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09/07/2024 | FRANCE | N°21/01292

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Quatrième chambre, 09 juillet 2024, 21/01292


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

Quatrième Chambre

N° RG 21/01292 - N° Portalis DB2H-W-B7F-VU6M

Jugement du 09 Juillet 2024

Minute Numéro :






















Notifié le :



1 Grosse et 1 Copie à



Me Aude BOUDIER-GILLES de la SELARL ADK,
vestiaire : 1086

Me Yves PHILIP DE LABORIE de la SELARL BDL AVOCATS, vestiaire : 566

Me Claire FILLIATRE,
vestiaire : 2524




Copie Dossier
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÃ

‡AIS


Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiqument, et en premier ressort, a rendu par mise au disposition au greffe, en son audience de la Quatrième chambre du 09 Juillet 2024 le jugement contradictoire su...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

Quatrième Chambre

N° RG 21/01292 - N° Portalis DB2H-W-B7F-VU6M

Jugement du 09 Juillet 2024

Minute Numéro :

Notifié le :

1 Grosse et 1 Copie à

Me Aude BOUDIER-GILLES de la SELARL ADK,
vestiaire : 1086

Me Yves PHILIP DE LABORIE de la SELARL BDL AVOCATS, vestiaire : 566

Me Claire FILLIATRE,
vestiaire : 2524

Copie Dossier
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiqument, et en premier ressort, a rendu par mise au disposition au greffe, en son audience de la Quatrième chambre du 09 Juillet 2024 le jugement contradictoire suivant,

Le dossier initialement mis en délibéré au 18 Juin 2024 a été prorogé au 09 Juillet 2024

Après que l’instruction eut été clôturée le 23 Janvier 2024, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 26 Mars 2024 devant :

Président : Véronique OLIVIERO, Vice-Président
Siégeant en formation Juge Unique
Greffier : Karine ORTI,

Et après qu’il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l’affaire opposant :

DEMANDERESSE

Madame [K] [J]
née le [Date naissance 2] 1977 à [Localité 9] (69)
[Adresse 4]
[Localité 6]

représentée par Maître Claire FILLIATRE, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, Maître Anne-Constance COLL,avocat au barreau de Paris, avocat plaidant.

DEFENDERESSES

La Caisse Primaire d’AssuranceMaladie du Rhône, prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est
[Localité 7]
[Localité 7]

représentée par Maître Yves PHILIP DE LABORIE de la SELARL BDL AVOCATS, avocats au barreau de LYON

La société AON FRANCE, société par actions simplifiée, prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est
[Adresse 3]

représentée par Maître Aude BOUDIER-GILLES de la SELARL ADK, avocats au barreau de LYON

La société HDI GLOBAL SE, société anonyme de droit étranger, prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est
[Adresse 10]
[Localité 8]
INTERVENANTE VOLONTAIRE

représentée par Maître Aude BOUDIER-GILLES de la SELARL ADK, avocats au barreau de LYON

La société KEOLIS LYON, société anonyme à conseil d’administration, prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentée par Maître Aude BOUDIER-GILLES de la SELARL ADK, avocats au barreau de LYON

EXPOSE DU LITIGE

Madame [K] [J] expose emprunter quotidiennement le tramway T2 pour se rendre à son travail. Elle indique que, le 23 janvier 2019, un freinage brusque du conducteur du tramway a provoqué sa chute, ainsi que celle d’autres passagers qui sont tombés sur elle. Elle précise avoir régularisé une déclaration d’accident du travail.

Aucun accord amiable n’est intervenu.

Par acte d’huissier signifié les 26 janvier et 8 février 2021, Madame [K] [J] a fait assigner la SA KEOLIS LYON et la SAS AON France devant le tribunal judiciaire de Lyon aux fins d’indemnisation de son préjudice.

Puis, par exploit signifié le 4 juin 2021, elle a fait appeler en cause la CPAM du Rhône. La jonction a été ordonnée par le juge de la mise en état le 25 juin 2021.

Par conclusions notifiées le 3 mai 2023, la société anonyme de droit étranger HDI GLOBAL SE est intervenue volontairement à l’instance.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées le 11 janvier 2023, Madame [K] [J] sollicite du tribunal de :

La DIRE recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions

DEBOUTER la société KEOLIS LYON, AON France et la CPAM de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions

A titre liminaire, RECONNAITRE que le cabinet AON doit l’indemniser en qualité d’assureur de la société KEOLIS

A titre principal, RECONNAITRE la société KEOLIS responsable d’une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle

A titre subsidiaire, ORDONNER une expertise médicale à la charge financière entière du défendeur

En tout état de cause,

CONDAMNER solidairement les sociétés KEOLIS, AON et la CPAM du Rhône à lui verser :
La somme de 5 000 € au titre des dépenses de santé actuelles La somme de 12 712,56 € au titre de l’incidence professionnelle La somme de 30 000 € au titre de dépenses de santé futures La somme de 15 000 € au titre de préjudice moral
DIRE que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la date de la décision à intervenir

CONDAMNER solidairement les sociétés KEOLIS, AON et la CPAM du Rhône à lui verser la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNER solidairement les sociétés KEOLIS, AON et la CPAM du Rhône aux entiers dépens.

