TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE CHARTRES
N° RG 23/02766 - N° Portalis DBXV-W-B7H-GD7K
Minute : 24/ JCP
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Maître Roger LEMONNIER de la SCP LEMONNIER DELION GAYMARD RISPAL-CHATELLE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P 516
Copie certifiée conforme
délivrée le :
à :
[H] [I], [E] [G]
Préf28
SPNLR
SPChâteaudun
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Juge des Contentieux de la Protection
JUGEMENT Réputé contradictoire
DU 30 Juillet 2024
DEMANDEUR :
S.A.S. ACTION LOGEMENT SERVICES,
dont le siège social est sis 19/21 Quai d’Austerlitz - 75013 PARIS
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par la SCP LEMONNIER DELION GAYMARD RISPAL-CHATELLE, demeurant 43-45 avenue Kléber - 75116 PARIS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P 516 substituée par Me Marie CHAUMANET, demeurant 47, avenue de Villiers - 75017 PARIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R 101
D’une part,
DÉFENDEURS :
Madame [H] [I],
demeurant 08 ter rue de la Poste - 28700 AUNAY SOUS AUNEAU
comparante en personne
Monsieur [E] [G],
demeurant 7 route des Chaises - 78125 RAIZEUX
non comparant, ni représenté
D’autre part,
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Juge des contentieux de la protection : Isabelle DELORME
Greffier: Séverine FONTAINE
DÉBATS :
L'affaire a été plaidée à l'audience publique du 21 Mai 2024 et mise en délibéré au 30 Juillet 2024 date à laquelle la présente décision est rendue par mise à disposition au greffe.
* * *
EXPOSE DU LITIGE
Selon offre préalable de pré excepté le 8 août 2011, l’Association GIC a consenti à Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G], un prêt immobilier d’un montant en capital de 15.000 € remboursables en 180 mensualités incluant les intérêts au taux nominal de 1.75 % .
Suite à une ordonnance 2016-1408 du 20 octobre 2016, la société ACTION LOGEMENT SERVICES, société anonyme simplifiée, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 824 541 148, dont le siège social est situé 19 Quai d’Austerlitz 75013 PARIS, agissant en la personne de son représentant légal domicilié de droit audit siège, a été substituée de plein droit, avec « transfert des biens, droits et obligations », incluant les actions judiciaires en cours aux fins organismes collecteurs de la participation des employeurs à l’effort de construction, et donc notamment à l’association ayant octroyé le prêt.
Des mensualités restées impayées, une mise en demeure a été adressée le 25 janvier 2023, qui est restée infructueuse.
Suivant acte de commissaire de justice en date des 10 et 12 octobre 2023, la société ACTION LOGEMENT SERVICES, venant aux droits de l’Association GIC, suite à l’ordonnance du 20 octobre 2016 précitée, a fait assigner Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G] afin de les voir condamner solidairement à payer la somme de 5198,06 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 25 janvier 2023 ; outre la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi d’obtenir leur condamnation in solidum aux entiers dépens.
L’affaire a été appelée à l’audience du 16 janvier 2024et renvoyé à l’audience du 21 mai 2024.
L’affaire a à nouveau été appelée le 21 mai 2024, retenue ce jour-là ;
A l’audience, le Juge a soulevé la prescription, la nullité de la convention souscrite et la déchéance du droit aux intérêts.
La société ACTION LOGEMENT SERVICES, représentée par son conseil, a demandé le bénéfice de son acte introductif d’instance, auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
Madame [H] [I] régulièrement citée par dépôt étude, à comparer à l’audience
Elle ne conteste pas le montant de la créance réclamée par la créancière. Elle explique que le bien est actuellement en vente, qu’elle a deux enfants à charge, pour lesquels elle reçoit une pension de 118 euros par mois et qu’il perçoit un revenu de 1.900 à 2.000 euros par mois et une prime d’activité de 120 euros. Elle précise par ailleurs faire face à un loyer mensuel de 627 euros outre d’autres prêts immobiliers à rembourser ;
Elle sollicite des délais de paiement à hauteur de 24 mois, le temps notamment que la vente du bien soit réalisée.
La société ACTION LOGEMENT SERVICES ne s’oppose pas aux délais demandés.
