La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2024 | FRANCE | N°23/02876

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab1, 11 avril 2024, 23/02876


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N° 24/ DU 11 Avril 2024


Enrôlement : N° RG 23/02876 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3CGJ

AFFAIRE : M. [O] [F] [W] (Me Marlène YOUCHENKO)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE


DÉBATS : A l'audience Publique du 08 Février 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président (juge rapporteur)
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des dÃ

©bats : ALLIONE Bernadette

En présence de PORELLI Emmanuelle, Vice-Procureure, Procureur de la République


Vu le rapport fait à l’...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N° 24/ DU 11 Avril 2024

Enrôlement : N° RG 23/02876 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3CGJ

AFFAIRE : M. [O] [F] [W] (Me Marlène YOUCHENKO)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE

DÉBATS : A l'audience Publique du 08 Février 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président (juge rapporteur)
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette

En présence de PORELLI Emmanuelle, Vice-Procureure, Procureur de la République

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 11 Avril 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [O] [F] [W]
né le 01 Novembre 2004 à [Localité 2] (TUNISIE)
de nationalité Tunisienne, demeurant et domicilié[Adresse 1]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 831370012022007934 du 07/10/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de TOULON)

représenté par Maître Marlène YOUCHENKO, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDEUR

M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE PRES LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
en son Parquet sis [Adresse 4]

dispensé du ministère d’avocat

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur [O] [W] est né le 1er novembre 2004 à [Localité 2] (Tunisie).

Le 4 mai 2022 il a souscrit une déclaration de nationalité française sur le fondement de l'article 21-12 du code civil, dont l'enregistrement a été refusé par le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal judiciaire de Toulon le 1er juin 2022.

Par acte de commissaire de justice du 28 février 2023 monsieur [W] a fait assigner le procureur de la République.

Le récépissé prévu par l'article 1040 du code de procédure civile a été délivré le 28 mars 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions du 2 octobre 2023 monsieur [W] demande au tribunal d'ordonner l'enregistrement de sa déclaration de nationalité, de dire qu'il est français depuis le 4 mai 2022, et de condamner le Trésor Public à lui payer la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Au soutien de ses demandes il fait valoir que ses documents d'état civil sont probants au sens de l'article 47 du code civil dès lors qu'il serait d'usage que dans les versions française des actes délivrés par les autorités tunisiennes, certaines mentions feraient défaut dans la mesure où elles ne sont pas considérées comme substantielles. Il se prévaut en outre de la version arabe de son acte de naissance reprenant l'ensemble des mentions prescrites par la loi tunisienne relative à l'état civil, et ajoute que le fait que certaines mentions figurent dans une version de l'acte et non dans l'autre est insuffisant à discréditer l'ensemble des deux versions.
Sur sa situation, monsieur [W] expose avoir été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance depuis le 3 janvier 2019 et remplir dès lors des conditions de l'article 21-12 du code civil.

Le procureur de la République a conclu le 30 août 2023 au rejet des demandes de monsieur [W] et à la constatation de son extranéité aux motifs qu'il ne justifie pas d'un état civil probant, l'acte de naissance du 23 janvier 2019 ne mentionnant pas la profession des parents, leurs dates et lieu de naissance ou leur âge, l'âge, la profession et le domicile du déclarant. Il ajoute que les traductions de l'extrait avec filiation sont plus complètes que l'acte initialement produit, et font état d'officiers d'état civil différents. Il souligne encore des imprécisions sur la date de déclaration de la naissance et d'établissement de l'acte de naissance, et que le nom du déclarant n'est jamais porté, celui-ci étant mentionné comme étant un hôpital.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Aux termes de l’article 30 du code civil la charge de la preuve, en matière de nationalité, incombe à celui dont la nationalité est en cause.

Monsieur [O] [W] n’étant pas titulaire d’un certificat de nationalité française, il doit donc rapporter la preuve de sa qualité de français.

Le requérant doit en premier lieu produire des pièces d’état civil fiables au sens de l’article 47 du code civil selon lequel tout acte de l’état civil des français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Monsieur [W] produit aux débats la version française de la copie intégrale de son acte de naissance, selon laquelle il est né le 1er novembre 2004, à une heure non précisée. Il y est indiqué que la déclaration a été faite le 3 novembre 2004 à midi par « l'hôpital », et que l'officier de l'état civil qui a dressé l'acte de naissance est [O] [R].

Il produit encore la traduction de la version arabe du même acte de naissance, selon laquelle il est né le 1er novembre 2004 à 15h45. Contrairement à la version française, les dates de naissance et professions des parents sont indiquées. Il y est également mentionné que la déclaration a été faite le 3 novembre 2004, mais que le déclarant est « l'hôpital régional de [3] n°552 le 2 novembre 2004 ». L'officier de l'état civil qui a dressé l'acte de naissance est cette fois [O] [B].

Or l'article 6 de la loi tunisienne du 30 juillet 1957 dispose que les actes énonceront l'année, le jour et l'heure où ils seront reçus, les prénom et nom de l'Officier de l'Etat Civil, les prénoms, noms, professions et domiciles de tous ceux qui y seront dénommés.
De même il est disposé par l'article 24 de ladite loi que la naissance de l'enfant sera déclarée par le père ou à défaut du père, par les docteurs en médecine, sages-femmes ou autres personnes qui auront assisté à l'accouchement, et lorsque la mère aura accouché hors de son domicile, s'il est possible, par la personne chez qui elle aura accouché. Selon l'article 7 cet acte doit être signé par l'officier de l'état civil, les comparants et les témoins.

Il s'ensuit qu'aucun des deux actes produits n'est conforme à la loi tunisienne, en ce que la naissance a été déclarée par une personne qui ne fait pas partie de l'une des catégories énumérées à l'article 24 susvisé. L'énumération que comporte cet article ne vise en effet que des personnes physiques et il ne peut dans ces conditions être considéré qu'un hôpital, personne morale, fasse partie des « autres personnes ayant assisté à l'accouchement ».

Par ailleurs ils comportent des incohérences sur la date de la déclaration de naissance (le 2 ou le 3 novembre 2004) et sur le nom de l'officier de l'état civil qui a dressé l'acte de naissance ([O] [R] ou [O] [B]).

Enfin certaines mentions manquantes sur la version française sont présentes sur la version arabe, notamment la profession et la date de naissance des parents. Or un acte de l'état civil est un document unique conservé dans un registre, qui ne saurait donner lieu à la délivrance de copies différentes entre elles.

Aucun de ces deux actes ne peut donc faire preuve de l'état civil de monsieur [W]. Celui-ci sera donc débouté de ses demandes, et son extranéité constatée.

Succombant à l'instance, il en supportera les dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions applicables en matière d'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :

Constate qu'il a été satisfait aux formalités de l'article 1040 du code de procédure civile ;

Déboute monsieur [O] [W] de ses demandes ;

Constate l'extranéité de monsieur [O] [W], né le 1er novembre 2004 à [Localité 2] (Tunisie) ;

Ordonne la mention prévue à l'article 28 du code civil ;

Condamne monsieur [O] [W] aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions applicables en matière d'aide juridictionnelle.

AINSI JUGÉ, PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE ONZE AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab1
Numéro d'arrêt : 23/02876
Date de la décision : 11/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-11;23.02876 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award