La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2024 | FRANCE | N°23/07821

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 9ème chambre jex, 14 mars 2024, 23/07821


MINUTE N° :
DOSSIER N° : N° RG 23/07821 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3VZD
AFFAIRE : [S] [L] divorcée [V] / S.A. INTRUM DBT FINANCE AG sont le siège est sis [Adresse 1]


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 14 MARS 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL


PRESIDENT : Mme BENHARKAT, Juge

GREFFIER : Madame KELLER, Greffier




DEMANDERESSE

Madame [S] [L] divorcée [V]
née le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 6] (TUNISIE),
demeurant [Adresse 4]

représentée par Maître Anne-so

phie LAMY, avocat au barreau de MARSEILLE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 130550012023005944 du 10/07/2023 accordée par le ...

MINUTE N° :
DOSSIER N° : N° RG 23/07821 - N° Portalis DBW3-W-B7H-3VZD
AFFAIRE : [S] [L] divorcée [V] / S.A. INTRUM DBT FINANCE AG sont le siège est sis [Adresse 1]

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 14 MARS 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Mme BENHARKAT, Juge

GREFFIER : Madame KELLER, Greffier

DEMANDERESSE

Madame [S] [L] divorcée [V]
née le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 6] (TUNISIE),
demeurant [Adresse 4]

représentée par Maître Anne-sophie LAMY, avocat au barreau de MARSEILLE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 130550012023005944 du 10/07/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Marseille)

DEFENDERESSE

S.A. INTRUM DBT FINANCE AG anciennement dénommée INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG, S.A immatriculée au registre du commerce de ZUG (Suisse) sous le numéro CH 100 023 266 ayant son siège [Adresse 5] (Suisse) par l’intermédiaire de son représentant INTRUM CORPORATE anciennement dénommé INTRUM, S.A.S immatriculée au registre du commerce de NANTERRE (92) sous le numéro 797 546 769
dont le siège est sis [Adresse 1]
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
venant aux droits de la SA FRANFINANCE, S.A immatriculée ua registre du commerce de NANTERRE (92) sous le numéro 719 807 406 ayant son siège [Adresse 3] suite au rachat de la créance selon acte de cession en date du 17 mars 2017

représentée par Maître Walter VALENTINI de la SELARL VALENTINI & PAOLETTI, avocat au barreau de GRASSE substitué par Maître Samuel LAFAGE, avocat au barreau de MARSEILLE

NATURE DE LA DECISION : Contradictoire

Le Tribunal après avoir entendu les parties et leurs avocats en leurs conclusions à l'audience du 01 Février 2024 a mis l'affaire en délibéré et indiqué que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024, date à laquelle a été rendu le jugement dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon ordonnance d’injonction de payer rendue par le tribunal d’instance de Marseille le 19 juillet 2007 revêtue de la formule exécutoire le 11 septembre 2007, [S] [L] a été condamnée à régler à la société FRANFINANCE la somme de 3 281,82 euros dont 1966,05 euros en principal.

Cette ordonnance lui a été signifiée le 20 septembre 2007 à l’étude.

Par acte du 17 mars 2017, la société FRANFINANCE a cédé sa créance à la société INTRUM DEBT FINANCE AG.

Par acte du 7 mars 2023, une saisie attribution a été pratiquée entre les mains de la CAISSE D’EPARGNE CEPAC sur les comptes de [S] [L] pour un montant de 5 647,69 euros et dénoncée le 14 mars 2023.

Selon acte d’huissier en date du 21 juillet 2023, [S] [L] a fait assigner la société INTRUM DEBT FINANCE AG devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Marseille aux fins de :
« A titre principal,
Retenir le défaut de qualité à agir d’INTRUM DEBT FINANCE AG
Déclarer en conséquence la saisie-attribution pratiquée le 7 mars 2023 nulle et de nul effet et en ordonner la main levée
Débouter INTRUM DEBT FINANCE AG de toutes ses demandes.
A titre subsidiaire,
Déclarer prescrit le titre exécutoire invoqué par INTRUM DEBT FINANCE AG,
Déclarer en conséquence la saisie-attribution pratiquée le 7 mars 2023 nulle et de nul effet et en ordonner la main levée,
Débouter INTRUM DEBT FINANCE AG de toutes ses demandes.
A titre infiniment subsidiaire,
Déclarer les intérêts antérieurs au 7 mars 2021 prescrits.
Enjoindre à INTRUM DEBT FINANCE AG de produire un décompte expurgé des intérêts, antérieurs au 7 mars 2021.
Limiter le taux des intérêts à échoir au taux légal.
Accorder 24 mois de délais de paiement à Madame [S] [L] pour régler la créance qui pourrait être retenue en faveur de INTRUM DEBT FINANCE AG.
Donner mainlevée de la saisie-attribution signifiée le 7 mars 2023 et dénoncée le 14 mars 2023.
La condamner aux dépens ».

