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14/06/2024 | FRANCE | N°21/02077

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Ctx protection sociale, 14 juin 2024, 21/02077


MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :
ASSESSEURS:





DÉBATS :

PRONONCE :



AFFAIRE :


NUMÉRO R.G :









14 Juin 2024

Martin JACOB, président
Dominique DALBIES, assesseur collège employeur
Claude NOEL, assesseur collège salarié

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Florence ROZIER, greffier

tenus en audien

ce publique le 10 Mai 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 14 Juin 2024 par le même magistrat


Madame [A] [N], Madame [A] [N] C/ CAF DE L’ISERE

N° RG 21/02077 - N° Portal...

MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :
ASSESSEURS:

DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

14 Juin 2024

Martin JACOB, président
Dominique DALBIES, assesseur collège employeur
Claude NOEL, assesseur collège salarié

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Florence ROZIER, greffier

tenus en audience publique le 10 Mai 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 14 Juin 2024 par le même magistrat

Madame [A] [N], Madame [A] [N] C/ CAF DE L’ISERE

N° RG 21/02077 - N° Portalis DB2H-W-B7F-WFVJ

DEMANDERESSES

Madame [A] [N]
née le 26 Février 1986 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me David BAPCERES, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 939

DÉFENDERESSE

CAF DE L’ISERE, dont le siège social est sis [Adresse 2]
comparante en la personne de Madame [J] [Y] de la CAF du Rhône, munie d’un pouvoir

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

[A] [N]
CAF DE L’ISERE
Me David BAPCERES, vestiaire : 939
la SELARL DBKM AVOCATS, vestiaire : 939
Une copie revêtue de la formule exécutoire :

CAF DE L’ISERE
Une copie certifiée conforme au dossier

EXPOSE DU LITIGE

De l'union entre [A] [N] et [H] [I] sont notamment issus :

- [G] [I], né le 9 janvier 2016,
- [K] [I], né le 29 décembre 2016,
- [V] [I], né le 26 décembre 2017.

Le 1er janvier 2018, [A] [N] a sollicité le bénéfice de l'allocation de soutien familial (ASF) auprès de la CAF de l'Isère, au profit des 3 enfants issus de son union avec [H] [I]. Elle précisait que ce dernier ne participait pas financièrement à l'entretien des enfants depuis le mois de janvier 2016.

Le 3 janvier 2018, [A] [N] précisait à la CAF de l'Isère vivre avec les enfants dans sa famille et ne pas vivre en couple avec le père des enfants.

Le 29 juillet 2019, [A] [N] a déclaré à la CAF de l'Isère être célibataire depuis le 26 février 1986, date de sa naissance. Elle indiquait vivre à [Localité 3] depuis le 2 décembre 2017.

Le 29 novembre 2019, un rapport d'enquête a été rédigé par les services de la CAF de l'Isère suite à une demande du Département de l'Isère aux fins de vérification de la situation familiale de [A] [N] et de ses ressources depuis 2015. Il était retenu une date de vie maritale entre [A] [N] et [H] [I] depuis le 9 janvier 2019, date de naissance de leur 1er enfant.

Par note interne, la CAF de l'Isère a modifié le rapport d'enquête en précisant retenir une date de vie maritale au 9 janvier 2016 et non au 9 janvier 2019, date de naissance du 1er enfant du couple parental.

Par un courrier daté du 3 février 2021, la CAF de l'Isère a informé [A] [N] qu'elle était notamment redevable d'un indu de 10 344,36 euros d'ASF et d'un indu de 17 069,52 euros d'allocations familiales, pour la période du 1er janvier 2018 au 31 octobre 2020.

La CAF de l'Isère informait également [A] [N] qu'elle envisageait de prononcer une pénalité administrative d'un montant de 1 000 euros à son égard, pour s'être rendue coupable de manœuvres frauduleuses en se déclarant en tant que personne isolée vivant chez ses parents avec ses enfants alors qu'elle vivait en couple avec le père des enfants.

Par un courrier recommandé daté du 9 mars 2021 et reçu le 19 mars 2021, la CAF de l'Isère a informé [A] [N] du prononcé d'une pénalité administrative de 1 000 euros à son égard, suite à la non-déclaration de sa vie maritale depuis le mois de janvier 2018.

Par un courrier recommandé daté du 31 mars 2021 et reçu le 1er avril 2021, [A] [N] a saisi la commission de recours amiable de la CAF de l'Isère.

Par un courrier daté du 20 avril 2021, la CAF de l'Isère a accusé réception du recours amiable formé par [A] [N] concernant la décision de pénalité.

Par un courrier recommandé daté du 28 juin 2021 et reçu le 30 juin 2021, la CAF de l'Isère a informé [A] [N] du maintien de la pénalité administrative de 1 000 euros à son égard.

Par un courrier daté du 14 octobre 2021, la CAF de l'Isère a informé [A] [N] du rejet de son recours amiable.

Par un jugement du 22 novembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête présentée par [A] [N] tendant notamment à annuler la décision du président de la Métropole de Lyon relative à un indu de RSA mis à sa charge par la CAF de l'Isère à hauteur de 20 815,01 euros, pour la période du 1er janvier 2018 au 31 octobre 2020.

