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11/06/2024 | FRANCE | N°21/00979

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 3ème chbre cab a4, 11 juin 2024, 21/00979


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 11 JUIN 2024



Enrôlement : N° RG 21/00979 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YLPY

AFFAIRE : S.C.I. YERVANT, S.A.R.L. BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et M. [P] [U] (Me TRAPÉ)
C/ S.A. ENEDIS (Me RUBIN)





DÉBATS : A l'audience Publique du 27 février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a étÃ

© fixée au 28 mai 2024 puis prorogée au 11 juin 2024



PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 11 juin 2024

Par Madame Nathalie YO...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 11 JUIN 2024

Enrôlement : N° RG 21/00979 - N° Portalis DBW3-W-B7F-YLPY

AFFAIRE : S.C.I. YERVANT, S.A.R.L. BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et M. [P] [U] (Me TRAPÉ)
C/ S.A. ENEDIS (Me RUBIN)

DÉBATS : A l'audience Publique du 27 février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 28 mai 2024 puis prorogée au 11 juin 2024

PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 11 juin 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Assistée de Madame Pauline ESPAZE, Greffière

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEURS

S.C.I. YERVANT
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 533 673 786
dont le siège social est sis [Adresse 2]
prise en la personne de son gérant en exercice

S.A.R.L. BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT (B.C.G.)
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 533 710 885
dont le siège social est sis [Adresse 2]
prise en la personne de son gérant en exercice

Monsieur [P] [U]
né le 8 juin 1980
de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]

tous représentés par Maître Laure TRAPÉ, avocate au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DÉFENDERESSE

S.A. ENEDIS
immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 444 608 442
dont le siège social est [Adresse 3]
prise en la personne de son représentant légal

représentée par Maître Martine RUBIN, avocate au barreau de MARSEILLE

EXPOSE DU LITIGE

La SCI YERVANT est propriétaire d’un immeuble sis [Adresse 2].

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT exploite au rez-de-chaussée de cet immeuble un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie.

Monsieur [P] [U] est gérant de ces deux sociétés.

Le 3 mars 2015, la SCI YERVANT a obtenu l’autorisation de surélever l’immeuble en R+3 pour la création de cinq logements au dessus de la boulangerie-pâtisserie.

Le 16 décembre 2015, la SCI YERVANT a sollicité auprès de la société ERDF, devenue la SA ENEDIS, le raccordement de l’immeuble au réseau d’électricité.

Le 25 janvier 2016, la société ERDF a adressé à la SCI YERVANT un devis d’un montant de 11.703,44 euros. Ce dernier a été accepté par la SCI YERVANT.

Les travaux étaient prévus sur une durée de 18 semaines.

Les travaux ont débuté le 26 juin 2017. Toutefois, Monsieur [P] [U] a demandé un arrêt de ces derniers compte tenu de ses inquiétudes au sujet de l’atteinte à la solidité de l’immeuble.

La SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] ont saisi le juge des référés, qui par ordonnance du 30 juillet 2018 a désigné Monsieur [L] en qualité d’expert.

Le rapport a été déposé le 18 septembre 2019.

*

Suivant exploit du 22 janvier 2021, la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] ont fait assigner devant le présent tribunal la SA ENEDIS.

Les travaux de raccordement ont été réalisés en juin 2023 et le raccordement et la mise sous tension des compteurs est intervenue le 10 juillet 2023. Le procès-verbal de réception a été signé le 1er septembre 2023.

Par conclusions notifiées par RPVA le 9 novembre 2023, la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] demandent au tribunal, sur le fondement des articles 1231-1, 1240 et 1242 et suivants du Code Civil, de :
- juger que la SA ENEDIS a reconnu expressément sa responsabilité et le préjudice subi devant huissier de justice le 6 février 2023,
- juger la SA ENEDIS responsable des préjudices subis par la SCI VERY ANT, la société BCG et Monsieur [U],
- condamner la SA ENEDIS à payer à la SCI YERVANT la somme de 110.324,52 €, somme à compléter ou à parfaire,
- condamner la SA ENEDIS à payer à la SARL BCG la somme de 103.158 €, somme à compléter ou à parfaire,
- ordonner la suppression du câble électrique en façade de l'immeuble propriété de la SCI YERVANT,
- condamner la SA ENEDIS à payer à Monsieur [U] la somme de 70.000 €, à compléter ou à parfaire, à titre de préjudice moral,
- condamner la SA ENEDIS à payer à Monsieur [U] la somme de 35.000 € à compléter ou à parfaire, à titre de préjudice de perte de chance,
- débouter la SA ENEDIS de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit de la décision à intervenir,
- condamner la SA ENEDIS à payer à la SCI YERVANT, à la société BCG et à Monsieur
[U] la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

Par conclusions notifiées par RPVA le 13 novembre 2023, la SA ENEDIS demande au tribunal, sur le fondement des articles 1240 et suivants du code civil, de :
- donner acte à la SA ENEDIS que les travaux sont achevés et que la SCI YERVANT ne forme plus de demande sous astreinte à ce titre,
- juger qu’il n’existe plus de câble en façade,
- débouter la SCI YERVANT de cette demande à ce titre,
- juger que les requérants ne rapportent pas la preuve d’une faute de la SA ENEDIS dans la réalisation des travaux à l’origine de la procédure,
- juger que l’absence de réalisation du raccordement à compter du dépôt du rapport d’expertise judiciaire est imputable au comportement des requérants et à leur obstruction,
- juger que la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] sont défaillants dans la charge de la preuve qui leur incombe de rapporter la preuve d’un lien de causalité entre chaque dommage invoqué et une faute de la SA ENEDIS au titre du raccordement,
- à titre principal, débouter la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] de leurs demandes respectives,
- à titre subsidiaire, ramener les indemnisations sollicitées à de plus justes proportions,
- les débouter de leurs demandes au titre de l’article 7000 et du code de procédure civile,
- écarter l’exécution provisoire,
- condamner les demandeurs au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 14 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera rappelé aux parties que les dispositions de l’article 4 du code de procédure civile obligent les parties à énoncer leurs prétentions dans le dispositif de leurs conclusions. Le tribunal ne statue que sur celles-ci.
Par prétention, il faut entendre une demande en justice tendant à ce qu'il soit tranché un point litigieux.
Par voie de conséquence, les « dire et juger », « relever » et les « constater » ne constituent pas des prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l'examen des griefs formulés et à la discussion des prétentions et moyens, pas dans le dispositif.

Ainsi, le tribunal ne répondra de ce fait à de tels « dire et juger » et « constater » qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée et énoncée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans le dispositif de son jugement, mais dans ses motifs.

Sur la responsabilité de la SA ENEDIS

L’article 1231-1 du Code civil énonce que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

L’article 1240 du Code civil énonce que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l’espèce, la lecture du rapport d’expertise montre qu’un litige est survenu entre les parties en cours de réalisation des travaux au sujet des modalités techniques de ces dernières. La SCI YERVANT a fait valoir des inquiétudes sur une éventuelle atteinte à la structure de l’immeuble. Par ailleurs, des interrogations sont survenues du fait de la présence d’une descente d’eaux de pluie à proximité immédiate du lieu d’implantation du coffret, outre la problématique d’empiètement du coffret sur la voie publique.

L’expert judiciaire a constaté que :
- au bas de la niche réalisée par le demandeur, un élément structurel en béton armé de type poutre a commencé à être attaqué sur 15 cm de profondeur, mettant à nu les armatures ; l’expert déclare que les traces de disqueuse montrent qu’il était prévu par la société en charge des travaux de découper le bloc de maçonnerie et de béton jusqu’au sol ; cette atteinte a exposé la poutre à la corrosion et à une fragilisation ; toutefois au jour de l’expertise, aucun dommage sur l’immeuble n’était mis en évidence,
- les désordres esthétiques demeurent : câble électrique accroché en façade, câbles d’alimentation devant la niche.

L’expert valide le choix qui a été fait par la SCI YERVANT de faire interrompre les travaux afin d’éviter une plus ample découpe de l’élément de chaînage en béton armé. Il préconise un autre mode d’implantation des coffrets de raccordement.

L’expert indique que la niche destinée à abriter les coffrets ne correspond pas aux exigences de la SA ENEDIS et des normes applicables car pour ce type de raccordement souterrain, la niche aurait dû être descendue jusqu’au niveau de la voirie, ce qui était toutefois impossible à cause de l’élément structurel en béton armé.

Un débat a eu lieu en cours d’expertise sur les autorisations administratives à obtenir pour procéder aux travaux. L’expert remarque que les dispositions de l’article R323-25 du code de l’énergie dispensent de demande de dépôt d’une demande d’autorisation d’urbanisme pour les travaux de branchement en basse tension.

La SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] estiment que la SA ENEDIS engage sa responsabilité à leur égard pour les importants retards dans l’exécution du contrat et les désordres qui ont surgi en raison des modalités de réalisation des travaux par la SA ENEDIS, l’exploitation de la boulangerie étant impactée par une fourniture d’électricité instable et soumise à différentes coupures.

Il résulte des pièces que par courrier du 25 janvier 2016, la SA ENEDIS a transmis à la SCI YERVANT un devis pour les travaux, avec un très bref descriptif technique de ces derniers.

La SA ENEDIS produit la proposition de raccordement électrique détaillée datée du même jour. Cette dernière stipule que la SCI YERVANT devra procéder aux travaux en aval des points de livraison et aux travaux d’encastrement des coffrets CCPC dans la façade, la confection de la niche d’encastrement selon les dispositions prescrites par la norme NF C 14-100. Il est expressément indiqué que les études relatives à ces aménagements sont soumises à l’accord préalable d’ERDF avant tout commencement des travaux.

Par courrier du 22 février 2016, la SA ENEDIS a accusé réception de l’accord de la SCI YERVANT pour ces travaux , avec un planning prévisionnel des travaux, étape par étape.
Ce planning montre une première phase d’étude de réalisation réalisée par la SA ENEDIS, comprenant notamment une prise en charge technique, des études d’exécution et des demandes d’autorisations administratives.

Il est constant que la SA ENEDIS a demandé à la SCI YERVANT de réaliser la niche destinée à recevoir les branchements et coffret. Toutefois, cette zone d’implantation de la niche a été déterminée par la SA ENEDIS compte tenu de l’installation existante.

La SCI YERVANT a procédé à la création de cette niche mais ne l’a pas réalisée jusqu’au sol. C’est la société en charge des travaux qui a commencé à creuser une niche rejoignant le pied de façade, conformément aux besoins pour les travaux. Toutefois, la découverte d’un chaînage de béton armé a conduit la SCI YERVANT à exiger l’interruption des travaux.

L’expert a confirmé qu’il était légitime d’interrompre les travaux et que la présence du chaînage imposait de trouver une autre solution technique d’installation du coffret.

La SA ENEDIS fait valoir le fait qu’il appartenait à la SCI YERVANT de procéder aux études techniques préalables, ce qu’elle n’a pas fait.

Or, les documents contractuels montrent que la SA ENEDIS devrait réaliser ces études d’exécution et qu’il lui appartenait en conséquence de vérifier si l’implantation choisie était conforme aux caractéristiques de l’immeuble. La SA ENEDIS, professionnel, ne peut opposer à la SCI YERVANT, profane, l’absence de réalisation d’études techniques avant création de la niche.

La SA ENEDIS ne peut prétendre que le retard dans la réalisation des travaux résulte de l’absence de réalisation de la niche dans les règles de l’art par la SCI YERVANT car il convient de constater qu’un délai de plus d’un an s’est écoulé entre le 22 février 2016 et le 27 juin 2017, date de démarrage effectif des travaux, sans que la SA ENEDIS n’apporte aucune information relative aux raisons de ce retard.
La SCI YERVANT produit des échanges de mails ou SMS avec le conseiller d’ERDF de l’époque, Monsieur [O]. Ces derniers montrent que la SA ENEDIS a fait dans cet intervalle des bricolages sur le compteur jaune de la boulangerie, afin de permettre de brancher les appartements terminés de la SCI YERVANT et prêts à être loués.
La SCI YERVANT a obtenu les attestations de conformité du consuel le 28 novembre 2016. A partir de cette date, il semble que les travaux de la SA ENEDIS pouvaient être engagés.

