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09/07/2024 | FRANCE | N°23/08332

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Jex droit commun, 09 juillet 2024, 23/08332


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 09 Juillet 2024


DOSSIER N° RG 23/08332 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YJCG
Minute n° 24/ 263


DEMANDEUR

S.A.S. GAREL, immatriculée au RCS de Paris sous le n° 395 088 693, agissant poursuites et diligences de son Président en exercice
dont le siège social est [Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Sophie STEFANUTTO, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant, Maître Olivier PIQUET-GAUTHIER, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant


DEFENDEU

R

S.C.I. MIRAMOND, immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 489 125 542, prise en la personne de son représentant lé...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 09 Juillet 2024

DOSSIER N° RG 23/08332 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YJCG
Minute n° 24/ 263

DEMANDEUR

S.A.S. GAREL, immatriculée au RCS de Paris sous le n° 395 088 693, agissant poursuites et diligences de son Président en exercice
dont le siège social est [Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Maître Sophie STEFANUTTO, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant, Maître Olivier PIQUET-GAUTHIER, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

DEFENDEUR

S.C.I. MIRAMOND, immatriculée au RCS de Bordeaux sous le n° 489 125 542, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 3]
[Localité 2]

représentée par Maître Olivier NICOLAS de la SELARL DUCASSE NICOLAS SICET, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 11 Juin 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 09 Juillet 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
Le 09 juillet 2024
Formules exécutoires aux avocats + dossiers
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties

EXPOSE DU LITIGE

Se prévalant d’une ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 12 décembre 2022, la SCI MIRAMOND a fait signifier à la SAS GAREL un procès-verbal de saisie-vente par acte en date du 27 juillet 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 4 octobre 2023, la SAS GAREL a fait assigner la SCI MIRAMOND devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de voir annulée la saisie-vente pratiquée.

A l’audience du 11 juin 2024 et dans ses dernières conclusions, la SAS GAREL sollicite le rejet des demandes de la SCI MIRAMOND et l’annulation de la saisie-vente pratiquée le 27 juillet 2023. Elle demande également la condamnation de la défenderesse aux dépens incluant les frais de saisie-vente annulée et au paiement d’une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile

Au soutien de ses prétentions, la SAS GAREL fait valoir que les bijoux saisis dans le cadre de cette mesure d’exécution forcée ne lui appartiennent pas car ils sont soumis à une clause de réserve de propriété stipulée au profit de la société [P] GROUPE SAM. Elle fait valoir que si elle n’a pas invoqué cet élément dans le cadre d’une précédente saisie-vente c’est au regard de la désorganisation de ses services juridiques résultant de la crise COVID et en raison de l’abandon de cette mesure par la SCI MIRAMOND désintéressée de sa dette. Elle conteste tout détournement des biens saisis et s’oppose à la demande formée à ce titre par la défenderesse.

A l’audience du 11 juin 2024 et dans ses dernières écritures, la SCI MIRAMOND conclut au rejet de toutes les demandes et à la condamnation de la SAS GAREL à remettre l’ensemble des biens objets de la saisie-vente entre les mains de l’huissier de justice ou dans tout lieu aux frais de la défenderesse et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision jusqu’à restitution complète. Elle demande également la condamnation de la SAS GAREL aux dépens et au paiement d’une somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

La défenderesse conteste que la preuve de la clause de réserve de propriété ne soit rapportée par les pièces versées aux débats qui ne sont pas datées. Elle souligne que cette clause n’a pas été évoquée lors de la précédente saisie-vente réalisée, soutenant que la SAS GAREL n’en avait pas connaissance alors qu’il s’agit d’une condition de validité de cette sûreté. Elle fait valoir que la représentante de la SAS GAREL et de la société [P] GROUPE est la même personne ce qui ne permet pas d’établir l’existence de la clause invoquée dans les documents versés aux débats. Au soutien de l’article R221-13 du Code des procédures civiles d‘exécution, la SCI MIRAMOND réclame la restitution des objets saisis, soulignant que ceux-ci ont été déplacés sans qu’elle en soit avertie, et sont conservés dans un endroit inconnu, la SAS GAREL ayant quitté les lieux loués le 1er septembre 2023.

L’affaire a été mise en délibéré au 9 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

- Sur la nullité de la saisie-vente

L’article L221-1 du Code des procédures civiles d’exécution dispose :
« Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce dernier.
Tout créancier remplissant les mêmes conditions peut se joindre aux opérations de saisie par voie d'opposition.
Lorsque la saisie porte sur des biens qui sont détenus par un tiers et dans les locaux d'habitation de ce dernier, elle est autorisée par le juge de l'exécution. »

Les articles 2367 et 2368 du Code civil prévoient :
« La propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie.
La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement. »
« La réserve de propriété est convenue par écrit. »

La SCI MIRAMOND justifie du titre exécutoire consistant dans l’ordonnance de référé du 12 décembre 2022 reconnaissant sa qualité de créancière à hauteur de la somme de 30.357,77 euros pour la période du 1er octobre 2021 au 30 juin 2022. Cette décision octroie également des délais de paiement qui n’ont pas été respectés, ce point n’étant pas contesté par la demanderesse. Elle produit également un commandement de payer aux fins de saisie-vente en date du 18 juillet 2023 précédant donc le procès-verbal de saisie-vente contesté en date du 27 juillet 2023.

