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04/06/2024 | FRANCE | N°21/05248

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab1, 04 juin 2024, 21/05248


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N° 24/ DU 04 Juin 2024


Enrôlement : N° RG 21/05248 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y2ZV

AFFAIRE : Mme [T] [Z] [P] [Y] divorcée [I] et autres (Me Catherine PINNELLI-CHARRIER)
C/ Mme [K] [A] [X] [N] veuve [G] (Me Paul-Victor BONAN)


DÉBATS : A l'audience Publique du 02 Avril 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette, Greffier


Vu le rapport fait à l’audiencer>
A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 04...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N° 24/ DU 04 Juin 2024

Enrôlement : N° RG 21/05248 - N° Portalis DBW3-W-B7F-Y2ZV

AFFAIRE : Mme [T] [Z] [P] [Y] divorcée [I] et autres (Me Catherine PINNELLI-CHARRIER)
C/ Mme [K] [A] [X] [N] veuve [G] (Me Paul-Victor BONAN)

DÉBATS : A l'audience Publique du 02 Avril 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette, Greffier

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 04 Juin 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEURS

Madame [T] [Z] [P] [Y] divorcée [I]
née le [Date naissance 6] 1949 à [Localité 9]
de nationalité Française, demeurant et domiciliée [Adresse 5]

Monsieur [C] [E] [V] [I]
né le [Date naissance 2] 1988 à [Localité 9]
de nationalité Française, demeurant et domicilié [Adresse 5]

Monsieur [L] [J] [O] [I]
né le [Date naissance 2] 1988 à [Localité 9]
de nationalité Française, demeurant et domicilié [Adresse 5]

représentés par Maître Catherine PINNELLI-CHARRIER, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDERESSE

Madame [K] [A] [X] [N] veuve [G]
née le [Date naissance 4] 1946 à [Localité 9]
de nationalité Française, demeurant et domiciliée [Adresse 1]

représentée par Maître Paul-Victor BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE

EXPOSÉ DU LITIGE :

[H] [U] est décédé le [Date décès 3] 2016.

Aux termes d’un testament en date du 25 décembre 2008, il avait institué madame [K] [N] en tant que légataire universelle. Le 1er avril 2012, [H] [U] a pris de nouvelles dispositions testamentaires, révoquant le précédent testament et désignant en tant que légataire universel madame [T] [Y].

Le 26 mai 2021 madame [T] [Y], monsieur [C] [I] et monsieur [L] [I] ont fait assigner madame [N] afin que soit constatée la caducité du testament du 25 décembre 2008, et que madame [N] soit condamnée à leur restituer la somme de 67.042,04 € représentant la moitié de l’actif successoral qu’elle a reçue, outre 21.420 € représentant la moitié des revenus locatifs et que soit désigné un notaire pour faire les comptes entre les parties.

Par ordonnance du 5 avril 2022 le juge de la mise en état a ordonné une expertise du testament attribué à [H] [U] daté du 1er avril 2012.

L'expert a déposé son rapport le 29 décembre 2022. Elle a conclut au fait que ce testament a été écrit et signé par [H] [U].

Aux termes de leurs dernières conclusions du 27 juin 2023 madame [T] [Y], monsieur [C] [I] et monsieur [L] [I] demandent au tribunal de dire que madame [T] [Y] est habile à se dire légataire de [H] [U], de condamner madame [N] à lui restituer les actifs successoraux qu’elle a appréhendés à hauteur de la somme de 67.042,04 € représentant la moitié de l’actif net successoral, ainsi que la somme de 21.420 euros, sauf à parfaire, comptes arrêtés au 30 avril 2021, au titre de la moitié des revenus locatifs mensuels afférents au bien immobilier sis à [Localité 8], de désigner un notaire pour faire les comptes entre les parties et de condamner madame [N] à payer à madame [Y] les sommes de 5.000 € de dommages et intérêts et 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de leurs demandes ils font valoir que le rapport d'expertise judiciaire a mis en évidence le caractère authentique du testament après examen de l'original et au vu du rapport de madame [B], que le rapport technique de madame [B] n'a été établi qu'au vu de simples photocopies et avec réserves, qu'il n'est pas prouvé que ce testament aurait été écrit dans un état de confusion mentale de son auteur, rappelant que monsieur [U] exerçait encore son activité professionnelle en avril 2012.

Madame [N] a conclu le 12 janvier 2024 au rejet des demandes formées à son encontre, à l'annulation du testament du 1er avril 2012 et à l'application de celui du 25 décembre 2008, ainsi qu'à la condamnation de madame [T] [Y], monsieur [C] [I] et monsieur [L] [I] à lui payer les sommes de 2.000 € de dommages et intérêts pour résistance abusive et 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose qu'il résulte d'un rapport technique de madame [B] du 1er décembre 2022 que le testament contesté aurait été écrit dans un état de confusion mis en évidence par certaines anomalies et différences d'écriture et de signature. Elle ajoute que [H] [U] souffrait de problèmes de santé, qu'il était sous oxygène le 1er décembre 2016 et avait déjà engagé de nombreuses dépenses de santé depuis 2006.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'action en pétition d'hérédité :

Selon l'article 970 du code civil, le testament olographe doit être l'oeuvre personnelle du testateur, et doit être écrit en entier, daté et signé de sa main.

