MINUTE N° :
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON
POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
JUGEMENT DU :
MAGISTRAT :
ASSESSEURS :
DÉBATS :
PRONONCE :
AFFAIRE :
NUMÉRO R.G :
Notification le :
Une copie certifiée conforme à :
-[T] [K]
-S.A.R.L. [7]
-Société [8]
-CPAM DU RHONE
-AVIVA ASSURANCE
-la SELARL ABDOU ET ASSOCIES, vestiaire : 2
-Me Pascal FERRARO, vestiaire : 181
-la SELARL ONELAW, vestiaire : 1406
Une copie certifiée conforme au dossier
03 Septembre 2024
Julien FERRAND, président
Gilles GUTIERREZ, assesseur collège employeur
Emmanuelle GIRAUD, assesseur collège salarié
assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Maéva GIANNONE, greffiere
tenus en audience publique le 07 Mai 2024
jugement réputé contradictoire, rendu en premier ressort, le 03 Septembre 2024 par le même magistrat
Monsieur [T] [K] C/ S.A.R.L. [7], Société [8]
N° RG 15/01713 - N° Portalis DB2H-W-B67-S6XA
DEMANDEUR
Monsieur [T] [K], demeurant [Adresse 4] (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-006971 du 25/04/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON),
représenté par Maître Pascal FERRARO, avocat au barreau de LYON
DÉFENDERESSES
La société [7], dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par la SELARL ONELAW, avocats au barreau de LYON
La société [8], dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par la SELARL ABDOU ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON
PARTIE INTERVENANTE
CPAM DU RHONE, dont le siège social est sis [Adresse 9]
non comparante, ni représentée,
[5], dont le siège social est sis [Adresse 1] non comparante, ni représentée par la SELARL ONELAW, avocats au barreau de LYON,
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par jugement du 26 septembre 2017, auquel il sera renvoyé pour l'exposé des faits et des prétentions initiales des parties, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon :
- a déclaré irrecevable la demande de Monsieur [K] aux fins d'expertise médicale technique ;
- a dit que la société [8], entreprise utilisatrice, a commis une faute inexcusable responsable de l'accident du travail dont Monsieur [T] [K] a été victime le 4 août 2009 ;
- a dit que la société [7] sera tenue des obligations incombant à l'employeur au titre de la faute inexcusable ;
- a condamné la société [8] à relever et garantir la société [7] de l'ensemble des sommes mises à la charge de cette dernière au titre de la faute inexcusable ainsi que du surcoût des cotisations accident du travail résultant du capital représentatif de la rente accident du travail attribuée à Monsieur [K] sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 12 % ;
- a dit que la rente dont Monsieur [K] est bénéficiaire sera fixée au taux maximum légal ;
- avant dire droit sur l'indemnisation, a ordonné l'expertise médicale de Monsieur [K] et désigné pour y procéder Madame le Docteur [U], remplacée depuis par Monsieur le Docteur [S] ;
- a dit que la caisse primaire d'assurance maladie doit faire l'avance des frais de l'expertise médicale, à charge pour elle de les recouvrer auprès de l'employeur ;
- a débouté la société [7] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- a déclaré le jugement commun et opposable à la société [5] ;
- a débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Le docteur [S] a déposé son rapport d'expertise établi le 28 mars 2024. Les conclusions de l'expert sont les suivantes :
- trouble de stress post-traumatique avec note dépressive ;
- déficit fonctionnel temporaire total : néant ;
- déficit fonctionnel temporaire partiel :
30 % du 4 août 2009 au 3 septembre 2009 ;
15 % du 4 septembre 2009 au 28 juillet 2013 ;
- tierce personne : pas de nécessité d'assistance ;
- aménagement logement et véhicule : néant ;
- perte de chance de promotion professionnelle : il disposait d'une promesse d'embauche que les séquelles de l'accident ne lui auraient pas permis de mener à terme ;
- souffrances endurées : 2,5/7 ;
- préjudice esthétique : 0,5/7 ;
- activités d'agrément rendues impossibles par l'anhédonie dépressive chronique ;
- préjudice sexuel : baisse de la libido en lien avec l'anhédonie liée à la dépression ;
- perte de chance de réaliser un projet de vie familial : sans objet ;
- préjudice exceptionnel : néant.
A l'audience du 7 mai 2024, Monsieur [T] [K] sollicite l'organisation d'un complément d'expertise aux fins d'évaluer son déficit fonctionnel permanent, indiquant que par arrêts du 20 janvier 2023, la Cour de Cassation statuant en assemblée plénière a jugé que ce préjudice n'est pas indemnisé par la rente accident du travail versée en application des dispositions du code de la sécurité sociale.
La société [7], la société [8] et la société [5], comparantes, acquiescent à cette demande.
La caisse primaire d'assurance maladie du Rhône n'a pas comparu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de l'employeur peut prétendre à l'indemnisation des souffrances physiques et morales, du préjudice esthétique, du préjudice d'agrément et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.
Par décision n° 2010-08 QPC du 18 juin 2010, le conseil constitutionnel a reconnu au salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de l'employeur le droit de réclamer devant les juridictions de sécurité sociale la réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.
Par deux arrêts prononcés en Assemblée plénière le 20 janvier 2023, la Cour de Cassation a jugé que la rente versée aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.
Ce préjudice résulte de la réduction définitive après consolidation du potentiel physique et psychosensoriel ou intellectuel du fait de l'atteinte à l'intégrité anotomo-physiologique, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence personnelles, familiales et sociales de la victime.
L'évaluation du déficit fonctionnel permanent n'ayant pas été prévue dans le cadre de la mission d'évaluation des préjudices confiés à l'expert judiciaire, il convient d'ordonner un complément d'expertise.
Il sera sursis à statuer sur les autres demandes.
PAR CES MOTIFS
Le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Lyon, statuant avant dire-droit par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
Vu le jugement du Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Lyon du 26 septembre 2017,
Ordonne un complément d'expertise :
Désigne pour y procéder Monsieur le Docteur [Z] [S], expert près la Cour d'appel de LYON demeurant [Adresse 6] ;
Lui donne mission complémentaire, après avoir convoqué les parties, de :
- dire si Monsieur [T] [K] subit, du fait de l'accident du travail du 4 août 2009, et après consolidation un déficit fonctionnel permanent défini comme une altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles ou mentales, ainsi que des douleurs permanentes ou tout autre trouble de santé entraînant une limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société, et en évaluer l'importance et en chiffrer le taux ;
Dit que l'expert devra prendre en considération les observations ou réclamations des parties, qu'il devra les joindre à son avis lorsqu'elles sont écrites et que les parties le demandent, et qu'il devra faire mention des suites qu'il leur aura données ;
Dit qu'il pourra, pour ce faire, adresser un pré-rapport aux parties et rappelle que lorsqu'il a fixé aux parties un délai pour formuler leurs observations ou réclamations, l'expert n'est pas tenu de prendre en compte celles qui auraient été faites après l'expiration de ce délai, à moins qu'il n'existe une cause grave et dûment justifiée, auquel cas il en fait rapport au juge ;
Dit que l'expert déposera son rapport au Greffe du Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Lyon dans le délai de six mois à compter de sa saisine et en transmettra une copie à chacune des parties ;
Sursoit à statuer sur les autres demandes ;
Réserve les dépens.
Ainsi jugé et mis à disposition au Greffe du Tribunal, le 3 septembre 2024, et signé par le président et le greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT