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08/03/2024 | FRANCE | N°22/00691

France | France, Tribunal judiciaire de Lyon, Ctx protection sociale, 08 mars 2024, 22/00691


MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX AGRICOLE

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :

ASSESSEURS :




DÉBATS :

PRONONCE :


AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :









08 MARS 2024

Martin JACOB, président

Marie-Claude APRUZZESE, assesseur collège employeur
Nathalie FAIVRE-VIDAL, assesseur collège salarié

Assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Alice GAUTHÉ, greffière
r>Tenus en audience publique le 09 janvier 2024

Jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 08 mars 2024 par le même magistrat


Monsieur [V] [C] C/ MSA AIN RHONE

N° RG 22/00691 - N° Po...

MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL - CONTENTIEUX AGRICOLE

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :

ASSESSEURS :


DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

08 MARS 2024

Martin JACOB, président

Marie-Claude APRUZZESE, assesseur collège employeur
Nathalie FAIVRE-VIDAL, assesseur collège salarié

Assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Alice GAUTHÉ, greffière

Tenus en audience publique le 09 janvier 2024

Jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 08 mars 2024 par le même magistrat

Monsieur [V] [C] C/ MSA AIN RHONE

N° RG 22/00691 - N° Portalis DB2H-W-B7G-WXYH

DEMANDEUR

Monsieur [V] [C]
Demeurant [Adresse 1]

Comparant en personne

DÉFENDERESSE

MSA AIN RHONE
Située [Adresse 2]

Représentée par Madame [G] [H], munie d’un pouvoir spécial

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

M. [V] [C]
MSA AIN RHONE
Une copie revêtue de la formule executoire :

M. [V] [C]
Une copie certifiée conforme au dossier

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 17 juin 2017, [V] [C] a été victime d'un accident du travail.

Par un courrier daté du 8 février 2019, la MSA Ain-Rhône a informé [V] [C] de la prise en charge administrative d'une cure thermale à [Localité 3], prescrite par son médecin traitant, en relation avec un accident du travail. La caisse s'est engagée à participer également aux frais de transport et d'hébergement.

Par un courrier daté du 17 juin 2019, les thermes de [Localité 3] ont informé [V] [C] de la fermeture de leur établissement thermal et de l'impossibilité de l'accueillir à la date du 13 juillet 2019, pour le début de sa cure thermale.

En date du 11 mai 2020, [V] [C] a demandé à la MSA Ain-Rhône la prise en charge d'une cure thermale à [Localité 3], prescrite par [B] [M], rhumatologue.

Par courriers datés des 4 juin 2020 et 16 juillet 2020, la MSA Ain-Rhône a informé [V] [C] que sa demande de cure thermale pour 2020 n'était pas en lien avec son accident du travail du 17 juin 2017. La caisse a invité [V] [C] à adresser sa demande à la CPAM.

Par courriers datés des 28 juillet 2020 et 19 août 2020, la MSA Ain-Rhône a informé [V] [C] qu'elle maintenait son refus de prise en charge de la cure thermale pour 2020.

Le 14 septembre 2020, [V] [C] a saisi la commission de recours amiable de la MSA Ain-Rhône.

Par un courrier daté du 4 février 2021, le médecin-conseil de la MSA a désigné [L] [R], médecin, en qualité d'expert médical dans le cadre du refus de la cure thermale de [V] [C].

Par un courrier daté du 19 mars 2021, le médecin-conseil de la MSA a transmis à [V] [C] le compte-rendu de l'expertise médicale.

Par un courrier daté du 5 mai 2021, la MSA Ain-Rhône a informé [V] [C] du refus médical de sa demande d'entente préalable pour la prise en charge d'une cure à [Localité 3].

Le 1er juin 2021, [V] [C] a saisi la commission de recours amiable de la MSA Ain-Rhône.

Par un courrier recommandé daté du 13 décembre 2021 et reçu le 15 décembre 2021, la MSA Ain-Rhône a informé [V] [C] de la décision de rejet de la commission de recours amiable, prise lors de sa séance du 7 septembre 2021.

* * * *

Par courrier recommandé avec avis de réception reçu au greffe le 2 février 2022, [V] [C] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de contester la décision de la commission de recours amiable de la MSA Ain-Rhône du 13 décembre 2021 et d'ordonner une nouvelle expertise.

L'affaire a été appelée à l'audience du 9 janvier 2024. [V] [C] et la MSA Ain-Rhône ont comparu, de sorte que le jugement sera contradictoire.

