées ont été pratiquées sur le fondement d’un arrêt du 11 mai 2022, la chambre sociale de la cour d’appel de BORDEAUX condamnant la société la société VIADOM ACTIVITES AQUITAINE devenue la société ACTIVITE ADOM SUD.
Cette décision a été signifiée selon procès-verbaux de recherches infructueuses des 30 août 2022 et le 20 septembre 2022 et que le conseil de la demanderesse était informé de la décision.
Dans ces conditions, l’arrêt précité a été signifiée et les saisies pratiquées sont valables.
Par conséquent, la société ACTIVITE ADOM SUD sera déboutée de sa demande de nullité.
Sur le quantum de la saisie attribution :
Selon l’article L211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.
La société ACTIVITE ADOM SUD considère que les saisies attributions sont fondées sur des calculs erronés, en ce que les intérêts légaux ont été calculés sur des montants bruts sans déduction des charges sociales, pour les sommes ayant caractère de salaire.
Or, il convient de constater que la société ACTIVITE ADOM SUD a été condamnée par la chambre sociale de la cour d’appel de BORDEAUX à communiquer à la salariée les documents de fin de contrat de travail dont les bulletins de salaire rectifiés par année, le dernier devant porter mention des sommes à verser suivant la condamnation précitée.
Il ressort qu’à ce jour, la production de ces bulletins de salaire n’a pas été effectuée de sorte que la défenderesse n’a pas été en mesure de calculer les montants nets de salaire qui lui étaient dû donc le calcul des intérêts légaux sur ces montants et donc le montant exact à saisir, sachant que ce précompte doit être effectué par l'employeur.
Dans ces conditions, il ne peut être reproché à Madame [F] [R] d'avoir effectué la saisie-attribution pour des sommes brutes.
En tout état de cause, l'erreur sur le montant de la créance dans le décompte de l'huissier n'affecte pas la validité de la saisie-attribution et affecte seulement sa portée.
En l’espèce, les saisies attributions pratiquées retiennent des sommes bien en deçà de la condamnation prononcée.
Par conséquent, la société ACTIVITE ADOM SUD sera déboutée de sa demande de mainlevée à ce titre ;
Sur l’astreinte :
Selon l’article L131-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.
En l’espèce, il ressort que la société ACTIVITE ADOM SUD n’a pas exécuté la condamnation mise à sa charge de communiquer à Madame [F] [R]:
- un bulletin de salaire rectifié, année par année, en considération des condamnations de nature salariale prononcées par arrêt du 11 mai 2022 ;
- les justificatifs de la régularisation auprès des caisses de retraite (régime général et
complémentaire) du paiement des cotisations afférentes.
Dans ces conditions, il convient de l’astreindre à communiquer ces documents suivant astreinte de 150 euros par jour de retard dans le délai d’un mois après la signification du présent jugement.
Sur les dommages et intérêts :
En vertu de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Cela suppose donc un fait générateur imputable à la personne dont la responsabilité délictuelle est recherchée, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le dommage.
En l’espèce, la société ACTIVITE ADOM SUD qui a été condamnée par arrêt du 11 mai 2022, signifié les 30 août 2022 et le 20 septembre 2022 mais qui a également été informé de cette décision au travers de cette procédure ne s’est toujours pas exécuté dans le paiement des condamnations dues à Madame [F] [R] qui comprend des rappels de salaire, ni dans la communication des bulletins de salaire et justificatifs de la régularisation auprès des caisses de retraite.
En agissant elle commet une faute entrainant un préjudice pour la défenderesse qui n’a pas perçu le montant des arriérés de salaire dû et ne peut régulariser ses droits auprès de caisses de retraite concernées.
Dans ces conditions, la société ACTIVITE ADOM SUD sera condamnée à régler à Madame [F] [R] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :
La société ACTIVITE ADOM SUD succombant, supportera les dépens de la procédure, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
La société ACTIVITE ADOM SUD sera condamnée à régler à Madame [F] [R] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur l’exécution provisoire :
En vertu de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution, la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision.
PAR CES MOTIFS,
Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition du public au greffe,
Déclare la contestation de la société ACTIVITE ADOM SUD recevable ;
Déboute la société ACTIVITE ADOM SUD de l’intégralité de ses demandes ;
Valide la saisie-attribution pratiquée à la requête de Madame [F] [R] née [M] entre les mains de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne sur les comptes bancaires de la société ACTIVITE ADOM SUD selon procès-verbal du 23 novembre 2023 ;
Dit que le tiers saisi paiera le créancier, conformément aux dispositions de l’article R211-13 du code des procédures civiles d’exécution, après notification aux parties de la présente décision, sur présentation de celle-ci.
Condamne la société ACTIVITE ADOM SUD à communiquer à Madame [F] [R] née [M], sous astreinte de 150 euros par jour de retard dans le délai d’un mois à compter de la signification du présent jugement :
- un bulletin de salaire rectifié, année par année, en considération des condamnations de nature salariale prononcées par l’arrêt du 11 mai 2022 de la cour d’appel de BORDEAUX sous le n°R.G. 21/00528,
- les justificatifs de la régularisation auprès des caisses de retraite (régime général et complémentaire) du paiement des cotisations afférentes conformément à l’arrêt du 11 mai 2022 de la cour d’appel de BORDEAUX sous le n°R.G. 21/00528;
Condamne la société ACTIVITE ADOM SUD à payer à Madame [F] [R] née [M] la somme de 2 000 euros au titre de dommages et intérêts ;
Condamne la société ACTIVITE ADOM SUD à payer à Madame [F] [R] née [M] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société ACTIVITE ADOM SUD aux dépens de la procédure,
Rejette le surplus des demandes ;
Rappelle que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;
Et le juge de l’exécution a signé avec le greffier ayant reçu la minute.
Le greffier Le juge de l’exécution