****

Par courrier recommandé envoyé le 23 septembre 2021 et reçu au greffe le 24 septembre 2021, [A] [N] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon aux fins notamment d'annulation des indus d'ASF et d'allocations familiales lui ayant été adressés par la CAF de l'Isère.

Cette requête a été enregistrée sous le numéro RG 21/2077.

****

Par courrier recommandé envoyé le 25 novembre 2021 et reçu au greffe le 26 novembre 2021, [A] [N] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon aux fins notamment d'annulation de la pénalité lui ayant été adressée par la CAF de l'Isère.

Cette requête a été enregistrée sous le numéro RG 21/2521.

****

Les affaires ont été appelées à l'audience du 5 mai 2023 et ont été renvoyées aux audiences des 13 octobre 2023, 8 décembre 2023, 16 février 2024 et 10 mai 2024.

À cette dernière audience, [A] [N] et la CAF de l'Isère ont comparu, de sorte que le jugement sera contradictoire.

****

[A] [N], représentée par son conseil, a soutenu oralement ses conclusions et a demandé au tribunal de :

- ordonner la jonction des deux instances,
- annuler les décisions d'indus d'ASF et d'allocations familiales prises à son égard,
- la décharger de l'obligation de rembourser les indus d'ASF et d'allocations familiales,
- ordonner à la CAF de l'Isère de lui restituer les sommes retenues au titre des indus d'ASF et d'allocations familiales,
- annuler la pénalité administrative prise à son égard par la CAF de l'Isère,
- la décharger de l'obligation de payer la pénalité administrative à hauteur de 1 000 euros,
- ordonner à la CAF de l'Isère de lui restituer les sommes retenues au titre de la pénalité,
- rejeter l'ensemble des demandes formées par la CAF de l'Isère,
- condamner la CAF de l'Isère aux entiers dépens de l'instance,
- condamner la CAF de l'Isère à lui verser la somme de 2 400 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

La CAF de l'Isère, dûment représentée, a soutenu oralement ses conclusions et a sollicité :

- condamner [A] [N] à lui verser la somme de 27 413,88 euros d'indus d'ASF et d'allocations familiales, pour la période de janvier 2018 à octobre 2020,
- s'en rapporter à la décision du tribunal quant à la recevabilité de la requête formée par [A] [N] relative à la pénalité,
- condamner [A] [N] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de la pénalité administrative,
- condamner [A] [N] à lui verser la somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'affaire a été mise en délibéré au 14 juin 2024.

MOTIFS

Sur la jonction des requêtes

Aux termes de l'article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. Il peut également ordonner la disjonction d'une instance en plusieurs.

En l'espèce, [A] [N] a saisi le tribunal judiciaire en contestation d'indus relatifs à l'ASF et à des prestations familiales, suite à la prise en compte d'une vie maritale par la CAF de l'Isère.

Elle a ensuite saisi la juridiction en contestation d'une pénalité prononcée en raison de la vie maritale n'ayant pas été déclarée auprès de la CAF de l'Isère.

Il est dans l'intérêt d'une bonne justice de juger ces requêtes ensemble.

En conséquence, il sera ordonné la jonction de la requête enregistrée sous le numéro RG 21/2521 à la requête enregistrée sous le numéro RG 21/2077.

Sur les indus d'ASF et de prestations familiales

Sur la compétence de la CAF de l'Isère

Aux termes de l'article 1302-1 du code civil, celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.

En l'espèce, [A] [N] indique que la CAF de l'Isère a reconnu avoir transféré son dossier à la CAF du Rhône.

Elle soutient ainsi que la CAF de l'Isère n'était pas compétente pour mettre à sa charge des indus alors que [A] [N] relevait d'une autre caisse. Seule la CAF du Rhône pouvait entreprendre une telle action en recouvrement des indus.

La décision rendue par la CAF de l'Isère doit donc être annulée.

Pour sa part, la CAF de l'Isère explique qu'elle était compétente pour émettre des indus puisqu'elle a procédé au versement des prestations litigieuses sur toute la période. Le domicile de [A] [N] a ensuite été modifié, sans que cela n'ait d'incidence sur la compétence de la CAF de l'Isère pour agir en répétition des indus.

À cet égard, la répétition des indus doit être diligentée par la caisse ayant procédé au paiement des sommes litigieuses.

Or, la CAF de l'Isère a versé l'ASF ainsi que des prestations familiales à [A] [N], de janvier 2018 à octobre 2020. Elle est donc compétente pour émettre des indus et entreprendre une procédure en ce sens à l'égard de [A] [N].

En conséquence, la demande reconventionnelle en recouvrement des indus formée par la CAF de l'Isère sera déclarée recevable.

Sur la régularité du contrôle effectué par la CAF de l'Isère

Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, les directeurs des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale ou du service des allocations et prestations mentionnées au présent code confient à des agents chargés du contrôle, assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ou par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations, le contrôle du respect des conditions de résidence et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Des praticiens-conseils et auditeurs comptables peuvent, à ce titre, être assermentés et agréés dans des conditions définies par le même arrêté. Ces agents ont qualité pour dresser des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire.

En l'espèce, [A] [N] explique que l'agent chargé du contrôle effectué par la caisse doit justifier avoir été agréé, avoir prêté serment et avoir reçu délégation de la part du directeur de la CAF de l'Isère. Or, elle indique que la caisse n'a pas rapporté cette preuve, de sorte que la procédure de contrôle doit être considérée comme irrégulière.

En outre, [A] [N] observe que le rapport d'enquête fait apparaître une date de vie maritale à compter du mois de janvier 2019 alors même que les indus ont été calculés à partir du mois de janvier 2018.

Si la CAF de l'Isère mentionne avoir corrigé cette erreur de plume par une note interne, [A] [N] soutient que cette note a été rédigée par le responsable du secteur fraudes - recours, qui n'est pas un agent de contrôle agréé et assermenté.

Elle affirme que les indus ayant été fondés sur le contrôle réalisé par la CAF de l'Isère, ils doivent être annulés.

Pour sa part, la CAF de l'Isère verse aux débats un justificatif de l'agrément et de l'assermentation du contrôleur.

Elle indique que l'agrément d'un agent contrôleur établit que celui-ci est affecté à un emploi comportant une mission de contrôle, dont il a été chargé par le directeur de la CAF ; aucune preuve supplémentaire n'est donc nécessaire.

La CAF de l'Isère explique également que le rapport d'enquête comportait une erreur de plume en mentionnant une date de début de vie maritale en janvier 2019 et que cela a été corrigé par une note interne pour viser le mois de janvier 2018.

La CAF de l'Isère estime que la procédure de contrôle est régulière.

À cet égard, le contrôle et le rapport d'enquête ont été réalisés par [U] [L], agent ayant été assermenté le 11 octobre 2012 et agréé en tant qu'agent de contrôle de la branche famille en date du 24 décembre 2013, comme cela ressort de la liste publiée au journal officiel du ministère des affaires sociales et de la santé.

L'assermentation et l'agrément constituent les deux conditions imposées par le code de la sécurité sociale. Aucune habilitation spécifique n'est exigée de la part du directeur de la caisse alors même que [U] [L] a été agréé et embauché sur un poste spécialement dédié au contrôle, de sorte qu'il bénéficiait de toute compétence pour réaliser les missions de contrôle dont il était chargé par le directeur de la CAF de l'Isère.

S'agissant de la date de début de la vie maritale. Le rapport d'enquête précise qu'il est retenu la date de naissance du 1er enfant de [A] [N] et [H] [I]. Or, [G] [I] est né le 9 janvier 2016, de sorte que l'erreur de plume est évidente et incontestable.

La note interne rédigée par le supérieur hiérarchique de [U] [L] ne doit pas être considérée comme irrégulière alors même qu'il intervenait pour corriger une erreur de plume, sans qu'il ne s'agisse d'une nouvelle information pour [A] [N], cette dernière n'ignorant pas la date de naissance de son 1er fils.

En conséquence, le contrôle réalisée par la CAF de l'Isère est régulier.

Sur la vie maritale

Il résulte du I de l'article L. 523-1 du code de la sécurité sociale qu'ouvrent droit à l'allocation de soutien familial :
- tout enfant orphelin de père ou de mère, ou de père et de mère,
- tout enfant dont la filiation n'est pas légalement établie à l'égard de l'un ou l'autre de ses parents ou à l'égard de l'un et de l'autre,
- tout enfant dont le père ou la mère, ou les père et mère, se soustraient ou se trouvent, s'ils sont considérés comme tels, au regard de conditions fixées par décret, comme étant hors d'état de faire face à leurs obligations d'entretien ou au versement d'une pension alimentaire mise à leur charge par décision de justice,
- tout enfant dont le père ou la mère, ou les père et mère, s'acquittent intégralement du versement d'une pension alimentaire mise à leur charge par décision de justice ou d'une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant fixée par les actes ou accords mentionnés au même IV, lorsque le montant correspondant est inférieur à celui de l'allocation de soutien familial. Dans ce cas, une allocation de soutien familial différentielle est versée.

Aux termes du 2e alinéa de l'article L. 523-2 du code de la sécurité sociale, lorsque le père ou la mère titulaire du droit à l'allocation de soutien familial se marie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en concubinage, cette prestation cesse d'être due.

Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 531-3 du code de la sécurité sociale, l'allocation de base est versée à taux partiel aux ménages ou aux personnes dont les ressources ne dépassent pas le plafond défini à l'article L. 531-2. Elle est versée à taux plein lorsque les ressources ne dépassent pas un plafond qui varie selon le nombre d'enfants nés ou à naître et qui est majoré lorsque la charge du ou des enfants est assumée soit par un couple dont chaque membre dispose d'un revenu professionnel minimal, soit par une personne seule. Ce plafond est revalorisé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale conformément à l'évolution des prix à la consommation hors tabac.

Aux termes de l'article R. 115-7 du code de la sécurité sociale, toute personne est tenue de déclarer à l'un des organismes qui assure le service d'une prestation mentionnée au premier alinéa de l'article R. 111-2 dont elle relève tout changement dans sa situation familiale ou dans son lieu de résidence, notamment en cas de transfert de sa résidence hors du territoire métropolitain de la France ou d'un département d'outre-mer qui remettrait en cause le bénéfice des prestations servies par cet organisme.

Aux termes de l'article R. 523-5 du code de la sécurité sociale, dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article L. 523-2, l'allocation cesse d'être due à compter du premier jour du mois au cours duquel le parent de l'enfant se marie ou vit maritalement. Le versement de l'allocation peut être repris si le parent justifie vivre seul à nouveau de façon permanente, à compter du premier jour du mois civil suivant cette justification.

