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28/05/2024 | FRANCE | N°22/05413

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 3ème chbre cab a4, 28 mai 2024, 22/05413


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 28 MAI 2024



Enrôlement : N° RG 22/05413 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2BDR

AFFAIRE : S.C.I. CHRISOLO (Me LAZZARINI)
C/ S.D.C. [Adresse 7] (Me GISBERT)
S.A. LA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES (Me GASIOR)
S.A.R.L. SONIM (Me DUPIELET)
S.A.R.L. CABINET CHABERT et M. [L] [K] (Me BABIN)



DÉBATS : A l'audience Publique du 13 février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente>Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 14 mai 2024 puis prorogée au 28 mai ...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 28 MAI 2024

Enrôlement : N° RG 22/05413 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2BDR

AFFAIRE : S.C.I. CHRISOLO (Me LAZZARINI)
C/ S.D.C. [Adresse 7] (Me GISBERT)
S.A. LA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES (Me GASIOR)
S.A.R.L. SONIM (Me DUPIELET)
S.A.R.L. CABINET CHABERT et M. [L] [K] (Me BABIN)

DÉBATS : A l'audience Publique du 13 février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 14 mai 2024 puis prorogée au 28 mai 2024

PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 28 mai 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Assistée de Madame Pauline ESPAZE, Greffière

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

S.C.I. CHRISOLO
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 438 468 134
dont le siège social est sis [Adresse 7]
prise en la personne de son gérant en exercice

représentée par Maître Laurent LAZZARINI de la SELARL CONVERGENCES AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DÉFENDEURS

Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 7]
représenté par son Syndic en exercice AGENCE DE LA COMTESSE - GIA MAZET
dont le siège social est sis [Adresse 4]
prise en la personne de son représentant légal en exercice

représenté par Maître François GISBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A. LA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES
immatriculée au RCS de Rouen sous le numéro 493 147 011
dont le siège social est sis [Adresse 6]
prise en la personne de son président en exercice

représentée par Maître Nicole GASIOR, avocate au barreau de MARSEILLE

S.A.R.L. SONIM
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 392 358 420
dont le siège social est sis [Adresse 1]
prise en la personne de son gérant en exercice

représentée par Maître Fabien DUPIELET de la SELARL DUPIELET-REYMOND, avocats au barreau de MARSEILLE

S.A.R.L. CABINET CHABERT
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 063 800 049
dont le siège social est sis [Adresse 3]
prise en la personne de son représentant légal

Monsieur [L] [K]
né le 20 décembre 1959 à [Localité 8] (13)
de nationalité Française
demeurant [Adresse 5]

tous deux représentés par Maître Audrey BABIN de la SELARL AUDREY BABIN, avocats au barreau de MARSEILLE

*****

EXPOSE DU LITIGE

La SCI CHRISOLO est propriétaire d’un appartement situé au rez-de-chaussée d’un immeuble sis [Adresse 7], soumis au régime de la copropriété.

La SARL CABINET [K] a été désignée comme syndic de la copropriété par assemblée générale du 13 juin 2013.

Un acte de cession de fonds de commerce est survenu entre la SARL CABINET [K] et la SARL SONIM le 30 octobre 2019 sur le portefeuille gestion du cabinet [K] mais pas sur le portefeuille syndic de ce dernier.

Par ordonnance du 24 août 2020, Monsieur [Z] a été désigné en qualité d’administrateur provisoire de la copropriété. Par assemblée générale du 15 juillet 2021, la société Agence de la Comtesse a été désignée en qualité de syndic de la copropriété.

Des infiltrations d’eaux usées sont survenues dans bien de la SCI CHRISOLO courant 2012.

Monsieur [Y] a été désigné comme expert par ordonnance de référé du 23 mai 2014.

Par ordonnance de référé du 8 janvier 2016, le juge des référés a condamné le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] à effectuer les travaux urgents préconisés par Monsieur [Y] en cours d’expertise.

Les travaux ont été exécutés en janvier 2016.

Monsieur [Y] a déposé son rapport le 1er avril 2016.

