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12/03/2024 | FRANCE | N°18/01232

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Quatrième chambre, 12 mars 2024, 18/01232


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Quatrième Chambre

N° RG 18/01232 - N° Portalis DB2H-W-B7C-SCNY

Jugement du 12 Mars 2024
























Notifié le :




Grosse et copie à :

Maître Mélanie CHABANOL de la SELARL CABINET MELANIE CHABANOL - 2866

Maître Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET - 475


Copie dossier



REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Tribunal judiciaire de LYON, s

tatuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 12 Mars 2024 devant la Quatrième Chambre le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 24 Octobre 2023, et que la cause eut...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Quatrième Chambre

N° RG 18/01232 - N° Portalis DB2H-W-B7C-SCNY

Jugement du 12 Mars 2024

Notifié le :

Grosse et copie à :

Maître Mélanie CHABANOL de la SELARL CABINET MELANIE CHABANOL - 2866

Maître Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET - 475

Copie dossier

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 12 Mars 2024 devant la Quatrième Chambre le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 24 Octobre 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 12 Décembre 2023 devant :

Stéphanie BENOIT, Président,
siégeant en formation Juge Unique,

Assistée de Sylvie ANTHOUARD, Greffier,

Et après qu’il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l’affaire opposant :

DEMANDERESSE

Madame [Z] [B]
née le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 6] (69),
demeurant [Adresse 5]

représentée par Maître Mélanie CHABANOL de la SELARL CABINET MELANIE CHABANOL, avocats au barreau de LYON

DEFENDERESSES

Madame [G] [P] épouse [K]
en qualité d’ayant droit de Monsieur [U] [P] né le [Date naissance 4] 1950 à [Localité 7] et décédé le [Date décès 3] 2020,
demeurant [Adresse 2]
intervention forcée

représentée par Maître Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON
et par la SCP THOIZET et ASSOCIES avocat plaidant au barreau de VIENNE
EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte d’huissier en date du 12 décembre 2017, Madame [Z] [B] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de LYON Madame [G] [P] épouse [K] en tant que tutrice de Monsieur [U] [P], lequel est décédé le [Date décès 3] 2020.
Elle explique que Monsieur [P] l’a embauchée pour occuper un poste de responsable des ressources humaines, titulaire d’un contrat à durée indéterminée au sein de la société ATS SURVEILLANCE.
Elle indique que la juridiction consulaire a prononcé le redressement puis la liquidation judiciaire de Monsieur [P], sans que celui-ci ne mentionne sa qualité de salariée investi d’un mandat de conseiller prud’homal auprès de l’administrateur judiciaire.
Ayant finalement été licenciée par le mandataire judiciaire en charge de la procédure collective, elle a contesté la mesure devant la juridiction prud’homale puis celle de second degré qui ont chacune confirmé sa régularité et fixé les montants de sa créance au passif de la liquidation. 
Madame [B] considère qu’une inaction délibérée de Monsieur [P] est constitutive d’une faute à l’origine d’un dommage et qu’elle a porté atteinte à son mandat.

Dans ses dernières conclusions, Madame [B] attend de la formation de jugement qu’elle condamne Madame [K] en qualité d’héritière de Monsieur [P] à lui régler une indemnité de 240 000 €, avec limitation à l’actif net de la succession, et qu’elle la condamne à lui verser une indemnité de 2 000 € au titre de la résistance abusive, outre le paiement d’une somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en sus des dépens.
Madame [B] conteste que l’action engagée par ses soins puisse être prescrite, faisant valoir que le délai quinquennal applicable en la matière n’a couru qu’à compter du 4 juin 2013.
L’intéressée se plaint de ne pas avoir pu bénéficier du statut protecteur attaché à son mandat et donc d’avoir perdu une chance d’obtenir une indemnisation réparant sa violation.
Elle reproche à la défenderesse de n’avoir transmis que le 2 juin 2022 une attestation dévolutive pourtant datée du 22 février 2021.

Aux termes de ses ultimes écritures, Madame [K] soulève l’irrecevabilité de l’action dirigée contre elle en l’état d’une prescription.
A défaut, elle conclut au débouté de Madame [B] au motif à titre principal qu’elle n’a accepté la succession de Monsieur [P] qu’à concurrence de l’actif net et à titre subsidiaire, que la demanderesse ne rapporte pas la preuve d’une faute à l’origine d’un préjudice.
Madame [K] réclame en retour la condamnation de Madame [B] à prendre en charge les dépens ainsi que les frais irrépétibles à hauteur de 3 000 €.
 
MOTIFS DE LA DÉCISION
 
           Il sera rappelé à titre liminaire que l'article 9 du code de procédure civile impose à celui qui entend obtenir satisfaction de sa demande de rapporter la preuve des faits nécessaires à son succès.

Sur la recevabilité de l’action engagée par Madame [B]

Madame [B] se prévaut des termes de l’article 789 du code de procédure civile, pris en son 1°, pour rappeler que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure.
Ce même texte dispose en son 6° que le juge de la mise en état possède également une compétence exclusive pour connaître des fins de non-recevoir.
Conformément à l’article 122 du code de procédure civile, le moyen soulevé par Madame [K] qui consiste à la faire déclarer irrecevable en sa demande pour cause de prescription constitue une fin de non-recevoir.
Or, le décret n°2019-1419 du 20 décembre 2019 ayant institué l’article 789 dispose en son article 55 que les dispositions de son 6° ne sont applicables qu’aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020.
Dès lors, ce texte ne saurait être utilement opposé à la défenderesse.

Conformément à l’article 2224 du code civil, l’action mise en œuvre à l’initiative de Madame [B] relève des actions personnelles ou mobilières qui « se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».

Madame [B] se plaint d’une inobservation des règles spécifiques applicables en cas de licenciement aux salariés protégés. Ceux-ci font l’objet d’une liste énumérative contenues à l’article L2411-1 du code du travail, au sein de laquelle figurent notamment les délégués syndicaux, les représentants syndicaux au comité social et économique, les conseillers prud’homaux ou encore les défenseurs syndicaux.
L’intéressée justifie de sa qualité de membre d’un conseil de prud’hommes par la production d’une carte officielle établie le 24 mars 2003.
Sans contestation opposée en demande, Madame [K] précise que Madame [B] a été convoquée par lettre du 29 novembre 2012 à un entretien préalable qui s’est déroulé le 10 décembre suivant.
Dès cette date, Madame [B] était en mesure de vérifier auprès du mandataire judiciaire si celui-ci avait été informé par l’employeur de sa qualité de salariée protégée et donc de pallier une éventuelle carence de celui-ci en informant elle-même ce même mandataire qu’elle était titulaire d’un mandat de conseiller prud’homal.
Sa qualité de membre d’une juridiction chargée spécifiquement de trancher les litiges entre employeurs et salariés l’empêchait d’ignorer qu’il lui appartenait en cas de besoin de signaler sa qualité de salariée protégée.

Ainsi, le point de départ du délai de prescription quinquennal doit être fixé au 10 décembre 2012, de sorte que Madame [B] devait agir au plus tard le 10 décembre 2017 tandis que l’acte introductif d’instance délivré sur ses instructions a été remis à destinataire le 12 décembre 2017.
Il convient donc de relever que la demande dirigée contre Madame [K] en sa qualité de tutrice de Monsieur [P] est irrecevable en raison de sa prescription.
En revanche, la prétention élevée contre la défenderesse à titre personnel, non visée par la fin de non-recevoir, sera examinée au fond.

Sur la demande indemnitaire de Madame [B] pour résistance abusive

La résistance abusive consiste pour le débiteur d’une obligation à refuser obstinément d’exécuter celle-ci.
En l’espèce, par un jugement du 23 février 2021, la présente juridiction autrement composée avait pris acte du décès de Monsieur [P] tel que signalé par l’avocat de Madame [K] et ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture en date du 18 juin 2019 avec renvoi de l’affaire à la mise en état virtuelle avec injonction pour cet avocat de communiquer un acte notarié.
Madame [B] justifie de ce que son propre conseil a adressé à son confrère deux lettres officielles datées des 16 septembre 2021 et 15 décembre 2021 afin de réclamer la communication de ce document.
Elle indique qu’une attestation dévolutive datée du 22 février 2021 ne lui a finalement été communiquée qu’à la date du 16 mai 2022.
Madame [K] ne nie pas avoir transmis tardivement le document en question, arguant d’un motif inopérant tenant au fait que la procédure n’avait été initialement engagée contre elle qu’en sa qualité de tutrice de Monsieur [P].
L’intéressée a donc effectivement fait preuve d’une résistance ayant dégénéré en abus eu égard aux nombreux mois écoulés entre l’injonction judiciaire et son exécution.
Cependant, Madame [B] ne rapporte pas la preuve d’un dommage qui ouvrirait droit à réparation, étant au surplus considéré que sa demande principale est frappée d’irrecevabilité.
    

       
Sur les demandes accessoires
 
En application de l'article 696 du code de procédure civile, Madame [B] sera condamnée aux dépens.
            Elle sera également tenue de régler à la partie adverse une somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles.
                
PAR CES MOTIFS   
     
Le Tribunal, statuant publiquement, en premier ressort et par jugement contradictoire,

Déclare irrecevable comme étant prescrite la demande présentée par Madame [Z] [B] contre Madame [G] [P] épouse [K] prise en sa qualité d’héritière de Monsieur [U] [P]
Déboute Madame [Z] [B] de sa demande tendant à la condamnation de Madame [G] [P] épouse [K] pour résistance abusive
Condamne Madame [Z] [B] à supporter le coût des dépens de l'instance
Condamne Madame [Z] [B] à régler à Madame [G] [P] épouse [K] la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
 
Prononcé à la date de mise à disposition au greffe par Stéphanie BENOIT, vice-président
En foi de quoi le présent jugement a été signé par le Président, Stéphanie BENOIT, et Sylvie ANTHOUARD, Greffier présent lors du prononcé.

Le Greffier                                                                                               Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 18/01232
Date de la décision : 12/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-12;18.01232 ?
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