Aux termes du 1er alinéa de l'article R. 531-1 du code de la sécurité sociale, pour l'attribution de la prime à la naissance ou à l'adoption prévue à l'article L. 531-2 et de l'allocation de base mentionnée à l'article L. 531-3, les ressources annuelles du ménage ou de la personne s'apprécient dans les conditions prévues à l'article R. 532-1.

Aux termes de l'article 515-8 du code civil, le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple.

En l'espèce, [A] [N] explique que le contrôle diligenté par la CAF de l'Isère était inopiné et qu'elle se trouvait bien au domicile de ses parents. Le contrôleur a également constaté la présence de vêtements et jouets d'enfants.

Elle rappelle que le rapport de contrôle évoque une date de vie maritale à compter du mois de janvier 2019 ; la CAF de l'Isère ne pouvait pas commencer le calcul des indus en janvier 2018.

De plus, [A] [N] estime que la CAF de l'Isère ne rapporte pas la preuve de la vie maritale.

Pour sa part, la CAF de l'Isère indique que [A] [N] a déclaré être célibataire avec 4 enfants à charge et vivre à [Localité 3].

Cependant, un contrôle a été effectué quant à sa situation personnelle et il en est ressorti que :

- [H] [I] a reconnu les 4 enfants de [A] [N],
- les enfants sont tous nés à [Localité 4],
- [A] [N] n'a engagé aucune démarche aux fins de fixation d'une contribution à l'entretien et à l'éducation à la charge de [H] [I] devant le juge aux affaires familiales alors qu'elle se déclarait en situation de précarité,
- des échanges financiers ont eu lieu entre [H] [I] et [A] [N],
- les enfants sont scolarisés à [Localité 4] et les parents se sont déclarés mariés auprès des établissements scolaires lors de l'inscription des enfants,
- [A] [N] utilise régulièrement des moyens de paiement sur la commune de [Localité 4],
- les 2 dernières déclarations de grossesses de [A] [N] ont été complétées par des praticiens de [Localité 4],
- [H] [I] s'implique dans l'éducation des enfants,
- les éléments relevés sur les réseaux sociaux, notamment facebook, font apparaître une relation sentimentale entre [H] [I] et [A] [N].

Le contrôleur a ainsi considéré qu'il existait une vie maritale depuis le 9 janvier 2016, date de naissance du 1er enfant de [H] [I] et [A] [N]. La CAF de l'Isère précise avoir corrigé une erreur de plume pour retenir la date de début de la vie maritale, permettant de retenir la période du 1er janvier 2018 au 31 octobre 2020 pour le calcul des indus.

La CAF de l'Isère ajoute que, depuis le 1er juin 2020, [A] [N] a déclaré vivre avec [H] [I] à [Localité 4].

La caisse relève que le tribunal administratif de Lyon a constaté l'existence d'une vie maritale sur la même période, à compter de janvier 2018. Or, l'autorité de la chose jugée par une juridiction administrative s'impose aux juridictions judiciaires. Une bonne et cohérente administration de la justice ne peut pas conduire à deux décisions antinomiques.

À cet égard, [A] [N] a déclaré vivre en couple avec [H] [I] depuis le 1er juin 2020, de sorte que la période litigieuse porte uniquement du 1er janvier 2018 au 31 mai 2020.

Il ressort du rapport d'enquête que [A] [N] a déclaré être hébergée à titre gratuit chez ses parents et qu'ils subvenaient à ses besoins. Elle ne justifie donc pas d'un logement indépendant et personnel.

Ainsi, [A] [N] indiquait vivre sur la commune de [Localité 3]. Or, [G] [I] et [K] [I], âgés de 3 ans et 2 ans au moment du contrôle, étaient scolarisés sur la commune de [Localité 4].

Il convient de préciser que la commune de résidence déclarée par [A] [N] se trouve dans le département de l'Isère, à l'est de l'agglomération lyonnaise, alors que la commune de scolarisation des enfants se situe au sud-ouest de l'agglomération lyonnaise. La distance est importante entre ces deux communes alors que [A] [N] n'évoquait aucune attache spécifique avec la commune de [Localité 4] et les parents n'avaient pas organisé de résidence alternée pour les enfants. Le tribunal administratif a précisé que la distance entre les deux communes était de 45 km.

[A] [N] explique que les enfants ont été inscrits dans un établissement scolaire de [Localité 4] sur décision du père mais qu'elle n'était pas d'accord.

Ce faisant, [A] [N] n'apporte pas une justification convaincante quant au choix d'une école se trouvant aussi loin du domicile déclaré des enfants alors même qu'ils étaient en bas âge et que la circulation routière depuis la commune de [Localité 3] est particulièrement compliquée puisqu'il est nécessaire de traverser l'agglomération lyonnaise, connue pour la densité de son trafic routier. En effet, l'inscription à l'école relève de l'exercice conjoint de l'autorité parentale et l'accord de [A] [N] était nécessaire.

Dans le rapport d'enquête, [A] [N] affirme qu'elle va prochainement inscrire les enfants à l'école de [Localité 3]. Or, cela n'a jamais été effectué alors même qu'elle a rencontré l'agent de contrôle en juillet 2019 et que la rentrée scolaire approchait.

