TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
LE JUGE DE L'EXECUTION
JUGEMENT DU 03 Septembre 2024
DOSSIER N° RG 24/04818 - N° Portalis DBX6-W-B7I-ZHTW
Minute n° 24/ 298
DEMANDEUR
Madame [U] [O] [C] [K]
née le 16 Juin 1976 à PORTUGAL (04935)
demeurant [Adresse 2]
[Localité 3]
comparante en personne
DEFENDEUR
Madame [B] [W] épouse [P]
née le 14 Décembre 1943 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Monsieur [V] [P], son époux
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier
A l’audience publique tenue le 23 Juillet 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 03 Septembre 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
Le 03 septembre 2024
Formule exécutoire Mme [P]
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties
EXPOSE DU LITIGE
Madame [B] [W] épouse [P] a donné à bail à Madame [U] [O] [C] [K] un logement sis au [Localité 3] (33).
Par ordonnance de référé en date du 12 avril 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Bordeaux a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et ordonné l’expulsion de la locataire. Cette décision a été signifiée le 15 mai 2024. Par acte du même jour, Madame [W] a fait délivrer un commandement de quitter les lieux.
Par requête en date du 4 juin 2024 reçue le 6 juin 2024, Madame [U] [O] [C] [K] a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin d’obtenir un délai pour quitter les lieux. A l’audience du 23 juillet 2024, elle sollicite un délai de 12 mois. Elle indique avoir sollicité un logement social dès le 3 novembre 2022 sans succès et avoir à sa charge deux enfants mineurs.
A l’audience du 23 juillet 2024, Monsieur [V] [P], représentant son épouse, conclut au rejet de la demande. Il indique que la dette de loyer approche les 6.000 euros et que ceux-ci ont été très irrégulièrement payés alors même que la locataire a un temps bénéficié des allocations logement. Il souligne que la chaudière n’a pas été entretenue depuis près de deux ans.
Le délibéré a été fixé au 3 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de délais pour quitter les lieux
Au visa de l'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution, « Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d'un titre à l'origine de l'occupation (…) ».
L'article L. 412-4 du même code précise que : « La durée des délais prévus à l'article L.412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés ».
Il résulte de la combinaison de ces textes qu'il appartient au juge, en considération de ces dispositions, d’octroyer ou non des délais dans le respect du droit de propriété dont le caractère est absolu et du principe de valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité humaine, de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accès à un logement décent, du droit à la vie privée et familiale, au domicile, dans le cadre d’un nécessaire contrôle de proportionnalité, ayant pour finalité d'établir un juste équilibre entre deux revendications contraires, celle du propriétaire et celle de l'occupant sans droit ni titre.
Les parties s’accordent à l’audience pour indiquer que le paiement des loyers a repris depuis peu de temps mais Monsieur [P] fait état d’une dette locative de 6.022 euros, qui a donc sensiblement augmenté depuis l’ordonnance de référé qui fixait cette dette à la somme de 5.563 euros.
Madame [U] [O] [C] [K] produit une demande de logement social en date du 3 novembre 2022 renouvelée le 11 octobre 2023. Elle justifie d’un relevé de CAF pour le mois de mai 2024 mentionnant un paiement à raison de 1.440,89 euros. Elle verse aux débats le contrat de travail à durée indéterminée de son époux à compter du 8 septembre 2019, ainsi que son bulletin de salaire pour le mois de mai 2024 mentionnant un salaire de 2.117 euros.
S’il est incontestable que Madame [U] [O] [C] [K] a rencontré d’importantes difficultés dans son parcours de vie l’ayant empêché d’acquitter la dette de loyers, il doit être constaté que les paiements des loyers au cours du bail ont été extrêmement irréguliers, témoignant d’une inexécution manifeste et ancienne du contrat de bail.
Le texte susvisé impose de vérifier l’absence de possibilité de relogement à des conditions normales. Or la demanderesse ne produit qu’une demande de logement social renouvelée en 2023, ce qui ne permet pas d’établir l’existence de recherches de relogement actives et ainsi l’impossibilité dans laquelle elle se trouverait de reloger sa famille.
Elle sera donc déboutée de ses demandes.
Sur les demandes annexes
Chacune des parties conservera la charge de ses dépens.
PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’Exécution, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort,
DEBOUTE Madame [U] [O] [C] [K] de toutes ses demandes,
DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens,
Rappelle que le présent jugement est exécutoire de plein droit, le délai d’appel et l’appel lui-même n’ayant pas d’effet suspensif par application des dispositions de l’article R. 121- 21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.
LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,