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14/05/2024 | FRANCE | N°23/08263

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 3ème chbre cab a4, 14 mai 2024, 23/08263


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 14 MAI 2024



Enrôlement : N° RG 23/08263 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3XYH

AFFAIRE : Mme [F] [T] vve [P] (Me JOUVE)
C/ S.C.I. S&H





DÉBATS : A l'audience Publique du 13 février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 14 mai 2024



PRONONCÉ : Par mise à d

isposition au greffe le 14 mai 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Assistée de Madame Pauline ESPAZE, Greffière



NATURE DU JUGEMENT
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TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 14 MAI 2024

Enrôlement : N° RG 23/08263 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3XYH

AFFAIRE : Mme [F] [T] vve [P] (Me JOUVE)
C/ S.C.I. S&H

DÉBATS : A l'audience Publique du 13 février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 14 mai 2024

PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 14 mai 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Assistée de Madame Pauline ESPAZE, Greffière

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

Madame [F] [T] veuve [P]
née le 12 octobre 1956 à [Localité 4] (13)
demeurant [Adresse 3]

représentée par Maître Thibaut JOUVE, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DÉFENDERESSE

S.C.I. S&H
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 538 290 982
dont le siège social est sis [Adresse 1]
prise en la personne de son représentant légal

défaillante

*****

EXPOSE DU LITIGE

Madame [F] [T], veuve [P], est propriétaire d’un appartement au sein d’un immeuble situé [Adresse 2] soumis au régime de la copropriété.

Madame [F] [T], veuve [P] a donné à bail cet appartement à Monsieur [J] [B].

La SCI S&H, propriétaire d’un local commercial situé au rez-de-chaussée de l’immeuble, a donné à bail ce dernier à la SARL L’EMPIRE.

Des travaux ont été entrepris dans le local de la SCI S&H par la SARL L’EMPIRE.

A la suite des ces travaux, l’apparition de fissures a été constatée par divers copropriétaires.

Par ordonnance du 14 mars 2022, le juge des référés, saisi par Madame [M] [K], copropriétaire, a désigné Monsieur [W] en qualité d’expert.

Son rapport en date du 4 juillet 2022 relève un risque d’effondrement de l’immeuble nécessitant des travaux urgents, et établit un lien avec les travaux réalisés sur le local commercial du rez-de-chaussée.

Suite au dépôt de ce rapport, la ville de [Localité 4] a pris le 26 juillet 2022 un arrêté de mise en sécurité urgente sur l’ensemble de l’immeuble et a ordonné l’évacuation sans délai de ses occupants.

La SCI S&H a fait procéder aux travaux permettant d’obtenir la levée de l’arrêté de mise en sécurité urgente le 14 novembre 2022.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 2 juin 2023, Madame [F] [T], veuve [P] a mis en demeure la SCI S&H de l’indemniser des préjudices subis du fait de l’évacuation de l’immeuble.

*

Par acte de commissaire de justice en date du 26 juillet 2023, Madame [F] [T], veuve [P], a fait assigner la SCI S&H devant le présent tribunal, sur le fondement des articles 544 et 1240 du code civil, aux fins de voir entendre :
- dire que la responsabilité de la société S&H est engagée sur le fondement du trouble anormal de voisinage ;
- condamner la société S&H à payer la somme de 11.290 euros à Madame [P] à titre de dommages et intérêts augmentés du taux d’intérêt légal à compter du 2 juin 2023,
- condamner la société S&H à payer la somme de 3.500 euros a Madame [P] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

A l’appui de ses prétentions, Madame [F] [T], veuve [P], expose que la SCI S&H doit lui rembourser le préjudice subi du fait de l’arrêté de mise en sécurité urgente de l’immeuble engendré par les travaux nécessaires au sein du local commercial lui appartenant, à savoir :
- une absence de perception des loyers entre le 26 juillet 2022 et le 14 novembre 2022 à hauteur de 1 890 € ;
- le coût du relogement du locataire assuré par la mairie pour 4 400 € ;
- le préjudice moral à hauteur de 5 000 € ;
- les frais irrépétibles à hauteur de 3 500 € outre les dépens.

La SCI S&H a été citée selon les modalités de l’article 659 du Code de procédure civile, donnant lieu à un procès-verbal de recherches infructueuses. L’accusé réception du courrier recommandé adressé par le commissaire de justice est produit. Elle n’a pas constitué avocat.

La clôture de la procédure est intervenue le 23 janvier 2024 et la procédure sans audience a été acceptée par le demandeur.

MOTIFS DE LA DECISION

Le tribunal rappelle, à titre liminaire, qu’il n’est pas tenu de statuer sur les demandes de “constater” ou de “dire et juger” qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions au sens de l’article 30 du code de procédure civile, en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Il n’y a donc pas lieu pour le tribunal de statuer sur ces demandes émanant des parties.