[A] [N] a ensuite présenté une autre version, affirmant que les enfants étaient inscrits à l'école de [Localité 4] car [H] [I] étant sans activité, il pouvait s'occuper d'eux. Alors qu'elle n'avait pas évoqué ce fait lors du premier entretien avec l'agent de contrôle, cette présentation du choix des parents surprend car [A] [N] était également sans activité et le trajet depuis la commune de [Localité 3] devait lui revenir, aboutissant à de multiples déplacements pour elle (2 le matin et 2 l'après-midi).

Au contraire, il doit être relevé que [H] [I] résidait à [Localité 4], ce qui permet de considérer que les enfants ont été scolarisés à proximité de leur domicile chez leur père. Pourtant, [A] [N] a sollicité des prestations familiales en tant que mère isolée, ayant l'ensemble des enfants à charge. Il apparaît que [A] [N] et les enfants vivaient à [Localité 4]. Cela est corroboré par les dépenses effectuées de manière régulière par [A] [N].

Dans le rapport d'enquête, il est précisé que [A] [N] et [H] [I] envisageait une vie maritale mais que " rien ne s'est concrétisé tant que le couple ne trouve pas de logement ". L'agent de contrôle a également constaté que [A] [N] se déclarait en couple avec [H] [I] sur facebook. Si [A] [N] affirme qu'il ne s'agissait que d'un souci d'affichage pour ne pas être dérangée sur les réseaux sociaux, l'ensemble de ces éléments démontrent une volonté de couple avec [H] [I].

En ce sens, les parents ont inscrit leurs enfants à l'école en se déclarant mariés.

La relation qu'entretenait [A] [N] et [H] [I] n'était pas seulement celle de parents s'entendant pour le bien-être des enfants mais il existait une relation sentimentale les amenant à souhaiter une vie commune. Cela s'est rapidement concrétisé puisqu'ils ont donné naissance à un 4e enfant, le 21 septembre 2020, et qu'ils ont emménagé ensemble dès le 1er juin 2020.

Il peut être considéré, sans incertitude, que [A] [N] et [H] [I] résidaient ensemble.

En outre, dans le logement des parents de [A] [N], l'agent de contrôle a relevé que les jouets des enfants se trouvaient dans une pièce servant de stockage et il a constaté l'absence d'armoire pour ranger les vêtements, un " tas de vêtements (étant) disposé à terre ". Cela ne ressemble pas à un logement où 3 enfants vivraient de manière habituelle, étant rappelé que le contrôle était inopiné.

Dans ces conditions, il convient de retenir une vie maritale ininterrompue entre [A] [N] et [H] [I], depuis le 1er janvier 2018.

Sur le montant des indus

Aux termes de l'article 1302 du code civil, tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. La restitution n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.

Aux termes de l'article 1302-1 du code civil, celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.

En l'espèce, [A] [N] indique que la CAF de l'Isère n'a pas justifié le quantum de la dette lui ayant été notifiée et elle considère que la caisse n'a pas précisé les modalités de liquidation de ces indus.

Elle relève que la CAF de l'Isère reconnaît ne pas être en mesure de produire des preuves comptables s'agissant des paiements antérieurs au mois de décembre 2018. Il n'est donc pas démontré que des versements aient été effectués au profit de [A] [N] de janvier à novembre 2018.

[A] [N] ajoute que des indus importants ont été mis à sa charge au titre du RSA et de l'APL, de sorte que les montants crédités sur son livret A ne correspondent pas nécessairement aux indus d'ASF et d'allocations familiales.

De plus, les captures d'écran des paiements réalisés à compter du mois de décembre 2018 sont insuffisantes pour fonder les indus.

Pour sa part, la CAF de l'Isère produit des captures d'écran des paiements effectués à [A] [N] de décembre 2018 à octobre 2020. Elle précise que, pour la période antérieure, les dossiers ont été archivés mais elle verse aux débats les relevés du livret A de [A] [N], sur lequel les prestations ont été versées.

La caisse communique également les documents comptables justifiant des paiements archivés.

À cet égard, la CAF de l'Isère verse aux débats l'ensemble des documents comptables relatifs au paiement des prestations familiales à [A] [N] depuis le mois de janvier 2018. Elle justifie ainsi du montant des indus.

Suite à cette communication, [A] [N] ne conteste plus la réalité des versements, notamment lors de l'audience devant le tribunal judiciaire.

La situation de vie maritale de [A] [N] ne lui permettait pas de percevoir l'intrégralité des prestations familiales et elle ne pouvait pas prétendre à l'ASF.

En conséquence, [A] [N] sera condamnée à verser à la CAF de l'Isère la somme de 27 413,88 euros au titre des indus d'ASF et de prestations familiales, pour la période du 1er janvier 2018 au 31 octobre 2020.

Sur la pénalité administrative

Sur la recevabilité de la demande d'annulation

Aux termes de l'article 43 du décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles, sans préjudice de l'application de l'article 9-4 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée et du II de l'article 44 du présent décret, lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée ou déposée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter :
1° De la notification de la décision d'admission provisoire ;
2° De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ;
3° De la date à laquelle le demandeur de l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 69 et de l'article 70 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ;
4° Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné.
Lorsque la demande d'aide juridictionnelle est présentée au cours des délais impartis pour conclure ou former appel ou recours incident, mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile et aux articles R. 411-30 et R. 411-32 du code de la propriété intellectuelle, ces délais courent dans les conditions prévues aux 2° à 4° du présent article.
Par dérogation aux premier et sixième alinéas du présent article, les délais mentionnés ci-dessus ne sont pas interrompus lorsque, à la suite du rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, le demandeur présente une nouvelle demande ayant le même objet que la précédente.

