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14/05/2024 | FRANCE | N°22/11311

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 3ème chbre cab a4, 14 mai 2024, 22/11311


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 14 MAI 2024



Enrôlement : N° RG 22/11311 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2VRF

AFFAIRE : M. [X] [I], Mme [G] [E] (Me DUMONT-SCOGNAMIGLIO)
C/ S.D.C. 96 BD LONGCHAMP (Me GISBERT)





DÉBATS : A l'audience Publique du 23 janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 9 avril 20

24 puis prorogée au 14 mai 2024



PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 14 mai 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-prés...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 14 MAI 2024

Enrôlement : N° RG 22/11311 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2VRF

AFFAIRE : M. [X] [I], Mme [G] [E] (Me DUMONT-SCOGNAMIGLIO)
C/ S.D.C. 96 BD LONGCHAMP (Me GISBERT)

DÉBATS : A l'audience Publique du 23 janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 9 avril 2024 puis prorogée au 14 mai 2024

PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 14 mai 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Assistée de Madame Pauline ESPAZE, Greffière

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEURS

Monsieur [X] [I]
né le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 7] (55)
de nationalité Française
demeurant [Adresse 4] (SUISSE)

Madame [G] [E]
née le [Date naissance 2] 1977 à [Localité 6] (26)
de nationalité Française
demeurant [Adresse 4] SUISSE

tous deux représentés par Maître Virginia DUMONT-SCOGNAMIGLIO, avocate au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DÉFENDEUR

Syndicat des Copropriétaires de l’ensemble immobilier [Adresse 5]
représenté par son Syndic en exercice la S.A.S. ACCORD COMPAGNIE IMMOBILIER
immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 071 806 962
dont le siège social est sis [Adresse 3]
prise en la personne de son représentant légal en exercice

représenté par Maître François GISBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] sont propriétaires indivis du lot n°10 de copropriété au sein de l’immeuble sis [Adresse 5].

Par assemblée générale du 1er septembre 2022 a été votée l’attribution de la jouissance exclusive d’une fraction de la terrasse située au 4ème étage, partie commune, au profit de Madame [Z], propriétaire des lots 5, 6, 7, 8 et 11 situés au 4ème étage, moyennant prise en charge par cette dernière des frais de réfection de l’étanchéité de la terrasse. Le projet modificatif du règlement de copropriété en lien avec cette jouissance exclusive a été également adopté.

Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] font valoir que cette décision porte atteinte à la jouissance de leur lot privatif.

*

Suivant exploit du 17 novembre 2022, Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] ont fait assigner devant le présent tribunal le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice la SAS ACCORD COMPAGNIE IMMOBILIER exerçant sous le nom LA COMTESSE IMMOBILIER, aux fins de voir entendre :
- déclarer leur demande recevable et bien fondée,
- annuler les résolutions 17, 18, 19 et 20 de l’assemblée générale du 1er septembre 2022,
- condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] à leur payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par conclusions notifiées par RPVA le 4 septembre 2023, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] demande au tribunal de :
- rejeter l’intégralité des prétentions et argumentations formulées par Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] à l’encontre des résolutions 17, 18, 19 et 20 de l’assemblée générale du 1er septembre 2022,
- condamner conjointement et solidairement Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamner conjointement et solidairement Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] au paiement de la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 28 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la nullité des résolutions

