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19/03/2024 | FRANCE | N°21/10168

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 3ème chbre cab a1, 19 mars 2024, 21/10168


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A1

JUGEMENT N°
du 19 Mars 2024


Enrôlement : N° RG 21/10168 - N° Portalis DBW3-W-B7F-ZMZG


AFFAIRE : M. [C] [H] ( Me Olivier ROSATO)
C/ S.A. AXA FRANCE IARD (la SARL ATORI AVOCATS) - SAS CABINET PAUL STEIN (Me Anne Cécile NAUDIN)



DÉBATS : A l'audience Publique du 16 Janvier 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats :


Président : Madame Aurore TAILLEPIERRE,


Greffier : Madame Sylvie HOBESSERIAN,


A l'issue de laque

lle, la date du délibéré a été fixée au 19 Mars 2024


PRONONCE : Par mise à disposition au greffe le 19 Mars 2024

Par Madame Aurore TAILLEPI...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A1

JUGEMENT N°
du 19 Mars 2024

Enrôlement : N° RG 21/10168 - N° Portalis DBW3-W-B7F-ZMZG

AFFAIRE : M. [C] [H] ( Me Olivier ROSATO)
C/ S.A. AXA FRANCE IARD (la SARL ATORI AVOCATS) - SAS CABINET PAUL STEIN (Me Anne Cécile NAUDIN)

DÉBATS : A l'audience Publique du 16 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats :

Président : Madame Aurore TAILLEPIERRE,


Greffier : Madame Sylvie HOBESSERIAN,

A l'issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 19 Mars 2024

PRONONCE : Par mise à disposition au greffe le 19 Mars 2024

Par Madame Aurore TAILLEPIERRE, Juge

Assistée de Madame Sylvie HOBESSERIAN, Greffier

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [C] [H]
né le 13 Juillet 1977 à [Localité 4] (13), de nationalité française, domicilié et demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Olivier ROSATO, avocat au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDERESSES

LA S.A. AXA FRANCE IARD, inscrite au RCS de Paris sous le numéro 722 057 460 et dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Maître Yves SOULAS de la SARL ATORI AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

LA S.A.S. CABINET PAUL STEIN, inscrite au RCS de Marseille sous le numéro 069 800 464 et dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Maître Anne Cécile NAUDIN de l’ASSOCIATION CABINET NAUDIN AVOCATS JURISTES, avocats au barreau de MARSEILLE

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [H] est propriétaire d’un appartement au sein d’une copropriété située [Adresse 2].

Le cabinet PAUL STEIN, assuré auprès de la SA AXA FRANCE IARD au titre de sa responsabilité civile professionnelle, occupe les fonctions de syndic de l’immeuble.

Dans le courant de l’année 2019, Mme [Y], propriétaire de l’appartement situé au-dessus de celui de M. [H], a installé une climatisation au sein de son domicile et fixé le climatiseur extérieur sur la façade de l’immeuble, au-dessus de la fenêtre de l’appartement de M. [H].

Par courriel en date du 19 septembre 2019, le CABINET PAUL STEIN a informé M. [H] que sa voisine n’avait pas obtenu les autorisations nécessaires à une telle installation en dépit du règlement de copropriété.

M. [H] s’est plaint de ce qu’en dépit de nombreuses relances téléphoniques et courriels en mars et avril 2020, le CABINET PAUL STEIN n’a entrepris aucune démarche concrète pour obliger Mme [Y] à se conformer au règlement de copropriété, remettre aux normes la façade et faire déplacer son installation.

***

Par acte extrajudiciaire en date du 22 juin 2021, M. [H] a fait citer le cabinet PAUL STEIN devant le juge du contentieux et de la protection de Marseille aux fins de condamnation à engager les démarches utiles pour faire respecter le règlement de copropriété.

