MINUTE N° : 2024/
JUGEMENT : Contradictoire
DU : 05 Juillet 2024
AFFAIRE : [X] / [R]
DOSSIER : N° RG 23/00013 - N° Portalis DBXV-W-B7H-F757
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CHARTRES
TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX
DEMANDEURS
Madame [V], [O], [F] [X] épouse [T]
née le 22 Août 1980 à [Localité 6], de nationalité Française
demeurant [Adresse 7]
Monsieur [K] [H] [X]
né le 26 janvier 1984 à [Localité 6] (28), de nationalité Française
demeurant [Adresse 2]
comparants et assistés de Maître Eliette SARKISSIAN, du barreau de CHARTRES
DÉFENDEUR
Monsieur [B], [I], [D] [R]
né le 01 Janvier 1980 à [Localité 6], de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]
comparant et assisté de Maître Julien GIBIER du barreau de CHARTRES
COMPOSITION DU TRIBUNAL
François RABY, Juge au Tribunal Judiciaire de CHARTRES,
assesseurs bailleurs : Monsieur Philippe PERDEREAU, Monsieur Alain BESNIER
assesseurs preneurs : Monsieur Jean-Luc GAUTIER, Monsieur Pierre GAULARD
GREFFIERE
Nathalie MULOT, lors des débats et Valérie AGUILERA, lors de la mise à disposition
▸ La formation du Tribunal est complète : délibéré à la majorité des voix (Article L.492.7 du code rural).
DÉBATS
A l’audience publique du 5 avril 2024, a l’issue des débats, il a été indiqué que la décision serait prononcée par mise à disposition au greffe le 07 juin 2024, prorogée au 05 juillet 2024.
copie certifiée conforme le : 05/07/2024 par LRAR
à :
Me Eliette SARKISSIAN - la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN
[V], [O], [F] [X] épouse [X]
[K] [H] [X]
- [B], [I], [D] [R]
grosse le : 05/07/2024 à : la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN
.EXPOSE DU LITIGE
Par acte d’obligation au rapport de Maître [A] [C], notaire à [Localité 5] (Eure-et-Loir), en date du 16 juillet 2009, Monsieur [Y] [X] et Madame [U] [X] ont consenti un bail rural à long terme à prise d’effet rétroactif au 1er avril 2009, à Monsieur [B] [R], et portant sur divers bâtiments et parcelles de terre sises commune d’[Localité 8].
Monsieur [Y] [X] est décédé le 31 décembre 2010.
Madame [U] [X] est décédée le 02 juin 2012.
Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] viennent désormais aux droits de Monsieur [Y] [X] et Madame [U] [X].
Par requête en date du 03 janvier 2022, Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de CHARTRES, invoquant un défaut d’entretien, sollicitent notamment la résiliation du bail rural.
Les parties ont été convoquées par les soins du greffe à l’audience de conciliation du 04 mars 2022.
En l’absence d’accord entre les parties, l’affaire a été renvoyée à l’audience de jugement du 03 juin 2022 puis, après renvoi, à l’audience du 07 octobre 2022. A cette date, une décision de radiation a été prononcée.
La réinscription au répertoire général a été sollicitée par courrier déposé au greffe le 06 avril 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 07 juillet 2023 puis, après renvois, aux audiences des 03 novembre 2023, 12 janvier 2024 et 05 avril 2024.
Lors de l’audience du 05 avril 2024, Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] comparaissent personnellement, assistés de leur avocat. Ils maintiennent leurs demandes et sollicitent du tribunal, aux termes de leurs dernières écritures, de voir :
déclarer irrecevable et infondé Monsieur [B] [R] en toutes ses demandes, fins et conclusions ;- prononcer la résiliation du bail rural à long terme consenti le 16 juillet 2009 en faveur de Monsieur [B] [R] ;
- ordonner l’expulsion de Monsieur [B] [R] et de tous les occupants de son chef avec au besoin le concours de la force publique, dans un délai d’un mois à compter du jugement à intervenir sur diverses parcelles de terre et bâtiments d’une superficie totale de 3ha 78a 20ca sur la commune d’[Localité 8] ;
- ordonner qu’une astreinte provisoire soit fixée à 150,00 euros par jour de retard à compter de cette date ;
- dire que le tribunal se réserve le droit de la liquider ;
- condamner Monsieur [B] [R] à leur payer :
- une indemnité d’occupation mensuelle égale à 300,00 euros en cas de maintien dans les lieux au-delà de cette date ;
- 3 000,00 euros à titre de dommages-intérêts en application de l’article 1231 du code civil,
- condamner Monsieur [B] [R] à leur payer la somme de 4 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
- condamner Monsieur [B] [R] aux entiers dépens.