Monsieur [E] [G] régulièrement cité par remise de l’acte à tiers présent domicile, a été mis comparant ni représenté.
La décision a été mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au 30 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l’action et la compétence du tribunal
Le prêt immobilier dont s’agit est soumis aux dispositions de l'article L. 312-1 du code de la consommation, qui s’applique à toute opération de crédit mentionnée au 6° de l'article L. 311-1, qu'elle soit conclue à titre onéreux ou à titre gratuit et, le cas échéant, à son cautionnement, dès lors que le montant total du crédit est égal ou supérieur à 200 euros et inférieur ou égal à 75 000 euros.
Selon les dispositions de l’article L 337-2 du code de la consommation, devenu, article L218-2 du même code, « l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par 2 ans ».
Il convient de rappeler que la prescription ne concerne que les seules échéances prescrites, les autres échéances non prescrits ainsi que le capital restant dû pouvant continuer à être réclamé par le prêteur.
Enfin, selon l’article 2240 Code civil le délai de prescription peut être interrompu, par la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait.
L’article 2245 du Code civil, le paiement partiel d’une créance par le débiteur solidaire suffit pour interrompre la prescription à l’égard de tous.
En l’espèce, le montant de la créance entre dans le taux de compétence de la présente juridiction.
En outre, selon l’échéancier, les mises en demeure, et le décompte versé aux débats, les premiers impayés remonte au 11 avril 2022, étant précisé que les emprunteurs ont repris quelques règlements partiels après cette date.
Madame [H] [I] tout état de cause le montant de la dette lors de l’audience.
L’assignation a par ailleurs interrompu le délai de prescription conformément aux dispositions de l’article 2241 du Code civil.
En conséquence, des dispositions rappelées ci-dessus, la présente juridiction compétente pour connaître du présent litige et l’action de la société ACTIONS LOGEMENT SERVICES est recevable.
SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT
Sur le montant de la créance
Il résulte des conditions générales du prêt du 5 août 2011, que : « toutes les sommes dues au titre du présent contrat tant en principal qu’en intérêt, primes d’assurances et accessoires, deviennent exigibles dans l’un des cas suivants… défaut de paiement d’une échéance, de toute autre somme due GIC à titre quelconque, en vertu des présentes…. L’exigibilité anticipée, dans les cas ci-dessus prévus, aura lieu immédiatement et de plein droit. Le GIC n’aura pas à faire prononcer en justice la déchéance du terme, qui lui demeure acquise, nonobstant tout paiement ou régularisation postérieure à l’exigibilité obtenue de plein droit. En cas de défaillance de l’emprunteur, le GIG pourra… exiger le remboursement immédiat du capital restant dû ; Dans ce cas des sommes produiront des intérêts de retard du prêt, l’emprunteur versera une indemnité égale à è ù du capital restant dû majoré des intérêts échus et non versés » ;
En l’espèce, la société ACTION LOGEMENT SERVICES demande la condamnation solidaire des emprunteurs, au paiement des sommes suivantes :
Échéances impayées 11 avril au 11 décembre 2021 : 100,31 euros x 9 soit 902,79€
Capital restant dû 4.126,42€Indemnité de résiliation (7 % du capital) 288,85€A déduire, remboursements - 120,00€Soit un montant total de 5.198,06 €
La demande au titre des intérêts contractuels est conforme aux dispositions convenues entre les parties au titre du contrat de prêt.
Il est par ailleurs rappelé, que la créance est donc capitale restant dû n’est pas contestée par Madame [H] [I].
Concernant en revanche indemnité de résiliation, il est rappelé, que l’article D312-16 du code de la consommation précise que : « lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L312-39, il peut demander une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance »
Selon la recommandation de la commission des clauses abusives numéro 21-01 du 10 mais2021, ces clauses sont licites mais l’article D312-16 du code de la consommation n’édicte pas un droit légal à pénalité de 8% . Il laisse à la discrétion des parties la stipulation d’une pénalité contractuelle dont seul le taux maximal est fixé. Les parties demeurent libres de déterminer un montant exprimé en pourcentage moindre que ce maximum.