Par acte extrajudiciaire en date du 12 juillet 2021, le cabinet PAUL STEIN a assigné son assureur, la SA AXA France IARD, aux fins de venir concourir au débouté de M. [H] et à titre subsidiaire, de le relever et garantir de toutes condamnations mises à sa charge.

Par soit-transmis en date du 2 novembre 2021, le juge du contentieux et de la protection a soulevé d’office son incompétence et transmis l’affaire au tribunal judiciaire de Marseille.

Par ordonnance en date du 6 septembre 2022, le juge de la mise en état a prononcé la jonction de l’affaire principale et de l’appel en garantie.

***

Dans ses conclusions récapitulatives signifiées par RPVA le 26 juin 2023, M. [H] demande au Tribunal de :

Vu l’article 1231-1 du code civil,
Vu l’article 1217 du code civil,
Vu l’article 1221 du code civil,
Vu les articles 1240 et suivants du code civil,
Vu l’article 18 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965,
Vu l’article 700 du code de procédure civile,

- A TITRE PRINCIPAL : CONSTATER l’inexécution de l’obligation contractuelle du CABINET PAUL STEIN, en l’espèce, son obligation « d’assurer l’exécution des dispositions du règlement de copropriété », en ne sommant pas Madame [Y] de faire enlever son climatiseur installé illégalement sur un mur appartenant à la copropriété,
- ORDONNER l’exécution forcée en nature de l’obligation contractuelle du CABINET PAUL STEIN, en l’espèce, obliger le CABINET PAUL STEIN à engager toutes démarches utiles pour faire respecter le règlement de copropriété à Madame [Y], copropriétaire,
- A TITRE SUBSIDIAIRE : CONSTATER la faute de gestion du CABINET PAUL STEIN,
- CARACTÉRISER la responsabilité délictuelle du CABINET PAUL STEIN,
- EN CONSÉQUENCE : CONDAMNER le CABINET PAUL STEIN à verser à Monsieur [H] la somme de 1.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral,
- CONDAMNER le CABINET PAUL STEIN à verser à Monsieur [H] la somme de 2.400,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Il indique que le syndic de copropriété est tenu d’assurer l’exécution des dispositions du règlement de copropriété par les copropriétaires, il doit tout mettre en œuvre pour respecter son obligation contractuelle : or, la violation du règlement de copropriété par Mme [Y] a été signalée au CABINET PAUL STEIN par M. [H] par téléphone, courriels et courriers et rien ne permet de prouver que la lettre de mise en demeure a été effectivement envoyée et reçue par Mme [Y] et aucune démarche concrète n’a été réalisée par le syndic pour faire respecter le règlement de copropriété.
Il fait état de son préjudice moral actuel et certain, craignant la dangerosité de l’installation du climatiseur extérieur par sa voisine et compte tenu du caractère inesthétique de ce dernier, dévaluant de manière significative la valeur de son bien immobilier en ce qu’il ne peut plus jouir d’une vue dégagée depuis la fenêtre de l’appartement.
Il ajoute que si le CABINET PAUL STEIN avait entamé des démarches auprès de Mme [Y] afin que celle-ci sollicite une autorisation préalable de l’assemblée générale des copropriétaires, le climatiseur extérieur aurait été démonté et installé différemment, aussi sa responsabilité contractuelle doit être engagée. Il sollicite l’exécution forcée de l’obligation de s’assurer du respect du règlement de copropriété par le CABINET PAUL STEIN.
Il rappelle qu’il a fait mettre à l’ordre du jour de l’assemblée générale prévue le 31 mai 2023 un point 16 intitulé “À la demande de M. [H], le syndic fait un rappel sur les climatisations”.
Il fait état à titre subsidiaire, d’une faute délictuelle du syndic, résidant dans sa négligence caractérisée par l'abstention ou les retards dommageables dans l'accomplissement d'un acte compris dans le cadre de sa mission.