Aux termes de l'article 640 du code de procédure civile, lorsqu'un acte ou une formalité doit être accompli avant l'expiration d'un délai, celui-ci a pour origine la date de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir.

Aux termes du 1er alinéa de l'article 641 du code de procédure civile, lorsqu'un délai est exprimé en jours, celui de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir ne compte pas.

En l'espèce, [A] [N] indique que la CAF de l'Isère a rendu sa décision définitive de pénalité administrative en date du 28 juin 2021.

Elle précise avoir déposé une demande d'aide juridictionnelle pendant le délai de recours contentieux de 2 mois et une décision a été rendue le 24 septembre 2021 ; la date de notification n'est pas connue.

[A] [N] ayant transmis sa requête au tribunal judiciaire le 25 novembre 2021, sa demande est recevable.

Pour sa part, la CAF de l'Isère s'en rapporte à la décision du tribunal.

À cet égard, [A] [N] a réceptionné la décision définitive de la CAF de l'Isère portant sur la pénalité administrative le 30 juin 2021. Elle disposait alors d'un délai de 2 mois pour contester cette décision devant le tribunal judiciaire, sous peine de forclusion. Le délai commence à courir le lendemain de cet événement ; [A] [N] pouvait transmettre sa requête au tribunal jusqu'au 1er septembre 2021.

Toutefois, [A] [N] a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 12 août 2021, ce qui a eu pour effet d'interrompre le délai de forclusion.

La décision du bureau d'aide juridictionnelle a été rendue le 24 septembre 2021, sans que la date de notification à [A] [N] ne soit connue. Ainsi, la CAF de l'Isère ne démontre pas que la requête de [A] [N] n'aurait pas été déposée dans le délai de 2 mois à compter de la notification de la décision d'aide juridictionnelle.

De plus, en envoyant sa requête au tribunal judiciaire le 25 novembre 2021, [A] [N] a nécessairement respecté le délai de forclusion, même si la décision du bureau d'aide juridictionnelle avait été notifiée dès le 24 septembre 2021 puisque ce délai de 2 mois n'aurait commencé à courir que le 25 septembre 2021.

En conséquence, la requête relative à la pénalité administrative présentée par [A] [N] sera déclarée recevable.

Sur la régularité de la procédure de pénalité administrative et son bien-fondé

Aux termes de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, I.-Peuvent faire l'objet d'un avertissement ou d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme chargé de la gestion des prestations familiales ou des prestations d'assurance vieillesse, au titre de toute prestation servie par l'organisme concerné :
1° L'inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;
2° L'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant le service des prestations, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;
3° L'exercice d'un travail dissimulé, constaté dans les conditions prévues à l'article L. 114-15, par le bénéficiaire de prestations versées sous conditions de ressources ou de cessation d'activité ;
4° Les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir le versement indu de prestations servies par un organisme mentionné au premier alinéa, même sans en être le bénéficiaire ;
5° Les actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle exercées, en application de l'article L. 114-10 du présent code et de l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, par les agents mentionnés au présent article, visant à refuser l'accès à une information formellement sollicitée, à ne pas répondre ou à apporter une réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d'information, d'accès à une information, ou à une convocation, émanant des organismes chargés de la gestion des prestations familiales et des prestations d'assurance vieillesse, dès lors que la demande est nécessaire à l'exercice du contrôle ou de l'enquête.
Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits, dans la limite de quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Tout fait ayant donné lieu à une sanction devenue définitive en application du présent article peut constituer le premier terme de récidive d'un nouveau manquement sanctionné par le présent article. Cette limite est doublée en cas de récidive dans un délai fixé par voie réglementaire. Le directeur de l'organisme concerné notifie le montant envisagé de la pénalité et les faits reprochés à la personne en cause, afin qu'elle puisse présenter ses observations écrites ou orales dans un délai d'un mois. À l'issue de ce délai, le directeur de l'organisme prononce, le cas échéant, la pénalité et la notifie à l'intéressé en lui indiquant le délai dans lequel il doit s'en acquitter ou les modalités selon lesquelles elle sera récupérée sur les prestations à venir.
La personne concernée peut former, dans un délai fixé par voie réglementaire, un recours gracieux contre cette décision auprès du directeur. Ce dernier statue après avis d'une commission composée et constituée au sein du conseil d'administration de l'organisme. Cette commission apprécie la responsabilité de la personne concernée dans la réalisation des faits reprochés. Si elle l'estime établie, elle propose le prononcé d'une pénalité dont elle évalue le montant. L'avis de la commission est adressé simultanément au directeur de l'organisme et à l'intéressé.
La mesure prononcée est motivée et peut être contestée devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire. La pénalité ne peut pas être prononcée s'il a été fait application, pour les mêmes faits, des articles L. 262-52 ou L. 262-53 du code de l'action sociale et des familles.
En l'absence de paiement dans le délai prévu par la notification de la pénalité, le directeur de l'organisme envoie une mise en demeure à l'intéressé de payer dans le délai d'un mois. Le directeur de l'organisme, lorsque la mise en demeure est restée sans effet, peut délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Une majoration de 10 % est applicable aux pénalités qui n'ont pas été réglées aux dates d'exigibilité mentionnées sur la mise en demeure.
La pénalité peut être recouvrée par retenues sur les prestations à venir. Il est fait application, pour les retenues sur les prestations versées par les organismes débiteurs de prestations familiales, des articles L. 553-2 et L. 845-3 du présent code, de l'article L. 262-46 du code de l'action sociale et des familles et de l'article L. 823-9 du code de la construction et de l'habitation et, pour les retenues sur les prestations versées par les organismes d'assurance vieillesse, des articles L. 355-2 et L. 815-10 du présent code.
Les faits pouvant donner lieu au prononcé d'une pénalité se prescrivent selon les règles définies à l'article 2224 du code civil. L'action en recouvrement de la pénalité se prescrit par deux ans à compter de la date d'envoi de la notification de la pénalité par le directeur de l'organisme concerné.
Les modalités d'application du présent I sont fixées par décret en Conseil d'État.
II.-Lorsque l'intention de frauder est établie, le montant de la pénalité ne peut être inférieur à un trentième du plafond mensuel de la sécurité sociale. En outre, la limite du montant de la pénalité prévue au I du présent article est portée à huit fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Dans le cas d'une fraude commise en bande organisée au sens de l'article 132-71 du code pénal, cette limite est portée à seize fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.

