TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
50D
Minute n° 24/708
N° RG 24/00590 - N° Portalis DBX6-W-B7I-YYM7
MI : 23/00000825
7 copies
ORDONNANCE
COMMUNE
GROSSE délivrée
le 05/08/2024
à la SCP BAYLE - JOLY
la SELARL CMC AVOCATS
la SELARL DGD AVOCATS
Me Bertille GRIGUER
COPIE délivrée
le 05/08/2024
au service expertise
Rendue le CINQ AOUT DEUX MIL VINGT QUATRE
Après débats à l’audience publique du 01 Juillet 2024
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Par Elisabeth FABRY, Première Vice-Présidente au tribunal judiciaire de BORDEAUX, assistée de David PENICHON, Greffier.
Lors des débats au fond, le tribunal était composé de Elisabeth FABRY, Première Vice-Présidente au tribunal judiciaire de BORDEAUX, et de Karine PAPPAKOSTAS, Greffière.
DEMANDEURS
Monsieur [D] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Maître Fabrice DELAVOYE de la SELARL DGD AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX
Compagnie d’assurance GAN ASSURANCES-SFPJ, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 10]
[Localité 9]
représentée par Maître Fabrice DELAVOYE de la SELARL DGD AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSES
S.A.S.U. MASERATI WEST EUROPE, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Maître Marie-christine RIBEIRO de la SELARL CMC AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX
S.A. MODENA SPORT, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 8]
[Localité 3]
représentée par Me Bertille GRIGUER, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A.S. AUTO OUEST, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 6]
[Localité 5]
représentée par Maître Christophe BAYLE de la SCP BAYLE - JOLY, avocats au barreau de BORDEAUX
I - PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Par ordonnance du 10 mai 2023, dans le cadre d’une instance n° RG 22/02201 opposant les époux [E] à Monsieur [S], le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux a ordonné une expertise judiciaire et désigné Monsieur [F] pour y procéder.
Les opérations d’expertise ont finalement été confiées à Monsieur [T].
Par actes des 08, 09 et 12 février 2024, Monsieur [S] et la compagnie d’assurance GAN ASSURANCES-SFPJ ont fait assigner la SASU MASERATI WEST EUROPE, la SA MODENA SPORT et la SAS AUTO OUEST devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux, afin, au visa des articles 145 et 331 du code de procédure civile, de leur voir déclarer communes et opposables les opérations d’expertise confiées à Monsieur [T] et réserver les dépens.
Les demandeurs exposent que Monsieur [S] a acquis le 28 juillet 2017 auprès du garage SA MODENA SPORT le véhicule Maserati litigieux ; qu’entre cette date et le 04 octobre 2019, date de cession du véhicule aux époux [E], il a assuré tous les entretiens et réparations nécessaires concernant le véhicule auprès des garages SA MODENA SPORT et STRADALE AUTOMOBILES ; que les époux [E] ont souscrit une extension de garantie pour la 4ème et 5ème années auprès du garage SIPA AUTOMOBILES, anciennement STRADALE AUTOMOBILES ; que le service MASERATI aurait décelé une défaillance moteur et indiqué que la cartographie moteur aurait été changée en novembre 2018 ; que l’expert judiciaire a estimé que cette affirmation nécessite d’être prouvée ; qu’il est ainsi nécessaire de rendre opposables les opérations d’expertise à la SA MODENA SPORT, la SAS AUTO OUEST et la SASU MASERATI WEST EUROPE.
Appelée à l’audience du 13 mai 2024, l’affaire a été renvoyée pour échanges de conclusions, puis retenue à l'audience de plaidoiries du 1er juillet 2024.
Les parties ont conclu pour la dernière fois :
- les demandeurs, le 02 avril 2024, par des écritures aux termes desquelles ils maintiennent leurs demandes et concluent au rejet de l’ensemble des demandes formulées par la SA MODENA SPORT,
- la SAS MODENA SPORT, le 10 juin 2024, par des écritures aux termes desquelles elle conclut au rejet des demandes de Monsieur [S] et de la compagnie d’assurance GAN ASSURANCES-SFPJ et demande leur condamnation solidaire à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,
- la SAS AUTO OUEST, le 27 juin 2024, par des écritures aux termes desquelles elle indique ne pas s’opposer à l’extension à son contradictoire des opérations d’expertise diligentées,
- la SASU MASERATI WEST EUROPE, le 10 juin 2024, par des écritures aux termes desquelles elle sollicite, à titre principal, sa mise hors de cause et la condamnation de Monsieur [S] et de la compagnie d’assurance GAN ASSURANCES-SFPJ à lui payer une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, et, à titre subsidiaire, formule toutes protestations et réserves d’usage sur la mesure d’instruction, les dépens étant réservés.
La présente décision se rapporte à ces écritures pour un plus ample exposé des demandes et des moyens des parties.
II - MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la mise en cause de la SASU MASERATI WEST EUROPE
L’expert judiciaire a signalé l’opportunité de mettre en cause le constructeur MASERATI. Cependant la SAS MASERATI WEST EUROPE n’est ni le constructeur ni l’importateur du véhicule litigieux. En sa qualité de prestataire de services, elle n’a pas pris part à la chaîne contractuelle des ventes successives entre le constructeur et le client final.
Il y a lieu en conséquence, en l’absence de motif légitime, de mettre hors de cause la SAS MASERATI WEST EUROPE dont la responsabilité n’est pas susceptible d'être engagée devant le juge du fond.
Sur la mise en cause de la SA MODENA SPORT
La SA MODENA SPORT sollicite sa mise hors de cause en affirmant que le véhicule litigieux n’était pas atteint de vice caché au moment de sa vente et qu’au surplus le délai inscrit à l’article 1548 du code civil est largement dépassé puisque la vente est intervenue le 29 juillet 2017 et que le premier acte de procédure est intervenu le 29 novembre 2022, soit plus de 5 ans après la vente ; que la modification de la cartographie moteur à l’origine de la défaillance de celui-ci réalisée en novembre 2018 a probablement été effectuée par le garage STRADALE AUTOMOBILES ou par la société Q2 Programmation et que par conséquent elle ne peut pas non plus être poursuivie sur le fondement de l’article 1787 du code civil.
Cependant, comme l’a souligné l’expert, les dires du service client MASERATI sur lesquels s’appuie la SA MODENA SPORT selon lesquels l’origine de la défaillance du véhicule provient de la modification de la cartographie du moteur effectuée en novembre 2018 par le garage STRADALE AUTOMOBILES ne sont corroborés par aucun élément probant. En effet, l’expert souligne que “rien n’a été produit pour montrer comment cette donnée, particulièrement précise, avait été obtenue. Il est capital que nous puissions obtenir cette information”.
Dès lors que le véhicule litigieux a été détenu par la SA MODENA SPORT avant la vente à Monsieur [S] et postérieurement à celle-ci, pour son entretien, il apparaît nécessaire que les opérations d’expertise soient effectuées à son contradictoire.
Par conséquent, il n’y a pas lieu de mettre hors de cause la SA MODENA SPORT.
Sur l’expertise commune et opposable
L'article 145 du code de procédure civile dispose que, s'il existe un motif légitime d'établir avant tout procès la preuve de faits pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissible peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, en référé.
La mise en oeuvre de cette disposition suppose l'existence d'un litige dont l'objet et le fondement sont suffisamment caractérisés, et l'impossibilité pour le demandeur de réunir lui même des éléments de preuve.
En l'espèce, au vu des pièces versées aux débats, dont le pré-rapport d’expertise, Monsieur [S] et la compagnie d’assurance GAN ASSURANCES-SFPJ justifient d’un intérêt légitime à faire étendre à la SA MODENA SPORT et la SAS AUTO OUEST les opérations d’expertise judiciaire confiées à Monsieur [T], sans qu’il ne soit nécessaire de compléter la mission.
Sans que la présente décision ne comporte de préjugement quant aux responsabilités et garanties encourues, il convient de faire droit à la demande.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Les dépens seront provisoirement mis à la charge des demandeurs.
Il n’apparaît pas inéquitable en l’état de laisser à la charge de la SA MODENA SPORT et de la SAS MASERATI WEST EUROPE les sommes, non comprises dans les dépens, exposées par elles dans le cadre de l’instance. Elles seront déboutées de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
III - DÉCISION
Le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux, statuant par une ordonnance contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, et susceptible d’appel ;
Vu l'article 145 du code de procédure civile,
MET hors de cause la SAS MASERATI WEST EUROPE ;
DEBOUTE la SA MODENA SPORT de sa demande de mise hors de cause ;
DIT que les opérations de l’expertise prévues par l’ordonnance de référé du 10 mai 2023 (n° RG 22/02201) et confiées à Monsieur [T] seront opposables à la SA MODENA SPORT et la SAS AUTO OUEST qui seront tenues d’y participer ;
DIT que les opérations seront reprises en présence de ces nouvelles parties et qu’elles seront convoquées à toute réunion d’expertise ultérieure ;
DEBOUTE la SA MODENA SPORT et la SAS MASERATI WEST EUROPE de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
DIT que les demandeurs conserveront provisoirement la charge des frais de la présente procédure.
La présente décision a été signée par Elisabeth FABRY, Première Vice-Présidente, et par David PENICHON, Greffier.
Le Greffier, Le Président,