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11/07/2024 | FRANCE | N°19/02908

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Ctx protection sociale, 11 juillet 2024, 19/02908


MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :
ASSESSEURS:







DÉBATS :

PRONONCE :



AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :









11 Juillet 2024

Françoise NEYMARC, présidente

Stéphanie DE MOURGUES, assesseur collège employeur
Bruno ANDRE, assesseur collège salarié

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Maëva GIANNONE, gref

fière

tenus en audience publique le 31 Mai 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, dont le délibéré initialement fixé au 27 Juin 2024 a été prorogé au 11 Juillet 2024 par le même m...

MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :
ASSESSEURS:


DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

11 Juillet 2024

Françoise NEYMARC, présidente

Stéphanie DE MOURGUES, assesseur collège employeur
Bruno ANDRE, assesseur collège salarié

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Maëva GIANNONE, greffière

tenus en audience publique le 31 Mai 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, dont le délibéré initialement fixé au 27 Juin 2024 a été prorogé au 11 Juillet 2024 par le même magistrat

Société [5] C/ CPAM DES ALPES-MARITIMES

N° RG 19/02908 - N° Portalis DB2H-W-B7D-UJJH

DEMANDERESSE

La société [5], dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SELARL Cédric PUTANIER, avocats au barreau de LYON

DÉFENDERESSE

La CPAM DES ALPES-MARITIMES, dont le siège social est sis [Adresse 2]
non comparante - moyens exposés par écrit (R.142-10-4 du code de la sécurité sociale)

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

Société [5]
CPAM DES ALPES-MARITIMES
Me Cédric PUTANIER, vestiaire : 2051
Une copie revêtue de la formule exécutoire :

CPAM DES ALPES-MARITIMES
Une copie certifiée conforme au dossier

Faits, procédure et prétentions des parties

Monsieur [G] [F] était salarié intérimaire de la société [5] (la société) en qualité de carrossier/peintre.

Le 17 décembre 2018, son employeur a établi une déclaration d'accident de travail pour un accident déclaré dans les circonstances suivantes :

date : 17/12/2018, heure : 9h30,
lieu de l'accident : lieu de travail habituel,
activité de la victime : l'intérimaire se trouvait dans l'atelier en carrosserie,
nature de l'accident : selon les dires de l'intérimaire, il se serait senti mal et aurait eu une baisse de tensions,
éventuelles réserves motivées : courrier de réserves ci joint,
nature des lésions : malaise,
la victime a été transportée à l'hôpital de [4].

Le certificat médical initial établi le jour de l'accident constate un malaise avec perte de connaissance en se relevant, contusion de la face dorsale du poignet droit et prescrivait un arrêt de travail jusqu'au 18 décembre 2018.

La CPAM des Alpes Maritimes (la caisse) a mis en oeuvre une mesure d'instruction au terme de laquelle elle a notifié à l'employeur le 21 mars 2019 la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré par le salarié.

La société a alors contesté la décision devant la commission de recours amiable et par requête en date du 24 septembre 2019, reçue au greffe le 30 septembre 2019, la société a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon afin de contester la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable.

L'affaire a été appelée à l'audience du 31 mai 2024 et mise en délibéré au 27 juin 2024 puis prorogée au 11 juillet 2024.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement la société demande au tribunal à titre principal, de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge de l'accident déclaré par Monsieur [F] au titre de la législation professionnelle et à titre subsidiaire, elle demande l'inopposabilité à son égard de la décision de prise en charge des arrêts de travail et soins prescrits à la suite de l'accident.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions de la société pour un exposé plus ample de ses moyens et prétentions.

La caisse non comparante lors de l'audience du 31 mai 2024 a néanmoins déposé ses conclusions et informé la juridiction de son absence au cours de l'audience selon les modalités fixées par les dispositions réglementaires de l'article R.142-10-4 du code de la sécurité sociale.
Il convient donc de se reporter aux écritures soumises au contradictoire aux termes desquelles elle sollicite du tribunal qu'il déboute la société de ses demandes et qu'il déclare opposable à la société la décision de prise en charge de l'accident déclaré par Monsieur [F] le 17 décembre 2018.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions de la caisse pour un exposé plus ample de ses moyens et prétentions.

MOTIFS DU TRIBUNAL

Sur les modalités d'enquête

Il résulte du dernier alinéa de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale applicable au cas d'espèce, qu'en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.
Le principe du contradictoire est loyalement respecté dès lors que l'enquête permet de recueillir des éléments d'information complets et pertinents, selon des modalités qu'il appartient à la caisse de fixer.

En l'espèce, la société soutient que l'enquête mise en oeuvre par la caisse était lacunaire et insuffisante en ce qu'elle n'a pas interrogé le salarié de manière pertinente sur ses antécédents médicaux et qu'elle s'est appuyée sur la présomption d'imputabilité sans davantage approfondir sur les raisons de ce malaise.

La caisse fait valoir en réplique que dans la mesure où aucun élément n'a révélé l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ou d'un état pathologique antérieur, la présomption d'imputabilité a vocation à s'appliquer.

D'après les dispositions susvisées, la caisse a mis en oeuvre le 15 janvier 2019 une mesure d'enquête par voie de questionnaires transmis à l'employeur et au salarié, dans lesquels elle
interrogeait particulièrement le salarié sur le lien entre son malaise et le travail et qu'elle l'a questionné sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail.
La caisse a donc respecté ses obligations contrairement à ce que soutient la société.

