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26/03/2024 | FRANCE | N°20/04764

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 3ème chbre cab a4, 26 mars 2024, 20/04764


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 26 MARS 2024



Enrôlement : N° RG 20/04764 - N° Portalis DBW3-W-B7E-XSUR

AFFAIRE : M. [P] [R] (Me GASIOR)
C/ S.D.C. RÉSIDENCE [Adresse 5] (la SELARL GIRAUD-GAY ET ASSOCIES)





DÉBATS : A l'audience Publique du 12 décembre 2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 27 fÃ

©vrier 2024 puis prorogée au 26 mars 2024



PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, V...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

JUGEMENT N°24/
du 26 MARS 2024

Enrôlement : N° RG 20/04764 - N° Portalis DBW3-W-B7E-XSUR

AFFAIRE : M. [P] [R] (Me GASIOR)
C/ S.D.C. RÉSIDENCE [Adresse 5] (la SELARL GIRAUD-GAY ET ASSOCIES)

DÉBATS : A l'audience Publique du 12 décembre 2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 27 février 2024 puis prorogée au 26 mars 2024

PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024

Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Assistée de Madame Pauline ESPAZE, Greffière

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [P] [R]
né le 4 mars 1973 à [Localité 6]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]

représenté par Maître Nicole GASIOR, avocate au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DÉFENDEURS

Syndicat des Copropriétaires de la RÉSIDENCE [Adresse 5]
représenté par son Syndic en exercice la S.A.R.L. SIGA PROVENCE
dont le siège social est sis [Adresse 2]
prise en la personne de son représentant légal

représenté par Maître Laurent GAY de la SELARL GIRAUD-GAY ET ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

S.A.M.C.V. SMABTP
immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 775 684 764
dont le siège social est sis [Adresse 4]
prise en la personne de son représentant légal

représentée par Maître Fabien BOUSQUET de la SARL ATORI AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte du 17 octobre 2003, Monsieur [P] [R] a acquis en état futur d’achèvement un appartement au sein de la copropriété de la Résidence [Adresse 5] sise [Adresse 3].
Il a pris livraison du bien le 24 février 2005.

Il a déclaré un dégât des eaux en 2010.

La SMABTP, assureur dommages-ouvrage, a versé une indemnisation au syndicat des copropriétaires pour ce sinistre le 25 janvier 2011.

De nouvelles infiltrations sont apparues courant février 2014.

Monsieur [P] [R] a saisi le juge des référés, qui par ordonnance du 8 janvier 2016 a désigné Monsieur [O] en qualité d’expert.
Le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] a appelé aux opérations d’expertise la SMABTP. Par ordonnance du 3 mars 2017 les opérations d’expertise lui ont été déclarées opposables.

Le rapport a été déposé le 20 mai 2019.

*

Suivant exploit d’huissier du 25 mai 2020, Monsieur [P] [R] a fait assigner le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] aux fins d’obtenir la condamnation de ce dernier à notamment procéder aux travaux de reprise sous astreinte et à l’indemniser de ses divers préjudices.

Suivant exploit d’huissier du 8 février 2021, le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] a appelé en garantie la SMABTP en qualité d’assureur dommages-ouvrage.

Les procédures ont été jointes par ordonnance du 2 décembre 2021.

Par ordonnance d’incident du 28 mars 2023, le juge de la mise en état a déclaré recevable l’action du syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] à l’encontre de la SMABTP.

*

Par conclusions notifiées par RPVA le 23 octobre 2023, Monsieur [P] [R] demande au tribunal de :
- constater les désordres affectant l'appartement de Monsieur [R] et liés à des infiltrations,
- constater que lesdits désordres ont pour origine un défaut d'étanchéité des balcons,
- constater le préjudice de jouissance subi par Monsieur [R],
- dire que la responsabilité du syndicat des copropriétaires de l'immeuble la Résidence [Adresse 5], [Adresse 3] est pleinement engagée,
- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble la Résidence [Adresse 5], [Adresse 3] à verser à Monsieur [R] la somme de 2.700 € en réparation de son préjudice matériel,
- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble la Résidence [Adresse 5], [Adresse 3] à verser à Monsieur [R] la somme de 43.276,80 € en réparation de son préjudice de jouissance,
- condamner le requis au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens de la procédure dépens, en ce compris le coût de l’expertise judiciaire,
- dire que dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier, les sommes retenues par l'huissier par application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996 n° 96-1080 (tarif des huissiers) devront être supportées par le débiteur en sus.

Par conclusions notifiées par RPVA le 19 octobre 2022, le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] demande au tribunal de :
- à titre principal,
- débouter Monsieur [P] [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
- juger que le Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble la RESIDENCE [Adresse 5] représenté par son syndic en exercice la SARL SIGA PROVENCE a toujours été diligent et a entrepris les travaux nécessaires préconisés par les sachants au fur et à mesures des infiltrations constatées par Monsieur [R],
- juger que le Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble la RESIDENCE [Adresse 5] représenté par son syndic en exercice la SARL SIGA PROVENCE n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité,
- rejeter en conséquence, toutes les demandes de Monsieur [R] formulées à l'encontre du Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble la RESIDENCE [Adresse 5] représenté par son syndic en exercice, la SARL SIGA PROVENCE,
- à titre subsidiaire, condamner la SMABTP, prise sa qualité d'assureur du Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble la RESIDENCE [Adresse 5] représenté par son syndic en exercice, la SARL SIGA PROVENCE, à le relever et garantir de toutes les demandes qui pourraient être prononcées à son encontre,
- en tout état de cause, condamner Monsieur [P] [R] à payer au Syndicat des Copropriétaires de l'immeuble la RESIDENCE [Adresse 5], représenté par son syndic en exercice, la SARL SIGA PROVENCE, la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 de Nouveau code de Procédure Civile, outre les dépens, distraits au profit de Me Laurent GAY.

Par conclusions notifiées par RPVA le 3 octobre 2023, la SMABTP demande au tribunal, sur le fondement de l’article 1792 du code civil, de :
- débouter le Syndicat des copropriétaires de L'ENSEMBLE IMMOBILIER LA RESIDENCE DES PINS de son appel en garantie à l'endroit de la SMABTP,
- juger que la demande relative à l'indemnisation des préjudices immatériels ne relève pas des garanties obligatoires et n'ont pas vocation à être mobilisées,
- débouter le Syndicat des copropriétaires de L'ENSEMBLE IMMOBILIER LA RESIDENCE DES PINS de son appel en garantie à l'endroit de la SMABTP,
- condamner le Syndicat des copropriétaires de L'ENSEMBLE IMMOBILIER LA RESIDENCE DES PINS à payer à la SMABTP la somme de 1500 € au titre des frais irrépétibles.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 28 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires

L’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa version applicable au présent litige issue de la loi du 31 décembre 1985 l’affaire ayant été enrôlée le 28 mai 2020, énonce que la collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile.
Le syndicat peut revêtir la forme d'un syndicat coopératif régi par les dispositions de la présente loi. Le règlement de copropriété doit expressément prévoir cette modalité de gestion.
Il établit, s'il y a lieu, et modifie le règlement de copropriété.
Il a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

En l’espèce, Monsieur [P] [R] a procédé à la première déclaration de dégât des eaux le 18 janvier 2020 suite à l’apparition d’infiltrations dans la chambre de son appartement.

Des travaux ont été entrepris dans le cadre de la garantie dommages-ouvrage. Toutefois, Monsieur [P] [R] a procédé à une nouvelle déclaration de sinistre le 18 mars 2013.

Des travaux ont été à nouveau entrepris. Toutefois, les infiltrations ont perduré.

Une recherche de fuite réalisée par la société ECRES le 4 juin 2014 à la demande du syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] a montré des défaillances d’étanchéité :
- des jointures périphériques de la douche de l’appartement des consorts [E]/[S],
- un manque d’étanchéité autour des mains courantes de la zone gauche du balcon du lot des consorts [E]/[S].

L’assureur de Monsieur [P] [R], la société MATMUT, a diligenté un expert les 3 et 26 novembre 2014, qui a constaté la persistance d’humidité anormale dans le lot de ce dernier, attestant selon l’expert une absence de réalisation des travaux d’étanchéité par le syndicat des copropriétaires.

Les 2 février et 12 mai 2015, Monsieur [P] [R] a fait procéder à des mesures de taux d’humidité dans son appartement par la société ABEILLE RENOVATION 13, qui a indiqué mesurer un taux de 60 % la première fois et 80 % la seconde fois.

L’expert judiciaire a constaté dans la chambre de Monsieur [R], côté façade à droite dans l’angle entre le plafond et les deux murs, la surface cartonnée des doublages a été arrachée et laisse voir des auréoles tracées sur la surface en béton traduisant des infiltrations et une humidité.
Dans le séjour, côté façade à gauche, des traces d’infiltrations sont visibles.

L’expert constate sur des photographies prises par Monsieur [P] [R] qu’un phénomène d’infiltrations actives par goutte à goutte est présent dans le salon comme dans la chambre.

L’expert indique que les désordres de la chambre de Monsieur [P] [R] se situent aux extrémités du balcon de l’appartement du dessus, soit au droit des liaisons entre les relevés maçonnés du balcon et de la façade.

L’expert déclare que les balcons ne sont pas étanches, leur surface carrelée reçoit beaucoup d’eau, qui se concentre vers la gargouille. L’eau s’infiltre au droit des joints et des fissures, percole la chape et se répand sur la dalle qui n’est pas en pente. Par ailleurs, des micro-fissures de l’enduit de façade à proximité des points d’accrochage des balcons sont mises en évidence. L’eau pénètre alors dans les ouvrages en béton et va ressortir soit vers l’intérieur en empruntant l’ouverture des micro-fissures dans le séjour de Monsieur [R], soit migrer vers une surface plus chaude avec formation de calcite vers la chambre de Monsieur [R] ou en façade.
L’expert précise que les constats de mauvais état des surfaces de ces balcons sur les appartements des autres immeubles avec la même exposition confirment ces analyses.

L’expert conclut que les infiltrations proviennent principalement de la façade à proximité des points de liaison et que le balcon de Monsieur [E] est à l’origine des désordres chez Monsieur [P] [R].

L’expert constate que des travaux ont été entrepris dans le cadre de la garantie dommages-ouvrage et indique que suivant déclarations de Monsieur [P] [R] les infiltrations auraient cessé le 22 avril 2014.

Toutefois, l’expert note que rien n’a été fait pour assurer l’étanchéité de la surface de façade à proximité du contact du balcon avec la façade et du relevé de la dalle balcon principalement à proximité de la gargouille, mais aussi de l’autre côté. L’expert affirme la nécessité de traiter ces fissures et de reprendre une surface de 1m2 environ des deux côtés.

L’expert n’évoque pas la persistance d’infiltrations au delà du 22 avril 2014 malgré les mesures d’humidité réalisées les 2 février et 12 mai 2015, qui ne sont pas évoquées dans le rapport.

Le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] fait valoir que sa responsabilité n’est pas susceptible d’être engagée car il a procédé à des diligences à chaque déclaration de sinistre et a fait procéder aux travaux prescrits par les experts amiables réalisées par l’assureur dommages-ouvrage.

Toutefois, l’expert a mis en évidence l’existence de vices de construction, en présence de micro-mouvements structurels ayant provoqué des micro-fissures aux points d’ancrage des balcons et du mauvais positionnement des gargouilles, beaucoup trop près des façades.

Ces vices de construction ont causé des désordres dans le lot privatif de Monsieur [P] [R]. Dans ces conditions, la responsabilité du syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] est nécessairement engagée et ce dernier n’est pas susceptible d’être exonéré par la démonstration d’une absence de faute.

Le syndicat des copropriétaires sera tenu de réparer les préjudices de Monsieur [P] [R].

Sur les préjudices de Monsieur [P] [R]

- Sur le préjudice matériel

Monsieur [P] [R] réclame le paiement de la somme de 2.700 € au titre des frais de remise en état de son logement.

L’expert n’a pas évalué le montant des frais de réparation et remise en état du logement de Monsieur [P] [R].

Ce dernier produit une facture dont l’en-tête n’est pas lisible, de telle sorte que le nom de la société n’est pas connu. Cette facture du 24 janvier 2020 s’élève à 2.700 € pour divers travaux, comprenant des travaux de plomberie, de remise en état de la salle de bains non concernée par les désordres, de même que pour la cuisine avec reprise de carrelage, et diverses prestations sans aucun lien avec le litige.
Cette facture n’étant pas détaillée, il n’est pas possible d’extraire les montants sans rapport avec les désordres.

En l’absence de tout élément permettant de chiffrer les frais de reprise des murs et plafonds atteints par les désordres, Monsieur [P] [R] ne pourra qu’être débouté de sa demande au titre des préjudices matériels, sans qu’il ne soit nécessaire de répondre aux argumentations relatives à l’indemnisation dans le cadre de la convention CIDRE, étant cependant remarqué que l’indemnisation évoquée par la société SMABTP concerne le premier sinistre de 2010.

- Sur le préjudice de jouissance

Monsieur [P] [R] réclame l’indemnisation de son préjudice de jouissance pour une période de 7 années, sans que les dates ne sont précisées.
L’expert a indiqué que Monsieur [P] [R] avait subi des infiltrations actives de 2010 à avril 2014 et qu’ensuite, à défaut de reprises des embellissements, Monsieur [P] [R] avait subi les stigmates des dégradations du bien pendant encore trois ans, sans donner aucune explication sur cette durée de trois ans. Toutefois, cette période de 7 ans n’est contestée par aucune partie.

Monsieur [P] [R] déclare que son bien fait une surface de 32 m2 et que les désordres ont eu des conséquences sur 28 m2 de la surface de son logement. Cette évaluation ne résulte par des travaux de l’expert mais d’un dire du conseil de Monsieur [P] [R], qui ne produit aucune pièce justificative d’un tel calcul.

Monsieur [P] [R] verse aux débats un avis de valeur locative daté du 11 avril 2019, indiquant une valeur locative comprise entre 580 et 600 € hors charges.

Monsieur [P] [R] en déduit un préjudice de jouissance sur la base mensuelle de 590 € par mois, calculée sur la base de 18,40 € par mètre carré.

Il convient de constater que cette évaluation revient à indemniser une impossibilité totale d’utiliser le bien pendant 7 ans. Or, la nature des désordres subis par Monsieur [P] [R] ne saurait être évaluée dans de telles proportions car ni le rapport d’expertise ni les pièces ni les argumentations de ce dernier ne mettent en évidence une impossibilité d’habiter le bien pendant 7 ans. Si l’expert indique que le bien est vide, Monsieur [P] [R] ne développe aucune argumentation sur l’usage qui était fait de ce bien et sur les raisons de cette absence d’occupation. Il n’apporte aucune information sur l’existence de contrats de bail avant et pendant les désordres.
En l’état, les infiltrations telles que mises en évidence par l’expertise ne caractérisent aucune impossibilité totale d’occuper le bien. Seule la gêne dans l’occupation est susceptible d’être indemnisée.

La nature des désordres subis justifie d’allouer à Monsieur [P] [R] une indemnisation du préjudice de jouissance à hauteur de 30 % de la valeur locative sur la base de 590 € par mois (représentant la moyenne entre 580 et 600 €), soit 177 € par mois.

Pour la durée de 7 ans déterminée par l’expert et non contestée par les parties, il convient d’allouer à Monsieur [P] [R] la somme de 177 x 84 = 14.868 €.

Le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] sera condamné à payer à Monsieur [P] [R] la somme de 14.868 € au titre de son préjudice de jouissance.

