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11/07/2024 | FRANCE | N°22/01150

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 5ème chambre civile, 11 juillet 2024, 22/01150


N° RG 22/01150 - N° Portalis DBX6-W-B7F-WFMP
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE

SUR LE FOND



50A

N° RG 22/01150 - N° Portalis DBX6-W-B7F-WFMP

Minute n° 2024/00



AFFAIRE :


[B] [O]

C/


[R] [T]







Grosses délivrées
le

à
Avocats : Maître Julien PLOUTON de la SELAS JULIEN PLOUTON
Me Nicolas NAVEILHAN



TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT DU 11 JUILLET 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débat

s et du délibéré

Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président,
Statuant à Juge Unique

Greffier, lors des débats et du prononcé
Isabelle SANCHEZ, Greffier


DÉBATS

A l’audience publique du 30 Avril 2024

JUGEMENT

Co...

N° RG 22/01150 - N° Portalis DBX6-W-B7F-WFMP
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE

SUR LE FOND

50A

N° RG 22/01150 - N° Portalis DBX6-W-B7F-WFMP

Minute n° 2024/00

AFFAIRE :

[B] [O]

C/

[R] [T]

Grosses délivrées
le

à
Avocats : Maître Julien PLOUTON de la SELAS JULIEN PLOUTON
Me Nicolas NAVEILHAN

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 11 JUILLET 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré

Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président,
Statuant à Juge Unique

Greffier, lors des débats et du prononcé
Isabelle SANCHEZ, Greffier

DÉBATS

A l’audience publique du 30 Avril 2024

JUGEMENT

Contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile

DEMANDEUR

Monsieur [B] [O]
de nationalité Française
34 Rue Guynemer
33200 BORDEAUX

représenté par Maître Julien PLOUTON de la SELAS JULIEN PLOUTON, avocats au barreau de BORDEAUX

DÉFENDEUR

Monsieur [R] [T]
né le 13 Janvier 1979 à BORDEAUX
de nationalité Française
1 résidence les 3 chênes
33840 ESCAUDES

représenté par Me Nicolas NAVEILHAN, avocat au barreau de BORDEAUX
N° RG 22/01150 - N° Portalis DBX6-W-B7F-WFMP

EXPOSE DU LITIGE

Faits constants :

Le 3 décembre 2020, M [R] [T] (ci-après “le vendeur”) a cédé à M [B] [O] (ci-après “l’acquéreur”) un véhicule de marque SKODA, type SUPERB, immatriculé AX-051-GL, mis en circulation le 23 juillet 2010.

Auparavant, le 26 novembre 2020, le véhicule a fait l’objet d’une visite technique périodique effectuée par la SARL ESPACE CONTROLE de BAZAS qui n’a relevé aucune défaillance majeure.

Le 25/03/2020, à la demande de l’acquéreur qui s’est plaint de plusieurs dysfonctionnements, le garage SKODA d’Artigues prés Bordeaux (ESPACE AUTO AQUITAINE) est intervenu sur le véhicule afin de diagnostic.

Le 29/03/2020, sur la base de cet examen péjoratif qui concluait à la dangerosité du véhicule déclaré non conforme par le garage sollicité, l’acquéreur par LR/AR a adressé au vendeur une mise en demeure tendant à l’annulation de la vente avec remboursement du prix de vente et des frais consécutifs.

N’ayant pas obtenu gain de cause et ayant été amené à déposé une main courante sur le comportement présumé agressif du vendeur, l’acquéreur a fait appel à son assureur de protection juridique, GROUPAMA, lequel a requis EXPERTISE AUTO CONSEILS afin d’expertise amiable contradictoire.

Le représentant du contrôleur technique mis en cause s’est présenté aux opérations d’expertises, en revanche M [T] dûment convoqué par l’expert ne s’est pas présenté, ni fait excuser.

Les opérations d’expertises ont eu lieu le 3/05/2021, dans les locaux de SKODA ESPACE AUTO AQUITAINE, sur pont élévateur, sans démontage, en présence de la responsable du service après vente de SKODA.

Le 9/06/2021, au terme d’un rapport détaillé, l’expert a conclu à l’existence de désordres ne rendant plus le véhicule apte à circuler et entraînant selon lui d’une part, la responsabilité du vendeur au titre de la garantie des vices cachés et d’autre part, celle du contrôleur pour défaut d’information.

Le 29/11/2021, le conseil de l’acquéreur a adressé au Procureur de la République de Bordeaux une lettre lui demandant de prendre une décision sur une éventuelle poursuite pénale suite à des faits de violences volontaires avec usage d’arme (par destination) qui auraient été commises, le 6/06/2021, sur M [O] et sa compagne, par M [T], lequel aurait été aidé par l’un de ces voisins, ayant entraîné pour l’acquéreur une ITT de deux jours et pour sa compagne une ITT d’un jour.

Procédure:

Par assignation délivrée le 19/01/2022, l’acquéreur a assigné le vendeur à comparaître devant le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX aux fins de résolution de la vente pour vices cachés, restitutions réciproques et indemnisations des frais consécutifs outre un préjudice moral.
Il convient de préciser que depuis cette assignation :

Le vendeur a constitué avocat et fait déposer des conclusions.

L'ordonnance de clôture est en date du 8/01/2024.

Les débats s’étant déroulés à l’audience du 30/04/2024, l’affaire a été mise en délibéré au 2/07/2024 et prorogée au 11/07/2024.

PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR, M [O], L’acquéreur :

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24/04/2023 et reprises à l'audience, le demandeur sollicite du Tribunal de :

ORDONNER la résolution du contrat de vente du véhicule de marque SKODA immatriculé AX-051-GL conclu le 3 décembre 2020 entre Monsieur [O] et Monsieur [T] en application de la garantie des vices cachés

CONDAMNER Monsieur [T] à restituer à Monsieur [O] la somme de 8.500 euros correspondant au prix de vente

CONDAMNER Monsieur [T] à récupérer, à ses frais, le véhicule litigieux

CONDAMNER Monsieur [T] à verser à Monsieur [O] les sommes suivantes en réparation du préjudice subi :

- 6.250 euros au titre du préjudice de jouissance, somme à parfaire au jour de la décision à intervenir

- 3.137,43 euros au titre du remboursement des frais d'assurance

- 231,66 euros au titre du remboursement des frais d'immatriculation

- 300 euros au titre du remboursement des frais de stockage du véhicule, somme à parfaire au jour de la décision à intervenir

- 100 euros au titre du remboursement des frais de remorquage du véhicule

- 115,20 euros au titre des frais de diagnostic SKODA

- 3.000 euros au titre du préjudice moral


CONDAMNER Monsieur [T] à verser à Monsieur [O] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

CONDAMNER Monsieur [T] aux entiers dépens

DIRE n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire

PRÉTENTIONS DU DÉFENDEUR, M [T], le vendeur :

Dans ses dernières conclusions en date du 8/11/2023 le défendeur, au visa des articles 1641 et suivants du Code civil, demande au tribunal de :

RECEVOIR Monsieur [R] [T] en ses conclusions et l'y déclarer aussi recevable que bien fondé ;

DEBOUTER Monsieur [B] [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, toutes aussi injustifiées qu'infondées ;

ECARTER l'exécution provisoire de la décision ;

CONDAMNER Monsieur [B] [O] à verser à Monsieur [R] [T] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure civile et aux entiers dépens de l'instance ;

L'exposé des moyens des parties sera évoqué par le Tribunal lors de sa motivation et pour le surplus, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures notifiées aux dates sus mentionnées aux parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le sort des demandes de donner acte et autres demandes ne constituant pas des prétentions

Le tribunal rappelle à titre liminaire qu'il n'a pas à statuer sur les demandes de "donner acte" ou "constater" de "déclarer" ou de "juger" qui figurent dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles demandes ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 53 et 768 du code de procédure civile mais des moyens de droit ou de fait qui doivent figurer au soutien d'une prétention dans la partie "discussion" des conclusions.

A titre liminaire, rappel sur la charge de la preuve

Selon l'article 9 du Code de procédure civile :

"Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention."

Alors que

- en matière contractuelle - l'article 1353 du Code civil dispose que :

"Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation."

Toutefois il peut y être dérogé en application de l'article 1354 qui énonce que :

"La présomption que la loi attache à certains actes ou à certains faits en les tenant pour certains dispense celui au profit duquel elle existe d'en rapporter la preuve.
Elle est dite simple, lorsque la loi réserve la preuve contraire, et peut alors être renversée par tout moyen de preuve ; elle est dite mixte, lorsque la loi limite les moyens par lesquels elle peut être renversée ou l'objet sur lequel elle peut être renversée ; elle est dite irréfragable lorsqu'elle ne peut être renversée."