S’agissant de l’implantation de la niche, la SA ENEDIS ayant fixé une localisation inadaptée pour la niche, elle ne peut en imputer la responsabilité à la SCI YERVANT.

La question de l’implantation du coffret ne sera résolue qu’après d’intenses débats entre les parties, en avril 2022, par création d’une saillie sur le domaine public.

La question de cette saillie avait été débattue au cours de l’expertise judiciaire et il avait été convenu que la SA ENEDIS devait obtenir une autorisation administrative pour procéder ainsi.

Or la SA ENEDIS n’a jamais justifié à l’expert des démarches en vue de l’obtention de cette autorisation d’empiètement sur le domaine public.

La responsabilité de la SCI YERVANT ne pourra pas être retenue au titre de la mauvaise réalisation de la niche.

La responsabilité de la SA ENEDIS pour le retard au démarrage des travaux, une mauvaise étude du lieu d’implantation de la niche et un défaut de devoir de conseil relatif aux études à mener par la SCI YERVANT sur le bâtiment sera retenue.

S’agissant du retard dans l’exécution des travaux, il est constaté que la SA ENEDIS a fait sporadiquement quelques travaux courant 2016.
Au changement de référent pour la société ERDF devenue ENEDIS, la SCI YERVANT a dû transmettre de nouvelles informations et interroger la SA ENEDIS sur la date de réalisation des travaux.

Le 26 juin 2017, les travaux d’agrandissement de la niche ont été légitiment interrompus par la SCI YERVANT.

Le 10 juillet 2017 une expertise amiable a été réalisée par le cabinet TEXA Expertises à la demande de l’assureur de la SCI YERVANT. Il a conclu à la nécessité de remettre en état le mur objet des travaux relatifs à la niche.

Le 5 janvier 2018, la SA ENEDIS a informé Monsieur [P] [U] que le câble en façade allait être fixé.

Le 29 mars 2018, la SA ENEDIS a demandé à Monsieur [P] [U] où en était la procédure judiciaire et si elle pouvait engager les commandes de travaux.

Le 31 mars 2018, Monsieur [P] [U] a répondu ne pas avoir d’informations.

Le 26 avril 2018, la SA ENEDIS est entrée en contact avec Monsieur [P] [U] pour évoquer une reprise de travaux. Ce dernier lui a donné un accord de principe, avec cependant volonté d’échanger sur place au préalable des modalités de réalisation des travaux et d’indemnisation par la SA ENEDIS des préjudices subis.

Par courrier du 22 mai 2018, la SA ENEDIS a indiqué au conseil de la SCI YERVANT qu’elle restait en attente du retour d’un document d’accord commun signé par tous les participants de la réunion du 22 novembre 2017.

Le 5 juillet 2018, la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] ont fait assigner la SA ENEDIS devant le juge des référés.

L’expert a déposé son rapport le 18 septembre 2019, préconisant les travaux décrits ci-dessus.

Par courrier officiel du 29 juillet 2020, la SA ENEDIS a indiqué à la SCI YERVANT être prête à réaliser les travaux et a sollicité son autorisation d’intervention.

Par courrier officiel du 28 septembre 2020, la SA ENEDIS a réitéré un courrier au même contenu.

La SA ENEDIS a envoyé un courrier officiel identique le 8 janvier 2021.

Par courrier du 19 mars 2021, le conseil de la SCI YERVANT a indiqué qu’il n’était pas possible de se positionner en l’absence de justification par la SA ENEDIS des démarches administratives entreprises.

Par courrier officiel du 8 avril 2021, la SA ENEDIS a répondu qu’elle ne pouvait pas procéder à des démarches sans l’accord de la SCI YERVANT pour les travaux et qu’en l’état la situation était bloquée.

Le conseil de Monsieur [P] [U] a répondu le 20 avril 2021 rester dans l’attente des justificatifs des autorisations.

La SA ENEDIS produit l’autorisation obtenue le 2 juillet 2021 pour des travaux de création de tranchée et d’électricité.

Par courrier officiel du 29 octobre 2021, le conseil de la SCI YERVANT a indiqué à la SA ENEDIS que la veille un chargé d’affaires de ladite société s’était présenté afin de reprendre le dossier.

Par courriel du 25 novembre 2021, la SA ENEDIS a dit souhaiter faire les travaux la semaine 49 et l’accès au réseau le lundi 17 janvier 2022.

Par courriel du 17 décembre 2021, la SA ENEDIS a informé la SCI YERVANT qu’elle devait procéder au percement du mur afin de pouvoir poser les fourreaux et dérouler le câble.

Le conseil de la SCI YERVANT a écrit à la SA ENEDIS un courriel le 31 décembre 2021, faisant valoir qu’aucun accord sur les travaux en janvier n’avait été donné en l’absence de production des autorisations requises. Compte tenu de l’existence d’un litige judiciaire en cours, le conseil déclare que tout doit passer par des discussions officielles.

La SA ENEDIS justifie avoir sollicité et obtenu des autorisations de travaux auprès de la métropole les 2 octobre et 19 novembre 2021 ainsi que les 4 et 21 février 2022 pour des travaux de voirie pour procéder au branchement en tranchée.

Elle a transmis ces documents par son conseil au conseil de la SCI YERVANT le 4 mars 2022.

Par courrier officiel du 8 mars 2022, le conseil de la SCI YERVANT a réclamé à la SA ENEDIS la communication de l’autorisation de la DPEPVC de la Métropole, ainsi que les plans de situation géographique, le montage photo DC 25/042098 et la coupe type du marche trottoir.

Par courrier officiel du 9 mars 2022, le conseil de la SA ENEDIS a indiqué que la problématique des autorisations ne concernait pas les relations entre la SCI YERVANT et la SA ENEDIS mais uniquement celles de la SA ENEDIS avait la métropole.