***

Dans ses conclusions récapitulatives signifiées par RPVA le 2 juin 2023, la SAS CABINET PAUL STEIN demande au Tribunal de :

Vu les articles 1240 et suivants du Code civil,
Vu les articles 331, 696, 700 du Code de Procédure civile,
Vu le contrat d’assurance responsabilité civile,
Vu la jurisprudence citée,

- A titre principal : Débouter M. [H] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- A titre subsidiaire : Si par impossible une quelconque condamnation devait être prononcée à l’encontre du Cabinet PAUL STEIN, Condamner la Société AXA France IARD à relever et garantir le Cabinet PAUL STEIN de l’intégralité des condamnations prononcées à son encontre au profit de M. [C] [H] ce tant en principal et intérêts que dépens et frais,
- En tout état de cause, Condamner M. [H] à verser à la SAS CABINET PAUL STEIN la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Me NAUDIN.

Elle soutient que le syndic de copropriété n’est pas le mandataire des copropriétaires pris individuellement, sa responsabilité envers les copropriétaires étant uniquement de nature délictuelle. En outre, M. [H] ne caractérise pas la moindre faute et ni un préjudice personnel et le syndic ne peut se substituer au syndicat des copropriétaires pour exercer une action tendant au rétablissement des parties communes dans leur état antérieur.
Elle ajoute que M. [H] ne démontre aucune perte de valeur de son bien ni trouble personnel que l’installation lui causerait ni aucun élément technique justifiant d’une quelconque dangerosité de l’installation. Elle affirme que la suppression d’une climatisation ne peut être qualifiée de « travaux urgents » et que même dans le cas de l’article 37 du décret du 17 mars 1967, le pouvoir du syndic de copropriété est limité.
Elle estime qu’il pouvait agir individuellement pour solliciter la cessation d’une atteinte aux parties communes et appeler dans la cause le syndicat des copropriétaires mais s’est abstenu et a préféré assigner le syndic sur un fondement juridique erroné devant une juridiction incompétente et n’a accompli aucune démarche pour tenter de mettre fin au litige en sollicitant une inscription à l’ordre du jour d’une assemblée générale des copropriétaires.

***

Dans ses conclusions récapitulatives signifiées par RPVA le 25 octobre 2022, la SA AXA FRANCE IARD demande au Tribunal de :

Vu les articles 1240 et suivants du Code civil,

- A TITRE PRINCIPAL, Débouter M. [H] de ses entières demandes, fins et conclusions,
- Débouter le cabinet PAUL STEIN de sa demande au titre des frais irrépétibles et des dépens,
- Condamner M. [H] au paiement d’une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens d’instance distraits au profit de Me Yves SOULAS,
- A TITRE SUBSIDIAIRE, Juger que la société AXA France IARD ne peut relever et garantir le cabinet PAUL STEIN au titre d’une condamnation à une obligation de faire,
- Ainsi, débouter le cabinet PAUL STEIN de sa demande tendant à voir AXA France IARD le relever et garantir de la demande en exécution forcée en nature tendant à l’obliger à engager toutes démarches utiles pour faire respecter le règlement de copropriété à Madame [Y],
- En cas d’admission de la demande, réduire à plus justes proportions les dommages-intérêts alloués à M. [H],
- Débouter M. [H] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du CPC,
- Débouter le cabinet PAUL STEIN de sa demande au titre des frais irrépétibles et des dépens.