Par jugement du 23 mai 2019, le présent tribunal a constaté la réalisation des travaux préconisés par Monsieur [Y] et a condamné :
- le syndicat des copropriétaires à payer à la SCI CHRISOLO la somme de 11.700 € au titre du préjudice locatif,
- la SARL CABINET [K] à payer à la SCI CHRISOLO la somme de 19.500 € pour le préjudice locatif postérieur au mois de juillet 2014 compte tenu de son inertie à faire procéder aux travaux.

En raison de la survenue de nouvelles infiltrations, une expertise amiable a été confiée au cabinet AGU ET ASSOCIES. Cette dernière a rendu un rapport le 20 septembre 2018.

La SCI CHRISOLO a saisi à nouveau le juge des référés, qui par ordonnance du 25 septembre 2020 a désigné Monsieur [Y] en qualité d’expert.
Le rapport a été déposé le 23 mars 2021.

*

Suivant exploits du 27 mai 2022, la SCI CHRISOLO a fait assigner devant le présent tribunal le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7], la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES, la SARL SONIM, la SARL CABINET [K] et Monsieur [L] [K].

Par conclusions notifiées par RPVA le 27 novembre 2023, la SCI CHRISOLO demande au tribunal, sur le fondement des articles 14 et 18 de la loi du 10 juillet 1965 et L237-12 du code de commerce, de :
- débouter les parties de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées contre la concluante,
- condamner la SARL CABINET [K] elle-même, et subsidiairement Monsieur [L] [K], solidairement avec le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 7] et l'assureur de ce dernier, la Compagnie INTER MUTUELLES ENTREPRISES, à verser à la SCI CHRISOLO la somme de 15.966,50 € au titre du coût des travaux préconisés par Monsieur l'Expert pour remédier aux conséquences matérielles des désordres;
- condamner la SARL CABINET [K] elle-même, et subsidiairement Monsieur [L] [K], solidairement avec le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 7] et l'assureur de ce dernier, la Compagnie INTER MUTUELLES ENTREPRISES, à verser à la SCI CHRISOLO la somme de 42.642 € au titre de l'indemnisation des pertes locatives subies par la requérante, comptes arrêtés à la date des présentes et sauf à parfaire ;
- dire que ces sommes porteront intérêts légaux à compter du 10 octobre 2019 ;
- ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil ;
- condamner, sous astreinte de 200 € par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement à intervenir, le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 7], à réaliser les travaux de réparation des canalisations communes préconisés par Monsieur l'Expert dans son rapport ;
- condamner sous astreinte de 200 € par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement à intervenir, la SARL CABINET [K] et Monsieur [L] [K] à communiquer l'identité et les références de l'assureur de responsabilité civile professionnelle de SARL CABINET [K] à l'époque à laquelle la responsabilité de cette dernière sera retenue;
- dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par conclusions notifiées par RPVA le 28 septembre 2023, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] demande au tribunal, sur le fondement des dispositions de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, de :
- donner acte au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] de ce qu’il accepte de réaliser les travaux de reprise d’évacuation des eaux usées tels que préconisés par Monsieur [Y], expert, et tels que votés lors de l’assemblée générale du 15 juillet 2022,
- au principal et sur les indemnisations financières sollicitées par la SCI CHRISOLO au titre des pertes locatives et reprises d'embellissements,
- dire et juger que le Cabinet [K] est seul responsable des conséquences financières résultant du sinistre survenu au mois de novembre 2017,
- rejeter toutes les demandes formulées à l'encontre du syndicat des copropriétaires [Adresse 2],
- condamner le Cabinet [K] à assumer l'intégralité des indemnisations financières allouées à la SCI CHRISOLO,
- subsidiairement,
- constater que la SCI CHRISOLO ne justifie nullement d'une quelconque perte locative de l'appartement dont elle est propriétaire [Adresse 2],
- constater que la SCI CHRISOLO ne justifie nullement du montant des travaux d'embellissement rendus nécessaires par suite du sinistre survenu au mois de novembre 2017,
- rejeter purement et simplement les demandes présentées par la SCI CHRISOLO,
- très subsidiairement,
- constater que la copropriété [Adresse 2] était régulièrement assurée auprès de la société INTER MUTUELLE ENTREPRISE lors du sinistre évoqué,
- rejeter purement et simplement la non garantie soulevée par la Société INTER MUTUELLES ENTREPRISES,
- condamner la Compagnie d'Assurances INTER MUTUELLE ENTREPRISE et le Cabinet [K] conjointement et solidairement à relever et garantir le syndicat des copropriétaires [Adresse 2] de toutes les condamnations pouvant être prononcées à son encontre en principal, intérêts, dommages intérêts, frais, article 700 du Code de Procédure Civile, et dépens,
- reconventionnellement,
- condamner le CABINET [K] au règlement de la somme de 5.000 € à titre de dommages intérêts outre celle de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de la Copropriété [Adresse 2],
- statuer ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions notifiées par RPVA le 24 avril 2023, la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES demande au tribunal de :
- à titre principal,
- dire que seule la responsabilité de la SARL CABINET [K] peut être engagée,
- la condamner à indemniser le préjudice de la SCI CHRISOLO,
- à titre subsidiaire,
- dire que la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES est fondée à opposer une exclusion de garantie en application des dispositions de l’article 31 des conditions générales du contrat,
- débouter la SCI CHRISOLO de toutes ses demandes,
- à titre infiniment subsidiaire,
- dire que la garantie n’est pas mobilisable en application des dispositions de l’article 22.4 des conditions générales du contrat souscrit par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] auprès de la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES,
- débouter la SCI CHRISOLO de sa demande au titre du préjudice locatif,
- en tout état de cause,
- écarter l’exécution provisoire de droit,
- condamner tout succombant aux dépens, comprenant les frais d’expertise,
- condamner la SCI CHRISOLO à payer à la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par RPVA le 14 novembre 2023, la SARL CABINET [K] et Monsieur [L] [K] demandent au tribunal de :
- débouter la SCI CHRISOLO et le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] de toutes leurs demandes à leur encontre,
- à titre subsidiaire,
- ramener à de plus justes proportions les demandes formulées par la SCI CHRISOLO au titre de l’indemnisation des conséquences matérielles,
- débouter la SCI CHRISOLO de sa demande d’indemnisation au titre des pertes locatives,
- condamner tout succombant à verser tant au cabinet [K] qu’à Monsieur [L] [K] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,
- écarter l’exécution provisoire.

