TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
LE JUGE DE L'EXECUTION
JUGEMENT DU 03 Septembre 2024
DOSSIER N° RG 24/03855 - N° Portalis DBX6-W-B7I-ZDD2
Minute n° 24/ 297
DEMANDEURS
Monsieur [C] [Z]
né le 01 Juin 1966 à [Localité 8]
demeurant [Adresse 3]
[Localité 4]
comparant en personne
Madame [H] [N] épouse [Z]
née le 15 Janvier 1972 à [Localité 6]
demeurant [Adresse 3]
[Localité 4]
comparante en personne
DEFENDEUR
S.A. CLAIRSIENNE, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Monsieur [V] [S], salarié en charge du secteur contentieux, muni d’un pouvoir de représentation
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier
A l’audience publique tenue le 23 Juillet 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 03 Septembre 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
Le 03 septembre 2024
Formules exécutoires M. [Z] + CLAIRSIENNE
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties
EXPOSE DU LITIGE
Par acte en date du 6 novembre 2011, la SA CLAIRSIENNE a donné à bail à Monsieur [C] [Z] et à Madame [H] [N] épouse [Z] un logement sis à [Localité 4] (33).
Par ordonnance de référé en date du 24 novembre 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d’Arcachon a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et ordonné l’expulsion des locataires. Cette décision a été signifiée par acte du 14 décembre 2023.
Par acte du 18 janvier 2024, la SA CLAIRSIENNE a fait délivrer un commandement de quitter les lieux. Par requête reçue le 2 mai 2024, les époux [Z] ont saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin d’obtenir un délai pour quitter les lieux.
A l’audience du 23 juillet 2024, ils sollicitent un délai de 6 mois. Ils indiquent avoir accompli diverses démarches de relogement en sollicitant un logement social et en effectuant une demande auprès du DALO. Ils indiquent également avoir déposé un dossier de surendettement, leur banque ayant contesté ce plan et bloquant la situation et leur capacité à apurer le passif. Ils font état de leur future séparation, Monsieur [Z] travaillant en intérim alors que Madame [Z] ne perçoit que le RSA et que le couple a trois enfants dont deux mineurs à charge.
A l’audience du 23 juillet 2024, la SA CLAIRSIENNE représenté par Monsieur [V] [S], conclut au rejet de la demande. La SA CLAIRSIENNE indique que la dette locative s’élève désormais à la somme de 15.139, 41 euros et que le suivi de cette famille par l’assistante sociale ne donne que peu de perspectives quant à une amélioration de la situation.
Le délibéré a été fixé au 3 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de délais pour quitter les lieux
Au visa de l'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution, « Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d'un titre à l'origine de l'occupation (…) ».
L'article L. 412-4 du même code précise que : « La durée des délais prévus à l'article L.412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés ».
Il résulte de la combinaison de ces textes qu'il appartient au juge, en considération de ces dispositions, d’octroyer ou non des délais dans le respect du droit de propriété dont le caractère est absolu et du principe de valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité humaine, de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accès à un logement décent, du droit à la vie privée et familiale, au domicile, dans le cadre d’un nécessaire contrôle de proportionnalité, ayant pour finalité d'établir un juste équilibre entre deux revendications contraires, celle du propriétaire et celle de l'occupant sans droit ni titre.
En l'espèce, les époux [Z] justifient d’un plan de surendettement et de la contestation introduite à l’encontre de celui-ci par le CIC SUD OUEST. Le couple produit une demande de logement social faite le 4 janvier 2024 ainsi que le versement du RSA à Madame [Z] en avril 2024, celle-ci ne percevant plus l’AAH et ayant interjeté un recours contre cette décision. Elle produit l’évaluation sociale réalisée par la MDS du [Localité 7] mettant en évidence les difficultés de gestion du couple et les très faibles revenus de Madame [Z] fragilisée par des problèmes de santé récurrents. Ce rapport met également en exergue les efforts faits par cette dernière pour se mobiliser et trouver un nouveau logement, une demande pour un logement à [Localité 5] ayant été faite. Ce document permet enfin de constater le temps long nécessaire pour l’accomplissement des démarches.
Ainsi, les époux [Z] justifient de l’impossibilité actuelle dans laquelle ils se trouvent de se reloger. S’il y a lieu de leur accorder un délai, il sera également tenu compte du caractère exponentiel de la dette de loyer excédant désormais les 15.000 euros. Il leur sera donc alloué un délai de 3 mois à compter de la présente décision pour quitter les lieux.
Sur les demandes annexes
Chacune des parties conservera la charge de ses dépens.
PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’Exécution, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort,
ALLOUE à Monsieur [C] [Z] et à Madame [H] [N] épouse [Z] un délai de trois mois à compter de la présente décision pour quitter le logement loué par la SA CLAIRSIENNE sis [Adresse 3] ;
DIT que chacune des parties supportera la charge de ses dépens ;
Rappelle que le présent jugement est exécutoire de plein droit, le délai d’appel et l’appel lui-même n’ayant pas d’effet suspensif par application des dispositions de l’article R. 121- 21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.
LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,