Sur la demande de résolution de la vente au titre de la garantie des vices cachés

L’acquéreur soutient que le rapport de l’expertise amiable - qui devrait être qualifiée de contradictoire car le vendeur aurait chois de ne pas s’y rendre - conclurait à l’existence de désordres, rendant le véhicule impropre à son usage, qui seraient constitutifs de vices cachés, lesquels seraient antérieurs à la vente et connus de son vendeur.

De sorte qu’il demande la résolution de celle-ci, les restitutions, ainsi que sa parfaite indemnisation des préjudices consécutifs.

En réplique, il affirme que l’expertise, bien que non judiciaire, serait corroborée par le diagnostic effectué par le garage SKODA ESPACE AUTO AQUITAINE, de sorte qu’ensemble ils constitueraient la preuve exigée.

Le vendeur rappelle la jurisprudence constante selon laquelle le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l'une des parties ; alors qu’au cas présent l’acquéreur se fonderait sur le seul rapport d’une expertise non judiciaire, qui aurait été établie non contradictoirement, par M [H] de la société EXPERTISE AUTO CONSEILS et qu’il conviendrait donc de débouter l’acquéreur de ses demandes en ce qu'il ne rapporterait pas la preuve d'un vice caché.

Par ailleurs, il soutient que le rapport d'expertise ferait mention de deux prétendus défauts qui rendrait " le véhicule pas apte à circuler dans des conditions normales de sécurité ", soit le montage de roues de 20 pouces et la suspension pneumatique ; alors que l’acquéreur aurait parfaitement eu connaissance des transformations du train avant du véhicule, ce dernier ayant indiqué à l’expert que les parties avaient prévu lors de la vente du véhicule que le vendeur remette également à son acheteur "les roues d'origine plus tard" (page 3 du rapport) et que les photos envoyées lors du contrôle technique par le vendeur auraient montré que le véhicule était bien équipé de jantes de 20 pouces et par conséquence de la suspension pneumatique, ainsi la modification du train avant aurait été visible lors de l'achat, s’agissant d’aménagements de type " tuning " qui seraient décelables par un n'importe quel acheteur, professionnel ou non.


Réponse du Tribunal :

En droit, selon l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Par ailleurs, l'article 1643 du Code civil dispose que le vendeur est tenu des vices cachés quand même il ne les aurait pas connus.

La mise en œuvre de l'action suppose la démonstration, à la charge du demandeur, non seulement de l'existence d'un vice rendant le véhicule impropre à son usage, mais également nécessite d'établir que le vice existait antérieurement à la vente ou à la livraison ou encore que le vice existait déjà en germe.
En l'espèce, le rapport d'expertise amiable ( EXPERTISE AUTO CONSEILS réalisée par M [H]) en date du 9/06/2021, établi à l'initiative de l'assureur protection juridique de l’acquéreur conclut que :

- sur le montage des roues en 20 pouces, qu’il s’agit un diamètre 15% supérieur à celles des roues d'origine (16 ou 17 autorisé par le constructeur) qui influe directement sur le développement des roues et donc sur la vitesse réelle du véhicule ; alors que le calculateur gérant la vitesse du véhicule en fonction de la vitesse de rotation de la roue est ainsi dupé.

- sur les suspensions installées à l’avant, que le système de suspension du véhicule n'est pas d'origine et non autorisé par le constructeur, soit non conforme car il modifie la géométrie des trains roulants et du comportement dynamique du véhicule, lequel est la cause de l'usure irrégulière et importante des pneumatiques constatée.

- sur la combinaison de ces deux constatations, qu’elle "confère au véhicule un caractère dangereux qui à terme engendrera la destruction des éléments en contact voire l'éclatement d'un pneumatique " et qu’ainsi “le véhicule n’est pas apte à circuler dans des conditions normales de sécurité” , outre que celle-ci serait cause de défaillance des témoins du tableau de bord, le calculateur croyant avoir à faire à une défaillance.

- sur l’enregistrement des défauts qui n’apparaissent qu’au 22/12/2014, que cette situation résulte d’un effacement volontaire, probablement par l’ancien propriétaire.

Pour finir - dans le cadre de ses diligences à fin résolution amiables du différend entre l’acquéreur et le vendeur - ce dernier, selon l’expert [H], a fini par admettre que “le calculateur de gestion moteur a été reprogrammé de sorte que le moteur développe plus de 200 chevaux” (au lieu de 170 chevaux d’origine), confirmant ainsi ce que Mme [I] [F], conseillère SAV du concessionnaire SKODA affirmait, à savoir que son logiciel SKODA avait constaté une modification de la puissance moteur en date du 27/01/2014, outre les propres constatations de l’expert qui a relevé, lors d’un essai sur route, une “forte accélération et de puissance. Ceci est inattendue au regard de la motorisation“ (pièce 5, demandeur).