* * * *

[V] [C], comparant en personne, a soutenu oralement ses conclusions et a demandé au tribunal de :

- ordonner à la MSA Ain-Rhône de prendre en charge pour l'année 2024, à ses frais, sa cure thermale, incluant les frais de soins thermaux, les frais de transport et les frais d'hébergement,

- condamner la MSA Ain-Rhône à lui verser la somme de 1 600 euros au titre des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et physique,

- condamner la MSA Ain-Rhône aux entiers dépens,

- rejeter toutes les demandes formées par la MSA Ain-Rhône.

La MSA Ain-Rhône, dûment représentée, a soutenu oralement ses conclusions et a sollicité ce qui suit :

- rejeter les demandes formées par [V] [C],

- condamner [V] [C] aux entiers dépens.

L'affaire a été mise en délibéré au 8 mars 2024.

MOTIFS

Sur la demande de prise en charge d'une cure thermale

Aux termes de l'article L. 751-8 du code rural et de la pêche maritime, les dispositions du titre III et du chapitre III du titre IV du livre IV du code de la sécurité sociale relatives aux prestations en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles sont applicables au régime défini au présent chapitre. Toutefois, l'article L. 434-1 du code de la sécurité sociale n'est pas applicable aux personnes mentionnées au 8° du II de l'article L. 751-1 du présent code.

Aux termes du 1° de l'article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, les prestations accordées aux bénéficiaires du présent livre comprennent la couverture des frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et accessoires, des frais liés à l'accident afférents aux produits et prestations inscrits sur la liste prévue à l'article L. 165-1 et aux prothèses dentaires inscrites sur la liste prévue à l'article L. 162-1-7, des frais de transport de la victime à sa résidence habituelle ou à l'établissement hospitalier et, d'une façon générale, la prise en charge des frais nécessités par le traitement, la réadaptation fonctionnelle, la rééducation professionnelle, le reclassement et la reconversion professionnelle de la victime. Ces prestations sont accordées qu'il y ait ou non interruption de travail.

En l'espèce, [V] [C] explique avoir été victime d'un accident du travail le 17 juin 2017 en déplaçant des pots, dans le cadre de son activité de pépiniériste au sein d'une entreprise de jardinerie.

À la suite de cet accident du travail, son médecin rhumatologue lui a prescrit une cure thermale qui a initialement été acceptée par la MSA Ain-Rhône, en février 2019. Il s'est donc inscrit auprès des établissements thermaux de [Localité 3], pour effectuer cette cure durant le mois de juillet 2019.

Néanmoins, suite à une fermeture de l'établissement thermal, [V] [C] n'a pas pu réaliser la cure envisagée.

[V] [C] ajoute avoir sollicité la prise en charge de cette même cure par la MSA Ain-Rhône en 2020 mais il a reçu un rejet de la part de la caisse car ces soins ne seraient pas en lien avec son accident du travail.

Il ne comprend pas comment une même prescription peut être considérée comme étant en lien avec son accident du travail de 2017 puis ne plus présenter cette caractéristique l'année suivante.

Il demande à pouvoir bénéficier d'une prise en charge de la cure thermale qui lui a été prescrite, incluant les soins thermaux, les frais de transport et les frais d'hébergement, au titre de l'année 2024.

Pour sa part, la MSA Ain-Rhône indique que les accords de prise en charge ne sont valables que pour l'année civile en cours. Ainsi, l'accord transmis à [V] [C] le 8 février 2019 n'était valable que jusqu'au 31 décembre 2019.

La caisse précise qu'une expertise médicale a été diligentée par [L] [R], médecin, qui a communiqué son rapport au médecin-conseil de la MSA. Or, le médecin expert a rendu un avis médical de refus de prise en charge de la cure thermale au motif que l'objet des soins de la cure n'a pas de lien avec l'accident du travail subi par [V] [C] le 17 juin 2017.

La MSA Ain-Rhône rappelle que l'avis de l'expert s'impose à elle, ce qui explique son refus de prise en charge.

À cet égard, [V] [C] ayant renoncé à solliciter une mesure d'expertise médicale, le tribunal ne dispose que des éléments médicaux évoqués dans la décision de la commission de recours amiable de la MSA Ain-Rhône.

Or, la commission indique que, " le 1er mars 2021, l'expert a rendu un avis médical de refus de prise en charge de la cure thermale au motif que l'objet des soins de la cure n'a pas de lien avec son accident du travail en date du 17 juin 2017 ".

Dans ces conditions, il revient à [V] [C] de démontrer l'existence d'un lien entre sa demande de cure et son accident du travail. Pour ce faire, il communique un certificat rédigé par [B] [M], médecin rhumatologue, en date du 14 septembre 2020, qui précise que " ce patient a présenté un accident du travail le 17/06/2017 avec apparition de douleurs lombofessières gauches, il a présenté une rechute dans les suites de cet accident du travail initial avec persistance de douleurs lombofessières gauches. Les demandes de soins en milieu thermal ont été effectuées avec nécessité de prise en charge dans le cadre de l'AT puisque ses douleurs s'inscrivent dans les suites de son accident initial ".