Lors de l’audience du 05 avril 2024, Monsieur [B] [R] comparaît personnellement, assisté de son avocat. Il sollicite, aux termes de ses dernières écritures, de voir :
- débouter Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] de leurs demandes comme étant irrecevables et en tout cas mal fondés ;
A titre reconventionnel,
- condamner Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X], sous astreinte de 150,00 euros par jour de retard et par manquement constaté, à achever de démolir et évacuer les bâtiments en ruine sur lesquels s’agrègent les ronciers et la végétation de manière à permettre au locataire une exploitation normale ;
- condamner Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X], sous astreinte de 150,00 euros par jour de retard et par manquement constaté, à évacuer les grumes ;
- condamner Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] à lui verser la somme de 2 500,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est fait référence aux termes des conclusions respectives des parties déposées le 05 avril 2024, associées aux notes d’audience.
L'affaire a été mise en délibéré au 07 juin 2024 par mise à disposition au greffe et le délibéré a été prorogé au 05 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande en résiliation du bail rural
L’article 2224 du code civil dispose que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».
Aux termes de l’article L. 411-31 du code rural, « I.- sauf dispositions législatives particulières, nonobstant toute clause contraire et sous réserve des dispositions des articles L. 411-32 et L. 411-34, le bailleur ne peut demander la résiliation du bail que s'il justifie de l'un des motifs suivants :
1° […] ;
2° Des agissements du preneur de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds, notamment le fait qu'il ne dispose pas de la main-d'oeuvre nécessaire aux besoins de l'exploitation ;
3° […].
Les motifs mentionnés ci-dessus ne peuvent être invoqués en cas de force majeure ou de raisons sérieuses et légitimes.
II.- […] ».
L’article L. 131-1 du code des procédures civiles d’exécution dispose que « tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision ».
Selon l’article L. 131-3 du même code, « l'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l'exécution, sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir ».
Il est constant que le délai de prescription quinquennale court à compter de la cessation du manquement imputé au preneur.
En l’espèce, les bailleurs invoquent l’envahissement de la végétation, fournissent deux procès-verbaux de constats d’huissier de justice, en dates des 07 avril 2015 et 17 juillet 2021, et soutiennent que le preneur n’a pas réalisé les travaux nécessaires, compromettant ainsi la bonne exploitation du fonds.
Le preneur fournit également un procès-verbal de constat d’huissier de justice, en date du 03 mai 2022.
Il ressort des éléments versés aux débats que le procès-verbal de constat en date du 07 avril 2015 relève que « les haies délimitant les parcelles WB n° [Cadastre 3] et [Cadastre 4] ne sont pas entretenues émondées, élaguées, ou recepées ».
Le second procès-verbal de constat, en date du 17 juillet 2021, a été dressé plus de six ans après le premier procès-verbal de constat et, en outre, à l’issue d’une période d’interdiction de taille des haies courant à compter du 1er avril.
Si un défaut d’entretien des allées et des abords des parcelles peut être relevé à l’encontre du preneur, les bailleurs ne démontrent pas en quoi ce manquement serait de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds.
Les bailleurs seront en conséquence déboutés de leur demande en résiliation de bail de leurs demandes subséquentes, étant précisé qu’ils n’apportent pas davantage d’éléments relatifs à la réalité et à l’importance du préjudice prétendument subi.
Sur les demandes reconventionnelles
Sur la demande reconventionnelle en démolition des bâtiments en ruine
Aux termes de l’article 1719 du code civil, « le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :
1° De délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant ;
2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;
3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
4° D'assurer également la permanence et la qualité des plantations ».
Le preneur reproche aux bailleurs de ne pas avoir respecté leur obligation de délivrance des bâtiments en état de servir à leur destination et sollicitent leur démolition, invoquant leur dangerosité et l’impossibilité d’une exploitation normale.
Or, le preneur ne rapporte pas la preuve de ses allégations et il sera donc débouté de sa demande reconventionnelle à ce titre.
Sur la demande reconventionnelle en retrait des grumes
Il ne ressort des éléments du dossier et des débats aucun élément qui permettrait de faire droit à la demande de Monsieur [B] [R].
Il sera en conséquence également débouté de cette demande reconventionnelle.
Sur les mesures accessoires
Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X], parties perdantes, devront supporter les dépens de la présente procédure.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à condamnation.
L’équité commande de rejeter les demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur l’exécution provisoire
Aux termes des dispositions des article 514 et 514-1 du Code de procédure civile, applicables au présent litige, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal paritaire des baux ruraux, statuant publiquement par mise à disposition au Greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
DEBOUTE Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] de l’intégralité de leurs demandes ;
DEBOUTE Monsieur [B] [R] de ses demandes reconventionnelles ;
DEBOUTE Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE Monsieur [B] [R] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Madame [V] [T] et Monsieur [K] [X] aux entiers dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est immédiatement exécutoire.
LA GREFFIÈRE LE PRESIDENT
Valérie AGUILERA François RABY