Elle soutient que M. [H] n’est pas lié contractuellement au syndic contrairement au syndicat des copropriétaires, aussi son recours à l’encontre du cabinet PAUL STEIN ne peut être fondé que sur le principe de la responsabilité délictuelle. Au demeurant, le syndic n’a pas été inactif puisqu’il a pris attache avec Mme [Y] et s’est fait communiquer un courrier de la société ayant réalisé lesdits travaux. En outre, l’enlèvement de l’unité extérieure de l’installation de climatisation mise en oeuvre par Mme [Y] ne répond pas à la définition des travaux pouvant être engagés d’autorité par le syndic en application des dispositions de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965.
Elle conteste le préjudice allégué, relevant que la dangerosité et la perte de vue ne sont pas prouvées et que l’installation litigieuse a été mise en œuvre par un professionnel dans le courant de l’année 2019. Par ailleurs, le lien de causalité certain et direct entre la faute alléguée et le dommage prétendu est inexistant et M. [H] était en capacité d’entreprendre les démarches et/ou les procédures nécessaires à l’enlèvement de l’installation litigieuse. Aussi, en s’abstenant, il a commis une faute par omission à l’origine du préjudice dont il sollicite réparation auprès de son syndic.
Elle expose qu’en aucun cas en application du contrat, elle n’est susceptible de relever et garantir le cabinet PAUL STEIN d’une condamnation tendant à engager toutes démarches utiles pour faire respecter le règlement de copropriété à Mme [Y], ne couvrant que les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de son assuré.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

***

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 novembre 2023.

L'audience de plaidoiries s'est tenue le 16 janvier 2024 et la décision a été mise en délibéré au 19 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

L'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le syndic est chargé, notamment, d'assurer l'exécution des dispositions du règlement de copropriété et des délibérations de l'assemblée générale et d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d'urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l'exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci.

A l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le syndic engage sa responsabilité contractuelle à l'égard du syndicat des copropriétaires en application des articles 18 de la loi du 10 juillet 1965, 1231-1 et 1992 du code civil.

Toutefois, comme le soulignent justement les défendeurs, le syndic ne peut engager sa responsabilité personnelle envers les copropriétaires que sur le fondement de l'article 1240 du code civil, dès lors qu'il a commis une faute dans l'accomplissement de sa mission et doit réparer les dommages causés. En effet, il doit être rappelé à M. [H] que le contrat de syndic n'est conclu qu'entre le syndicat des copropriétaires et le syndic, les copropriétaires n'en étant pas signataires.

Dès lors, M. [H] ne peut rechercher la responsabilité de la SAS CABINET PAUL STEIN sur le fondement contractuel mais uniquement délictuel. Il doit donc être débouté de sa demande d'exécution forcée en nature de l'obligation contractuelle de la SAS CABINET PAUL STEIN tendant à engager toutes démarches utiles pour faire respecter le règlement de copropriété par Mme [Y], dans la mesure où ses prétentions sont uniquement fondées sur les articles 1217 et 1221 du code civil, alors même que le syndic n'est débiteur d'aucune obligation contractuelle envers le copropriétaire.

Sa demande de réparation de son préjudice moral ne peut non plus aboutir sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil.

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il est constant qu'une faute contractuelle causant un préjudice à un tiers peut être invoquée par ce dernier sur le terrain de la responsabilité délictuelle.

En l'espèce, il ressort des pièces communiquées que M. [H] a demandé au syndic, le CABINET PAUL STEIN, par courriel du 16 septembre 2019, l'autorisation éventuellement donnée à M. [Y] pour l'installation récente du climatiseur au-dessus de la fenêtre de son appartement.

M. [H] a, par courrier recommandé en date du 11 mars 2020, rappelé au syndic l'installation sans autorisation d'un climatiseur extérieur par son voisin au-dessus de la fenêtre de son appartement et déploré l'absence de réaction du cabinet PAUL STEIN depuis plus de 6 mois en dépit de ses engagements. Par ce même courrier, M. [H] a sollicité la mise en œuvre par le syndic des démarches nécessaires pour remettre en état la façade dans les plus brefs délais en joignant une photographie de l'ouvrage.

Le conseil de M. [H] a réitéré cette mise en demeure par courrier recommandé en date du 30 avril 2020 puis par courriel du 19 juin 2020.

Par courrier officiel en réponse en date du 9 mars 2020 (dont la date est visiblement erronée, puisqu'il est fait référence aux courriers des 30 avril et 16 juin 2020), le conseil du syndicat des copropriétaires a informé celui de M. [H] de l'envoi, le même jour, d'une mise en demeure à Mme [Y] concernant la pose, en façade, d'un moteur de climatisation.
La lettre recommandée, également datée du 9 mars 2020 et destinée à Mme [Y], ne comporte effectivement aucune référence, aucun élément ne permettant donc de s'assurer du réel envoi de ce courrier à la copropriétaire. Dans cette lettre, le conseil du syndic fait état d'une installation d'un moteur de climatisation en façade illicite, affectant l'aspect extérieur de l'immeuble et réalisée sans autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires et met en demeure Mme [Y] de procéder à la dépose des aménagements litigieux et à la remise en état des lieux.

Il résulte du procès-verbal en date du 20 juillet 2020 que le commissaire de justice sollicité par M. [H] a constaté la présence d'une unité extérieure de climatisation installée juste au-dessus de la fenêtre de la chambre de M. [H], côté cour. Maître [Z] ajoute que les équerres du kit de fixation semblent n'avoir pas été installées de façon parallèle, que les tuyaux sont maintenus entre eux avec une bande adhésive qui semble se décoller et que l'unité extérieure repose sur une plaque métallique percée d'un trou, identifié par M. [H] comme correspondant à une évacuation des eaux de condensation, située au-dessus du portant à linge de sa fenêtre. Le commissaire de justice met également en évidence la présence de cinq autres unités extérieures de climatisation accrochées à la façade, mais situées sur le côté des alignements verticaux des fenêtres et non dans l'alignement de celles-ci.

L'ensemble de ces éléments établit que Mme [Y] a bien procédé à l'installation d'un moteur de climatisation en façade de l'immeuble, au-dessus de la fenêtre de la chambre de l'appartement occupé par M. [H]. Les constatations du commissaire de justice révèlent que cet aménagement n'a pas été réalisé dans les règles de l'art, puisque les équerres du bloc ne semblent pas avoir été installées de façon parallèle, faisant douter de la perpendicularité avec le mur de façade, et puisque la bande adhésive maintenant les tuyaux semble se décoller, le trou d'évacuation des eaux de condensation étant au surplus situé au-dessus du portant à linge de la fenêtre du demandeur.
En dépit de l’absence de production du règlement de copropriété de l'immeuble et des procès-verbaux d'assemblées générales des copropriétaires, le syndic ne conteste pas l'irrégularité de l'installation réalisée par Mme [Y] puisqu'il reconnaît lui-même dans le courrier destiné à cette dernière, qu'il ait été ou non effectivement envoyé, l'illicéité de cet aménagement affectant l'aspect extérieur de l'immeuble, effectué sans autorisation préalable de l'assemblée générale.

S'agissant de la faute délictuelle reprochée à la SAS CABINET PAUL STEIN, force est de constater que cette dernière n'a pas, malgré les courriels et courriers recommandés adressés par M. [H] depuis septembre 2019 et la procédure judiciaire engagée depuis juin 2021, justifié avoir mis en demeure la copropriétaire de respecter le règlement de copropriété de l'immeuble et de procéder à l'enlèvement de l'installation réalisée dans autorisation du syndicat, la lettre du 9 mars 2020 n'étant accompagnée d'aucune preuve de son envoi et de sa distribution.
En cela, le syndic n'a pas correctement exécuté la mission qui lui incombe en application de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 précité, lui imposant d'assurer l'exécution des dispositions du règlement de copropriété et des délibérations de l'assemblée générale mais également d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien.

S'il est vrai que le syndic ne peut, de sa propre initiative, engager une procédure à l'encontre d'un copropriétaire afin d'obtenir la dépose d'une installation réalisée sans autorisation adéquate, il lui incombe en sa qualité de mandataire du syndicat de rappeler aux copropriétaires les dispositions légales, réglementaires et celles issues du règlement de copropriété et, le cas échéant, de proposer l'inscription à l'ordre d'une jour d'une résolution en ce sens.

Ce manquement contractuel est donc caractéristique d'une faute délictuelle à l'égard du tiers, copropriétaire.

