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14/03/2024 | FRANCE | N°22/10275

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab3, 14 mars 2024, 22/10275


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°24/117 DU 14 Mars 2024


Enrôlement : N° RG 22/10275 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2LCQ

AFFAIRE : M. [C] [B]( Me Faouzia DRISSI BOUACIDA)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE


DÉBATS : A l'audience Publique du 11 Janvier 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente, juge rapporteur

Greffier lors des débats : BESANÇON Bén

dicte
En présence de , Procureur de la République

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisé...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/117 DU 14 Mars 2024

Enrôlement : N° RG 22/10275 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2LCQ

AFFAIRE : M. [C] [B]( Me Faouzia DRISSI BOUACIDA)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE

DÉBATS : A l'audience Publique du 11 Janvier 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente
BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente, juge rapporteur

Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte
En présence de , Procureur de la République

Vu le rapport fait à l’audience

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 14 Mars 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BESANÇON Bénédicte, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [C] [B]
né le 20 Octobre 1984 à [Localité 2] (ALGÉRIE)
de nationalité Algérienne, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Faouzia DRISSI BOUACIDA, avocat au barreau de MARSEILLE, vestiaire :

CONTRE

DEFENDEUR

M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE, dont le siège social est sis TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE - [Adresse 4]

dispensé du ministère d’avocat

EXPOSE DU LITIGE :

Le 15 juin 2020, Monsieur [C] [B], se disant née le 20 octobre 1984 à [Localité 2] (Algérie), de nationalité algérienne et marié le 24 décembre 2012 à [Localité 2] ( Algérie) avec Mme [K] [O], née le 21 mai 1994 à [Localité 2] (Algérie), a souscrit une déclaration d’acquisition de la nationalité française sur le fondement de l’article 21-2 du code civil.

Par décision du 13 avril 2022 notifiée le 15 avril 2022, le ministère de l’intérieur a refusé l’enregistrement de cette déclaration au motif que l’intéressé ne s’était pas présenté aux convocations adressées par les services de police dans le cadre de l’enquête réglementaire prévue par l’article 15 du décret n°93-1362 du 30 décembre 1993 modifié; que l’assimilation à la société française et la communauté de vie affective et matérielle avec sa conjointe n’ont pas pu être vérifiées.

Suivant exploit en date du 11 octobre 2022, Monsieur [C] [B] a assigné le Procureur de la République aux fins de :
- ANNULER la décision de refus de la déclaration de nationalité par mariage du ministère de l'Intérieur ;
- ENJOINDRE au Ministère public d'accorder à Monsieur [B] la nationalité française par mariage ;
- CONDAMNER le ministère public à une contrainte de 150€ par jour de retard à partir de la signification de la décision à intervenir ;
- CONDAMNER le ministère public à payer à Monsieur [B] la somme de 2 500€ au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Aux termes de ses dernières conclusions signifées le 28 mai 2023, Monsieur [C] [B] maintient ses demandes sauf en ce qu’il ne demande plus l’annulation de la décision de refus de la déclaration de nationalité par mariage.

Il fait valoir qu’il a épousé Madame [K] [O] de nationalité française à [Localité 2] (Algérie) ; que trois enfants sont issus de cette union : [T] [B] née le 18 novembre 2013 à [Localité 3], [J] [B] né le 07 août 2016 à [Localité 3] et [Y] [B] née le 24 septembre 2021 à [Localité 3] ; qu’il a obtenu un titre de séjour en France, valable jusqu’au 15 octobre 2024 ; que depuis le 14 février 2020, il a un emploi stable dans la Sarl BEST MD ; qu’il lui est reproché de ne pas s’être présenté aux convocations qui lui ont été adressées par les services de police dans le cadre de l’enquête réglementaire prévue par l’article 15 du décret n°93-1362 du 30 décembre 1993 modifié alors qu’il n’a jamais été destinataire de convocations par les services de police.
Il soutient de plus, qu’il rapporte la preuve de l’existence d’une communauté de vie avec son épouse et ses enfants.
Il indique par ailleurs produire un acte d’état civil certain conforme aux dispositions de l’article 47 du code civil.

Par conclusions en date du 19 janvier 2023, le Procureur de la République demande au tribunal de :
- dire que la procédure est régulière au regard de l'article 1040 du code de procédure civile ;
- débouter M. [C] [B] de l’ensemble de ses demandes ;
- dire que M. [C] [B], se disant née le 20 octobre 1984 à [Localité 2] (Algérie),
n’est pas de nationalité française ;
- ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;
- condamner M. [C] [B] aux entiers dépens.

Il soutient que le requérant verse aux débats une copie délivrée le 28 avril 2022 par la commune de [Localité 2] d’un acte de naissance n°06951 du 20 octobre 1984 qui indique qu’il est né le 20 octobre 1984 à [Localité 2] de [Z] et de [G] [F] selon acte dressé le 21 octobre 1984 sur déclaration de [P] [X], un mariage avec [O] [K] à [Localité 2] figurant en mention marginale ; que cet acte de naissance est dépourvu de tout caractère probant en ce qu’il ne mentionne pas les âges, professions et domiciles des père et mère, ni d’ailleurs le nom du père, ni la qualité du déclarant, ni même les informations relatives aux nom et qualité de l’officier d’état civil, mentions substantielles devant figurer sur les copies d’acte délivrées en application de l’article 30 de l’ordonnance algérienne n°70-20 du 19 février 1970 relative à l’état civil ; que cet acte est donc dépourvu de tout caractère probant.
Il indique qu’il résulte du rapport d’enquête établi le 24 mars 2022 par la direction centrale de la sécurité publique que les époux ont été convoqués le 24 mars 2022 et n’ont pas déféré à la convocation, sans faire connaître le motif de leur carence ; que la communuauté de vie matérielle et affective des époux n’a ainsi pas pu être vérifiée.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 novembre 2023, et l’affaire renvoyée pour être plaidée à l’audience collégiale du 11 janvier 2024.

MOTIFS :

En application de l’article 30 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité française incombe à celui dont la nationalité est en cause.

Nul ne peut se voir reconnaître la nationalité française, sur quelque fondement que ce soit, y compris sur celui de l’article 21-2 du code civil s’il ne justifie pas de façon certaine de son état civil par la production d’un acte de naissance répondant aux exigences de l’article 47 du code civil qui dispose que « Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. »

Aux termes de l’article 21-2 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 24 juillet 2006 applicable à l’espèce, l’étranger qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu’à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n’ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité.

L’article 15 du Décret N°93-1362 du 30 décembre 1993 modifié dispose que “Les services qui procèdent à l'instruction de la déclaration sont placés sous l'autorité du préfet, de l'ambassadeur ou du consul territorialement compétent.

En France, dès la production du formulaire de souscription et des pièces justificatives prévues à l'article 14-1, l'autorité compétente procède à une enquête, effectuée par les services de police ou de gendarmerie territorialement compétents, et, après réception des conclusions de celle-ci, à un entretien avec le déclarant et son conjoint, destinés à vérifier la continuité de la communauté de vie tant affective que matérielle entre les époux depuis le mariage, et à permettre d'apprécier s'il y a lieu de s'opposer à l'acquisition de la nationalité française pour indignité ou défaut d'assimilation autre que linguistique”

En l’espèce, le requérant verse aux débats deux copies d’actes de naissance datés des 28 avril 2022 et 09 avril 2023, le premier ne mentionnant ni la date de naissance des parents ni leur profession, ni le nom de famille du père, et ne mentionne pas davantage le nom de l’officier d’état civil ayant reçu l’acte.

Dès lors, cet acte de naissance est dépourvu de tout caractère probant au sens de l’article 47 du code civil en ce qu’il ne mentionne pas les âges, professions et domiciles des père et mère, ni d’ailleurs le nom du père, ni d’ailleurs la qualité du déclarant, mentions substantielles devant figurer sur les copies d’acte délivrées en application de l’article 30 de l’ordonnance algérienne n°70-20 du 19 février 1970 relative à l’état civil qui stipule que : “les actes d’état civil énoncent l’année, le jour et l’heure où ils sont reçus, les prénoms, nom et qualité de l’officier d’état civil, les prénoms, noms, professions et domicile de tous ceux qui y sont dénommés, les dates et lieux de naissance des père et mère dans les actes de naissance (...)”.

En outre, les carences de cet acte ne peuvent être suppléer par un second acte de naissance, en ce qu’il doit être produit deux copies d’actes de naissance strictement identiques, leurs différences leur ôtant tout caractère probant.
Par ailleurs, il résulte du rapport d’enquête établi le 24 mars 2022 par la direction centrale de la sécurité publique que les époux ont été convoqués le 24 mars 2022 et n’ont pas déféré à la convocation, sans faire connaître le motif de leur absence. Le requérant n’ayant pu être contacté téléphoniquement et contact pris avec son épouse, celle-ci n’a pas souhaité venir au rendez-vous proposé pour le lendemain ou éventuellement seule, sans son époux, mais a indiqué préférer être convoquée dans un mois par mail plutôt que par courrier ; elle a indiqué que son époux n’était pas en mesure de s’absenter de son travail même avec une attestation délivrée par la police. Il en résulte que la communuauté de vie matérielle et affective des époux n’ayant pu être vérifiée, c’est à bon droit que le ministère de l’intérieur a refusé d’enregistrer la déclaration de nationalité française de M. [C] [B].
Il sera en conséquence débouté de ses demandes, et son extranéité constatée.
Succombant à l'instance, il en supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort :
CONSTATE qu'il a été satisfait aux formalités de l'article 1040 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE Monsieur [C] [B] de ses demandes ;
CONSTATE l'extranéité de Monsieur [C] [B], se disant née le 20 octobre 1984 à [Localité 2] (Algérie) ;
ORDONNE la mention prévue par l’article 28 du code civil ;
CONDAMNE Monsieur [C] [B] aux dépens.

AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 14 Mars 2024
LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab3
Numéro d'arrêt : 22/10275
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;22.10275 ?
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