Certes ce rapport d’expertise ne résulte pas d’une expertise judiciaire, toutefois, le garage ESPACE AUTO AQUITAINE, représentant la marque automobile SKODA sur Artigues Prés Bordeaux, dans son rapport de diagnostic établi le 25/03/2021 (pièce 3, demandeur) confirme : d’une part, suite à l’ordre d’intervention (au dos du document) du client que : “N.B. Voiture avec le calculateur modifié. Ne pas effectuer la mise à jour 23R6" et d’autre part, que :“Ctrl technique: 25/03/2023 4 JANTES NON CONFORMES (...) Silentblocs de triangle non conforme - Suspensions pneumatiques non conformes - Véhicule dangereux, Véhicule n’est pas en état pour rouler correctement”.

Le Tribunal retient que cette pièce corrobore les constatations et l’appréciation critique de l’expert [H], ce qui permet d’accorder à son rapport le caractère probatoire requis en pareille matière, pour le moins sur la non conformité du calculateur du moteur modifié en 2014 soit à une époque où M [T] en était le propriétaire, des jantes et des silentblocs ainsi que de la suspension qui rendent le véhicule dangereux et impropre à la circulation ; alors que le vendeur a finit par reconnaître verbalement à l’expert (“au fil de nos échanges”) en avoir été à l’origine s’agissant du calculateur et du couple jantes+pneus/suspension du train avant, soit avant la vente (in fine du paragraphe de l’analyse technique de son rapport).

Tous ces vices étaient nécessairement antérieurs à la vente. Seule la taille des jantes (20 pouces au lieu de 16 ou 17) constituait un vice apparent, ce qui ne fait cependant pas obstacle à ce que cette non conformité - combinée avec celle, inconnue et non apparente, de la modification du système de suspension du train avant - participe à rendre le véhicule impropre à son usage.

C'est donc à bon droit que l’acquéreur invoque le bénéfice de la garantie légale des vices cachés, laquelle au terme de l'article 1644 du Code Civil leur permet de choisir entre l'action rédhibitoire ou l'action estimatoire, assortie le cas échéant d'une action indemnitaire.

- sur l'action rédhibitoire

Le Tribunal retient que M [O] est bien fondé à solliciter la résolution de la vente conclue avec M [T] le 3/12/2020 avec toutes conséquences de droit ; à savoir la restitution du prix de vente et celle du véhicule.

- sur l'action indemnitaire

Selon l'article 1645 du code civil :

"Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur."

Il est de jurisprudence constante que seul le vendeur professionnel est présumé connaître les vices de la chose vendue ; s’agissant du vendeur non professionnel, c’est à l’acquéreur de démontrer que son vendeur connaissait les vices.

En l'espèce, l'expert [H] a conclu son avis ainsi :

"M [T] a vendu à M [O] un véhicule présentant de nombreux défauts dont il connaissait parfaitement l'existence étant donné que c'est lui qui a procédé ou ordonné les modifications".

Le Tribunal adopte cette analyse pertinente, le vendeur est donc tenu de l’ensemble des préjudices consécutifs à cette vente résolue pour vices cachés.

- sur les préjudices indemnisables à ce titre

M [O] justifie avoir dû régler : les frais de remorquage en dépanneuse pour 100 euros, les frais de contrôle de diagnostic SKODA pour 115,20 euros, les frais d’immatriculation pour 231,66 euros, ainsi que les frais de gardiennage facturés pour un montant de 60 euros mensuels, soit la somme de 300 euros, étant rappelé que les demandes “à parfaire” ne lient pas le juge qui n’a pas à se substituer à la carence du demandeur sur ce point.

Ces sommes seront retenues.

En revanche, l'indemnisation du préjudice de jouissance sera ramenée à la somme de 1.380 euros correspondant à 138 jours de privation de jouissance sur la base usuelle de 10€ par jour (soit du 25/03/2021 au 9/08/2021) ; cette durée étant présumée suffisante pour permettre à la victime d’un vice caché affectant le véhicule acheté de prendre toutes dispositions utiles - deux mois après le dépôt du rapport de l'expertise amiable fixant le contour et les limites du litige - pour faire cesser son préjudice de jouissance en faisant soit réparer le véhicule à ses frais avancés, soit en optant pour une autre acquisition ; étant précisé que tout délai supérieur doit être présumé avoir résulté d'un choix personnel de la victime ; étant également relevé que l'expert amiable n’a pas été amené à se prononcer sur ce poste de préjudice.