Cette déclaration entre ainsi en contradiction avec l'avis du médecin expert et du médecin-conseil de la MSA Ain-Rhône sans qu'il soit possible de connaître les motifs précis et détaillés ayant été retenus par l'expert médical.

Il doit être ajouté que [V] [C] verse aux débats un jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, en date du 27 mai 2021, qui mentionne une décision de la MSA Ain-Rhône du 14 novembre 2018 évoquant une " très discrète gène fonctionnelle du rachis lombaire sur état antérieur majeur ". La caisse a attribué à [V] [C] un taux d'incapacité permanente partielle de 1%.

Toutefois, le tribunal ne retient pas l'existence d'un état antérieur et, au vu des séquelles objectives constatées sous la forme de douleurs, il fixe le taux d'incapacité permanente partielle de [V] [C] à hauteur de 5%.

En effet, il ressort du procès-verbal de consultation organisé lors de l'audience devant le tribunal judiciaire, le 27 mai 2021, qu'il existe un accident du travail sous forme de lumbago.

Dans ces conditions, il peut être constaté que [V] [C] :

- a été victime d'un accident du travail, en 2017,
- ayant entraîné des douleurs lombaires,
- qui ont ensuite donné lieu à la fixation d'une taux d'incapacité permanente partielle de 5%, après consultation effectuée en 2021,
- des séquelles pour lesquelles la MSA Ain-Rhône a donné un accord de prise en charge d'une cure thermale en février 2019.

Le médecin rhumatologue de [V] [C] établit un lien entre l'accident du travail et les douleurs actuellement ressenties par son patient, ce qui présente une forte cohérence avec les constatations opérées par le médecin présent lors de l'audience devant le tribunal judiciaire en 2021.

La caisse a initialement considéré qu'il existait un lien entre l'accident du travail et l'état de santé de [V] [C], sans expliquer davantage pour quelle raison l'organisation d'une cure thermale ne serait plus nécessaire quelques mois plus tard.

Aucune des parties n'a sollicité une expertise médicale pour départager les avis contradictoires du médecin rhumatologue de [V] [C] et du médecin expert désigné par le médecin-conseil de la MSA.

En conséquence, il convient de retenir l'existence d'un lien entre la pathologie de [V] [C] et son accident du travail de 2017.

Il sera ordonné à la MSA Ain-Rhône de prendre en charge la cure thermale prescrite au profit de [V] [C], pour les soins thermaux, les frais de transport et les frais d'hébergement, au titre de l'année 2024.

Sur la responsabilité de la MSA Ain-Rhône

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Aux termes de l'article L. 141-2 du code de la sécurité sociale, quand l'avis technique de l'expert ou du comité prévu pour certaines catégories de cas a été pris dans les conditions fixées par le décret en Conseil d'État auquel il est renvoyé à l'article L. 141-1, il s'impose à l'intéressé comme à la caisse. Au vu de l'avis technique, le juge peut, sur demande d'une partie, ordonner une nouvelle expertise.

En l'espèce, [V] [C] sollicite des dommages-intérêts pour son préjudice moral et physique.

À cet égard, il convient de rappeler que la caisse de MSA Ain-Rhône est tenue de suivre l'avis du médecin-conseil et du médecin-expert. En refusant la prise en charge des frais de cure thermale de [V] [C], elle n'a donc commis aucune faute.

En conséquence, la demande formée par [V] [C] sera rejetée.

Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En l'espèce, la MSA Ain-Rhône sera condamnée aux dépens de l'instance.

Sur l'exécution provisoire

Aux termes du premier alinéa de l'article R. 142-10-6 du code de la sécurité sociale, le tribunal peut ordonner l'exécution par provision de toutes ses décisions.

En l'espèce, l'ancienneté du litige justifie que l'exécution provisoire soit ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort ;

- ORDONNE à la MSA Ain-Rhône de prendre en charge la cure thermale prescrite par [B] [M], médecin rhumatologue, au profit de [V] [C], pour l'année 2024, incluant les soins thermaux, les frais de transport et les frais d'hébergement ;

- REJETTE la demande formée par [V] [C] à titre de dommages-intérêts ;

- CONDAMNE la MSA Ain-Rhône aux dépens de l'instance ;

- ORDONNE l'exécution provisoire.

LA GREFFIERELE PRÉSIDENT

A. GAUTHÉM. JACOB


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Lyon
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/00691
Date de la décision : 08/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-08;22.00691 ?
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