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11/04/2024 | FRANCE | N°23/11372

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 9ème chambre jex, 11 avril 2024, 23/11372


MINUTE N° : 24/
DOSSIER N° : N° RG 23/11372 - N° Portalis DBW3-W-B7H-4C27
AFFAIRE : [G] [I] / S.C.I. IMOBA


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 11 AVRIL 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL


PRESIDENT : Mme BENHARKAT, Juge

GREFFIER : Madame KELLER, Greffier




DEMANDERESSE

Madame [G] [I]
née le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 5] (TUNISIE),
demeurant [Adresse 4]

représentée par Maître Hedi SAHRAOUI de la SARL SUDAIX, avocats au barreau de MARSEILLE



DEFENDERESSE

S.C.I. IMOBA,
société civile immobilière immatriculée eu RCS de Marseille sous le numéro 521 690 511
dont le siège social est sis [Adresse...

MINUTE N° : 24/
DOSSIER N° : N° RG 23/11372 - N° Portalis DBW3-W-B7H-4C27
AFFAIRE : [G] [I] / S.C.I. IMOBA

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 11 AVRIL 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Mme BENHARKAT, Juge

GREFFIER : Madame KELLER, Greffier

DEMANDERESSE

Madame [G] [I]
née le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 5] (TUNISIE),
demeurant [Adresse 4]

représentée par Maître Hedi SAHRAOUI de la SARL SUDAIX, avocats au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE

S.C.I. IMOBA,
société civile immobilière immatriculée eu RCS de Marseille sous le numéro 521 690 511
dont le siège social est sis [Adresse 2]
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Anne TAIBI-HOVSEPIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

NATURE DE LA DECISION : Contradictoire

Le Tribunal après avoir entendu les parties et leurs avocats en leurs conclusions à l'audience du 14 Mars 2024 a mis l'affaire en délibéré et indiqué que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024, date à laquelle a été rendu le jugement dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon jugement en date du 28 juin 2023, [G] [I] a été condamnée à régler à la SCI IMOBA la somme de 5 058,50 euros avec intérêts légaux à compter du jugement et 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Cette décision a été signifiée le 16 août 2023.
Selon procès-verbal de saisie-attribution en date du 5 octobre 2023, agissant en vertu de la décision susvisée, la SCI IMOBA a procédé à deux saisies-attribution entre les mains de la société BNP PARIBAS et la société BOURSORAMA de toutes les sommes dont le tiers-saisi était personnellement tenu envers, pour la somme de 6 966,43 euros auprès de chacune des banques.
Ce procès-verbal a été dénoncé à [G] [I], par acte signifié le 11 octobre 2023.
Selon acte d’huissier en date du 31 octobre 2023, [G] [I] a fait assigner devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Marseille en vue de la nullité de la saisie-attribution et de sa mainlevée.
Le 2 novembre 2023, mainlevée de la saisie-attribution effectuée sur les comptes de la BNP PARIBAS a été effectuée.
Par conclusions communiquées par RPVA le 19 février 2024, [G] [I] fait valoir que le fait que deux saisies ont été pratiquées simultanément auprès de ses deux banques pour un montant total de 13 932,86 euros alors qu’elle est poursuivie pour une somme d’environ 6 000 euros est abusif, qu’elle justifie d’un préjudice car ces deux comptes ont été indisponibles pendant 28 jours. Elle sollicite la somme de 2000 euros de dommages et intérêts à ce titre. Par ailleurs, elle sollicite la nullité du procès-verbal de recherches infructueuses du commissaire de justice et donc la caducité des saisies-attributions au motif qu’il n’a pas accompli toutes les diligences pour lui notifier les actes de dénonces des saisies-attribution, cette dernière ayant souscrit un contrat de suivi de courriers auprès de la poste et ayant déclaré son changement d’adresse auprès du service des finances publiques. Elle ajoute que le commissaire de justice ne peut se voir opposer le secret bancaire et aurait dû solliciter l’adresse de la requérante auprès des banques qui connaissait sa nouvelle adresse, qu’il est fallacieux de soutenir que celle-ci aurait communiquer une fausse adresse. Elle soutient que le décompte des sommes dues est erroné car l’état de frais est inhérent aux deux saisies attribution et qu’il ne prend pas en compte le dépôt de garantie versé par la requérante, que les saisies sont donc caduques. Elle requiert que lui soit alloué la somme de 2100 euros pour le préjudice subi du fait du blocage de ses comptes dont 100 euros de frais bancaires. Elle demande la condamnation de la SCI IMOBA au paiement de la somme de 1800 au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions communiquées par RPVA le 12 mars 2024, la SCI IMOBA fait valoir que [G] [I] n’ignorait pas l’existence d’une instance devant le juge de proximité, qu’elle avait laissé son nom sur le tableau des occupants de son ancien logement, que le commissaire de justice a pratiqué une recherche FICOBA, qu’il a pu contacter la requérante par téléphone qu’il lui aurait communiqué une fausse adresse sur la commune d’AVIGNON, qu’il a effectué une recherche sur les pages jaunes, blanches, le site internet Google et Facebook et auprès des services postaux, que ne la trouvant pas, il lui notifiait les dénonces de saisies attribution à son ancienne adresse. Elle soutient que la saisie attribution n’a pu lui causer un préjudice car le solde disponible de son compte bancaire s’élevait à la somme de près de 23000 euros alors que la saisie portait sur une somme de plus de 6000 euros, qu’une des deux saisies a fait l’objet d’une saisie attribution un mois après son exécution. La SCI IMOBA sollicite la somme de 3 000 euros de dommages et intérêts sans indiquer de fondement juridique et la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
À l’audience du 14 mars 2024, les parties ont sollicité le bénéfice de leurs écritures.