Par conséquent, le moyen de la société sera rejeté.

Sur la matérialité de l'accident

L'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose qu'est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

Il appartient à la caisse dans ses rapports avec l'employeur, de rapporter la preuve de la matérialité de l'accident et donc de l'existence d'une lésion survenue au temps et lieu du travail, les seules déclarations du salarié ne suffisent pas à établir cette preuve et elles doivent être corroborées par des éléments objectifs.
La preuve de l'accident du travail peut résulter de présomptions graves, sérieuses et concordantes de la matérialité du fait accidentel.

La société soutient que la matérialité de l'accident n'est pas établie pour les raisons suivantes :
- les conditions de travail étaient normales et habituelles,
- le salarié ne subissait aucun stress et il ne s'est plaint d'aucune difficulté le jour de l'accident,
- la baisse de tension ayant entrainé le malaise est sans lien avec le travail,
- le salarié a ressenti le malaise une heure et demi seulement après avoir débuté sa journée de travail et après deux jours de repos.

La caisse rappelle que l'article L 411-1 du code précité énonce le principe selon lequel l'accident survenu sur le lieu de travail et durant le temps de travail, quelqu'en soit sa cause, doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle.

Elle fait valoir que les éléments recueillis ne permettent pas d'affirmer que le malaise est du à une cause totalement étrangère, que le salarié indiquait dans son questionnaire que les conditions de travail n'étaient pas normales et elle soutient que la société ne fait qu'alléguer l'absence de lien de causalité entre l'accident et le travail mais qu'elle ne prouve pas ce qu'elle affirme.

En l'espèce, la déclaration d'accident de travail décrit un accident survenu à Monsieur [F] le 17 décembre 2018, à 9h30 sur son lieu de travail habituel.

Le salarié se trouvait dans l'atelier en carrosserie, quand il s'est senti mal et qu'il a eu une baisse de tension.
Le salarié a été transporté à l'hôpital de [4] à [Localité 3] et le médecin de l'hôpital lui a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 18 décembre 2018 après avoir constaté que le salarié avait été victime d'un malaise avec perte de connaissance en se relevant et une contusion de la face dorsale du poignet droit.

Le questionnaire du salarié fait ressortir que le salarié repeignait un pare choc dans une cabine de peinture quand il a eu une sensation de malaise, d'état second, une douleur au poignet et une envie de vomir, que les conditions de travail n'étaient pas inhabituelles, que le salarié ne savait pas si le travail avait un lien avec son malaise bien que son emplacement dans l'atelier était étroit, qu'il y avait une mauvaise ventilation et qu'il s'était déjà plaint de ses conditions, qu'il n'y avait pas de témoin puisqu'il travaillait seul quand il se trouvait en cabine bien que son responsable avait constaté son état de malaise et qu'il avait prévenu les secours.

Le questionnaire de l'employeur décrit les éléments suivants : les conditions de travail étaient habituelles, le salarié avait repris son travail après un week end de repos, et il avait déclaré à son chef d'atelier qu'il se sentait mal mais que rien ne démontrait que le salarié s'était fait mal à son poste de travail.

Compte tenu de la survenance de son malaise sur le lieu de travail habituel du salarié et durant son temps de travail, d'une constatation médicale le jour de l'accident à l'hôpital, de l'existence d'une première personne avisée ayant téléphoné aux secours, d'une description précise des faits concordants avec le constat médical établi par le médecin de l'hôpital, il y a lieu de considérer qu'il existe un faisceau d'indices graves, précis et concordants de nature à établir le caractère professionnel de l'accident de Monsieur [F].

L'employeur qui apporte seulement des doutes quant au caractère professionnel du malaise du salarié ne remet pas en cause le caractère professionnel de l'accident.
Il y a donc lieu de rejeter son moyen.

Sur l'imputabilité des arrêts de travail à l'accident professionnel

L'article L 411-1 du code de la sécurité sociale applicable au litige édicte une présomption d'imputabilité au travail d'un accident survenu au temps et au lieu du travail qui s'applique dans les rapports du salarié victime avec la caisse mais également en cas de litige entre l'employeur et la caisse.

La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime et il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

En l'espèce, la société reproche à la caisse d'avoir pris en charge au titre de la législation professionnelle plusieurs mois d'arrêt de travail alors que la lésion initiale avait entrainé seulement un jour de repos au salarié et elle affirme qu'il y a une cause totalement étrangère.

La caisse fait valoir que la société ne produit aucun élément de nature à renverser la présomption d'imputabilité.

Il est constant que le certificat médical initial prescrivait un arrêt de travail au salarié de sorte que l'ensemble des arrêts de travail prescrits par la suite bénéficiait de la présomption d'imputabilité et qu'il appartenait à l'employeur de prouver qu'il existait une cause totalement étrangère de nature à renverser cette présomption.

Or, la société qui ne procède que par voie d'allégations ne renverse aucunement cette présomption d'imputabilité et il convient donc de rejeter son moyen.

PAR CES MOTIFS

Le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe

Déboute la société [5] de l'ensemble de ses demandes,

Déclare opposable à la société [5] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré par Monsieur [F] le 17 décembre 2018,

Condamne la société [5] aux dépens de l'instance.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 19/02908
Date de la décision : 11/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-11;19.02908 ?
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