Par courrier officiel du 15 mars 2022, le conseil de la SA ENEDIS a transmis au conseil de la SCI YERVANT une autorisation de travaux à signer.

En réponse, le conseil de la SCI YERVANT a fait état d’une erreur ou d’un oubli dans le document à signer.

Par courriel du 28 mars 2022, la SA ENEDIS a écrit à la SCI YERVANT qu’elle allait entreprendre les travaux tels que préconisés par l’expert judiciaire, ce qui impliquait la création de deux percements dans son mur d’un diamètre de 70 mm.

Par courrier officiel du 29 mars 2022, le conseil de la SA ENEDIS a redit que cette problématique d’autorisation ne concernait pas les rapports entre elle et la SCI YERVANT. Elle a indiqué que les travaux de terrassement étaient prévus du 19 au 22 avril 2022.

Par courriel du 30 mars 2022, Monsieur [P] [U] a demandé à la SA ENEDIS de lui préciser la localisation précise des percements à effectuer.

Le 30 mars 2022, la SA ENEDIS a fait parvenir à la SCI YERVANT une convention de servitude. Il semble que cet envoi soit le résultat d’une erreur de la SA ENEDIS.

Par courriel du 18 avril 2022, Monsieur [P] [U] a répondu à un mail non produit de la SA ENEDIS. Cette réponse montre que la SA ENEDIS semble être intervenue quelques jours auparavant mais que cette intervention a causé des désagréments au voisinage qui s’est manifesté.
A cette date, il apparaît que le lieu de création des percements n’avait pas été défini par la SA ENEDIS, qui réclamait à la SCI YERVANT un plan de masse de l’immeuble, pièce déjà produite au stade de la conclusion du contrat. La SA ENEDIS réclamait également communication des attestations de conformité du consuel, ces dernières étant pourtant annexées au rapport d’expertise judiciaire. La SA ENEDIS ne pouvait ignorer leur existence.

Un courriel de Monsieur [P] [U] du 22 avril 2022 adressé à la SA ENEDIS montre qu’une réunion sur place en présence d’huissier s’est tenue quelques jours auparavant afin de décider de l’implantation du coffret. Monsieur [P] [U] déclare que le coffret n’a pas été installé à cette place mais ailleurs. Il demande à la SA ENEDIS de repositionner le coffret à la place décidée afin de lui permettre de procéder aux percements.

La SCI YERVANT produit un procès-verbal de constat du 19 avril 2022 rédigé au cours de ladite réunion sur place. Au cours de cette dernière les techniciens de la SA ENEDIS ont indiqué que la solution de l’expert n’était pas adaptée. Une discussion a également été nourrie au sujet des câbles en façade. Toutefois, le commissaire de justice mandaté par la SCI YERVANT n’a pas reproduit l’intégralité des déclarations de chacun, se bornant à inscrire les déclarations de son mandant. La teneur complète des propos de la SA ENEDIS n’est donc pas connue.

Par courrier officiel du 17 mai 2022, le conseil de la SA ENEDIS a indiqué au conseil de la SCI YERVANT que la première partie des travaux, en l’occurrence la mise en place du coffret, avait été réalisée et qu’il convenait à la SCI YERVANT de procéder aux percements requis et de fournir un plan de masse.

Le 10 octobre 2022, le conseil de la SCI YERVANT a déclaré au conseil de la SA ENEDIS que le planning prévu pour les travaux n’avait pas été préalablement communiqué et n’avait au demeurant pas été respecté, des travaux ayant eu lieu dès le 7 octobre 2022. Par ailleurs, il mettait en demeure la SA ENEDIS de respecter les accords sur le lieu d’implantation du coffret intervenus le 19 avril 2022.

Les 12 et 13 octobre 2022, la SCI YERVANT a fait établir un procès-verbal de constat, montrant des travaux en cours au droit du coffret le second jour.

Les conseils des parties ont échangé des correspondances au sujet du débat sur l’implantation du coffret et la justification par la SA ENEDIS des autorisations de la métropole.

Par courrier officiel du 7 novembre 2022, la SA ENEDIS a donné à la SCI YERVANT un mode opératoire des travaux et a sollicité des dates de disponibilité.

Par courrier officiel du 12 décembre 2022, la SCI YERVANT a réclamé le déplacement du coffret sur le lieu décidé par l’expert judiciaire et une synchronisation des travaux par la SA ENEDIS compte tenu des contraintes de maintien d’alimentation électrique pour la boulangerie.

Un accord est survenu entre les parties pour une réunion sur place le 6 février 2023.

La SCI YERVANT a fait consigner le contenu de cette réunion par un commissaire de justice. En début de rencontre, Monsieur [D], chef de pôle ingénierie ENEDIS, déclare que la solution préconisée à l’époque par le chargé de projet est une aberration et que les contraintes techniques ne permettaient pas l’installation du coffret à l’emplacement initialement déterminé. Il est indiqué que Monsieur [P] [U] a rappelé que la façade a été percée à la demande du chef de projet et que les parties reconnaissent le préjudice subi par Monsieur [P] [U] depuis toutes ces années. Il est consigné que Monsieur [D] tend la main au représentant de la SCI YERVANT et s’excuse au nom d’ENEDIS pour toutes les erreurs commises et le préjudice subi par Monsieur [P] [U] depuis toutes ces années.
La réunion permet alors de mettre en évidence le fait qu’un seul boîtier sera désormais utilisé, puisque le second est celui récemment posé en sailli, au niveau de la cuvette d’évacuation des eaux pluviales. Il est alors décidé que des fourreaux seront posés depuis le boîtier existant, l’un pour la boulangerie et l’autre pour la partie habitation. Les parties conviennent également que les branchements seront intégrés dans une goulotte partant du sol pour rejoindre le futur boîtier. Une fois ces travaux réalisés, les câbles présents en façade seront déposés.
La réunion permet la fixation de la date des travaux un jour où la boulangerie est fermée. Il est également convenu que les travaux de percement et de maçonnerie seront réalisés par une entreprise mandatée par la SA ENEDIS en présence de Monsieur [P] [U].