Sur la garantie de la SMABTP

La SMABTP estime que l’appel en garantie diligenté à son encontre ne saurait aboutir dans la mesure où les désordres subis par Monsieur [P] [R] sont de nature exclusivement esthétique depuis arrêt des infiltrations en avril 2014 et où en tout état de cause ces demandes sont prescrites.

Toutefois, s’agissant de la prescription, la SMABTP ne vise aucun texte ni ne développe de démonstration au sujet de cette prescription, et ne formule aucune fin de non recevoir dans son dispositif. Le tribunal n’est donc pas saisi de cette fin de non recevoir, étant observé à titre surabondant qu’en tout état de cause, il n’aurait pas été compétent pour la trancher compte tenu de la date d’enrôlement de la présente procédure.

S’agissant de la nature esthétique des désordres, les infiltrations ont causé des dommages impropres à la destination de l’immeuble. Le fait que les remises en état n’aient pas été faites depuis 2014 est le résultat de la persistance du litige entre les parties sur la réalisation de travaux de nature à mettre un terme définitif aux infiltrations. L’expert a dit que les travaux réalisés ne sont pas complets et que l’arrêt des infiltrations est dû à un hasard et non à une réalisation de l’intégralité des prestations à accomplir.
Les désordres subis par Monsieur [P] [R] ne peuvent pas être qualifiés de nature esthétique.

Ensuite, la SMABTP estime que le préjudice de jouissance n’est pas garanti contractuellement. Toutefois, et alors que le juge de la mise en état a attiré son attention dans son ordonnance d’incident sur le fait qu’elle ne produisait pas les conditions particulières souscrites dans le cadre de cette opération immobilière et qu’il n’était pas établi que les conditions générales produites étaient applicables à la garantie mobilisée, la SMABTP se borne à verser à nouveau uniquement ces conditions générales.

En l’absence de toute production du contrat souscrit par le maître d’ouvrage de l’opération, les argumentations de la SMABTP ne pourront qu’être écartées.

Elle devra sa garantie au titre du préjudice de jouissance subi par Monsieur [P] [R].

Sur les demandes accessoires

L'article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge par décision motivée n'en mette la totalité ou une partie à la charge de l'autre partie.

En application de l’article 699 du code de procédure civile, les avocats et les avoués peuvent dans les matières ou leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance, sans avoir reçu provision.

La société SMABTP succombant principalement dans cette procédure, elle sera condamnée aux entiers dépens.

Il doit être rappelé qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le sort de l’expertise judiciaire, qui est comprise par définition dans les dépens suivant dispositions de l’article 695 du Code de procédure civile.

Il résulte de l'article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.
La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %.

En l'espèce, il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [P] [R] la totalité des frais irrépétibles qu’il a pu engager et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Il conviendra en conséquence de condamner le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice à payer la somme de 2.000 € à Monsieur [P] [R] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] et la société SMABTP seront nécessairement déboutés de leurs demandes dirigées à l’encontre de Monsieur [P] [R] fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

En vertu de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Sur la demande formulée en cas d’exécution forcée concernant l’article 10 du décret du 8 mars 2001 sur le tarif des huissiers, il s’agit d’une demande relative à une difficulté d’exécution. Elle est par conséquent irrecevable devant le juge du fond, et en tout état de cause prématurée en l’état.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique par jugement mis à la disposition des parties au greffe, contradictoire et en premier ressort,

Déboute Monsieur [P] [R] de sa demande au titre du préjudice matériel,

Condamne le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice à payer à Monsieur [P] [R] la somme de 14.868 € au titre de son préjudice de jouissance,

Condamne la société SMABTP à relever et garantir le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice de cette condamnation,

Condamne la société SMABTP aux dépens, qui comprennent par définition l’expertise judiciaire,

Condamne le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice à payer à Monsieur [P] [R] la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 5] pris en la personne de son syndic en exercice et la société SMABTP de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

Déclare irrecevable la demande fondée sur l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996 n° 96-1080.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE DE LA TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE VINGT-SIX MARS DEUX MIL VINGT QUATRE.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 3ème chbre cab a4
Numéro d'arrêt : 20/04764
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;20.04764 ?
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