L’affaire a été mise en délibéré au 11avril 2024.
MOTIFS
Sur la qualification de la décision :

En l’espèce, toutes les parties ont comparu. La présente décision sera donc contradictoire, conformément aux dispositions de l’article 467 du code de procédure civile.
Par ailleurs la présente décision est rendue en premier ressort.
Sur la recevabilité de la contestation :

L’article R 211-11 du code des procédures civiles d'exécution énonce “A peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au commissaire de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. Il remet une copie de l'assignation, à peine de caducité de celle-ci, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience”.
En l’espèce, [G] [I] a saisi la présente juridiction de sa contestation dans le mois à compter de la dénonciation de la saisie-attribution litigieuse.
Les dispositions du texte précité ont donc été respectées de sorte que la contestation est jugée recevable.
Sur la régularité de la signification du 30 mai 2006 :

Il est constant que la violation des conditions requises par la loi pour la validité des actes de procédures et, notamment, des règles de forme exigées pour la signification des actes de procédure est susceptible d’entraîner la nullité de l’acte.

Selon l’article 114 du code de procédure civile “aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public et, dans tous les cas, à charge pour celui qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité alléguée”.

L’article 693 du même code dispose “ce qui est prescrit par les articles 654 à 659, 663 à 665-1, 672, 675, 678, 680, 683 à 684-1, 686, le premier alinéa de l'article 688 et les articles 689 à 692 est observé à peine de nullité”.

Selon l’article 654, la signification doit être faite à personne. L'article 655 du même code prévoit que « si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification ».

Enfin, aux termes de l'article 659 du code de procédure civile, « lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte. Le même jour ou, au plus tard le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie du procès-verbal à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification. Le jour même, l'huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l'accomplissement de cette formalité ».

En l’espèce, les actes critiqués du 5 octobre 2023 ont été signifié par procès-verbal de recherches infructueuses à l’adresse indiquée dans le jugement précité.

Il ressort des procès-verbaux de signification que les diligences effectuées par le commissaire de justice ont consisté en une recherche via les pages jaunes, les pages blanches, les sites Google et Facebook et que contacté par téléphone, la requérante aurait donné une adresse sur la commune d’[Localité 3], que des recherches auprès des services postaux auraient été effectuées.

Or, il apparait à la lecture des pièces versées par la requérante que cette dernière a bien souscrit un contrat de suivi de courriers auprès des services de la poste dès le 3 octobre 2022 jusqu’au 31 octobre 2023 et a déclaré sa nouvelle adresse auprès des finances publiques. Le commissaire ne justifie pas avoir accompli des diligences efficaces. En effet, [G] [I], il était prévisible que l’adresse de cette dernière ne figure pas sur des sites internet tels que Google et Facebook, l’adresse postale n’a pas lieu d’y être et ces sites internet ne constituent pas des lieux d’informations d’une adresse postale, cette recherche sur ces sites s’avérait vouée à l’échec et ne constitue pas des diligences efficaces. Par contre, il apparait que la requérante avait souscrit un contrat de suivi de courriers dès le 3 octobre 2022 jusqu’au 31 octobre 2023 et qu’ainsi son adresse pouvait être retrouvée auprès des services de la poste comme de ceux des finances publiques. Or, cette vérification n’a manifestement pas été effectuée ou de manière effective puisque le commissaire de justice n’a pas attendu le retour de courrier de la poste tel que cela est indiqué dans les écritures de la défenderesse.

Il s’ensuit que les diligences entreprises doivent être déclarées insuffisantes.

Cette irrégularité rend caduque les dénonces de saisies-attribution du 11 octobre 2023.

Dans ces conditions, les actes de signification des saisies attribution du 5 octobre 2023 seront en conséquence annulés et mainlevée de la saisie restante du 5 octobre 2023 sera ordonnée.
Sur les demandes de dommages et intérêts pour abus de saisie :
Aux termes de l’article L121-2 du code de procédure civile des voies d’exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie.

En l’espèce, il apparait que la SCI IMOBA disposait d’un titre exécutoire lui permettant de pratiquer un ou plusieurs actes d’exécution.

Cette dernière ne connaissant pas la disponibilité des sommes figurant sur les comptes bancaires de la requérante, il ne peut être considéré comme abusif qu’elle ait procédé à deux saisies attributions auprès de deux banques différentes, sachant que mainlevée d’une entre elle a été levée dès que la connaissance du solde suffisant existant auprès du deuxième tiers saisi.

Dans ces conditions, [G] [I] sera déboutée de sa demande à ce titre.
Sur la demande de dommages et intérêts pour faute :

En vertu de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Cela suppose donc un fait générateur imputable à la personne dont la responsabilité délictuelle est recherchée, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le dommage.
En l’espèce, il apparait que les actes de dénonce sont caduques faute de diligences suffisantes effectuées et ont entrainé la nullité des actes de saisies.

Il est établi que [G] [I] a vu ses deux comptes bloqués, pour l’un pendant un mois et l’autre depuis le 5 octobre 2023, que ces actes ont rendus ses comptes indisponibles et ont privé la requérante des sommes dont elle était propriétaire, ce qui lui cause un préjudice, outre les frais bancaires liés aux deux saisies attribution pratiquées et annulées.

Dans ces conditions, il lui sera alloué la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre le remboursement des frais bancaires y afférents.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile:
La SCI IMOBA succombant, supportera les dépens de la procédure, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
La SCI IMOBA tenue aux dépens, sera condamnée à payer à une somme, qu’il paraît équitable d’évaluer à 1500 euros au titre des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer pour la présente procédure.
Sur l’exécution provisoire :
En vertu de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution, la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision.

PAR CES MOTIFS,
Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition du public au greffe,
Déclare la contestation de Madame [G] [I] recevable ;
Juge nulle les saisies attribution pratiquée le 5 octobre 2023 entre les mains de la banque BNP PARIBAS et BOURSORAMA sur les comptes bancaires de Madame [G] [I] ;

Ordonne la mainlevée de la saisie-attribution effectuée le 5 octobre 2023 entre les mains de la banque BOURSORAMA sur le compte de Madame [G] [I] pour l’intégralité de la somme saisie, soit la somme de 6 966,43 euros ;

Condamne la SCI IMOBA au paiement de la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts à Madame [G] [I] ;
Condamne la SCI IMOBA à payer à 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI IMOBA aux dépens de la procédure ;
Rejette tous autres chefs de demandes ;
Rappelle que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;
Et le juge de l’exécution a signé avec le greffier ayant reçu la minute.  
Le greffier                                                                             Le juge de l’exécution


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 9ème chambre jex
Numéro d'arrêt : 23/11372
Date de la décision : 11/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-11;23.11372 ?
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