- s'agissant des frais d'assurance

Il convient de retenir que les frais d'assurances résultent d'une obligation légale, du moins tant que le véhicule était utilisé par l’acquéreur.

A partir de son immobilisation, non contestée, à la suite du dépôt du rapport d’expertise [H] le 9/06/2021, il appartenait à l’acquéreur, dés lors qu’il avait acquis la certitude de la nécessité d’immobiliser le véhicule, de demander à son assureur de limiter sa couverture à une garantie dite “véhicule immobilisé” d’un coût bien moindre à celui dont il est demandé réparation ; le surplus de garanties accordées par l’assureur ressort alors d'un choix délibéré ou encore de la négligence de l’assuré. Il ne peut donc demander son indemnisation.

Une somme de 900 euros (3x300) sera retenue au titre des seuls frais d’assurance nécessaires.

Soit au total, tous postes de préjudices financiers confondus, une somme de 3.026,86 euros.

Sur la demande de condamnation du vendeur pour préjudice moral

L’acquéreur fait valoir qu’il aurait entrepris de multiples démarches, sous la crainte qui résulterait du prétendu comportement menaçant et violent du vendeur, ce qui auraient généré un préjudice moral qui devrait être évalué à une somme minimum de 3.000 euros.

Le vendeur est taisant sur ce point.

Réponse du Tribunal :

Le Tribunal retient que toute violation d'un droit essentiel, dont celui d'être entendu dans sa démarche judiciaire sans encourir en retour l’agressivité, voire la violence, du défendeur, cause à autrui un dommage d'ordre psychologique (moral) consistant en un trouble de jouissance du sentiment de sécurité juridique et/ou corporel.

Pour autant, il appartient à celui qui l'invoque d'apporter tout élément susceptible de permettre à la juridiction d'en apprécier tant la réalité, que la nature exacte et que le quantum du préjudice qui en découle.

En l’espèce, le demandeur produit une main courante, un dépôt de plainte et un courrier de son conseil au Procureur de la République. Or, en l’absence de toute condamnation définitive, ces pièces n’emportent pas, à elles seules, démonstration de la réalité et de l’imputabilité des faits qu’elles relatent ; alors que par ailleurs la seule résistance du vendeur aux demandes de l’acquéreur ne sont sources de responsabilité que si leur caractère manifestement abusif est démontré, ce qui fait ici défaut.
L’acquéreur sera débouté de cette demande d’indemnisation.

Sur les autres demandes :

- sur les dépens,

Les dépens seront supportés par la partie qui succombe, en application de l'article 696 du code de procédure civile, ici le vendeur.

- sur la demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la partie non condamnée aux dépens, tout ou partie des frais non compris dans les dépens qu’elle a engagé pour faire valoir ses droits et assurer correctement sa défense.

Le vendeur sera condamné à payer à l’acquéreur une somme de 1.500€ à ce titre.

- sur l’exécution provisoire,

L’exécution provisoire de la décision à venir est de droit et il n’y a pas lieu à l’écarter.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX,

- CONSTATE l'existence d'un vice caché antérieur à la vente du véhicule de marque SKODA, type SUPERB, immatriculé AX-051-GL, intervenue le 3 décembre 2020, entre le vendeur M [R] [T] et l’acquéreur M [B] [O] ;

- PRONONCE la résolution de la vente du véhicule SKODA, type SUPERB, immatriculé AX-051-GL ;
- ORDONNE à M [B] [O] la restitution du véhicule aux frais de M [R] [T] ;

- CONDAMNE M [R] [T] à rembourser à M [B] [O] le prix de vente, soit 8.500 euros ;

- DIT que ces restitutions réciproques interviendrons simultanément ;

- CONDAMNE M [R] [T] à payer à M [B] [O] la somme de 3.026,86 euros, à titre des dommages et intérêts consécutifs au vice caché ;

- DÉBOUTE M [B] [O] de sa demande d'indemnisation au titre d’un préjudice moral ;
- CONDAMNE M [R] [T] aux entiers dépens ;

- CONDAMNE M [R] [T] à payer à la M [B] [O] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- REJETTE la demande tendant à voir écarter l'exécution provisoire.

- REJETTE les demandes plus amples ou contraires des parties ;

La présente décision est signée par Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président, et Isabelle SANCHEZ, Greffier

.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 5ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01150
Date de la décision : 11/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-11;22.01150 ?
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