Les travaux ont été réalisés en juin-juillet 2023, l’ouvrage a été mis sous tension le 3 juillet 2023 et la convention pour la réalisation et la remise d’ouvrages électriques de distribution publique en vue d’un raccordement collectif (CRRO) a été signée par la SCI YERVANT le 1er septembre 2023.

La lecture de l’enchaînement de ces correspondances et réunions permet de constater que la gestion de l’exécution du contrat par la SA ENEDIS a été très laborieuse. Les raisons techniques des retards au début ne sont pas explicitées. Par ailleurs, la SA ENEDIS est restée totalement inactive à la réception du rapport d’expertise judiciaire le 18 septembre 2019 jusqu’au courrier du 29 juillet 2020, sans aucune justification.
Cependant, il convient de constater que la SCI YERVANT pour sa part n’a pas répondu à ce courrier, ainsi qu’aux suivants jusqu’à sa réponse du 19 mars 2021. Entre temps, la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] ont fait assigner au fond la SA ENEDIS dans le cadre de la présente procédure en sollicitant initialement la condamnation de cette dernière à la réalisation des travaux.

Il n’est pas explicité par la SCI YERVANT les raisons de cette action plutôt que la réponse aux courriers de la SA ENEDIS.

L’existence de la présente procédure judiciaire a induit le fait que tous les rapports entre les parties ont eu lieu par voie de courriers officiels, ne facilitant pas une gestion simple de la réalisation des travaux.

A partir de ce moment, la SCI YERVANT a par ailleurs exigé la justification de la production d’autorisations administratives, alors que ce point ne concernait que les relations entre la SA ENEDIS et la métropole.

Le conflit entre les parties s’est enlisé jusqu’à la réalisation des travaux courant 2023.

La lecture des échanges montre que le retard dans l’exécution du contrat n’est pas uniquement imputable à la SA ENEDIS. En effet, si cette dernière a failli techniquement dans la gestion du dossier et les choix de raccordement et d’implantation du coffret, les objections de la SCI YERVANT n’apparaissent pas toutes fondées juridiquement ou techniquement.

Il convient de dire que la responsabilité de la SA ENEDIS pour le retard d’exécution du contrat sera retenue à hauteur de 60 %. La SCI YERVANT, Monsieur [P] [U], également représentant de la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT, devront conserver 40 % dans la responsabilité du retard.

Sur les demandes indemnitaires de la SCI YERVANT

La SCI YERVANT fait valoir divers préjudices.

- Sur les pertes de loyer

La SCI YERVANT fait valoir qu’elle n’a pas pu mettre en location les appartements 2, 3, 4 et 5 pendant 8 mois. Toutefois, elle ne précise pas au sujet de quels mois elle entend obtenir indemnisation.

Elle produit les contrats de location conclus :
- le 1er août 2022 pour l’appartement n°2,
- le 20 mars 2022 pour l’appartement n°3,
- le 29 décembre 2022 pour l’appartement n°4,
- le 1er août 2022 pour l’appartement n°5.

Il résulte des échanges entre les parties et notamment des SMS et courriels avec Monsieur [O] que la SA ENEDIS a fait dans cet intervalle des bricolages sur le compteur jaune de la boulangerie, afin de permettre de brancher les appartements terminés de la SCI YERVANT et prêts à être loués.
La SCI YERVANT a obtenu les attestations de conformité du consuel le 28 novembre 2016. La lecture des pièces et conclusions des parties montre que l’obtention de ces attestations n’était pas dépendante de l’avancée des travaux par la SA ENEDIS et était un préalable à l’exécution des travaux de raccordement commandés. Par conséquent, la SCI YERVANT ne peut imputer à la SA ENEDIS aucun retard avant cette date.

Par ailleurs, il résulte des échanges et pièces que les logements étaient occupés tout au long du litige entre les parties, seul l’appartement n°1 ayant été conservé à titre de pièce technique.

En effet, Monsieur [P] [U] a écrit dans son courrier du 2 août 2019 adressé au tribunal administratif de Marseille relatif à une contestation sur la taxe foncière que ces quatre appartements ont été loués à partir de 2017.
La décision du tribunal administratif du 23 avril 2021 a relevé dans sa décision du 23 avril 2021 que les appartements ont été occupés respectivement à compter du 1er décembre 2016, 15 janvier 2017 et 21 mars 2017.

La SCI YERVANT n’explicitant pas précisément la période de perte de loyers dont elle entend obtenir réparation, et compte tenu du fait que les appartements n’étaient manifestement pas proposables à la location avant le 28 novembre 2016 au regard de ses contraintes personnelles tenant au chantier d’élévation, la SCI YERVANT sera déboutée de sa demande au titre des 4 appartements.

S’agissant de l’appartement n°1, il est constant que ce dernier a dû être affecté comme pièce technique le temps du règlement du litige relatif au branchement. Toutefois, la SCI YERVANT n’a transmis à l’expert aucune pièce de nature à permettre l’évaluation de la valeur locative de cet appartement. La SCI YERVANT n’apporte aucune pièce de nature à pallier cette carence dans le cadre de la présente procédure. La seule pièce qu’elle produit pour justifier de la valeur locative de 700 euros qu’elle réclame est une liste de ses préjudices établie par ses propres moyens. Nul ne pouvant s’établir de preuve à soi-même, cette dernière ne peut servir de fondement au calcul du préjudice de jouissance.

Les travaux ayant été réalisés en juillet 2023, la SCI YERVANT était en mesure de verser aux débats une quittance de loyer pour ce bien, proposable à la location depuis cette date. En n’y procédant pas, elle est défaillante dans son administration de la preuve. Elle ne permet pas au tribunal d’évaluer le montant de son préjudice locatif pour cet appartement et il n’y a pas lieu d’ordonner d’expertise aux fins d’évaluation de ce préjudice car cette dernière aurait pour vocation de pallier la carence de la SCI YERVANT.

Elle sera déboutée de cette demande.

- Sur les frais supplémentaires

La SCI YERVANT déclare que le retard de la SA ENEDIS a induit pour elle des frais supplémentaires, devant payer des prestations non prévues pour son chantier principal.

Elle réclame la somme de 2.976 euros avec pour seule description de ces frais un renvoi à ses pièces, sans caractérisation explicite dans le développement de ses écritures.

La pièce 19 est le rapport d’expertise amiable du cabinet TEXA qui évoque la nécessité de reboucher le trou de la niche. Ce rapport n’induit aucune facturation.

La pièce 26 est une facture de la société Maçonnerie du Sud du 30 mai 2016 pour l’installation du chantier, la fermeture de l’emplacement de l’ancien du coffre. Or, aucun élément de la procédure ne permet d’imputer à la responsabilité de la SA ENEDIS ces frais, qui ont été engagés un an avant les travaux litigieux et il n’y a aucune démonstration que ces derniers ont été supportés inutilement. Cette facture ne sera pas indemnisée.

La pièce 27 est une facture de la société Maçonnerie du Sud du 9 décembre 2016 pour la création d’un local technique temporaire pour sécuriser les coffrets ENEDIS, d’un montant de 1.140 € TTC.
Il a été dit que la responsabilité de la non conformité de la niche relevait d’un défaut de conseil de la SA ENEDIS et d’un défaut de prise en compte des contraintes de l’immeuble.
La SA ENEDIS sera condamnée à rembourser ces frais à la SCI YERVANT.

La pièce 39 est une note d’honoraires de Monsieur [G] du 28 juillet 2017 pour une expertise relative aux travaux ERDF. Il a été démontré que les travaux d’agrandissement de la niche réalisés par la SA ENEDIS l’ont été de manière fautive. Les frais de cette étude amiable qui a servi à conforter la SCI YERVANT dans sa volonté de faire interrompre ces travaux atteignant la structure de l’immeuble seront mis à la charge de la SA ENEDIS.

La SA ENEDIS sera condamnée à payer à la SCI YERVANT la somme de 960 euros TTC au titre de cette facture. La responsabilité de la SA ENEDIS est totale sur cette part du litige, il n’y a pas lieu à application du taux de partage de responsabilité.

Au total, la SA ENEDIS sera condamnée à payer à la SCI YERVANT la somme de 1.140 + 960 euros = 2.100 euros au titre des frais supplémentaires.

- Sur les frais de finalisation de la colonne EDF

La SCI YERVANT produit le devis de la société L’entreprise générale du bâtiment du 23 mars 2023 pour la reprise du local technique et le crépi de façade pour un montant de 4.920 €.

Toutefois, cette unique pièce ne permet pas d’affirmer que ces frais, dont il n’est pas justifié qu’ils ont été engagés, sont imputables aux fautes retenues à l’égard de la SA ENEDIS.

La SCI YERVANT sera déboutée de cette demande.

- Sur les frais de finalisation des groupes frigo et des travaux intérieurs

La SCI YERVANT verse aux débats un devis du 23 octobre 2019 pour la création d’une niche maçonnée pour l’installation de 6 groupes frigorifiques, une étagère métallique anti-vibration, une porte battante métallique et un forfait frigoriste. Toutefois, cette unique pièce ne permet pas d’affirmer que ces frais, dont il n’est pas justifié qu’ils ont été engagés, sont imputables aux fautes retenues à l’égard de la SA ENEDIS, ils paraissent davantage en lien avec les travaux de sur-élévation entrepris par la SCI YERVANT.

Cette demande sera rejetée.

- Sur les frais supplémentaires d’installation de l’enseigne supérieure de la boulangerie

La SCI YERVANT produit une facture du 2 février 2018 de la société Maçonnerie du Sud pour l’installation d’une enseigne.

Elle fait valoir que cette pose a pris du retard du fait de l’absence de retrait des fils électriques en façade.

Toutefois, ces frais de pose sont inhérents à cette installation et n’ont pas de lien direct avec le retard dans la suppression des câbles. La SCI YERVANT ne justifie pas que ce retard a induit un surcoût dans les frais de pose. Elle ne produit aucune pièce relative à son chantier principal et il ne peut être vérifié que cette prestation était prévue à la charge de l’entreprise en charge de ces travaux et pouvait bénéficier de l’installation d’échafaudages déjà en place.

Elle sera déboutée de cette demande, étant remarqué qu’il semble qu’il s’agisse au demeurant davantage d’une demande que seule la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT était susceptible de présenter.

- Sur la demande au titre du rapport d’expertise conseil

Il s’agit d’un doublon, cette demande ayant déjà été traitée.

- Sur les frais d’obtention du certificat RT2012

La SCI YERVANT fait valoir qu’elle a dû payer la somme de 906 euros pour obtenir l’obtention du certificat RT2012 car elle n’a pas pu le faire lors de la déclaration d’achèvement des travaux. Elle indique que le service de l’urbanisme exige une mise à jour plus complexe à obtenir compte tenu de la nouvelle réglementation par rapport à celle applicable lors du permis de construire.

Pour justifier de ce préjudice, elle produit la facture du 21 janvier 2017 de la société 2CTHERM pour recherche de fuite suivant la norme NF EN ISO 9972, rédaction des rapports d’infiltrométrie final par logement et rédaction de l’attestation RT2012 à titre gracieux.

Cette facture montre que la certification RT 2012 était offerte à la SCI YERVANT en janvier 2017. Toutefois, la SCI YERVANT ne justifie pas des frais dont elle fait état dans ses écritures à ce sujet compte tenu des retards et de la modification de réglementation.

Elle ne pourra qu’être déboutée de sa demande de remboursement de la facture du 21 janvier 2017 qui était affectée à des prestations sans lien avec le litige.

- Sur la taxe d’impôt foncier non exonérée

La SCI YERVANT déclare qu’elle n’a pas pu déposer la déclaration d’achèvement des travaux et a été de fait privée d’exonération des deux premières années de taxe foncière pour construction nouvelle.