Aussi, bien que l’indemnité de 8% et en l’espèce 7% soit autorisée, il ne s’agit pas pour autant d’une clause qui refléterait une disposition législative ou réglementaire qui serait impératif ;
La clause fixant une telle indemnité constitue donc une clause pénale soumise à l’application de la législation sur les clauses abusives.
L’article L212-1 alinéa 2 du code de la consommation prévoient que le caractère abusif une clause s’apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat.
En outre, au terme de l’article 1152 du code civil dans sa version applicable au contrat de prêt de 2011, lorsque la convention portait que celui qui manquera de l'exécuter devait payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne pouvait être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
L’article 1231 du code civil également dans sa version en vigueur en 2011, précisait que lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la peine convenue peut, même d'office, être diminuée par le juge à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'article 1152, toute stipulation contraire étant réputée non écrite.
Le juge peut donc, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
L’indemnité de résiliation de 7% est manifestement excessive, au regard du montant emprunté et de ce que les emprunteurs ont remboursé une partie importante du capital avant leur défaillance dans le règlement des mensualités.
L’indemnité de résiliation sera ramenée à un montant de 1 euro.
En conséquence, il y a lieu de condamner solidairement Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G] la somme de 4.910,21 euros au titre du solde débiteur prêt immobilier du 5 août 2011, avec intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 2023, date de la mise en demeure.
Sur la demande reconventionnelle de délais
Aux termes de l’article de l’article 1343-5 du code civil, « Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment.
En l’espèce, Madame [H] [I] sollicite 24 mois de délais de paiement pour régler la dette.
Elle fait part d'un revenu moyen mensuel d'environ 1.900 à 2.000 euros outre une prime d’activité de 120€ et précise que le bien est actuellement en vente. Elle indique avoir deux enfants à charge, pour lesquels elle reçoit une pension de 118 euros par mois. Elle déclare par ailleurs faire face à un loyer mensuel de 627 euros outre les charges courantes et d’autres prêts immobiliers à rembourser.
Ainsi au regard de ces éléments, Madame [H] [I] sera autorisée à se libérer du montant de sa dette en 24 mois et selon les modalités qui seront rappelées au dispositif, étant précis que si le bien est vendu avant l’expiration des délais, la dette pourra être apurée avant l’expiration des délais accordés.
SUR LES AUTRES DEMANDES
Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».
Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G], parties perdantes, devront supporter solidairement les entiers dépens de la présente procédure.
Sur les frais irrépétibles
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à condamnation.
Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G], parties perdantes condamnées aux dépens, seront condamnées également à payer solidairement à la société ACTION LOGEMENT SERVICES une somme qu’il est équitable de fixer à 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur l’exécution provisoire
Aux termes des dispositions des article 514 et 514-1 du Code de procédure civile, applicables au présent litige, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
PAR CES MOTIFS
Le Juge des contentieux de la protection, statuant après débats en audience publique, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe ;
DECLARE la société ACTION LOGEMENT SERVICES, ayant son siège social est situé 19 Quai d’Austerlitz 75013 PARIS, recevable en sa demande de paiement ;
DIT que l’indemnité de résiliation est ramenée à la somme de 1 euros;
CONDAMNE solidairement Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G] à payer à la société ACTION LOGEMENT SERVICES, ayant son siège social est situé 19 Quai d’Austerlitz 75013 PARIS, la somme de quatre mille neuf cent dix euros et vingt et un centimes (4.910,21 euros) au titre du solde débiteur du prêt immobilier du 5 août 2011, avec intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 2023;
AUTORISE Madame [H] [I] à s’acquitter des sommes susvisées en 24 mensualités de deux cents euros (200,00 euros), le 10 de chaque mois et pour la première fois le 10 du mois suivant le prononcé du jugement à intervenir, la dernière mensualité étant majorée du solde de la dette ;
DIT qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité à son terme, la totalité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible ;
CONDAMNE solidairement Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G] à verser à la société ACTION LOGEMENT SERVICES la somme de cinq cents euros (500,00 euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE solidairement Madame [H] [I] et Monsieur [E] [G] aux entiers dépens ;
DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires,
RAPPELLE que le présent jugement bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
Ainsi jugé et prononcé.
LE GREFFIER LE JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Séverine FONTAINE Isabelle DELORME