Par ailleurs l'article 901 du même code dispose que pour faire une libéralité, il faut être sain d'esprit.

Pour soutenir sa demande d'annulation du testament du 1er avril 2012, madame [N] se prévaut d'une consultation technique de madame [B] en date du 1er décembre 2022 selon laquelle elle a détecté des anomalies dans le document qui lui a été soumis. Selon elle ces anomalies permettent d'accréditer l'hypothèse selon laquelle [H] [U] aurait inscrit les trois dernières lignes du recto et les cinq lignes du verso du testament et signé celui-ci dans un état de confusion. Elle rappelle toutefois que les documents soumis à son étude ne figurent qu'en photocopie et formule des « réserves d'usage ».

Cette étude a été soumise sous forme de dire à l'expert, qui en réponse (pages 29 et suivantes du rapport), n'a observé sur l'original du testament aucune différence sur l'écriture des trois dernières lignes avec le premières lignes du testament, la seule existante tenant au dessin des carreaux sur la feuille.
L'expert ajoute que l'écriture du bas et du verso du testament n'est pas plus tourmentée que sur les autres lignes et correspond aux critères et gestes graphiques de [H] [U], que ce testament ne contient aucune répétition inutile et relève le fait que le testateur a mentionné dans la marge de gauche « un mot nul » et paraphé à côté montre sa clairvoyance et sa lucidité pour appuyer et authentifier ses écrits, que le fait que [H] [U] a détaillé les proportions de répartition de son capital est un indice supplémentaire de son équilibre intellectuel.
S'agissant de la signature l'expert relève après l'avoir comparée avec dix autres exemples de signatures de [H] [U] que celle figurant sur le testament correspond à leurs caractéristiques graphiques, à leurs dimensions et inclinaisons.

Il est donc suffisamment démontré au vu de ces éléments que le testament du 1er avril 2012 a été écrit en entier, daté et signé par [H] [U], et qu'il ne peut être tiré d'aucun des éléments intrinsèques de ce testament, que ce soit la cohérence de sa teneur ou celle de son écriture, ou preuve ou un indice de l'insanité d'esprit de son auteur. Il a été vu au contraire que ce testament contient des dispositions précises et chiffrées sur la répartition des biens du testateur et la rature avec son approbation en marge d'un mot annulé qui démontrent la cohérence de la pensée de son auteur.

Par ailleurs il ne saurait être tiré aucune conclusion que [H] [U] ait souffert de difficultés respiratoires en 2016 conduisant à son placement sous oxygène, soit quatre ans après la rédaction du testament, étant rappelée que l'insanité d'esprit alléguée doit exister au moment de la rédaction de cet acte pour être susceptible d'entraîner son annulation.

Il en est de même d'un relevé de prestation maladies daté de 2006, non contemporain du testament, et qui ne précise pas si les affections soignées ont pu avoir pour effet d'affaiblir ou d'abolir les facultés mentales de [H] [U].

Madame [N] sera donc déboutée de sa demande d'annulation du testament de 2012, lequel recevra application.

En conséquence madame [N] sera condamnée à restituer les biens reçus dans la succession de [H] [U], soit la somme de a somme de 67.042,04 € selon le décompte de la SCP de notaires [7]. En revanche aucune preuve n'est produite montrant qu'elle a appréhendé d'autres biens ou revenus de la succession et les autres demandes de restitution seront en conséquence rejetées.

La présente instance ne vise pas à ce que soit ordonnée l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession, et il n'y a pas lieu de désigner un notaire pour faire les comptes entre les parties.

Sur les demandes de dommages et intérêts :

La demande de dommages et intérêts formée par madame [Y] à l'encontre de madame [N] n'est pas motivée. Or toute demande à ce titre suppose la démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice.

En l'absence d'une telle démonstration il ne sera pas fait droit à cette demande.

La présente instance, loin de revêtir un quelconque caractère abusif, apparaît fondée au moins en son principe. Il s'ensuit que madame [N] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes :

Madame [N], qui succombe à l'instance, en supportera les dépens.

Elle sera encore condamnée à payer à madame [Y] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :

Déboute madame [K] [N] veuve [G] de sa demande tendant à l'annulation du testament de [H] [U] du 1er avril 2012 ;

Dit que la succession de [H] [U] sera réglée en application dudit testament ;

Condamne madame [K] [N] veuve [G] à restituer à madame [T] [Y] la somme de 67.042,04 € ;

Déboute madame [T] [Y] de ses autres demandes de restitution ;

Dit n'y avoir lieu à désignation d'un notaire ;

Déboute les parties de leurs demandes respectives de dommages et intérêts ;

Condamne madame [K] [N] veuve [G] à payer à madame [T] [Y] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne madame [K] [N] veuve [G] aux dépens.

AINSI JUGÉ, PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE QUATRE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab1
Numéro d'arrêt : 21/05248
Date de la décision : 04/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-04;21.05248 ?
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