Le tribunal administratif de Marseille par décision du 23 avril 2021 a rejeté la demande d’exonération de la SCI YERVANT pour quatre appartements en retenant que ces derniers étaient achevés et faisaient l’objet d’un contrat de bail respectivement à compter du 1er décembre 2016, 15 janvier 2017 et 21 mars 2017.

En conséquence, ils devaient être regardés comme achevés malgré le litige avec la SA ENEDIS.

La décision de refus d’exonération du tribunal administratif n’a aucun lien avec le retard dans l’exécution des travaux par la SA ENEDIS car elle est motivée par un défaut de déclaration par la SCI YERVANT à l’administration fiscale dans les délais prescrits par l’article 321 E de l’annexe III au code général des impôts.

La SCI YERVANT ne pourra qu’être déboutée de cette demande.

- Sur les frais de réinstallation des câblages téléphoniques

La SCI YERVANT produit un devis de la société ORANGE en date du 21 février 2017 pour la dépose, la pose et le raccordement d’un point d’extrémité.

Toutefois, aucun élément de la procédure ne permet d’imputer à la responsabilité de la SA ENEDIS ces frais, dont le principe était acté avant le début des travaux litigieux.

La SCI YERVANT n’apporte aucun élément de nature à démontre qu’elle a subi un sur-coût pour ces frais du fait de litige avec la SA ENEDIS. Elle ne justifie d’ailleurs pas de la coupure de service dont elle se prévaut.

Elle ne pourra qu’être déboutée de cette demande.

- Sur les frais de réalisation de percements sur la niche

La SCI YERVANT produit un devis de la société BERANGER du 24 février 2023 pour la réalisation de deux percements en façade, pour un montant de 443,52 euros TTC.

Les frais de percement sont à la charge contractuelle de la SCI YERVANT. Elle ne démontre pas avoir engagé ces frais une première fois au droit de la niche qu’elle avait commencé à réaliser, et les échanges entre les parties montrent qu’elle n’y avait pas procédé compte tenu du litige avec la SA ENEDIS sur le positionnement du coffret.

En conséquence, ces frais sont les premiers engagés au titre des percements de la façade et ils doivent rester à la charge de la SCI YERVANT.

La SCI YERVANT sera déboutée de cette demande.

- Sur les frais de réparation de l’enseigne

La SCI YERVANT fait valoir que la SA ENEDIS a cassé l’enseigne supérieure lors du retrait du câble de haute tension. Elle produit le devis du 1er août 2023 de la société Entreprise Générale du Bâtiment au titre d’une enseigne néon sur mesure et de son installation.

Or, la SCI YERVANT ne produit aucune pièce de nature à démontrer d’un lien entre les travaux de la SA ENEDIS et les dommages prétendument subis par l’enseigne. Aucun courrier officiel n’a été échangé à ce sujet, aucune déclaration de sinistre. Aucun constat de ces dégradations n’a été établi, ni même une photographie effectuée.

La SCI YERVANT ne pourra qu’être déboutée de cette demande.

Au total, la SA ENEDIS sera condamnée à payer à la SCI YERVANT la somme de 2.100 euros au titre des dommages subis.

La SCI YERVANT sera déboutée du surplus de ses demandes.

Sur les demandes indemnitaires de la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT valoir qu’elle a dû fonctionner pendant 7 ans avec une alimentation électrique non conforme, inadaptée et provisoire et qu’elle a souffert de variations et pertes de tensions électriques qui ont entraîné le dysfonctionnement des groupes frigorifiques, des ventilateurs et des compresseurs des groupes frigorifiques, qui ont été d’abord réparés, puis remplacés ayant vieilli prématurément.
Elle déclare également que ces dysfonctionnements ont entraîné des défauts de conservation et d’interruption de la chaîne du froid et des aléas dans les phases de cuisson, une altération de la qualité des produits confectionnés et une mise au rebut totale lors des coupures prolongées.

- Sur les pertes de marchandise

A titre de justificatif de ce préjudice, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT produit comme unique pièce un courrier de Monsieur [H], expert comptable, du 17 décembre 2019. Dans ce dernier, le comptable déclare que la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT a été contrainte de jeter des marchandises et matières premières stockées dans la période d’avril à septembre 2016.

Or ce courrier n’a aucune valeur probatoire dans la mesure où le comptable indique que les pertes ont été estimées par Monsieur [P] [U] lui-même à 12.000 €.

Aucune pièce comptable n’est produite au soutien de cette démonstration.

Par ailleurs, il est fait référence à une période antérieure aux travaux litigieux. L’expert judiciaire n’a pas reçu transmission de ces justificatifs et aucune partie n’a évoqué cette problématique des dysfonctionnements électriques invoqués.

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT est totalement défaillante dans l’administration de la preuve des dysfonctionnements et des éventuelles conséquences sur l’exploitation de son fonds de commerce.

Elle sera nécessairement déboutée de cette demande au titre de la mise en rebut de la marchandise.

- Sur l’obsolescence accélérée du matériel et des équipements

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT produit au titre de ce préjudice :
- une facture de la société HAGANI MATERIEL du 1er octobre 2010 pour l’achat d’un groupe frigorifique,
- une facture de la société HAGANI MATERIEL du 11 janvier 2021 pour l’achat d’un moteur ventilateur,
- une facture de la société HAGANI MATERIEL du 18 décembre 2018 pour le remplacement du groupe frigorifique,
- une facture de la société AK FROID du 3 décembre 2021 pour la fourniture d’un ventilateur et de petites fournitures,
- une facture de la société AK FROID du 9 janvier 2017 pour le remplacement d’un compresseur surchauffé et l’entretien annuel des équipements,
- une facture de la société GGMGASTRO du 27 octobre 2021 pour un matériel non identifié, la facture étant rédigée en allemand et n’étant pas traduite, rendant cette pièce irrecevable.

Si la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT justifie de frais sur son matériel, elle n’apporte pas la moindre pièce de nature à démontrer des dysfonctionnements électriques dont elle se prévaut et d’un lien de causalité entre ces derniers et ces frais.
A titre surabondant, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT qui se prévaut de 7 ans de dysfonctionnements ne produit que des pièces allant de 2017 à 2021, montrant les carences importantes dans l’administration de la preuve.

