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19/04/2024 | FRANCE | N°23/01361

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Ctx protection sociale, 19 avril 2024, 23/01361


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON
POLE SOCIAL

Jugement du 19 Avril 2024


Minute n° :
Audience du :19 février 2024

Requête n° : N° RG 23/01361 - N° Portalis DB2H-W-B7H-YHPZ


PARTIES EN CAUSE



partie demanderesse


Monsieur [W] [Y]
né le 29 Avril 1963 à [Localité 5] (ITALIE)
[Adresse 1]
[Localité 2]
comparant en personne assisté de Me Mustapha BAICHE substitué par Me Nina SCALISI, avocats au barreau de LYON

partie défenderesse


CPAM DU RHONE
Service Contentieux Gé

néral
[Localité 3]
comparante en la personne de M. [B], muni d’un pouvoir spécial












COMPOSITION DU TRIBUNAL


Lors des débats tenus en audie...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON
POLE SOCIAL

Jugement du 19 Avril 2024

Minute n° :
Audience du :19 février 2024

Requête n° : N° RG 23/01361 - N° Portalis DB2H-W-B7H-YHPZ

PARTIES EN CAUSE

partie demanderesse

Monsieur [W] [Y]
né le 29 Avril 1963 à [Localité 5] (ITALIE)
[Adresse 1]
[Localité 2]
comparant en personne assisté de Me Mustapha BAICHE substitué par Me Nina SCALISI, avocats au barreau de LYON

partie défenderesse

CPAM DU RHONE
Service Contentieux Général
[Localité 3]
comparante en la personne de M. [B], muni d’un pouvoir spécial

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats tenus en audience publique et du délibéré :
Présidente : Justine AUBRIOT
Assesseur collège employeur : Jérôme DUMARD
Assesseur collège salarié : Marie-José MARQUES

Assistés lors des débats et du délibéré de : Anne DESHAYES, Greffière

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

[W] [Y]
Me Mustapha BAICHE - T 1005
CPAM DU RHONE
Une copie certifiée conforme au dossier
EXPOSÉ DU LITIGE

Par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19/04/2023, Monsieur [W] [Y] a formé un recours devant le Pôle Social du tribunal judiciaire de LYON, spécialement désigné en application de l'article L.211-16 du code de l'organisation judiciaire, aux fins de contester la décision implicite de rejet de la Commission Médicale de Recours Amiable confirmant la décision notifiée par la CPAM du RHONE le 10/11/2022 qui fixe à 32% (dont 7% de taux socio professionnel) le taux d'incapacité permanente partielle en raison d'une maladie professionnelle hors tableau du 05/09/2020 consolidée le 17/06/2022, dont les séquelles sont décrites de la manière suivante par le médecin conseil : " Polyarthropathie des pieds et des mains avec crises douloureuses articulaires entraînant des troubles de la marche et une baisse de la force de préhension des deux mains chez un maçon ".

Le greffe de la juridiction a donc convoqué les parties, conformément à l'article R142-10-3 du Code de la sécurité sociale, pour l'audience du 19/02/2024.

À cette date, en audience publique :

- Monsieur [W] [Y] était présent assisté de Me BAICHE substitué par Me SCALISI. Il a fait valoir que sa situation n'avait pas été exactement évaluée et conteste le taux médical de 25 % qui lui a été attribué. Il explique être atteint d'une polyarthrite rhumatoïde séropositive et érosive touchant les pieds, les mains et les genoux, avec des douleurs intenses et des poussées inflammatoires. Il s'en suit une gêne à la marche et une baisse de la force de préhension des deux mains. Il évoque également des crises d'angoisse avec un traitement immunodépresseur.

Il sollicite également une réévaluation du correctif socio-professionnel au motif qu'il a été déclaré inapte le 29/06/2022 et licencié pour inaptitude le 22/07/2022 de son poste de maçon.

Il se fonde sur l'avis du docteur [G] du 01/02/2023 qui propose un taux médical de 60 % et un coefficient socio professionnel qui ne saurait être inférieur à 10 %.