En application de l’article 472, alinéa 2, du Code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Le défendeur n’ayant pas constitué avocat, la décision rendue en premier ressort sera réputée contradictoire en application des dispositions de l’article 472 du Code de procédure civile.

Sur la responsabilité de la SCI S&H

Il est constant que nul ne peut causer à autrui de trouble anormal du voisinage.

Le droit d’un propriétaire de jouir de sa chose de la manière la plus absolue, sauf usage prohibé par la loi ou les règlements, est limité par l’obligation qu’il a de ne pas causer à la propriété d’autrui aucun dommage excédant les inconvénients anormaux du voisinage.

Il appartient au voisin, victime de dommages matériels ou immatériels de démontrer le lien d’imputabilité entre les désordres allégués, l’action du maître d’ouvrage et le trouble anormal subi.

En l’espèce, l’expert judiciaire déclare dans son rapport en date du 4 juillet 2022 que les désordres proviennent de l’agrandissement du passage réalisé en sous-œuvre sur le mur de refend du local commercial du rez-de-chaussée, avant de noter que les désordres nécessitent des travaux urgents compte tenu du risque d’effondrement de l’immeuble si le renforcement préconisé n’est pas exécuté à bref délai.

Ainsi un lien peut-il être établi entre les travaux réalisés par la société L’EMPIRE, locataire du local commercial dont la SCI S&H est propriétaire, et le risque d’effondrement de l’immeuble qui a notamment donné lieu à l’arrêté de mise en sécurité émis par la mairie de [Localité 4] en date du 26 juillet 2022 face à la caractérisation d’un danger imminent pour les occupants de l’immeuble.

Ce danger caractérisé, qui a contraint l’évacuation immédiate des occupants de l’immeuble, a donc été à l’origine trouble anormal du voisinage subi par Madame [F] [T], veuve [P], dont le locataire Monsieur [J] [B] a dû être relogé pendant la durée des travaux nécessaires à la mainlevée de l’arrêté de mise en sécurité urgente prononcée par la ville de [Localité 4] en date du 14 novembre 2022.

Par ailleurs, l’assemblée générale des copropriétaires a voté le 13 septembre 2022 la réalisation des travaux nécessaires à l’obtention de la mainlevée de l’arrêté. Ces travaux dont le montant s’élevait à 15 873 € ont été financés entièrement par la SCI S&H qui n’a pas contesté sa responsabilité du fait des travaux de son locataire.

La responsabilité de la SCI S&H à l’égard de Madame [F] [T], veuve [P] est alors engagée.

Sur les demandes indemnitaires

Madame [F] [T], veuve [P] réclame en premier lieu l’indemnisation de son préjudice locatif pour la période comprise entre le 26 juillet 2022 et le 14 novembre 2022.

Elle produit le bail signé avec Monsieur [B] le 28 janvier 2014. Ce dernier stipule un loyer mensuel de 540 € charges comprises.
Pour la période du 26 juillet 2022 au 14 novembre 2022, le manque à percevoir de Madame [F] [T], veuve [P] est alors de 1.890 € qui sera allouée à Madame [F] [T], veuve [P].

Madame [F] [T], veuve [P] justifie par production du bordereau de situation de la totalité des produits locaux dûs à la trésorerie du 26 juillet 2023, avoir dû rembourser la ville de [Localité 4] qui a procédé au relogement de son locataire pour la période du 2 août au 15 novembre 2022, à hauteur de 4.400 €.
Cette somme lui sera allouée.

Enfin, Madame [P] fait valoir qu’elle a subi un préjudice moral compte tenu de la situation d’évacuation de l’immeuble.
Au regard des éléments de preuve produits à l’appui de cette demande, il n’apparaît pas sérieusement contestable que Madame [P] a subi un préjudice moral en lien avec la situation. Il lui sera alloué la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l’article 696 du Code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

La SCI S&H, qui succombe, sera condamnée aux dépens.

Par ailleurs, aux termes de l’article 700 (1°) du Code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [P] les frais irrépétibles non compris dans les dépens qui ont été exposés dans le cadre de la présente instance. La SCI S&H sera donc condamnée au paiement de la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique par jugement mis à la disposition des parties au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,

Condamne la SCI S&H à payer à Madame [F] [T], veuve [P] :
- la somme de 1.890 euros au titre de la perte des loyers entre le 26 juillet 2022 et le 14 novembre 2022 ;
- la somme de 4.400 euros au titre du coût du relogement du locataire Monsieur [J] [B],

Dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter de l’assignation,

Condamne la SCI S&H à payer à Madame [F] [T], veuve [P] la somme de 1.000 € au titre du préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Condamne la SCI S&H à payer la somme de 2.000 euros à Madame [F] [T], veuve [P] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCI S&H aux dépens.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE DE LA TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE QUATORZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 3ème chbre cab a4
Numéro d'arrêt : 23/08263
Date de la décision : 14/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-14;23.08263 ?
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