Par conclusions notifiées par RPVA le 5 octobre 2022, la SARL SONIM demande au tribunal de :
- la mettre hors de cause,
- débouter la SCI CHRISOLO de toutes ses demandes à son encontre,
- condamner la SCI CHRISOLO à lui payer la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 9 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient de constater à titre préliminaire qu’aucune demande n’est formulée à l’encontre de la SARL SONIM.

Sur les désordres

En novembre 2017, l’appartement de la SCI CHRISOLO a été victime d’un nouveau dégât des eaux, alors que le syndicat des copropriétaires avait fait procéder en janvier 2016 à la reprise du coude préconisée par Monsieur [Y].

Après une expertise amiable de la société Cabinet AGU ET ASSOCIES du 21 septembre 2018, qui a conclu à une fuite du réseau enterré sous l’appartement de la SCI CHRISOLO, Monsieur [Y] a été à nouveau désigné comme expert.

Monsieur [Y] a constaté que l’appartement a été l’objet d’une infiltration d’eau par le sol. Plusieurs centimètres d’eau provenant des salles d’eau et des toilettes se sont rependus au sol. Le bien n’étant pas occupé, l’eau est restée plusieurs jours, générant d’importantes dégradations dans le bien. Le carrelage au sol s’est soulevé et s’est cassé en divers endroits. Les bâtis de porte se sont dégradés et l’odeur au sein de l’appartement est décrite par l’expert comme nauséabonde le 2 décembre 2020.
Des photographies agrémentent les commentaires de l’expert et permettent de constater les dégradations.

Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires

L’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa version applicable au présent litige issue de l’ordonnance du 30 octobre 2019, énonce que la collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile.
Le syndicat peut revêtir la forme d'un syndicat coopératif régi par les dispositions de la présente loi.
Il établit, s'il y a lieu, et modifie le règlement de copropriété.
Il a pour objet la conservation et l'amélioration de l'immeuble ainsi que l'administration des parties communes.
Le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

En l’espèce, l’expert déclare que les arrivées d’eau proviennent de la conduite d’évacuation objet du premier litige. Cette dernière est cassée au niveau du sol de l’appartement de la SCI CHRISOLO.

Il a été jugé que cette canalisation est commune.