[S] [L] fait valoir qu’elle est recevable à agir car elle a déposé une demande d’aide juridictionnelle dans le délai d’un mois suivant la dénonciation de la saisie attribution, peu important la date de l’assignation qui a suivi. Elle soutient que la société défenderesse ne dispose pas de la qualité à agir car elle ne justifie pas de la créance qui lui a été cédée. A titre subsidiaire, elle soulève la prescription du titre exécutoire car si un acte d’exécution a bien été délivré le 25 mai 2018 interrompant la prescription, celui-ci ne concerne pas la créance visée par l’ordonnance en injonction de payer sus visée et n’a pas interrompu valablement la prescription. A titre infiniment subsidiaire, elle sollicite la prescription des intérêts échus de plus de deux ans au visa de l’article 1343-5 du code civil et l’octroi d’un échelonnement de sa dette sur 24 mois eu égard au fait qu’elle se trouve sans emploi, séparée avec trois enfants à charge et que la défenderesse a pris 20 ans pour solliciter le paiement de sa dette qu’elle ne justifie donc pas de préjudice.

Par conclusions remises à l’audience du 1er février 2024, la société INTRUM DEBT FINANCE AG fait valoir que la contestation de [S] [L] en date du 21 juillet 2023 est irrecevable au motif que son acte introductif d’instance a été signifié plus d’un mois après la dénonce de la saisie attribution du 14 mars 2023. Elle soutient produire un bordereau de créances justifiant de sa qualité à agir. Elle avance que son titre exécutoire n’est pas prescrit car le délai de prescription a été interrompu par une précédente saisie attribution du 31 mai 2018, pratiquée avant l’expiration du délai de 10 ans s’achevant le 19 juin 2018. Elle explique que la demanderesse est irrecevable à contester devant le juge de l’exécution le montant des intérêts dus car ceux-ci ont été fixés de manière définitive. Elle rejette la demande de délai de [S] [L] en soutenant qu’elle a déjà bénéficié d’un délai de 20 ans en s’abstenant de régler sa dette et que l’absence de règlement lui a causé un préjudice certain et considérable. Elle requiert l’octroi de la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’audience du 1er février 2024, les parties ont soutenu le bénéfice de leurs écritures.

L’affaire a été mise en délibéré au 14 mars 2024.

MOTIFS

Sur la qualification de la décision :

En l’espèce, toutes les parties ont comparu. La présente décision sera donc contradictoire, conformément aux dispositions de l’article 467 du code de procédure civile.
Par ailleurs la présente décision est rendue en premier ressort.

Sur la recevabilité de la contestation :

En vertu de l'article R 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, à peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier qui a procédé à la saisie. L'auteur de la contestation en informe en informe le tiers saisi par lettre simple et en remet une copie, à peine de caducité de l'assignation, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience. 

Aux termes de l’article 38 du décret n°91-1266 du 19 décembre 1991, lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter :
a) De la notification de la décision d'admission provisoire ;
b) De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ;
c) De la date à laquelle le demandeur à l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 56 et de l'article 160 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ;
d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné.

En l’espèce, [S] [L] a déposé un dossier d’aide juridictionnelle le 23 mars 2023 dans le mois de la dénonce de la saisie attribution en date du 14 mars 2023.

La décision attribuant l’aide juridictionnelle date du 10 juillet 2023 et l’assignation a été délivrée le 21 juillet 2023.

Les dispositions du texte précité ont donc été respectées de sorte que la contestation est jugée recevable.

Sur la qualité à agir de la défenderesse :

Aux termes de l’article L2l 1-1 du Code des procédures civiles d`exécution, tout créancier muni al 'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.

En l’espèce, la société INTRUM DEBT FINANCE AG verse au débat en pièce 2, le contrat de prêt original conclut entre les parties, référencé sous le n°21312615152.

Elle produit en pièce 11, l’acte de cession de créance est accompagné en page deux de cette pièce, de l’identification du contrat précité sous le n°21312615152, devenant sous la référence du cédant, la créance n°20021312615152 pour un montant de 2 269,12 euros en principal avec la mention des nom, prénom, la date et lieu de naissance de [S] [L].

Dans ces conditions, il apparait que la société INTRUM DEBT FINANCE AG justifie de sa créance et donc de sa qualité à agir.

Sur la prescription de l’action en recouvrement :

Selon les dispositions de l'article L 111-4, issues de la loi n°208-561 du 17 juin 2008, entrées en vigueur le 19 juin suivant, l'exécution des titres exécutoires mentionnées aux 1° et 3° de l'article L 111-3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans.

En application des dispositions de l'article 2244 du code civil, le délai de prescription est interrompu par un acte d'exécution forcée.

En l'espèce, l'ordonnance d'injonction de payer du 19 juillet 2007, a été revêtue de la formule exécutoire le11 septembre 2007 puis signifiée le 20 septembre 2007.

Le 31 mai 2018, la société INTRUM DEBT FINANCE AG a signifié à [S] [L] une saisie attribution.

Cet acte a nécessairement interrompu le délai de prescription du titre exécutoire, lequel a recommencé à courir pour une durée de 10 ans.

Le 7 mars 2023, la société INTRUM DEBT FINANCE AG disposait bien d’un titre valide lui permettant de délivrer la saisie attribution querellée.

Par ailleurs, la société INTRUM DEBT FINANCE AG produit avec ses écritures, les pièces justifiant de sa créance et de sa cession, couvrant ainsi tout défaut de signification de ces éléments.

Par conséquent, la fin de non-recevoir de prescription du titre exécutoire doit être écartée.

Sur la prescription des intérêts :

Aux termes de l'artic1e L218-2 du code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

Ainsi, il ressort de l’avis 4 juillet 2016 n°16-70.004 de la cour de cassation que les créances périodiques nées d’une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d’un bien ou d’un service par un professionnel à un consommateur se prescrivent par deux ans.

Dans ces conditions, la société INTRUM DEBT FINANCE AG n’est en droit de solliciter les seuls intérêts échus à compter 7 mars 2021, ceux antérieurs à cette date étant prescrits.

Sur la demande de délai de paiement :

Selon l’article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondantes aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. Toute stipulation contraire est réputée non écrite. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment.

En l’espèce, [S] [L] justifie être sans emploi, séparée, avec trois enfants à charge. La société INTRUM DEBT FINANCE AG ne justifie pas de besoin particulier quant au recouvrement rapide de cette créance.

Dans ces conditions, il sera alloué à [S] [L] un échéancier de paiement de sa dette sur une période de 24 mois.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts :

En vertu de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Cela suppose donc un fait générateur imputable à la personne dont la responsabilité délictuelle est recherchée, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le dommage.
En l’espèce, la société INTRUM DEBT FINANCE AG n’établit pas d’abus de droit de la part de la demanderesse, ni de préjudice subi.
Dons aces conditions, la société INTRUM DEBT FINANCE AG sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

[S] [L] qui succombe dans la présente instance, supportera les dépens de la procédure, lesquels seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle.

La situation économique respective des parties justifie qu’il ne soit pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur l’exécution provisoire :

En vertu de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution, la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision.

PAR CES MOTIFS,

Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition du public au greffe,

Déclare la contestation de Madame [S] [L] recevable ;

Juge que la société INTRUM DEBT FINANCE AG justifie de sa qualité à agir ;

Déclare les intérêts antérieurs au 7 mars 2021 prescrits ;

Enjoint à la société INTRUM DEBT FINANCE AG de communiquer à Madame [S] [L] un nouveau décompte de sa créance actualisé prenant en compte le présent jugement ;

Ordonne l’octroi d’un délai de paiement sur une période de 24 mois de la dette expurgée des intérêts ayant courus jusqu’au 7 mars 2021, en faveur de Madame [S] [L], à compter de la signification du jugement à intervenir ;

Ordonne mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 7 mars 2023 entre les mains de la CAISSE D’EPARGNE CEPAC sur les comptes de Madame [S] [L] pour un montant de 5 647,69 euros ;

Condamne Madame [S] [L] aux dépens de l’instance, lesquels seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle ;

Dit n’y avoir lieu au paiement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette tous autres chefs de demandes ;

Rappelle que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;

Et le juge de l’exécution a signé avec le greffier ayant reçu la minute.  

Le greffier                                                                             Le juge de l’exécution


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 9ème chambre jex
Numéro d'arrêt : 23/07821
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;23.07821 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award