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21/05/2024 | FRANCE | N°24/01227

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 9ème chambre jex, 21 mai 2024, 24/01227


MINUTE N° : 24/
DOSSIER N° : N° RG 24/01227 - N° Portalis DBW3-W-B7I-4NOE
AFFAIRE : [S] [N], S.A.S. [S] [N] / [O] [P]


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 21 MAI 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL


PRESIDENT : Madame DESMOULIN, Vice-Présidente,
GREFFIER : Madame KELLER, Greffier




DEMANDEURS

Monsieur [S] [N]
né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 6] (92),
domicilié [Adresse 3]

représenté par Maître Michel AMAS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Maîtr

e Jean-Marc MONTANARO, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S. [S] [N],
dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Maître Miche...

MINUTE N° : 24/
DOSSIER N° : N° RG 24/01227 - N° Portalis DBW3-W-B7I-4NOE
AFFAIRE : [S] [N], S.A.S. [S] [N] / [O] [P]

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 21 MAI 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Madame DESMOULIN, Vice-Présidente,
GREFFIER : Madame KELLER, Greffier

DEMANDEURS

Monsieur [S] [N]
né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 6] (92),
domicilié [Adresse 3]

représenté par Maître Michel AMAS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Maître Jean-Marc MONTANARO, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S. [S] [N],
dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Maître Michel AMAS, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Maître Jean-Marc MONTANARO, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDEUR

Monsieur [O] [P]
né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 5] (94),
demeurant [Adresse 4]

représenté par Maître Sebastien SALLES de la SARL THELYS AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

NATURE DE LA DECISION : Contradictoire

Le Tribunal après avoir entendu les parties et leurs avocats en leurs conclusions à l'audience du 02 Avril 2024 a mis l'affaire en délibéré et indiqué que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 21 Mai 2024, date à laquelle a été rendu le jugement dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE :

Déclarant agir en vertu d’un arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 20 mai 2021, le 15 décembre 2023 Me [O] [P] a procédé à une saisie-attribution entre les mains de la Caisse des Dépôts et Consignations de toutes les sommes dont le tiers-saisi était personnellement tenu envers la S.A.S [S] [N] pour la somme de 112.549,80 euros.

Ce procès-verbal a été dénoncé à la S.A.S [S] [N] par acte signifié le 22 décembre 2023.

Déclarant agir en vertu d’un arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 20 mai 2021, le 15 décembre 2023 Me [O] [P] a procédé à la saisie-attribution entre les mains de la SELAS FLORENCE ZENOU DISIER OUDENOT PAULINE OUDENOT, société titulaire d’un office de greffier, de toutes les sommes dont le tiers-saisi était personnellement tenu envers la S.A.S [S] [N] pour la somme de 112.549,80 euros.

Ce procès-verbal a été dénoncé à la S.A.S [S] [N] par acte signifié le 22 décembre 2023.

Déclarant agir en vertu d’un arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 20 mai 2021, le 15 décembre 2023 Me [O] [P] a procédé à la saisie-attribution entre les mains du Crédit Lyonnais de toutes les sommes dont le tiers-saisi était personnellement tenu envers Me [S] [N] pour la somme de 112.549,80 euros.

Ce procès-verbal a été dénoncé à Me [S] [N] par acte signifié le 22 décembre 2023.

Selon acte d’huissier en date du 22 janvier 2024 Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] ont fait assigner Me [O] [P] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Marseille.

A l’audience du 2 avril 2024 Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] ont, par conclusions réitérées oralement, demandé de
- annuler les saisies attributions dénoncées le 22 décembre 2023
- condamner Me [O] [P] à leur payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts
- condamner Me [O] [P] à payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Ils ont rappelé qu’une transaction avait été signée entre les parties, laquelle entraînait novation dans les relations des parties et interdisait de recouvrer les sommes allouées par la cour d’appel en pratiquant une mesure d’exécution forcée sur la base de l’arrêt. Ils ont en outre souligné que la transaction (qui n’était pas mentionnée sur les procès-verbaux de saisie) n’avait pas été homologuée ni notifiée aux parties et qu’elle n’était pas revêtue de la formule exécutoire à la suite d’une ordonnance judiciaire. Ils ont ajouté que les dispositions éventuellement violées, dans le cadre du protocole transactionnel, n’étaient pas précises ni dans leur nature ni dans leur décompte et qu’il incombait au juge de l’exécution de l’interpréter en considérant que seules deux mensualités consécutives non payées permettaient de délivrer l’une des parties dudit protocole. Sur la demande de dommages et intérêts ils ont fait valoir que tant leur activité professionnelle que l’identité des tiers saisi (le greffe du tribunal de commerce étant le plus gros client institutionnel de l’étude et la Caisse des Dépôts et Consignations étant le partenaire financier unique de l’étude) rendaient les saisies abusives et nuisaient à leur réputation.

Par conclusions réitérées oralement, Me [O] [P] a demandé de
- débouter Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] de leurs demandes
- confirmer la régularité des saisies dénoncées le 22 décembre 2023
- condamner solidairement Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts
- condamner solidairement Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens, avec distraction.