La responsabilité du syndicat des copropriétaires est engagée, ce que ce dernier ne conteste pas, les travaux de remise en état de cette canalisation ayant été votés.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] sera condamné à faire réaliser les travaux préconisés par Monsieur [Y] dans son rapport du 23 mars 2021.

Les travaux ont été votés mais il n’est pas justifié qu’ils ont été réalisés à ce jour, malgré l’absence de raison légitime de ne pas y procéder. Il convient d’assortir cette condamnation d’une astreinte de 100 € par jour de retard à l’expiration d’un délai de 3 mois après signification de la présente décision.

Le syndicat des copropriétaires fait valoir cependant que seule la SARL CABINET [K] doit être condamnée à indemniser la SCI CHRISOLO de ses préjudices compte tenu de ses fautes dans la gestion de ce sinistre.

Toutefois, la faute éventuelle du syndic ne peut pas être exonératoire de responsabilité du syndicat des copropriétaires pour les préjudices matériels subis par la SCI CHRISOLO. L’imputabilité des faits de chacun sera examinée au stade de l’indemnisation des préjudices.

Sur la garantie de la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES

La SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES fait valoir l’application de l’article 31 des conditions générales du contrat d’assurance, relatif aux dégâts des eaux, qui stipule que sont exclus les dommages provenant d’un défaut de réparation, d’entretien ou de précautions indispensables de la part de l’assuré (tant avant qu’après le sinistre s’il n’y a pas remédié dans un délai de 30 jours à compter de celui où il en a eu connaissance, sauf cas de force majeure) ainsi que de l’usure signalée à l’assuré ou connue de lui depuis 15 jours au moins concernant les conduites, tuyaux ou appareils.

La SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES fait valoir que les désordres sont dûs à un défaut d’entretien de la canalisation par le syndicat des copropriétaires dans la mesure où cette dernière avait été déjà l’objet de la première expertise judiciaire.

Toutefois, la lecture des deux rapports d’expertise montre que dans le premier Monsieur [Y] ne préconisait pas une reprise de l’intégralité de la canalisation, mais uniquement le coude qui a fait l’objet des travaux en janvier 2016.

Le syndicat des copropriétaires ayant procédé aux réparations préconisées par l’expert, aucun défaut d’entretien ne peut être retenu à son encontre.

La clause suivant laquelle les dommages doivent être réparés dans les 30 jours dans lesquels il a eu connaissance du sinistre n’est pas davantage de nature à exclure la garantie de la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES dans la mesure où une mesure d’expertise était nécessaire afin de connaître la nature exacte des travaux à entreprendre.

La SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES devra sa garantie au syndicat des copropriétaires s’agissant des préjudices matériels.

S’agissant des préjudices locatifs, l’article 20 des conditions générales stipule que sont garantis les préjudices immatériels, c’est-à-dire les frais exposés ou les pertes subies par l’assuré, dans les conditions fixées à l’article 23.

L’article 22 stipule que la perte de loyer et la privation de jouissance ne peut en aucun cas profiter aux copropriétaires de l’immeuble assuré.

Par ailleurs, suivant l’article 23, la garantie perte de loyers ne peut s’appliquer aux locaux vacants avant le sinistre.

Il résulte de ces clauses que la garantie de la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES n’est pas mobilisable pour les pertes de loyers subies par la SCI CHRISOLO.

Sur la responsabilité de la SARL CABINET [K]

Il résulte de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1985 dans sa version applicable au présent litige issue de la loi du 22 août 2021, qu’indépendamment des pouvoirs qui lui sont conférés par d'autres dispositions de la présente loi ou par une délibération spéciale de l'assemblée générale, le syndic est chargé, dans les conditions qui seront éventuellement définies par le décret prévu à l'article 47 ci-dessous :
- d'assurer l'exécution des dispositions du règlement de copropriété et des délibérations de l'assemblée générale ;
- d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d'urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l'exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci.

L’article 1240 du Code civil énonce que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l’espèce, le 27 novembre 2017 un procès-verbal de constat amiable de dégât des eaux a été établi entre Monsieur [I], gérant de la SCI CHRISOLO, et la SARL CABINET [K] en qualité de syndic de la copropriété.