Au visa des articles 1178, 1227, 1228, 1231, 1231-5 et 1240 du code civil, Madame [J] recherche la responsabilité de la société KEOLIS LYON pour avoir manqué à son obligation de sécurité de résultat dans le cadre du contrat de transport de personnes qui les liait le jour de l’accident. Elle considère que le conducteur n’a pas eu une conduite attentive, adaptée aux conditions de circulation (en termes de distance de sécurité et de vitesse). Elle estime que la matérialité de l’accident est établie par sa déclaration sur l’honneur, ses arrêts de travail, des attestations, le communiqué sur les difficultés de circulation.

Par ailleurs, elle explique exercer une action directe contre la société AON France, en application de l’article L. 124-3 du code des assurances, affirmant tout à la fois qu’elle est l’assureur et le « courtier assureur » de la société KEOLIS LYON.

***

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 3 mai 2023, la SA KEOLIS LYON, la SAS AON France et la société anonyme de droit étranger HDI GLOBAL SE sollicitent du tribunal de :

A titre liminaire,

JUGER irrecevable l’action directe introduite à l’égard de la société AON France, ès qualités de courtier en assurance de la société KEOLIS

En conséquence, ORDONNER la mise hors de cause de la société AON France

DEBOUTER Madame [J] et la CPAM DU RHONE de toute demande de condamnation de la société AON France

DECLARER la compagnie HDI GLOBAL SE recevable et bien fondée en son intervention

DONNER ACTE à la compagnie HDI GLOBAL SE de son intervention volontaire en qualité d’assureur responsabilité civile de la société KEOLIS France

A titre principal,

DEBOUTER Madame [J] de l’ensemble de ses demandes

DEBOUTER la CPAM de l’ensemble de ses demandes

A titre subsidiaire,

DEBOUTER Madame [J] de sa demande d’expertise médicale

DEBOUTER la CPAM de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

JUGER que la société HDI GLOBAL SE est bien fondée à solliciter le bénéfice des limites de sa garantie, en ce compris la franchise contractuelle de 60 000 euros

En tout état de cause

CONDAMNER Madame [J] à verser à la société KEOLIS LYON et à la société AON France la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l’instance.

Sur le fondement de l’article L. 124-3 du code des assurances, la société AON France et la société KEOLIS LYON expliquent être liées par un contrat de mandat de courtage en assurance, et en déduisent d’une part que la première n’est pas l’assureur de la seconde, d’autre part que Madame [J] ne peut se prévaloir d’aucun manquement contractuel à l’encontre de la société AON France. Celle-ci conclut à l’irrecevabilité de l’action directe engagée par Madame [J] et à sa mise hors de cause.

Parallèlement, la société HDI GLOBAL SE entend intervenir volontairement à l’instance, en sa qualité d’assureur responsabilité civile de la société KEOLIS LYON, en application des articles 325, 328 et 329 du code de procédure civile.

Au visa des articles 1231-1 et 1353 du code civil, les parties défenderesses soutiennent que la responsabilité contractuelle de la société KEOLIS LYON n’est pas engagée dès lors que la matérialité de l’accident du 23 janvier 2019 n’est pas établie, en l’absence de pièce objective et probante. Subsidiairement, elles critiquent les prétentions indemnitaires.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées le 12 janvier 2023, la CPAM du Rhône sollicite du tribunal de :

Condamner in solidum la SA KEOLIS et son assureur le cabinet AON France à lui régler les sommes suivantes :
2 307,51 € au titre des prestations servies, outre intérêt au taux légal à compter du jugement à intervenir,769,17 € au titre des dispositions de l’article L. 454-1du code de la sécurité sociale, 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamner les mêmes aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de la Selarl BdL Avocats, Maître Yves PHILIP de LABORIE, avocat, sur son affirmation de droit.

Sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil, la CPAM affirme que le contrat de transport de personnes fait naître une obligation de sécurité de résultat à la charge du transporteur. Elle estime que la société KEOLIS LYON a manqué à cette obligation. Par suite, la CPAM exerce son recours contre elle, en qualité de tiers responsable, en application de l’article L. 454-1 du code de la sécurité sociale.

***

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Une ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2024.

MOTIFS

Sur l’intervention volontaire de la société anonyme de droit étranger HDI GLOBAL SE

Vu les articles 325 et suivants du code de procédure civile

La société anonyme de droit étranger HDI GLOBAL SE entend intervenir volontairement à la présente instance en qualité d’assureur « responsabilité civile » de la société KEOLIS LYON. Elle produit un « programme d’assurance responsabilité civile » résumant les garanties souscrites par la société KEOLIS, pour le compte de KEOLIS LYON, à effet au 1er janvier 2019. Madame [J] et la CPAM n’émettent aucune observation sur cette intervention volontaire, laquelle doit être déclarée recevable.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société AON France

En vertu de l'article 122 du code de procédure civile constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

La société AON France conclut à l’irrecevabilité de l’action de Madame [J] au motif qu’elle n’est pas l’assureur de la société KEOLIS LYON et que sa responsabilité contractuelle n’est pas engagée en tant que courtier. Elle développe ainsi des moyens de fond, de sorte que l’action de la demanderesse ne saurait être déclarée irrecevable, mais, le cas échéant, mal fondée. La fin de non-recevoir doit être rejetée.
Sur la responsabilité de la société KEOLIS

Vu l’article 1231-1 du code civil

Madame [J] soutient avoir été victime d’une chute dans le tramway T2 le 23 janvier 2019, en se rendant à son travail. La matérialité de cet accident est contestée par les parties défenderesses. Il appartient donc à Madame [J] d’en rapporter la preuve.