L’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 énonce que sont prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix les décisions concernant :
a) Les actes d'acquisition immobilière et les actes de disposition autres que ceux visés à l'article 25 d ;
b) La modification, ou éventuellement l'établissement, du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l'usage et l'administration des parties communes ;
c) La suppression du poste de concierge ou de gardien et l'aliénation du logement affecté au concierge ou au gardien lorsqu'il appartient au syndicat. Les deux questions sont inscrites à l'ordre du jour de la même assemblée générale.
Lorsqu'en vertu d'une clause du règlement de copropriété la suppression du service de conciergerie porte atteinte à la destination de l'immeuble ou aux modalités de jouissance des parties privatives, la suppression du poste de concierge ou de gardien et l'aliénation du logement affecté au concierge ou au gardien lorsqu'il appartient au syndicat ne peuvent être décidées qu'à l'unanimité.
L'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété.
Elle ne peut, sauf à l'unanimité des voix de tous les copropriétaires, décider l'aliénation des parties communes dont la conservation est nécessaire au respect de la destination de l'immeuble ou la modification des stipulations du règlement de copropriété relatives à la destination de l'immeuble.

En l’espèce, Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] font valoir que l’octroi de la jouissance exclusive à un copropriétaire d’une partie de la terrasse du 4ème étage leur cause un trouble de jouissance de leurs parties privatives car l’utilisation de cette terrasse va créer d’importants vis-à-vis car plusieurs fenêtres de leur appartement donnent sur cette terrasse.

Leur assignation contient des photographies :
- d’une fenêtre de la cuisine à travers laquelle est visible la rambarde de la terrasse,
- de la vue sur une chambre à partie de ladite terrasse.

Ils ne produisent aucun autre élément au soutien de leur demande et notamment aucune photographie de la terrasse et de la partie concernée par les résolutions de l’assemblée générale querellée.

Toutefois, les pièces annexées à la convocation pour l’assemblée générale querellée contiennent un plan du 4ème étage dans sa configuration actuelle. Ce dernier montre les lots n°6 et 7 situés au 4ème étage disposent chacun de la jouissance exclusive de la partie de terrasse couverte située au droit respectivement de la cuisine et de la chambre. Ces parties de terrasse à jouissance exclusive sont conformes aux dispositions du règlement de copropriété qui les énonce.

Le plan du projet de jouissance exclusive à accorder au lot n°8 montre que cette zone correspond au reste de la terrasse et se prolonge jusqu’au droit du lot 9 et du lot n°10 de Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] et devant sa fenêtre.

Ce plan corroboré par les photographies de Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] montrent que ce projet porte une atteinte importante à la jouissance de leur lot dans la mesure où cette attribution de jouissance exclusive permettrait aux occupants du lot 8 de prendre possession de l’intégralité de la terrasse et d’en user seuls. Cette privatisation de la terrasse est de nature à causer d’importants troubles de jouissance à Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] compte tenu du vis-à-vis direct et immédiat sur leur appartement. Le règlement de copropriété évoque à raison des jouissances privatives au droit des lots afin de préserver l’intimité des occupants de chacun des lots de l’étage.

La majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 n’était pas applicable et cette décision devait être soumise à l’unanimité en ce qu’elle concerne la partie de terrasse au droit du lot n°10.

Il convient alors d’annuler les résolutions 17, 18, 19 et 20 de l’assemblée générale du 1er septembre 2022.

Sur la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires

La demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires fondée sur le caractère abusif de l’action de Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] sera nécessairement rejetée, ces derniers ayant obtenu gain de cause.

Sur les demandes accessoires

L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge par décision motivée n'en mette la totalité ou une partie à la charge de l'autre partie.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice succombant principalement dans cette procédure, sera condamné aux entiers dépens.

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %.

En l'espèce, il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] la totalité des frais irrépétibles qu’ils ont pu engager et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Il conviendra en conséquence de condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice à payer la somme de 2.000 € à Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

En vertu de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique par jugement mis à la disposition des parties au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Annule les résolutions 17, 18, 19 et 20 de l’assemblée générale du 1er septembre 2022 de la copropriété de l’immeuble [Adresse 5],

Déboute le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice aux dépens,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice à payer à Monsieur [X] [I] et Madame [G] [E] la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE DE LA TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE QUATORZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 3ème chbre cab a4
Numéro d'arrêt : 22/11311
Date de la décision : 14/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 20/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-14;22.11311 ?
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