La SARL CABINET [K] a participé à l’expertise amiable diligentée par l’assureur de Monsieur [I] le 23 juillet 2018. Le rapport a été déposé par le cabinet d’expertise le 21 septembre 2018. Ce rapport indique que le dégât des eaux émane de la conduite d’évacuation des eaux usées litigieuse.

La société MAIF, assureur de Monsieur [I], a écrit à la SARL CABINET [K] le 23 octobre 2018 pour lui demander de l’informer sur les éventuels travaux réalisés sur la canalisation.

En l’absence de réponse, le conseil de la SCI CHRISOLO a écrit un courrier officiel à la SARL CABINET [K] le 10 octobre 2019, lui demandant de faire procéder aux travaux.

La SARL CABINET [K] ne justifie d’aucune démarche en vue de la réalisation de travaux. Son dossier de plaidoirie ne comporte aucune pièce à ce sujet. La seule initiative qu’elle a prise a été de saisir le président du tribunal par requête le 20 août 2020 aux fins de faire désigner un administrateur provisoire pour la copropriété.

En l’absence de réalisation des travaux, la SCI CHRISOLO a été contrainte de saisir à nouveau le juge des référés, qui a désigné Monsieur [Y].

La lecture des pièces montre que la SARL CABINET [K] n’a procédé à aucune diligence au cours de son mandat, n’a convoqué aucune assemblée générale. Elle ne peut se prévaloir de l’absence de renouvellement de son mandat de syndic alors que ce défaut résulte de sa propre inaction. Par ailleurs, étant restée dans les faits syndic, la SARL CABINET [K] ne justifie pas ne pas avoir obtenu de rémunération pour le mandat qu’elle a continué malgré tout à exercer.

Elle engage nécessairement sa responsabilité tant à l’égard du syndicat des copropriétaires que de la SCI CHRISOLO sur le fondement délictuel à son égard.

Sur la responsabilité de Monsieur [L] [K]

La SCI CHRISOLO ne développe aucune argumentation de nature à permettre de retenir la responsabilité personnelle de Monsieur [L] [K], gérant de la SARL CABINET [K].

Les demandes formées à son encontre seront rejetées.

Sur la demande de condamnation de la SARL CABINET [K] et de Monsieur [L] [K] à produire des pièces sous astreinte

La SARL CABINET [K] produit une attestation d’assurance professionnelle en date du 13 avril 2017.

Il n’y a pas lieu de la condamner à produire d’autre pièce sous astreinte.

Sur les préjudices de la SCI CHRISOLO

- Sur le préjudice matériel

La SCI CHRISOLO verse aux débats le devis de la société LE QUINZE BTP du 24 février 2021, d’un montant de 15.966,50 € TTC, pour la reprise des revêtements de sol, reprise des canalisations EU, reprise des plâtres et de la peinture du plafond.

Ce devis a été validé par l’expert judiciaire, qui a implicitement estimé légitimes les travaux y figurant, y compris concernant le plafond du logement.

Cette somme sera retenue au titre du préjudice matériel subi par la SCI CHRISOLO.

La responsabilité de la SARL CABINET [K] pour l’absence de gestion de sinistre ne peut être retenue au titre de l’indemnisation des frais de reprise de l’appartement, qui ne seront assumées que par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] et son assureur la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES.

- Sur la perte de jouissance

L’expert a constaté que l’appartement était totalement inutilisable compte tenu des dégradations et de l’odeur nauséabonde due au déversement d’eaux usées.

Il résulte de la lecture de l’expertise que le bien n’était pas occupé lors du dégât des eaux. La SCI CHRISOLO est taisante sur l’utilisation du bien qu’elle avait. Elle ne justifie d’aucun bail avant le dégât des eaux ni après la remise en état du bien en février 2016. Il est constant que son gérant n’habitait pas dans les lieux, étant domicilié à [Localité 9].

En l’état et en l’absence de toute autre pièce justificative, seule une perte de chance de pouvoir louer le bien sera indemnisée, à hauteur de 25.000 €, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Le défaut de réalisation des travaux dans un délai raisonnable étant exclusivement imputable à la SARL CABINET [K], seule cette dernière sera condamnée à payer cette somme à la SCI CHRISOLO.

