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22/08/2024 | FRANCE | N°20/00860

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Ctx protection sociale, 22 août 2024, 20/00860


MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :

ASSESSEURS :





DÉBATS :

PRONONCE :



AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :









22 Août 2024

Martin JACOB, président

Alain MARQUETTY, assesseur collège employeur
Yasmina SEMINARA, assesseur collège salarié

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Maëva GIANNONE, greffière

t

enus en audience publique le 22 Mai 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 22 Août 2024 par le même magistrat


Société [1] C/ CPAM DU RHONE

N° RG 20/00860 - N° Portalis DB2H-W-B7...

MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :

ASSESSEURS :

DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

22 Août 2024

Martin JACOB, président

Alain MARQUETTY, assesseur collège employeur
Yasmina SEMINARA, assesseur collège salarié

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Maëva GIANNONE, greffière

tenus en audience publique le 22 Mai 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 22 Août 2024 par le même magistrat

Société [1] C/ CPAM DU RHONE

N° RG 20/00860 - N° Portalis DB2H-W-B7E-U3B2

DEMANDERESSE

La société [1],
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Olivier POUEY, avocat au barreau de LYON, substitué par Maître Quentin JOREL, avocat au barreau de LYON

DÉFENDERESSE

La CPAM DU RHONE,
dont l’adresse est sis [Adresse 3]
représentée par Madame [P] [A], audiencière munie d’un pouvoir

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

Société [1]
CPAM DU RHONE
Me Olivier POUEY, vestiaire : 1129
Une copie revêtue de la formule exécutoire :

CPAM DU RHONE
Une copie certifiée conforme au dossier
EXPOSE DU LITIGE

Le 20 avril 2015, [U] [O] a été engagée par la société [1] en tant que conductrice de machine.

Le 4 janvier 2019, la société [1] a établi une déclaration d'accident du travail relative à l'accident de [U] [O] survenu le 2 janvier 2019 à 10h30.

Le certificat médical initial, établi le jour du fait accidentel, fait état d'un "lumbago". Le médecin a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 13 janvier 2019. [U] [O] a ensuite bénéficié d'arrêts de travail de prolongation.

Par courrier du 23 janvier 2019, la CPAM du Rhône a informé la société [1] de la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident survenu le 2 janvier 2019.

Après avis du médecin conseil, la CPAM a informé la société de la prise en charge d'une nouvelle lésion, non décrite sur le certificat médical initial, le traitement se rapportant à cette nouvelle lésion étant imputable au sinistre du 2 janvier 2019.

Par courrier du 11 décembre 2019, la société [1] a formé un recours gracieux devant la commission de recours amiable (la CRA) de la CPAM du Rhône en contestation de la durée des arrêts de travail de [U] [O].

Lors de sa réunion du 19 mars 2021, la CRA de la CPAM du Rhône a confirmé l'opposabilité à l'employeur de la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont a été victime [U] [O] le 2 janvier 2019, de la durée de l'arrêt de travail à compter du 3 janvier 2019. La CRA de la CPAM du Rhône a ainsi rejeté la demande de la société [1].

* * * *

Par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception expédiée le 31 mars 2020 et reçue au greffe le 11 mai 2020, la société [1] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon d'une demande d'expertise médicale et aux fins d'inopposabilité de la décision de prise en charge, au titre de la réglementation professionnelle, des soins et arrêts de travail consécutifs à l'accident du travail dont a été victime [U] [O] le 2 janvier 2019.

L'affaire a été appelée à l'audience du 22 mai 2024.

Dans ses dernières conclusions développées oralement à l'audience, la société [1] demande au pôle social du tribunal judiciaire de Lyon d'avant dire-droit :

- ordonner une expertise médicale judiciaire sur pièces,
- nommer un expert conformément à la mission figurant dans les conclusions,
- dire que les frais d'expertise seront la charge de la société,

en tout état de cause,

- condamner la CPAM du Rhône à lui payer la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la CPAM du Rhône aux entiers dépens.

La CPAM du Rhône demande au tribunal de :

- rejeter la demande d'expertise judiciaire,
- confirmer l'opposabilité à la société [1] de l'ensemble des soins et arrêts de travail dont a bénéficié l'assurée social au titre de son accident du travail,
- débouter la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions visées pour un exposé plus ample des prétentions et moyens des parties.

L'affaire a été mise en délibéré au 22 août 2024.

MOTIFS

D'une part, l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose qu'est considéré comme accident du travail, qu'elle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.
Ce texte édicte une présomption d'imputabilité au travail d'un accident survenu au temps et au lieu du travail, laquelle s'applique dans les rapports du salarié victime avec la caisse mais également en cas de litige entre l'employeur et la caisse.
La présomption d'imputabilité des soins et arrêts de travail délivrés à la suite d'un accident du travail s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime.
Lorsque la caisse démontre qu'il y a continuité de symptômes et de soins à compter de l'accident initial, les soins en découlant sont présumés imputables à celui-ci sauf pour l'employeur à rapporter la preuve de l'existence d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec l'accident ou la maladie ou d'une cause postérieure totalement étrangère, auxquels se rattacheraient exclusivement les soins et arrêts de travail postérieurs.

En l'espèce, la société [1] ne conteste pas la matérialité de l'accident survenu. En revanche, elle invoque le caractère disproportionné de la durée des soins et arrêts de travail prescrits à [U] [O], au vu des lésions initiales, et sollicite la mise en œuvre d'une expertise médicale judiciaire.

Pour sa part, la CPAM du Rhône fait valoir que, faute pour la société [1] d'apporter la preuve que la lésion résulte d'une cause totalement étrangère au travail, l'employeur ne détruit pas la présomption d'imputabilité, s'attachant à toute lésion survenue brusquement au temps et au lieu de travail, qui a donc vocation à s'appliquer à l'ensemble des soins et arrêts.

La caisse ajoute que le médecin conseil ne s'est pas opposé à la prise en charge de la nouvelle lésion et qu'il appartenait à l'employeur de solliciter la réalisation de contrôles.

À cet égard, selon la déclaration d'accident du travail établie par la société [1], [U] [O] a été victime d'un accident du travail le 2 janvier 2019 à 10h30. La salariée travaillant ce jour-là de 6h à 14h, s'est baissée pour ramasser des rebuts et, en se relevant, elle a ressenti une douleur dans le dos.

Le certificat médical initial, établi le jour du fait accidentel, fait état d'un "lumbago". Le médecin a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 13 janvier 2019. [U] [O] a ensuite bénéficié d'arrêts de travail de prolongation.

Par courrier du 23 janvier 2019, la CPAM du Rhône a informé la société [1] de la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident survenu le 2 janvier 2019.

Après avis du médecin conseil, la CPAM a informé la société de la prise en charge d'une nouvelle lésion, non décrite sur le certificat médical initial, le traitement se rapportant à cette nouvelle lésion étant imputable au sinistre du 2 janvier 2019.

La CPAM du Rhône fournit le certificat médical initial, les certificats médicaux de prolongation, l'attestation de versement des indemnités journalières et une fiche de liaisons médico-administratives, ces documents étant tous rattachés à l'accident du 2 janvier 2019.

Le médecin conseil de la caisse s'est par ailleurs prononcé favorablement sur la justification des arrêts de travail de [U] [O] le 20 juin 2019.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, les arrêts et soins prescrits au titre de l'accident dont a été victime [U] [O] le 2 janvier 2019 bénéficient de la présomption d'imputabilité, étant en outre précisé que la continuité des symptômes et des soins est parfaitement caractérisée. Il est rappelé à toutes fins utiles que même en présence d'un état pathologique antérieur avéré, la présomption d'imputabilité s'applique lorsque l'accident a aggravé ou révélé un état antérieur. De plus, la société [1] aurait pu faire réaliser un contrôle médical, notamment par un médecin indépendant, qui peut indiquer si l'arrêt de travail est lié à une maladie simple ou à un accident du travail sans violer le secret médical.

D'autre part, si l'employeur peut solliciter l'organisation d'une expertise médicale pour vérifier l'imputabilité à l'accident des soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse, il doit cependant justifier de l'utilité d'une telle mesure en apportant au soutien de cette demande des éléments médicaux de nature à accréditer l'existence d'une cause qui serait à l'origine exclusive des prescriptions litigieuses. L'expertise judiciaire ne doit pas permettre de pallier la carence probatoire d'une partie. De simples doutes fondés sur la longueur de l'arrêt de travail ne sont pas de nature à étayer les prétentions de l'employeur.

En effet, la société [1] soutient qu'il existe une disproportion entre la durée des soins et arrêts de travail et les lésions décrites de [U] [O].
Néanmoins, les déclarations de la société, qui ne démontre pas l'existence d'une cause totalement étrangère au travail, ne peuvent faire échec à la présomption d'imputabilité.
De plus, l'utilisation de référentiels relatifs à la longueur des arrêts de travail, tels que le barème indicatif du docteur [H] ne peut se faire qu'à titre indicatif. Il revient aux professionnels de santé d'adapter la durée des arrêts de travail aux cas qu'ils rencontrent et à leurs spécificités, dans le cadre de leur connaissance et de leur expérience.

En conséquence, la demande de mise en œuvre d'une expertise médicale judiciaire sera rejetée, aucun élément ne permettant de remettre en cause l'avis du médecin ayant établi le certificat médical initial et les avis du médecin-conseil de la caisse.

Les arrêts de travail et soins consécutifs à l'accident du travail de [U] [O] du 2 janvier 2019 seront donc déclarés opposables à la société [1].

Sur la demande d'article 700 du code de procédure civile

La société [1] fait valoir qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais qu'elle a dû engager afin d'assurer la défense de ses intérêts.

À cet égard, la société [1] succombant à la présente instance, il convient de la débouter de sa demande.

PAR CES MOTIFS

Le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, après en avoir délibéré, par jugement contradictoire et en premier ressort, mis à disposition,

Déclare opposables à la société [1] la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident du travail de [U] [O] survenu le 2 janvier 2019, ainsi que l'ensemble des arrêts consécutifs audit accident ;

Déboute la société [1] de sa demande d'expertise médicale judiciaire et de ses demandes subséquentes ;

Déboute la société [1] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société [1] aux dépens.

LA GREFFIERE, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 20/00860
Date de la décision : 22/08/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-22;20.00860 ?
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