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11/04/2024 | FRANCE | N°23/04510

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab1, 11 avril 2024, 23/04510


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N° 24/ DU 11 Avril 2024


Enrôlement : N° RG 23/04510 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3ISR

AFFAIRE : M. et Mme [Y] (Me Joël BATAILLE)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE


DÉBATS : A l'audience Publique du 08 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président (juge rapporteur)
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des débats

: ALLIONE Bernadette

En présence de PORELLI Emmanuelle, Vice-Procureure, Procureur de la République


Vu le rapport fait à l’audie...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N° 24/ DU 11 Avril 2024

Enrôlement : N° RG 23/04510 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3ISR

AFFAIRE : M. et Mme [Y] (Me Joël BATAILLE)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE

DÉBATS : A l'audience Publique du 08 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président (juge rapporteur)
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette

En présence de PORELLI Emmanuelle, Vice-Procureure, Procureur de la République

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 11 Avril 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEURS

Madame [J] [I] épouse [Y], agissant en sa qualité de représentante légale de sa fille [Y] [F], née le 29/05/2006, à [Localité 6] (ALGERIE), de nationalité algérienne
née le 03 Février 1968 à [Localité 3] (13)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 130550012023003045 du 28/02/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Marseille)

Monsieur [G] [Y], agissant en sa qualité de représentant légal de sa fille [Y] [F], née le 29/05/2006, à [Localité 6] (ALGERIE), de nationalité algérienne
né le 12 Décembre 1961 à [Localité 5] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne, demeurant [Adresse 1]

représentés par Maître Joël BATAILLE, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDEUR

M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE PRES LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
en son Parquet sis [Adresse 4]

dispensé du ministère d’avocat

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mademoiselle [F] [Y] est née le 29 mai 2006 à [Localité 6] (Algérie).

Le 5 novembre 2020 le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal de grande instance de Paris a refusé de lui délivrer un certificat de nationalité française.

Par acte de commissaire de justice du 21 avril 2023 madame [J] [Y] et monsieur [G] [Y], représentants légaux de [F] [Y], ont fait assigner le procureur de la République.

Les formalités prévues par l'article 1040 du code de procédure civile ont été accomplies le 14 juin 2023.

Aux termes de leurs dernières conclusions en date du 21 novembre 2023 madame [J] [Y] et monsieur [G] [Y], représentants légaux de [F] [Y], demandent au tribunal de dire que cette dernière est de nationalité française.
Au soutien de leur demande ils exposent que son acte de naissance contient toutes les mentions requises par les articles 30 et 63 de l'ordonnance algérienne du 19 février 1970, qu'elle est la fille de [J] [Y] née [I], née en France le 3 février 1968, titulaire d'un certificat de nationalité délivré le 15 septembre 2016 et française comme étant née en France de deux parents nés dans les territoires français d'Algérie avant le 3 juillet 1962 : [E] [I], né le 29 août 1924 à [Localité 2], et [W] [X], née le 1er décembre 1929 à [Localité 2]. Ils ajoutent que l'article 47 du code civil ne peut s'appliquer aux actes de naissance de ces derniers, puisqu'établis par une autorité française et entré en vigueur après l'établissement de ces actes.

Le procureur de la République a conclu le 17 octobre 2023 au rejet des demandes de mademoiselle [F] [Y] et à la constatation de son extranéité aux motifs que la preuve de la nationalité de madame [J] [I] n'est pas rapportée, en ce que l'acte de naissance de sa mère [W] [X] n'est pas conforme à l'article 34 du code civil en vigueur au jour de sa naissance puisqu'il ne mentionne pas l'heure de la naissance, le jour et l'heure de l'établissement de l'acte, l'acte de naissance de [E] [I] étant également irrégulier pour ne pas comprendre l’heure de la naissance, l’heure d’établissement de l’acte et surtout le nom de l’officier de l’état civil qui a dressé l’acte. Il ajoute que la copie de l'acte de mariage des grands parents de la demanderesse n'est pas conforme à l'article 76 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 août 1944 faute de mentionner l’heure du mariage et les noms des deux témoins majeurs, de sorte que la filiation de madame [J] [I] n'est pas prouvée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Aux termes de l’article 30 du code civil la charge de la preuve, en matière de nationalité, incombe à celui dont la nationalité est en cause.

Mademoiselle [F] [Y] n’étant pas titulaire d’un certificat de nationalité française, elle doit donc rapporter la preuve de sa qualité de française.

Le caractère probant des actes de l'état civil de mademoiselle [F] [Y] n'est pas discuté.

Celle-ci revendique la nationalité française par filiation maternelle. Il lui revient donc d'établir que sa mère est française pour être née d'un parent français.

Madame [J] [I] est titulaire d'un certificat de nationalité française, délivré le 15 septembre 2016. Cependant un tel acte ne profite qu'à son titulaire, et ne peut être invoqué par des tiers. Il convient dont de vérifier que madame [J] [I] est bien la fille de parents nés dans les territoires français d'Algérie et non libérés de leurs liens d'allégeance envers la France.

L'article 34 du code civil, dans sa version en vigueur entre le 28 octobre 1922 et le 19 mai 2013, dispose que :
« Les actes de l'état civil énonceront l'année, le jour et l'heure où ils seront reçus, les prénoms et nom de l'officier de l'état civil, les prénoms, noms, professions et domiciles de tous ceux qui y seront dénommés.
Les dates et lieux de naissance :
a) Des père et mère dans les actes de naissance et de reconnaissance ;
b) De l'enfant dans les actes de reconnaissance ;
c) Des époux dans les actes de mariage ;
d) Du décédé dans les actes de décès,
seront indiqués lorsqu'ils seront connus. Dans le cas contraire, l'âge desdites personnes sera désigné par leur nombre d'années, comme le sera, dans tous les cas, l'âge des déclarants. En ce qui concerne les témoins, leur qualité de majeur sera seule indiquée ».

Si l'acte de naissance de madame [J] [I] est conforme à ces dispositions, tel n'est pas le cas de celui de sa propre mère, madame [W] [X], qui ne mentionne pas l'heure de la naissance, le jour et l'heure où l'acte a été fait.

De même, l'acte de naissance de [E] [I], père de [J] [I] n'indique pas l’heure de la naissance, l’heure d’établissement de l’acte et surtout le nom de l’officier de l’état civil qui a dressé l’acte.

Dans ces conditions, la preuve n'est pas rapportée de la certitude de l'état civil de [W] [X] et de [E] [I], et par conséquent que ces derniers sont bien nés dans des territoires français d'Algérie dans des conditions leur permettant d'acquérir la nationalité française et de la conserver après le 3 juillet 1962, et auraient pu transmettre une telle nationalité à leur fille [J] [I].

En outre l'acte de mariage de [W] [X] et de [E] [I] n'est pas conforme à l'article 76 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 août 1944 faute de mentionner l’heure du mariage et les noms des deux témoins majeurs, de sorte que la filiation paternelle de madame [J] [I] n'est pas prouvée.

Madame [J] [Y] et monsieur [G] [Y], représentants légaux de [F] [Y], seront en conséquence déboutés de leurs demandes, et l'extranéité de [F] [Y] constatée.

Succombant à l'instance, ils en supporteront les dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions applicables en matière d'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :

Constate qu'il a été satisfait aux diligences prescrites par l'article 1040 du code de procédure civile ;

Déboute madame [J] [Y] et monsieur [G] [Y], représentants légaux de [F] [Y] de leurs demandes ;

Constate l'extranéité de mademoiselle [F] [Y], née le 29 mai 2006 à [Localité 6] (Algérie) ;

Ordonne la mention prévue à l'article 28 du code civil ;

Condamne madame [J] [Y] et monsieur [G] [Y], représentants légaux de [F] [Y] aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions applicables en matière d'aide juridictionnelle.

AINSI JUGÉ, PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE ONZE AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab1
Numéro d'arrêt : 23/04510
Date de la décision : 11/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-11;23.04510 ?
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