Il a fait que valoir que Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] avaient failli à leurs obligations résultant du protocole transactionnel en payant quasi-systématiquement tardivement les échéances ; qu’en application des stipulations parfaitement claires et incontestables, il était délié du protocole et pouvait valablement pratiquer une mesure d’exécution forcée à leur encontre sur le fondement de l’arrêt de la cour de Nîmes. Il a ajouté qu’il avait à plusieurs reprises averti Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] des manquements, en vain et sans même la moindre réponse de leur part. S’agissant de sa demande de dommages et intérêts il a fait valoir que la procédure engagée par Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] lui causait un préjudice moral qu’il convenait de réparer en lui allouant une indemnité.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la contestation :

En vertu de l'article R 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, à peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour, ou le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier qui a procédé à la saisie. L'auteur de la contestation en informe en informe le tiers saisi par lettre simple et en remet une copie, à peine de caducité de l'assignation, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience. 
En l’espèce, Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] ont saisi la présente juridiction de sa contestation dans le mois à compter de la dénonciation des saisies litigieuses.
Les dispositions du texte précité ont donc été respectées de sorte que la contestation est jugée recevable.
Sur la contestation :
Selon l’article L211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.

Par arrêt du 20 mai 2021 la cour d’appel de Nîmes a notamment condamné Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] à payer à Me [O] [P] la somme de 145.026,50 euros au titre de sa part des bénéfices pour la période du 01/01/17 au 31/12/2018 outre la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Cette décision a été notifiée entre avocats et signifiée à Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] le 1er juin 2021.

Me [O] [P] disposait donc bien d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible à l’encontre de Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N].

Toutefois, les parties ayant choisi de transiger ont signé un protocole transactionnel le 1er juillet 2021.

Aux termes dudit protocole -dont les termes sont particulièrement clairs et ne prêtent à aucune interprétation- il était prévu que
- le paiement de la somme de 140.000 euros s’effectue en 48 mensualités, les 47 premières d’un montant de 2.917 euros chacune et la dernière d’un montant de 2.901 euros, les mensualités devant être versées par virement le 5 de chaque mois
- au-delà de plus d’une mensualité payée en retard, quelle qu’en soit la cause, Me [O] [P] pouvait, immédiatement, sans procéder par voie de mise en demeure préalable, faire exécuter l’arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 20 mai 2021 sur l’ensemble des condamnations prononcées par la cour, déduction faite des sommes déjà été versées par Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N]”.

Or, il est acquis aux termes des débats -et Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] ne le contestent en définitive pas sérieusement- qu’ils se sont acquittés avec retard de plusieurs mensualités, notamment les mensualités de septembre 2021, novembre 2021 et encore de celles versées au cours de l’année 2022 et de l’année 2023.

Dès lors, en raison de l’inexécution du protocole par Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N], Me [O] [P] en était délié (peu important qu’aucun défaut de paiement ne soit à déplorer) et pouvait donc valablement procéder à une mesure d’exécution forcée à leur encontre.

Ainsi, les saisies querellées ont été justement pratiquées en vertu de l’arrêt de la cour d’appel de Nimes et non en vertu d’un protocole transactionnel, celui-ci n’ayant donc pas à être visé aux procès-verbaux de saisie.

Les saisies étant parfaitement fondées et régulières, Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] seront déboutés de leur demande tendant à les annuler.

Sur les demandes de dommages et intérêts :

Aux termes des dispositions de l’article L121-2 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d’abus de saisie.
Me [O] [P] a pu justifier d’une créance liquide et exigible à l’encontre de Me [S] [N] et de la S.A.S [S] [N] fondée sur un titre exécutoire leur ayant été préalablement régulièrement signifié. En outre, il a été rappelé à ceux-ci à plusieurs reprises, entre septembre 2021 et août 2023, la nécessité de veiller au respect des stipulations contenues dans le protocole transactionnel, en vain. Aucune faute n’est donc imputable à Me [O] [P] et si Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] souffrent d’un préjudice d’image à l’égard de leurs partenaires institutionnels, ils en sont les seuls responsables. Ils seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

En vertu de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Le droit d'agir en justice participe des libertés fondamentales de l'individu. Toutefois, il est admis en droit que toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité des plaideurs.

En l’espèce, Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N], professionnels de l’exécution forcée, alors qu’ils n’avaient pas respecté le protocole transactionnel malgré mises en demeure, entendent aujourd’hui de façon infondée contester les mesures prises à leur encontre devant le juge de l’exécution. Ce comportement abusif cause nécessairement à Me [O] [P] un préjudice résultant de la gêne subie qu’il convient de réparer en lui allouant la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N], succombant, supporteront solidairement les dépens de la procédure, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N], tenus aux dépens, seront condamnés solidairement à payer à Me [O] [P] une somme, qu’il paraît équitable d’évaluer à la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles qu’il a dû exposer pour la présente procédure.

PAR CES MOTIFS,
Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition du public au greffe,
Déclare la contestation de Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] recevable mais les déboute de leurs demandes ;
Condamne solidairement Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] à payer à Me [O] [P] la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Condamne solidairement Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] aux dépens de la procédure;
Condamne solidairement Me [S] [N] et la S.A.S [S] [N] à payer à Me [O] [P] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;
Et le juge de l’exécution a signé avec le greffier ayant reçu la minute.  
Le greffier                                                                             Le juge de l’exécution


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 9ème chambre jex
Numéro d'arrêt : 24/01227
Date de la décision : 21/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-21;24.01227 ?
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