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06/06/2024 | FRANCE | N°22/02654

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab1, 06 juin 2024, 22/02654


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N° 24/ DU 06 Juin 2024


Enrôlement : N° RG 22/02654 - N° Portalis DBW3-W-B7G-ZXW7

AFFAIRE : M. et Mme [B] (Me Virgile REYNAUD)
C/ HOPITAL PRIVE [8] (SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS) et autres


DÉBATS : A l'audience Publique du 28 Mars 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président (juge rapporteur)
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffi

er lors des débats : BESANÇON Bénédicte


Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N° 24/ DU 06 Juin 2024

Enrôlement : N° RG 22/02654 - N° Portalis DBW3-W-B7G-ZXW7

AFFAIRE : M. et Mme [B] (Me Virgile REYNAUD)
C/ HOPITAL PRIVE [8] (SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS) et autres

DÉBATS : A l'audience Publique du 28 Mars 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président (juge rapporteur)
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 06 Juin 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEURS

Monsieur [S] [B]
né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 12] (ALGERIE)
de nationalité Française, demeurant et domicilié [Adresse 6]

Madame [V] [B]
née le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 11]
de nationalité Française, demeurant et domiciliée [Adresse 7]

représentés par Maître Virgile REYNAUD, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDEURS

ONIAM
dont le siège social est [Adresse 16], pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représenté par Maître Patrick DE LA GRANGE de la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Maître Charlotte TREBAOL

L’HOPITAL PRIVE [8] venant aux droits de l’HOPITAL PRIVE [13]
SA immatriculée au RCS de MARSEILLE sous le n° 423 899 947, dont le siège social est sis [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Société AXA FRANCE
dont le siège social est sis [Adresse 4], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représentés par Maître Bruno ZANDOTTI de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

CPAM DES BOUCHES-DU-RHÔNE
dont le siège social est [Adresse 15], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

défaillante

Mutuelle APGIS
dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

défaillante

*******

EXPOSÉ DU LITIGE :

Faits et procédure :

Monsieur [B], né le [Date naissance 3] 1953, a bénéficié, le 20 février 2017, d’une intervention pour pose de prothèse totale du genou gauche.

Celle-ci a été réalisée par le docteur [K] à l’Hôpital Privé [13] dans un contexte de gonarthrose post-traumatique, à la suite d’une fracture de la rotule ostéosynthésée le 27 août 2016.

Le 15 mai 2017, le docteur [K] a procédé à une reprise de prothèse totale de genou gauche pour descellement cotyloïdien sur granulome péri prothétique d’évolution favorable.

Le 30 octobre 2017, le docteur [K] a réalisé un lavage articulaire de la prothèse de genou, des prélèvements per opératoires ont été effectués et se sont avérés positifs au Staphylococcus epidermidis. Cette infection a été traitée par Cefixime et Ciprofloxacine.

Le lendemain, monsieur [B] a été hospitalisé dans le service du professeur [F], à l’Hôpital de [10], pour lavage articulaire et traitement de fond par Vancomycine en raison de germes à Staphylococcus epidermidis et Staphylococcus aureus.

À partir du 9 novembre 2017, une fenêtre thérapeutique a été mise en place. Le 13 novembre 2017, le docteur [K] a effectué un lavage articulaire, une dépose de la prothèse et la mise en place d’un spacer.

Les prélèvements qui ont été réalisés en per opératoire sont revenus positifs au Staphylococcus aureus. Une antibiothérapie par Rifadine et Oflocet a été mise en place.

Monsieur [B] a de nouveau été hospitalisé au sein du service du professeur [F] du 16 au 30 novembre 2017 avant de rejoindre le centre de rééducation [9].

Le 26 février 2018, après RCP, le spacer a été changé et la jambe a été remise en extension.

Les prélèvements qui ont été réalisés en per opératoires sont revenus stériles. Le 26 mars 2018, il a été constaté que la cicatrice était propre et non inflammatoire.

La radiographie a montré un spacer en place. Après avis des infectiologues, monsieur [B] a subi une nouvelle intervention le 1er juin 2018 pour dépose du spacer et mise en place d’une nouvelle prothèse totale de genou scellé au ciment antibiotique, à savoir Vancomycine.

La suite de sa prise en charge a été réalisée au centre de rééducation [14] à compter du 6 juin 2018.

Le 26 février 2018 monsieur [B] a saisi la CCI d'une demande d'indemnisation. Celle-ci a désigné les docteurs [X] et [D] en qualité d'experts.