- la CPAM du RHONE a comparu représentée par Monsieur [B]. La caisse rappelle qu'en l'espèce, nous sommes dans le cadre des maladies professionnelles (paragraphe 8.1 " majoration spécifique à la morbidité rhumatismale ") et que le raisonnement se fait en deux temps : le médecin conseil évalue dans un premier temps les limitations fonctionnelles et dans un deuxième temps, il majore le taux en fonction du retentissement des séquelles de la maladie professionnelle sur la capacité de travail.

La caisse explique ainsi que le taux de 25 % intègre déjà l'incidence professionnelle de la maladie professionnelle (retentissement qualifié de " modéré "). Le taux socio professionnel de 7% attribué vient donc en majoration.

En raison de la nature du litige, le tribunal a ordonné une consultation médicale confiée au Docteur [C] [Z], mesure qui a été exécutée sur-le-champ.

A l'issue de cette consultation, le médecin consultant, commis conformément aux dispositions des articles R 142-16 et suivants du Code de la sécurité sociale, après avoir pris connaissance du dossier médical de Monsieur [W] [Y], a exposé oralement la synthèse de ses constatations médicales, dont les parties ont pu discuter.

Les conclusions écrites du médecin consultant auprès du tribunal sont jointes à la minute du présent jugement.

Puis, le tribunal s'est retiré et a délibéré de l'affaire conformément à la loi, avant de rendre son jugement par mise à la disposition au greffe le 19/04/2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité du recours

La recevabilité du recours n'est pas discutée par la caisse. Il appartient néanmoins au juge de la vérifier d'office, l'exercice d'un recours administratif préalable conditionnant le recours contentieux en vertu de l'article 125 du NCPC et de l'article L142-4 du Code de la sécurité sociale (visant les litiges relatifs à l'incapacité permanente résultant d'accident du travail ou maladie professionnelle), applicable aux décisions notifiées à compter du 1er janvier 2020.

En l'espèce, Monsieur [W] [Y] justifie avoir exercé un recours préalable devant la commission médicale de recours amiable le 24/11/2022, réceptionné le 25/11/2022, qui a été rejeté par décision implicite. Il a formé un recours contentieux le 19/04/2023.

Le recours est déclaré recevable.

Sur l’évaluation du taux médical d’IPP

La juridiction saisie du recours, doit vérifier l'application du barème et des dispositions de l'article L 434-2 du Code de la Sécurité Sociale.

En application de l'article L.434-2 du Code de la Sécurité Sociale, le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d'après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

En l'espèce, Monsieur [W] [Y] souffre d'une maladie professionnelle hors tableau du 05/09/2020 consolidée le 17/06/2022 (polyarthrite rhumatoïde).

Le Docteur [C] [Z], médecin consultant, note qu'à la date de l'examen clinique réalisé par le médecin conseil, la cinétique des doigts est complète à droite et à gauche, la force de préhension est conservée à droite et à gauche, la cinétique des articulations des chevilles est complète, la cinétique des articulations métatarso-phalangiennes est conservée. Ainsi, sur le plan purement fonctionnel, le médecin consultant note qu'à cette date, il n'y a pas de limitation importante.

Il note un traitement de fond, régulier.

Selon l'évaluation du médecin conseil, le taux médical se décompose comme suit :

- 5 % pour la limitation de force musculaire des deux mains,
- 10 % pour la limitation du mouvement des articulations métarso-phalangiennes par la douleur des deux pieds,
- 10 % pour le retentissement professionnel " modéré " (crises douloureuses, traitement).

Le Docteur [C] [Z] propose de porter le taux médical à 35 % compte tenu de la pathologie inflammatoire tout en précisant qu'il y a une part de subjectivité dans l'évaluation dans la mesure où la maladie est fluctuante avec le temps.

Il convient à ce titre de préciser que le certificat médical réalisé par le Docteur [G] du 01/02/2023 est postérieur à la date de la consolidation (8 mois), et ne peut être retenu dans le cadre de la présente instance mais pourrait l'être dans le cadre d'un nouvel examen de la situation de l'assuré par la CPAM faisant suite à une éventuelle déclaration d'aggravation du médecin traitant.

En tout état de cause, il ressort des observations et constatations du médecin consultant, des pièces fournies, du rapport du médecin-conseil et des débats à l'audience de ce jour, que le taux médical de 35 % correspond à une plus juste évaluation des séquelles de l'assuré à la date de consolidation, conformément au barème indicatif.

En conséquence, il convient de réformer la décision contestée et d'attribuer un taux médical de 35 % à Monsieur [W] [Y].

Sur l’évaluation du taux socio-professionnel

Il résulte des dispositions de L. 434-2 du Code de la sécurité sociale que " Le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques, et mentales de la victime, ainsi que d 'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité ".

Les notions de qualification professionnelle et d'aptitude se rapportent aux possibilités d'exercice d'une profession déterminée et aux facultés que peut avoir une victime d'accident du travail de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.

Dès lors, la majoration du taux d'incapacité au titre du retentissement professionnel suppose que soit rapportée la preuve d'une perte d'emploi ou d'un préjudice économique distinct en lien direct et certain avec la maladie professionnelle.

En l'espèce, la caisse a attribué un taux socio professionnel à l'assuré à hauteur de 7 %.

Or, comme souligné à l'audience par la Caisse, l'incidence professionnelle est également évaluée dans le taux d'IPP, selon le paragraphe 8.1 du barème " majoration spécifique à la morbidité rhumatismale " :

" En tenant compte du taux de base et éventuellement des majorations spécifiques, le médecin portera un jugement global sur le retentissement des séquelles de la maladie sur la capacité de travail du patient et fixera le taux d'IPP en fonction de son importance ". En l'espèce, le médecin conseil a évalué à 10 % le retentissement des séquelles de la maladie sur la capacité de travail.

Monsieur [W] [Y], au moment de la déclaration de la maladie professionnelle, était chef de chantier/maçon depuis 1986 au sein de la même société : l'entreprise [4]. Il a été déclaré inapte par le médecin du travail le 29/06/2022 (" l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. Inapte au poste et à tout poste dans l'entreprise "). Par la suite, il a été licencié pour inaptitude avec impossibilité de reclassement le 27/07/2022.

Ainsi, en attribuant un taux socio professionnel de 7 % (en plus des 10 % intégrés par le médecin conseil dans le taux médical, la CPAM a bien tenu compte de ces éléments et a correctement indemnisé l'incidence professionnelle de la maladie professionnelle de l'assuré au regard de son inaptitude et de son licenciement, et dont le taux est proportionnel au taux médical de 35 %, et ce d'autant plus que la fixation du taux d'IPP n'a pas pour objet d'attribuer à l'assuré un revenu de remplacement compensant intégralement la perte de salaire liée aux séquelles de sa maladie professionnelle.

Compte tenu de ces éléments, il n'y a pas lieu de majorer encore le taux socio-professionnel accordé.

Il convient par ailleurs d'ordonner l'exécution provisoire vu l'ancienneté du litige.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire en premier ressort,

- DÉCLARE recevable le recours formé par Monsieur [W] [Y] ;

- REFORME la décision implicite de rejet de la Commission Médicale de Recours Amiable confirmant la décision notifiée de la CPAM du RHONE du 10/11/2022 et FIXE à 42 % (dont 7 % de taux socio-professionnel) le taux d'incapacité permanente partielle de Monsieur [W] [Y] en raison de sa maladie professionnelle hors tableau du 05/09/2020 consolidée le 17/06/2022 ;

- ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision.

- RAPPELLE, en application de l'article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale introduit par l'article 61 (VII) de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l'audience sont à la charge de la caisse nationale d'assurance maladie.

- CONDAMNE la CPAM du RHONE aux dépens exposés à compter du 1er janvier 2019.

Jugement rendu par mise à disposition au greffe le 19 avril 2024 dont la minute a été signée par la présidente et par la greffière.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 23/01361
Date de la décision : 19/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-19;23.01361 ?
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