Aux termes de l'article R. 114-11 du code de la sécurité sociale, lorsqu'il envisage de faire application de l'article L. 114-17, le directeur de l'organisme qui est victime des faits mentionnés aux 1° à 4° du I du même article le notifie à l'intéressé en précisant les faits reprochés et le montant de la pénalité envisagée et en lui indiquant qu'il dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de la notification pour demander à être entendu, s'il le souhaite, ou pour présenter des observations écrites.
Si, après réception des observations écrites ou audition de la personne concernée dans les locaux de l'organisme ou en l'absence de réponse de cette personne à l'expiration du délai mentionné à l'alinéa précédent, le directeur décide de poursuivre la procédure, il fixe le montant de la pénalité et le notifie à la personne concernée. Celle-ci peut, dans un délai d'un mois à compter de la réception de cette notification, former un recours gracieux contre la décision fixant le montant de la pénalité auprès du directeur. Dans ce cas, le directeur saisit la commission mentionnée au septième alinéa du I de l'article L. 114-17 et lui communique, le cas échéant, les observations écrites de la personne concernée ou le procès-verbal de son audition.
Après que le directeur de l'organisme ou son représentant a présenté ses observations, et après avoir entendu la personne en cause, si celle-ci le souhaite, la commission rend un avis motivé, portant notamment sur la matérialité des faits reprochés, sur la responsabilité de la personne et sur le montant de la pénalité susceptible d'être appliquée.
La commission doit émettre son avis dans un délai d'un mois à compter de sa saisine. Elle peut, si un complément d'information est nécessaire, demander au directeur un délai supplémentaire d'un mois. Si la commission ne s'est pas prononcée au terme du délai qui lui est imparti, l'avis est réputé rendu.
Le directeur dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu pour fixer le montant définitif de la pénalité et le notifier à la personne en cause ou pour l'aviser que la procédure est abandonnée. À défaut, la procédure est réputée abandonnée.
Lors des auditions mentionnées au présent article, la personne en cause peut se faire assister ou se faire représenter par la personne de son choix.
Les notifications prévues au présent article s'effectuent par tout moyen permettant de rapporter la preuve de leur date de réception. Copie en est envoyée le même jour par lettre simple.
La décision fixant le montant définitif de la pénalité précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et mentionne l'existence d'un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours. Elle mentionne également, le cas échéant, les modalités de recouvrement de la pénalité par retenues sur les prestations ultérieures à verser à l'intéressé.
La mise en demeure prévue à l'article L. 114-17 est adressée par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Elle comporte les mêmes mentions que la notification de la pénalité en ce qui concerne la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et indique l'existence du délai de paiement d'un mois à compter de sa réception, assorti d'une majoration de 10 %, ainsi que les voies et délais de recours.
Les dispositions des articles R. 133-3 et R. 133-5 à R. 133-7 sont applicables à la contrainte instituée par l'article L. 114-17.

En l'espèce, [A] [N] soutient que la CAF de l'Isère ne lui a pas communiqué l'avis de la commission des pénalités. En effet, le document lui ayant été notifié est un simple courrier, signé par une personne n'étant pas membre de la commission des pénalités. Or, la caisse devait lui transmettre une copie de l'avis proprement dit. Elle déclare que la production de procès-verbaux n'est pas suffisante.

Elle ajoute qu'il n'est pas démontré que cet avis aurait également été transmis au directeur de la caisse, de sorte que ce dernier a pris une décision relative à la pénalité sans avoir pris connaissance de l'avis de la commission des pénalités.

De plus, [A] [N] demande à la CAF de l'Isère de justifier que la commission des pénalités se soit réunie dans le respect des règles de convocation, de composition et de quorum.

[A] [N] soutient que la CAF de l'Isère n'a pas prouvé sa mauvaise foi ou son intention frauduleuse.