Les experts ont remis un premier rapport le 19 septembre 2018 aux termes desquels ils ont retenu une prise en charge conforme aux règles de l'art, et à l'existence d'une infection nosocomiale. Ils ont également indiqué que l'état de santé de monsieur [B] n'était pas consolidé.

La CCI a rendu un premier avis le 8 novembre 2018 aux termes duquel elle estimait que la réparation des préjudices de monsieur [B] incombait à l’hôpital privé [13]. Un règlement amiable est intervenu entre les parties au moyen d'un protocole d'accord prévoyant le paiement à monsieur [B] de la somme de 10.200 € à titre de provision.

Le 9 juin 2021 la CCI a de nouveau été saisie par monsieur [B] d'une demande d'indemnisation après consolidation. Les docteurs [X] et [D], de nouveau désignés, ont déposé un nouveau rapport le 21 octobre 2021, fixant le préjudice de monsieur [B] ainsi que suit :
consolidation le 8 février 2019souffrances endurées : 3,5/7assistance par une tierce personne, à hauteur de deux heurs par jour, du 9 décembre 2017 au 25 février 2018, du 1er mars 2018 au 30 mai 2018, et du 7 juillet 2018 au 8 février 2019déficit fonctionnel permanent : 30 %déficit fonctionnel temporaire total du 27 octobre au 8 décembre 2017, du 26 au 28 février 2018 et du 31 mai au 6 juillet 2018déficit fonctionnel temporaire partiel classe IV du 9 décembre 2017 au 25 février 2018, du 1er mars au 30 mai 2018, du 7 juillet 2018 au 8 février 2019 et du 24 novembre 2018 au 28 février 2019préjudice esthétique temporaire 4/7préjudice esthétique permanent 4/7assistance par une tierce personne après consolidation une heure par jour.
Par acte d'huissier des 22 février 2022, 9 et 10 mars 2022 et 30 janvier 2023 monsieur [S] [B] et madame [V] [B] ont fait assigner l'hôpital privé [8] SANTÉ, la société AXA FRANCE IARD, la CPAM des Bouches du Rhône, la mutuelle APGIS et l'ONIAM.

Selon exploit du 15 décembre 2022 la société HÔPITAL PRIVÉ [8] et la société AXA FRANCE IARD ont également fait assigner l'ONIAM.

L'ensemble de ces instances ont été jointes.

Demandes et moyens des parties :

Aux termes de leurs dernières conclusions du 23 mai 2023 monsieur [S] [B] et madame [V] [B] demandent au tribunal, à titre principal, de condamner solidairement l'Hôpital privé [13] et la compagnie AXA FRANCE IARD à payer à monsieur [S] [B] la somme totale de 142.728,03 € de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, subsidiairement de condamner l'ONIAM à lui payer la même somme, de rejeter en tout état de cause la demande de nouvelle expertise médicale demandée par l'ONIAM, et de condamner tout succombant à payer à monsieur [S] [B] la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de leurs demandes ils font valoir que monsieur [B] a été victime d'une infection nosocomiale dont l'indemnisation incombe à l'établissement de soins, et qu'il convient de retenir pour l'évaluation de son préjudice les conclusions des docteurs [X] et [D]. Ils ajoutent qu'une nouvelle expertise est inutile au regard du caractère complet de l'expertise réalisée, de l'absence de production d'un nouvel élément de nature à la remettre en cause, de l'âge de la victime et de l'ancienneté de l'infection.

La société HÔPITAL PRIVÉ [8], venant aux droits de l'Hôpital privé [13], et son assureur la société AXA FRANCE ASSURANCE ont conclu le 2 octobre 2023 au rejet des demandes formées à leur encontre, et à la condamnation de l'ONIAM, à défaut de monsieur [B] à rembourser à la société AXA la somme de 10.200 € versée dans le cadre du protocole transactionnel.
Elles exposent que le taux de déficit fonctionnel permanent résultant de l'infection nosocomiale étant égal à 30 %, son indemnisation doit être prise en charge par l'ONIAM en application de l'article L1142-1-1 du code de la santé publique. Elles ajoutent que le taux de 21 % suggéré par l'ONIAM ne doit pas être retenu en l'état des conclusions expertales et d'une note du docteur [I].