La défenderesse justifie avoir suivi la procédure légale précédant la mesure de saisie-vente.

Au soutien de l’existence d’une clause de réserve de propriété affectant les biens saisis, la SAS GAREL verse aux débats un mail adressé par « [B] [P] [L] » à Madame [N] [S] et à une assistante du service RH indiquant que les biens inscrits sur le listing joint sont affectés d’une clause de réserve de propriété. Cette déclaration unilatérale d’une personne dont l’identité n’est pas spécifiée n’est pas à même de prouver l’existence de la clause, pas plus que le document non daté et non signé intitulé « Conditions générales de vente » à l’en-tête d’[P] Groupe Sam ou signé mais non daté dont rien n’indique qu’il concerne les relations contractuelles entretenues avec la SAS GAREL. L’acte de revendication adressé par la société [P] GRPE SAM en date du 31 août 2023 à un destinataire non précisé n’apporte pas davantage de preuve de la souscription de cette sureté, le mail du conseil de la société GAREL annexant cette demande n’ayant lui-même aucune valeur probatoire.

Il est ensuite fourni sept factures dont une mentionne en anglais l’existence d’une clause de réserve de propriété mais ces documents sont tous adressés aux boutiques de la SAS GAREL à [Localité 6], [Localité 5] ou [Localité 7], rien ne justifiant donc que les biens saisis dans la boutique de [Localité 2] soient concernés par ces documents. Une facture produite mentionne bien comme destinataire la boutique de [Localité 2] mais elle ne comporte aucune référence à une clause de réserve de propriété.

La SAS GAREL verse aux débats certaines pages d’un contrat de distribution conclu avec la société [P] GROUPE. Le caractère partiel du document fourni ne permet pas de garantir que la page 5/5 versée aux débats est bien la suite du document dont est produit la première page mais il mentionne à l’article 21 intitulé « Subrogation de créance » : « En cas de revente ou de transformation des marchandises, le fournisseur est subrogé et substitué dans les droits du distributeur sur toutes créances trouvant son origine dans les marchandises à concurrence de la valeur des marchandises sous réserve de propriété. ».
Le magasin sis à Bordeaux à l’adresse du bâtiment détenu par la SCI MIRAMOND est enfin cité en annexe 3 comme bénéficiaire de la licence de distribution GAREL.

Ce document n’établit cependant pas que les biens saisis sont bien visés par une clause de réserve de propriété, l’article 21 susvisé indiquant que certaines marchandises sont grevées d’une telle clause quand d’autres ne le sont pas ainsi qu’en témoigne le mail de « [B] [P] [L] » versé en pièce 5 évoquant des montres non sujettes à cette garantie.

Dès lors, la SAS GAREL, sur qui repose la charge de la preuve de l’existence d’une clause de réserve de propriété affectant les biens saisis, n’établit pas l’existence de cette dernière invoquée pour la première fois dans le cadre de la présente instance, alors qu’une mesure de saisie-vente a déjà été diligentée sans opposition de sa part.

Le procès-verbal de saisie-vente n’encourt donc aucun grief de nullité et la SAS GAREL sera déboutée de toutes ses demandes à ce titre.

- Sur le détournement

L’article R221-13 du code des procédures civiles d’exécution prévoit : « Les biens saisis sont indisponibles.
Si une cause légitime rend leur déplacement nécessaire, le gardien est tenu d'en informer préalablement le créancier ; il lui indique le lieu où ils seront placés. »

Il ressort du procès-verbal de détournement de biens saisis dressé le 1er septembre 2023 que les locaux occupés par la SAS GAREL ont été vidés incluant les coffres-forts contenant les bijoux. L’ancienne responsable de la boutique présente sur les lieux, ayant refusé de signer sa déclaration, a précisé que ces bijoux avaient été déplacés à l’initiative du siège de la société GAREL et étaient sans doute entreposés sur son site à [Localité 5] dont elle ne connait pas l’adresse. Ce procès-verbal établit bien le déplacement des objets saisis sans que la SCI MIRAMOND ait été avisée de leur destination en violation de l’article R221-13 du Code des procédures civiles d’exécution susvisé et partant le détournement de ces marchandises.

LA SAS GAREL sera donc condamnée à restituer ces biens entre les mains du commissaire de justice ayant procédé à la saisie-vente à ses frais. Compte tenu de la réticence de la demanderesse à s’exécuter et du montant très élevé de la dette, cette obligation sera assortie d’une astreinte définie au dispositif.

Sur les autres demandes
Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

La SAS GAREL, partie perdante, subira les dépens et sera condamnée au paiement d’une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,
DEBOUTE la SAS GAREL de toutes ses demandes ;
CONDAMNE la SAS GAREL à restituer la totalité des biens saisis visés par le procès-verbal de saisie-vente dressé le 27 juillet 2023 entre les mains de la SARL EXACTHUIS, commissaires de justice associés, sise à [Localité 2] (33), à ses frais, à raison de 100 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai de dix jours suivant la signification de la présente décision jusqu’à exécution parfaite et au maximum pour 90 jours ;
CONDAMNE la SAS GAREL à payer à la SCI MIRAMOND la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS GAREL aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.
LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Jex droit commun
Numéro d'arrêt : 23/08332
Date de la décision : 09/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-09;23.08332 ?
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