Elle ne pourra qu’être déboutée de sa demande.

- Sur la perte de visibilité en l’absence d’enseigne

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT déclare péremptoirement que l’absence de pose de l’enseigne a occasionné une perte financière de 34.000 euros compte tenu du manque de visibilité.

Or d’une part, aucune pièce comptable ne vient étayer un tel propos, le courrier purement déclaratif de Monsieur [H], se borne à reproduire les déclarations de son client Monsieur [P] [U].
L’évolution favorable du chiffre d’affaire après pose de l’enseigne invoquée par la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT n’est pas établie par des pièces comptables. Par ailleurs, il ne peut être contesté que la réalisation de travaux de très grande ampleur sur le bâtiment aux fins d’élever ce dernier d’un ou plusieurs niveaux a nécessairement eu des incidences négatives en terme de chiffre d’affaires pour la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT.

Le lien de causalité entre l’absence d’enseigne pendant quelques mois sur une boutique ancienne et bien implantée et une supposée baisse du chiffre d’affaire non établie n’est pas démontré.

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT ne pourra qu’être déboutée de cette demande.

- Sur le préjudice de sur-coût électrique en 2022-2023

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT fait valoir le fait que la crise énergétique a entraîné pour les commerçants titulaires d’un coffret jaune qui dépasse 36 kW une augmentation de 500 % des factures d’électricité.
Elle déclare qu’elle n’a pas pu bénéficier du bouclier tarifaire offert aux titulaires du coffret bleu qui lui a été refusé car les travaux de la SA ENEDIS n’étaient pas achevés.

Comme justificatif de ce préjudice, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT verse uniquement une proposition commerciale de la société EDF du 24 novembre 2022. Elle ne verse pas de justificatif de refus de la société EDF de souscription de ce contrat. Elle ne produit pas davantage de pièces relatives à ses factures d’électricité.

Elle ne pourra qu’être déboutée de cette demande.

La SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT sera alors déboutée de l’intégralité de ses demandes.

Sur les demandes indemnitaires de Monsieur [P] [U]

Monsieur [P] [U] réclame l’allocation de :
- 70.000 euros au titre de son préjudice moral,
- 35.000 euros au titre de sa perte de chance.

Monsieur [P] [U] justifie avoir souffert de troubles anxieux sur toute la période couverte par le litige.

Il est le gérant de la SCI YERVANT et de la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT.

Il est incontestable que le délai qui s’est écoulé entre la signature du contrat et l’installation effective du branchement est totalement anormale et a engendré de très nombreuses démarches de sa part, ainsi que de multiples réunions sur place.

Cette situation a pu légitimement engendrer un état anxieux et un préjudice moral, qu’il convient d’évaluer à la somme de 3.000 euros après application du partage de responsabilité relativement au retard dans le déroulement des travaux.

Monsieur [P] [U] réclame en outre un préjudice pour perte de chance, indiquant ne pas avoir pu mener à bien le projet initialement envisagé et d’en percevoir les bénéfices.

Or, Monsieur [P] [U] ne démontre pas en quoi son projet n’a pas pu aboutir, alors que l’intégralité des travaux ont été réalisés et que les appartements construits sont loués.

Cette demande sera nécessairement rejetée.

Sur la demande de suppression du câble électrique en façade de l’immeuble

La SCI YERVANT réclame la condamnation de la SA ENEDIS à procéder au retrait du câble en façade de l’immeuble.

Or, la SA ENEDIS produit des photographies de l’immeuble montrant que les câbles provisoires qui étaient le long de la façade ont été retirés.
La SA ENEDIS ne montre pas la façade avant de l’immeuble mais il semble qu’un câble continue à traverser cette dernière au dessus de la devanture de la boulangerie. Toutefois, il n’est pas démontré que la SA ENEDIS s’était engagée à supprimer ce câble qui traverse cette façade provenant d’un autre immeuble et rejoignant un autre immeuble.

La SCI YERVANT n’explique d’ailleurs pas quel câble elle entend voir être supprimé de la façade.

Elle sera déboutée de cette demande.

Sur les demandes accessoires

L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge par décision motivée n'en mette la totalité ou une partie à la charge de l'autre partie.

Les parties succombant toutes partiellement en leurs demandes et prétentions, il convient de dire qu’elles partageront les dépens et frais d’expertise à hauteur des responsabilités retenues, soit 40 % à la charge de la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et 60 % à la charge de la SA ENEDIS.

Il doit être rappelé qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le sort de l’expertise judiciaire, qui est comprise par définition dans les dépens suivant dispositions de l’article 695 du Code de procédure civile.

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %.

En l'espèce, la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] succombant en une très grande majorité de leurs demandes, présentées sans pièces justificatives, seront déboutés de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

La SA ENEDIS sera également déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

En vertu de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Aucune circonstance ne justifie qu’il soit fait obstacle au bénéfice de l’exécution provisoire de la présente décision.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique par jugement mis à la disposition des parties au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Condamne la SA ENEDIS à payer à la SCI YERVANT la somme de 2.100 euros au titre des dommages subis,

Déboute la SCI YERVANT du surplus de ses demandes,

Déboute la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT de l’intégralité de ses demandes,

Condamne la SA ENEDIS à payer à Monsieur [P] [U] la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral,

Déboute Monsieur [P] [U] du surplus de ses demandes,

Déboute la SCI YERVANT de sa demande de suppression de câble en façade sous astreinte,

Dit que les dépens, qui comprennent les frais d’expertise judiciaire, seront supportés par la SCI YERVANT, la SARL BOULANGERIE DE CHATEAU GOMBERT et Monsieur [P] [U] à hauteur de 40 % et par la SA ENEDIS à hauteur de 60 %,

Rejette l’intégralité des demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu à écarter le bénéfice de l’exécution provisoire.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE DE LA TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE ONZE JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 3ème chbre cab a4
Numéro d'arrêt : 21/00979
Date de la décision : 11/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-11;21.00979 ?
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