Il est également à l'origine d'un préjudice pour M. [H], qui a subi l'inaction du syndic depuis septembre 2019 en dépit de la dangerosité de l'installation mise en exergue par le commissaire de justice et alors même qu'il revient à la SAS CABINET STEIN de veiller à la conservation de l'immeuble et au respect du règlement de copropriété.

Le moyen tiré de la carence et de l'inaction de M. [H], qui n'a exercé aucune action tendant à la remise en état des parties communes sur le fondement de l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 est inopérant, dans la mesure où cette disposition n'exonère pas le syndic de ses obligations et où M. [H] justifie bien d'une faute personnelle de la SAS CABINET PAUL STEIN et d'un préjudice directement causé par celle-ci. Aucune faute ne peut donc être reprochée au demandeur.
Au surplus, la convocation à l'assemblée générale des copropriétaires du 31 mai 2023 mentionne l'inscription à l'ordre du jour d'une « résolution » n°16, à la demande de M. [H], portant sur un rappel au sujet des climatisations, qui « ne doivent pas créer de nuisances » aux voisins,

les « compresseurs devant être posés sur des silentblocs qui amortissent les vibrations, les eaux de condensat devant être récupérées dans des bacs prévus à cet effet et le bruit ne devant pas gêner la quiétude des voisins ».

La négligence du syndic dans l'accomplissement de sa mission a ainsi causé un préjudice moral à M. [H], constitué par les craintes et inquiétudes liées à la dangerosité de l'installation réalisée au-dessus de sa fenêtre sans autorisation du syndicat des copropriétaires et sans réaction appropriée de la SAS CABINET PAUL STEIN, depuis septembre 2019, pour y mettre un terme.

Par conséquent, la SAS CABINET PAUL STEIN sera condamnée à verser à Monsieur [C] [H] la somme de 1000 euros en réparation de son préjudice moral.

La SAS CABINET PAUL STEIN a souscrit auprès de la SA AXA FRANCE IARD un contrat couvrant sa responsabilité civile professionnelle à effet du 1er janvier 2008, la garantissant contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qui peut lui incomber du fait de l'exercice de son activité professionnelle en raison des dommages subis par autrui résultant notamment d'erreurs, omissions ou négligences, retards commis par elle-même, ses collaborateurs ou préposés.

En conséquence, il convient de condamner la SA AXA FRANCE IARD à relever et garantir la SA CABINET PAUL STEIN des condamnations prononcées à son encontre dans le cadre de la présente procédure, en principal, intérêts, dépens et frais.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

La SAS CABINET PAUL STEIN et la SA AXA FRANCE IARD, qui succombent dans le cadre de la présente procédure, supporteront les dépens.

La SAS CABINET PAUL STEIN sera condamnée à payer à Monsieur [C] [H] une somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure.

Les autres demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

En application de l’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable à la présente instance, l’exécution provisoire est de droit.

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PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort :

DEBOUTE Monsieur [C] [H] de sa demande tendant à ordonner à la SAS CABINET PAUL STEIN d'engager toutes démarches utiles pour faire respect le règlement de copropriété par Madame [Y], copropriétaire,

CONDAMNE la SAS CABINET PAUL STEIN à verser à Monsieur [C] [H] la somme de 1000 euros en réparation de son préjudice moral,

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD à relever et garantir la SA CABINET PAUL STEIN des condamnations prononcées à son encontre dans le cadre de la présente procédure, en principal, intérêts, dépens et frais,

CONDAMNE la SAS CABINET PAUL STEIN et la SA AXA FRANCE IARD aux dépens,

CONDAMNE la SAS CABINET PAUL STEIN à Monsieur [C] [H] une somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure,

REJETTE les autres demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe de la troisième chambre civile section A1 du tribunal judiciaire de Marseille, le 19 mars 2024.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 3ème chbre cab a1
Numéro d'arrêt : 21/10168
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;21.10168 ?
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