L'ONIAM a conclu le 4 septembre 2023 au rejet des demandes formées à son encontre et subsidiairement à l'instauration d'une nouvelle expertise. À titre encore plus subsidiaire il conclu à la réduction des sommes qui pourraient être allouées à monsieur [B].
L'ONIAM fait valoir que les conditions de son intervention ne sont pas réunies dès lors qu'il résulte du barème du concours médical que le déficit fonctionnel permanent de monsieur [B] s'établit en réalité à 26 %, dont 5 % imputable à l'intervention initiale et 21 % à la seule infection nosocomiale, taux inférieur à celui prévu par l'article L1142-1-1 du code de la santé publique.
Sur la demande de nouvelle expertise, l'ONIAM expose qu'il n'a pas été partie à l'expertise ordonnée par la CCI et n'a donc pu dans ce cadre faire valoir ses arguments et présenter ses observations, et n'a pas eu communication du dossier médical.
Sur l'évaluation du dommage, il rappelle que doivent être déduites de l'indemnisation pour l'aide par une tierce personne les indemnités telles que l'APA et la PCH et qu'en l'absence de justification d'absence de perception de ces allocations ce poste de préjudice ne peut être liquidé.

La CPAM des Bouches du Rhône et la mutuelle APGIS n'ont pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En application de l’article L 1142-1 II du code de la santé publique, lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient et, en cas de décès, de ses ayants droit, au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.
Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret.

L’article D1142-1 du même code précise que “Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %.
Présente également le caractère de gravité mentionné au II de l'article L. 1142-1 un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ayant entraîné, pendant une durée au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois, un arrêt temporaire des activités professionnelles ou des gênes temporaires constitutives d'un déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à un taux de 50 %.
A titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu :
1° Lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l'activité professionnelle qu'elle exerçait avant la survenue de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale ;
2° Ou lorsque l'accident médical, l'affection iatrogène ou l'infection nosocomiale occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d'ordre économique, dans ses conditions d'existence.”

Les rapports d'expertise ont été communiqués aux débats, de même que le dossier médical de monsieur [B], ces pièces ayant pu faire l'objet d'une libre discussion des parties.

Pourtant à l'appui de sa demande de nouvelle expertise, l'ONIAM ne produit aucune pièce d'ordre médical critiquant, ne serait-ce qu'au vu des éléments composant le dossier médical, les conclusions des experts. Or une nouvelle mesure d'expertise ne saurait être ordonnée au simple motif que les conclusions d'une première mesure d'instruction sont en défaveur de l'une des parties. L'ONIAM a par ailleurs été en mesure de discuter des conclusions du rapport dans ses écritures, notamment en ce qui concerne le taux de déficit fonctionnel permanent.

Il n'y a donc pas lieu d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise, le tribunal disposant des éléments nécessaires, soumis au contradictoire des parties et consistant dans le dossier médical et les deux rapports d'expertise, pour statuer sur l'indemnisation de monsieur [B].

Concernant le caractère nosocomial de l'infection contractée par monsieur [B] le 27 octobre 2017, celui-ci résulte du rapport d'expertise du 10 septembre 2018, les experts indiquant sans être contredits par la production d'un élément en sens contraire, et après un examen attentif des pièces composant le dossier médical que l'infection du site opératoire profond peut être qualifiée d'infection nosocomiale au sens strict du terme. Ils relèvent encore qu'elle n'a pas pour origine une cause extérieure et étrangère aux lieux où ont été dispensés les soins et qu'il ne s'agit pas de l'aggravation d'une infection en cours ou ayant existé.
Ils ajoutent que cette infection a eu pour la victime des conséquences anormales au regard de son état de santé initial comme de l'évolution prévisible de celui-ci, à savoir plusieurs reprises chirurgicales sous anesthésie générale, des antibiothérapies prolongées pendant plusieurs mois administrées par voie intraveineuse et orale.

Au cours de l'examen clinique par les experts, il a été relevé que monsieur [B] présentait un flessum de 42° au genou gauche.

L'ONIAM pour retenir un taux de déficit fonctionnel permanent de 21 % imputable à l'infection, se base sur le barème du concours médical qui évalue le flessum de 10 à 20° à 10 % de déficit fonctionnel, ce qui ne correspond pas à l'état de santé de monsieur [B]. C'est donc à juste titre que les experts ont retenu, en considération de la limitation réelle de l'extension du genou gauche de monsieur [B], un taux de déficit fonctionnel permanent de 30 % imputable à la seule infection nosocomiale.

L'ONIAM sera en conséquence condamné à indemniser le préjudice subi par monsieur [B] ainsi que suit, le taux prévu à l'article D1142-1 du code de la santé publique étant atteint et les autres conditions de son intervention réunies, notamment le caractère anormal du dommage :

I – Préjudices patrimoniaux temporaires :

Le besoin en tierce personne avant la consolidation a été évalué à deux heures par jour pendant 321 jours. Sur la base d'une indemnisation à hauteur de 18 € l'heure, il revient à monsieur [B], dont il n'est pas démontré qu'il perçoit à ce titre une quelconque prestation devant venir en déduction, une somme de 11.556 €.

II – Préjudices patrimoniaux permanents :

Postérieurement à la consolidation le 8 février 2019, le besoin en tierce personne est évalué à une heure par jour à titre viager.

Du 8 février 2019 au jour du présent jugement il s'est écoulé 1945 jours. Il revient donc à monsieur [B], sur la même base d'indemnisation, une somme de 35.010 € à ce titre.

Pour la période postérieure au jugement, à compter du 7 juin 2024 et compte tenu de l'âge de monsieur [B] à cette date (70 ans), il lui revient une somme de 365 x 16,949 = 6.186,39 € selon le barème de capitalisation d'une rente viagère publié dans la Gazette du Palais du 31 octobre 2022.

Conformément à la demande, il sera alloué à monsieur [B] une somme de 6.847,03 € à ce titre, le tribunal ne pouvant accorder plus que ce qui a été demandé.

III – Préjudices non patrimoniaux temporaires :

A – Déficit fonctionnel temporaire :

Il inclut pour la période antérieure à la consolidation, la perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le préjudice temporaire d’agrément, éventuellement le préjudice sexuel temporaire.

Monsieur [B] a subi une période de déficit fonctionnel total pendant 81 jours, et une période de déficit fonctionnel de classe 4 (soit 75 %) pendant 384 jours.

Sur la base d'une indemnisation de 30 € par jour de déficit fonctionnel total, ce poste de préjudice s'évalue à la somme de 11.070 €.

B – Souffrances endurées :

Il s’agit d’indemniser les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, à sa dignité et à son intimité et des traitements, interventions, hospitalisations qu’elle a subis depuis l’accident jusqu’à la consolidation.

Après la consolidation, les souffrances chroniques sont une composante du déficit fonctionnel permanent.

Elles ont été évaluées à 3,5/7 par les experts, justifiant une indemnisation à hauteur de 8.000 €.

C – Préjudice esthétique temporaire :

Il a été évalué à 4/7 et repose sur l'obligation de déambuler en fauteuil roulant. Conformément à la demande il sera alloué à monsieur [B] la somme de 4.500 € à ce titre.

IV – Préjudices non patrimoniaux permanents :

A – Déficit fonctionnel permanent :

Ce poste tend à indemniser la réduction définitive (après consolidation) du potentiel physique, psychosensoriel, ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique, à laquelle s’ajoute les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales).

Il s’agit, pour la période postérieure à la consolidation, de la perte de qualité de vie, des souffrances après consolidation et des troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales) du fait des séquelles tant physiques que mentales qu’elle conserve.

Ainsi qu'il a été vu plus haut, le taux de déficit fonctionnel permanent imputable à la seule infection nosocomiale est de 30 %.

Compte tenu de l'âge de monsieur [B] au jour de la consolidation (65 ans), ce poste de préjudice doit être évalué à 30 x 1.760 = 52.800 €.

B – Préjudice esthétique permanent :

Il est évalué à 4/7 par les experts, pour les mêmes raisons que le préjudice esthétique temporaire.

Compte tenu de son caractère définitif, il sera réparé à hauteur de 12.000 €.

Il revient donc à monsieur [B] la somme totale de 106.773,03 €. Ce dernier a reçu de la compagnie AXA une somme de 10.200 € dans le cadre d'un protocole d'accord transactionnel à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice. Or ni la compagnie AXA ni son assurée ne sont tenues d'indemniser monsieur [B] des conséquences de l'infection nosocomiale dont il a été victime. Ce versement étant dépourvu de cause, et afin d'éviter une double indemnisation du même dommage, monsieur [B] devra restituer à la compagnie XA la somme de 10.200 €.

L'ONIAM, qui succombe à l'instance, en supportera les dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de maître REYNAUD et de maître ZANDOTTI conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Il sera encore condamné à payer à monsieur [B] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :

Déboute l'ONIAM de sa demande de nouvelle expertise ;

Condamne l'ONIAM à payer à monsieur [S] [B] la somme de 106.773,03 € en réparation de son préjudice résultant de l'infection nosocomiale contractée le 27 octobre 2017 ;

Condamne monsieur [S] [B] à restituer à la société AXA FRANCE ASSURANCE la somme de 10.200 € ;

Condamne l'ONIAM à payer à monsieur [S] [B] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'ONIAM aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de maître REYNAUD et de maître ZANDOTTI conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

AINSI JUGÉ, PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab1
Numéro d'arrêt : 22/02654
Date de la décision : 06/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-06;22.02654 ?
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