Sur la demande de garantie du syndicat des copropriétaires à l’encontre de la SARL CABINET [K]

Cette demande de garantie sera rejetée dans la mesure où il a été dit que la responsabilité de la SARL CABINET [K] ne pouvait être retenue au titre des dommages matériels subis par la SCI CHRISOLO.

Le syndicat des copropriétaires présente également une demande de dommages et intérêts à l’encontre de la SARL CABINET [K], faisant valoir que les carences de cette dernière lui ont causé un préjudice.
Toutefois, cette demande n’est étayée par aucun justificatif dudit préjudice. La survenue du sinistre n’est pas imputable à la SARL CABINET [K], et la perte de chance de pouvoir louer le bien de la SCI CHRISOLO a été imputée à la SARL CABINET [K] uniquement.

Le syndicat des copropriétaires ne fait pas état d’un autre préjudice que celui d’avoir dû subir une nouvelle procédure judiciaire. Or, force est de constater qu’il n’a toujours pas fait procéder aux travaux de reprise, alors que la SARL CABINET [K] n’est plus syndic.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge par décision motivée n'en mette la totalité ou une partie à la charge de l'autre partie.

En application de l’article 699 du code de procédure civile, les avocats et les avoués peuvent dans les matières ou leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance, sans avoir reçu provision.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice, la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES et la SARL CABINET [K] succombant principalement dans cette procédure, seront condamnés in solidum aux entiers dépens distraits au profit de Maître Laurent LAZZARINI.

Il doit être rappelé qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le sort de l’expertise judiciaire, qui est comprise par définition dans les dépens suivant dispositions de l’article 695 du Code de procédure civile.

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %.

En l'espèce, il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI CHRISOLO la totalité des frais irrépétibles qu'elle a pu engager et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Il conviendra en conséquence de condamner in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice, la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES et la SARL CABINET [K] à payer la somme de 3.000 € à la SCI CHRISOLO sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La SCI CHRISOLO sera condamnée à payer à la SARL SONIM la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La SARL CABINET [K] sera condamnée à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Les autres demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

En vertu de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Aucune circonstance ne justifie qu’il soit fait obstacle au bénéfice de l’exécution provisoire de la présente décision.


PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique par jugement mis à la disposition des parties au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Constate l’absence de demande à l’encontre de la SARL SONIM,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice à réaliser les travaux préconisés par Monsieur [Y] dans son rapport du 23 mars 2021, en l’espèce le remplacement de la canalisation d’évacuation d’eaux usées cassée par la création d’un nouveau réseau en partant de la cage d’escalier en la reliant au regard extérieur,

Assortit cette condamnation d’une astreinte de 100 € par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 3 mois commençant à courir au jour de la signification du présent jugement,

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice et la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES à payer à la SCI CHRISOLO la somme de 15.966,50 € TTC au titre du préjudice matériel,

Condamne la SARL CABINET [K] à payer à la SCI CHRISOLO la somme de 25.000 € au titre de la perte de chance de louer son bien,

Dit que ces condamnations en paiement sont assorties de l’intérêt au taux légal à compter de la présente décision,

Fait droit à la demande de capitalisation des intérêts dus pour au moins une année entière,

Déboute la SCI CHRISOLO de sa demande de condamnation de la SARL CABINET [K] et de Monsieur [L] [K] à produire une attestation d’assurance,

Déboute la SCI CHRISOLO du surplus de ses demandes,

Déboute le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice de sa demande de garantie à l’encontre de la SARL CABINET [K],

Déboute le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice de sa demande de dommages et intérêts à l’égard de la SARL CABINET [K],

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice, la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES et la SARL CABINET [K] aux dépens, distraits au profit de Maître [M] [J], dépens comprenant les frais d’expertise,

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice, la SA COMPAGNIE INTER MUTUELLES ENTREPRISES et la SARL CABINET [K] à payer à la SCI CHRISOLO la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL CABINET [K] à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 7] pris en la personne de son syndic en exercice la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCI CHRISOLO à payer à la SARL SONIM la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu à faire obstacle à l’exécution provisoire de la présente décision.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE DE LA TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE VINGT-HUIT MAI DEUX MIL VINGT QUATRE.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 3ème chbre cab a4
Numéro d'arrêt : 22/05413
Date de la décision : 28/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-28;22.05413 ?
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