Enfin, elle précise que la procédure de sanction est viciée car [A] [N] n'a pas été en mesure de présenter ses observations préalables ; un courrier de suspicion de fraude aurait dû être envoyé avant la décision relative à la pénalité.

Dans ces conditions, [A] [N] sollicite l'annulation de la pénalité mise à sa charge.

Pour sa part, la CAF de l'Isère soutient que le courrier daté du 14 juin 2021 constitue l'avis de la commission des pénalités. Elle joint également le procès-verbal de la commission, qui fait apparaître que l'avis du 14 juin 2021 était fidèle à la décision des administrateurs.

La CAF de l'Isère verse aux débats la feuille d'émargement des membres de la commission ; elle justifie ainsi que le quorum et le paritarisme ont été respectés.

La caisse ajoute que la transmission de l'avis est obligatoire mais que les modalités de cette communication ne sont imposées par aucun texte.

Elle considère donc que la procédure relative à la pénalité est régulière.

Sur le bien-fondé de la pénalité, la CAF de l'Isère relève que [A] [N] a omis, de manière délibérée et réitérée, de déclarer sa situation de vie maritale, attestant régulièrement de son isolement.

La multiplicité de ces déclarations permettent d'établir sa mauvaise foi et sa volonté de dissimuler sa situation réelle, dans le but de percevoir des prestations indues.

En outre, eu égard au montant total de l'indu, le montant de la pénalité est proportionné.

Elle sollicite la condamnation de [A] [N] à payer la somme de 1 000 euros au titre de la pénalité administrative.

À cet égard, par un courrier daté du 3 février 2021, la CAF de l'Isère a informé [A] [N] qu'elle envisageait de prononcer une pénalité administrative d'un montant de 1 000 euros à son égard, pour s'être rendue coupable de manœuvres frauduleuses en se déclarant en tant que personne isolée vivant chez ses parents avec ses enfants alors qu'elle vivait en couple avec le père des enfants. [A] [N] a donc reçu un avertissement motivé, lui permettant de présenter ses observations.

Par un courrier recommandé daté du 9 mars 2021 et reçu le 19 mars 2021, soit après le délai d'un mois suivant l'avertissement tel que prévu par le code de la sécurité sociale, la CAF de l'Isère a informé [A] [N] du prononcé d'une pénalité administrative de 1 000 euros à son égard, suite à la non-déclaration de sa vie maritale depuis le mois de janvier 2018. [A] [N] a été en mesure de contester cette décision auprès de la commission des pénalités.

Il peut être ajouté que [A] [N] a été destinataire du rapport d'enquête ayant abouti à la reconnaissance d'une fraude et qu'elle a pu s'exprimer à ce sujet.

La commission des pénalités a été saisie par le directeur de la CAF de l'Isère dans les délais requis. Cette obligation légale ayant été respectée, aucune nullité n'est prévue en cas de dysfonctionnement au niveau de la commission des pénalités notamment en matière de quorum. Le moyen soulevé par [A] [N] doit donc être écarté comme étant inopérant.

De plus, le courrier daté du 14 juin 2021 constituait l'avis de la commission des pénalités et il a été adressé à [A] [N].

En outre, la CAF de l'Isère a démontré la mauvaise foi de [A] [N] qui a dissimulé sa situation de vie maritale pour percevoir des prestations indues. Cela justifie le prononcé d'une pénalité.

Enfin, au regard du montant des indus, la CAF de l'Isère a prononcé une pénalité administrative à hauteur de 1 000 euros, ce qui apparaît proportionné et adapté.

En conséquence, [A] [N] sera condamnée à verser à la CAF de l'Isère la somme de 1 000 euros au titre de la pénalité administrative.

Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce, [A] [N] sera condamnée aux entiers dépens de l'instance.

Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

Aux termes des deux premiers alinéas de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique, les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

En l'espèce, la demande formée par [A] [N], partie succombante, sera rejetée.

En revanche, [A] [N] sera condamnée à verser à la CAF de l'Isère une somme qu'il est équitable de fixer à 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'exécution provisoire

Aux termes du premier alinéa de l'article R. 142-10-6 du code de procédure civile, le tribunal peut ordonner l'exécution par provision de toutes ses décisions.

En l'espèce, l'ancienneté du litige justifie que l'exécution provisoire soit ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort,

Ordonne la jonction de la requête enregistrée sous le numéro RG 21/2521 à la requête RG 21/2077;

Déclare recevable la demande en recouvrement des indus d'ASF et de prestations familiales formée par la CAF de l'Isère ;

Dit que la procédure de contrôle diligentée par la CAF de l'Isère est régulière ;

Condamne [A] [N] à verser à la CAF de l'Isère la somme de 27 413,88 euros au titre des indus d'allocation de soutien familial et de prestations familiales, pour la période du 1er janvier 2018 au 31 octobre 2020 ;

Déclare recevable la demande formée par [A] [N] relative à la pénalité administrative ;

Condamne [A] [N] à verser à la CAF de l'Isère la somme de 1 000 euros au titre de la pénalité financière ;

Condamne [A] [N] aux entiers dépens de l'instance ;

Rejette la demande formée par [A] [N] au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Condamne [A] [N] à verser à la CAF de l'Isère la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne l'exécution provisoire.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

Florence ROZIERMartin JACOB


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/02077
Date de la décision : 14/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-14;21.02077 ?
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