Force est de constater que seulement deux pièces produites au débat font état d’une chute dans le tramway :
D’une part, la déclaration d’accident du travail rédigée par Madame [J] elle-même, qui n’est pas une déclaration sur l’honneur et qui ne peut constituer une preuve objective. Il est notable que la déclaration produite par la demanderesse (sa pièce 2) diffère de celle en possession des parties défenderesses (leur pièce 1). Un examen attentif des deux documents met en évidence une présentation formelle distincte (certains mots ne se trouvant pas sur la même ligne) en dépit d’un texte identique. De plus, l’une est datée du 23 janvier 2019, et l’autre du 23 janvier 2018. D’autre part, le certificat médical de rechute dressé par le Docteur [I] le 19 février 2019. Or le certificat d’arrêt de travail initial n’est pas versé au débat. Et les certificats suivants (de prolongation, de fin) évoquent tout au plus une chute sans en préciser les circonstances. Aucun élément ne peut davantage être déduit des prescriptions médicales ou avis d’aptitude de la médecine du travail.
Par ailleurs, la justification d’un abonnement mensuel de Madame [J] auprès de KEOLIS LYON pour janvier 2019 et du communiqué relatif aux conditions de circulation le 23 janvier 2019, en raison de la neige et du verglas, ne permettent pas de démontrer la réalité de la chute dans le tramway telle que rapportée par la demanderesse.

De plus, le formulaire d’accident du travail rempli par l’employeur indique, outre l’absence de lésion constatée, la mention suivante : « 4 h plus tard la salariée déclare avoir mal au dos et cervicales ». Madame [J] ne joint pas les attestations annoncées en pièce 2bis de son bordereau, dont les parties défenderesses observent qu’elles se bornent à reprendre ses propres déclarations. Ainsi, ces pièces ne permettent pas de confirmer le récit de Madame [J].

Enfin, le tribunal observe que, dans ses dernières écritures, Madame [J] évoque alternativement la chute de plusieurs passagers, celle de passagers avec des valises, et celle d’une passagère.

Dans ce contexte, le tribunal considère que la preuve de l’existence d’une chute dans le tramway T2, provoquée par un freinage brutal du conducteur, n’est pas rapportée. Par suite, la responsabilité de la société KEOLIS n’est pas engagée.

A titre surabondant, concernant le préjudice allégué, il doit être relevé que Madame [J] sollicite une provision de 45 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice corporel (prétention figurant dans les motifs des conclusions, mais non reprise dans le dispositif), subsidiairement une expertise médicale ayant notamment pour mission de « déterminer l’origine de son préjudice corporel, de fournir tous éléments permettant d’apprécier les responsabilités encourues », et « en tout état de cause », la liquidation de son préjudice corporel.

Par conséquent, Madame [J] sera déboutée de toutes ses demandes. En l’absence de consécration de la responsabilité d’un tiers, le recours de la CPAM doit être rejeté.

Sur les demandes accessoires

Il convient de condamner Madame [J] aux dépens, conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

Madame [J] sera également condamnée à payer à la SA KEOLIS LYON et à la SAS AON France la somme globale et unique de 1500 euros au titre des frais de procédure non compris dans les dépens, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les demandes de la CPAM du Rhône au titre des frais non répétibles et de l’indemnité forfaitaire de gestion doivent être rejetées.

L'article 514 du code de procédure civile applicable aux instances introduites depuis le 1er janvier 2020 dispose que les décisions de première instance sont, de droit, exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, et en premier ressort

DECLARE recevable l’intervention volontaire de la société anonyme de droit étranger HDI GLOBAL SE en qualité d’assureur de la SA KEOLIS LYON

DEBOUTE la SAS AON France de sa fin de non-recevoir

DEBOUTE Madame [K] [J] de toutes ses demandes

DEBOUTE la CPAM du Rhône de toutes ses demandes

CONDAMNE Madame [K] [J] aux dépens

CONDAMNE Madame [K] [J] à payer à la SA KEOLIS LYON et la SAS AON France la somme unique et globale de 1 500 euros au titre des frais non répétibles de l'instance

DEBOUTE la CPAM du Rhône de ses demandes au titre des frais non répétibles et de l'indemnité forfaitaire de gestion

REJETTE toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

Prononcé à la date de mise à disposition au greffe par Véronique OLIVIERO, vice-président,

En foi de quoi, le présent jugement a été signé par le Président, Véronique OLIVIERO, et Karine ORTI, Greffier, présent lors du prononcé.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 21/01292
Date de la décision : 09/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-09;21.01292 ?
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