MINUTE N° :
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON
POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
JUGEMENT DU :
MAGISTRAT :
ASSESSEURS:
DÉBATS :
PRONONCE :
AFFAIRE :
NUMÉRO R.G :
30 Juillet 2024
Julien FERRAND, président
Stéphanie DE MOURGUES, assesseur collège employeur
Yasmina SEMINARA, assesseur collège salarié
assistés lors des débats par Florence ROZIER et du prononcé du jugement par Anne DESHAYES, greffières
tenus en audience publique le 19 Mars 2024
jugement contradictoire, rendu en premier ressort, dont le délibéré initialement prévu au 21 mai 2024 a été prorogé au 30 juillet 2024 par le même magistrat.
Société [4] [Localité 3] C/ CPAM DE SAONE-ET-LOIRE
N° RG 19/03707 - N° Portalis DB2H-W-B7D-URTT
DEMANDERESSE
Société [4] [Localité 3], dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Laurent SAUTEREL, avocat au barreau de LYON
DÉFENDERESSE
CPAM DE SAONE-ET-LOIRE, dont le siège social est sis [Adresse 1]
dispensée de comparution
Notification le :
Une copie certifiée conforme à :
Société [4] [Localité 3]
CPAM DE SAONE-ET-LOIRE
Me Laurent SAUTEREL, vestiaire : 588
Une copie revêtue de la formule exécutoire :
Me Laurent SAUTEREL, vestiaire : 588
Une copie certifiée conforme au dossier
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Monsieur [W] [C] a été embauché en qualité de conducteur routier par la société [4] [Localité 3] depuis le 1er novembre 2018.
Un arrêt de travail jusqu’au 30 juin 2019 lui a été prescrit par certificat médical initial établi le 14 juin 2019 au titre d’un accident du travail survenu le même jour pour “Traumatisme épaule droite. Probable rupture tendineuse.”
Le 17 juin 2019, la société [4] [Localité 3] a établi une déclaration d’accident du travail survenu le 14 juin 2019 en formulant des réserves pour “absence de témoin.”
Par courrier du 9 juillet 2019, la caisse primaire d’assurance maladie de Saône-et-Loire a notifié à la société [4] [Localité 3] la décision de prise en charge de l’accident du travail en précisant que les réserves non motivées sont irrecevables.
Après saisine de la commission de recours amiable, la société [4] LYON a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Lyon, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, par courrier recommandé du 19 décembre 2019.
Aux termes de ses conclusions développées oralement à l’audience du 19 mars 2024, la société [4] [Localité 3] demande :
- à titre principal, que la décision de prise en charge de l’accident lui soit déclarée inopposable ;
- à titre subsidiaire, que l’ensemble des soins et arrêts de travail postérieurs au 14 juin 2019 prescrits au titre de l’accident en cause lui soient déclarés inopposables ;
- à tout le moins, la mise en oeuvre d’une expertise.
Elle fait valoir :
- qu’aucun fait accidentel n’est caractérisé en l’absence de témoin et au vu des dires du salarié qui n’évoque aucun faux mouvement, choc ou événement exogène ;
- que la caisse n’a pas respecté le principe du contradictoire en s’abstenant de diligenter une enquête alors que les réserves formulées étaient de nature à remettre en cause la matérialité du sinistre ;
- que la caisse ne justifie pas de la continuité de soins et arrêts en ne produisant pas l’intégralité des certificats médicaux descriptifs de prolongation permettant de couvrir la période d’arrêt ;
- que l’importance des soins et arrêts pris en charge est disproportionnée au regard du caractère bénin du sinistre initial, et qu’elle ne peut résulter que d’un état antérieur indépendant de l’accident ou d’une fixation tardive de la date de consolidation.
La caisse primaire d’assurance maladie de Saône-et-Loire conclut au rejet des demandes de la société [4] [Localité 3] et sollicite que la décision de prise en charge de l’accident lui soit déclarée opposable.
Elle fait valoir :
- que les réserves émises par l’employeur ne portant pas sur les circonstances de temps et de lieu de l’accident ou sur une cause étrangère sont insuffisantes pour discréditer la matérialité d’un fait soudain survenu aux temps et lieu du travail et qu’elle n’était dès lors pas tenue de diligenter une enquête ;
- que la matérialité de l’accident est établie au regard du certificat médical initial établi le jour même relevant des lésions compatibles avec les déclarations du salarié et de l’information immédiate de l’employeur, ces éléments constituant un faisceau d’indices graves, précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un accident survenu au temps et lieu du travail devant être pris en charge en application de la présomption d’imputabilité.
L’affaire a été appelée à l’audience du 19 mars 2024 pour être mise en délibéré au 21 mai 2024 prorogé au 30juillet 2024.
MOTIFS DE LA DECISION :
Aux termes des dispositions de l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale alors applicables au présent litige, “en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès”.
Les réserves doivent porter sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail et doivent être explicitées par l'employeur.
Au stade de la recevabilité des réserves motivées, l'employeur n'est pas tenu d'apporter la preuve de leur bien-fondé.
La société [4] [Localité 3] a formulé des réserves fondées sur l’absence de témoin qui caractérisent l’existence d'un doute sur le fait que l'accident ait pu se produire au temps et au lieu du travail. La caisse était dès lors tenue de procéder à une instruction par questionnaire ou en sollicitant les observations du salarié et de l’employeur.
La décision de prise en charge de l’accident doit en conséquence être déclarée inopposable à la société [4] [Localité 3].
PAR CES MOTIFS
Le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Déclare inopposable à la société [4] [Localité 3] la décision de prise en charge de l’accident du travail du 14 juin 2019 de Monsieur [W] [C] ;
Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de la Saône-et-Loire aux dépens.
Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal, le 30 juillet 2024 après prorogation du 21 mai 2024, et signé par le président et la greffière.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT