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25/06/2024 | FRANCE | N°24/00687

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Ppp contentieux général, 25 juin 2024, 24/00687


Du 25 juin 2024


53B


SCI/DC


PPP Contentieux général

N° RG 24/00687 - N° Portalis DBX6-W-B7I-Y4DU



Ste coopérative [8]

C/

[I] [V]




Expéditions délivrées à :
Me GERARD-DEPREZ
M. [V]

FE délivrée à :
Me GERARD-DEPREZ


Le 25/06/2024




TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2] - [Localité 6]

JUGEMENT EN DATE DU 25 juin 2024



JUGE : Madame Bérengère LARNAUDIE,

Vice Présidente

GREFFIER : Madame Dominique CHATTERJEE



DEMANDERESSE :

[8] - RCS Bordeaux n° 755 501 590 - [Adresse 1] [Localité 5]

Représentée par Me GERARD-DEPREZ, avocat au barreau de Bordeaux
...

Du 25 juin 2024

53B

SCI/DC

PPP Contentieux général

N° RG 24/00687 - N° Portalis DBX6-W-B7I-Y4DU

Ste coopérative [8]

C/

[I] [V]

Expéditions délivrées à :
Me GERARD-DEPREZ
M. [V]

FE délivrée à :
Me GERARD-DEPREZ

Le 25/06/2024

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2] - [Localité 6]

JUGEMENT EN DATE DU 25 juin 2024

JUGE : Madame Bérengère LARNAUDIE, Vice Présidente

GREFFIER : Madame Dominique CHATTERJEE

DEMANDERESSE :

[8] - RCS Bordeaux n° 755 501 590 - [Adresse 1] [Localité 5]

Représentée par Me GERARD-DEPREZ, avocat au barreau de Bordeaux

DEFENDEUR :

Monsieur [I] [V] né le [Date naissance 4] 1988 à [Localité 9], demeurant [Adresse 3] [Localité 7]

Comparant en personne

DÉBATS :

Audience publique en date du 30 avril 2024

PROCÉDURE :

Articles 480 et suivants du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre préalable acceptée par signature électronique le 9 septembre 2021, la [8] a consenti à Monsieur [I] [V] un prêt personnel d'un montant de 25.000 € remboursable en 68 mensualités d'un montant de 429,49 € hors assurance, au taux nominal contractuel de 4,96 %.

Des échéances étant demeurées impayées, la [8] a prononcé la déchéance du terme après deux mises en demeure infructueuses par lettres adressées en recommandé avec avis de réception les 13 mars et 20 avril 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 29 février 2024, la [8] a fait assigner Monsieur [I] [V] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de BORDEAUX, aux fins de le voir condamner en paiement des sommes suivantes, avec exécution provisoire :
▸24.339,98 €, avec intérêts contractuels au taux de 5,07% à compter du 20 avril 2023, ou à défaut à compter de l'assignation,
▸800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

A l'audience du 30 avril 2024, la [8], représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice des prétentions de son acte introductif d'instance. Elle a précisé que l'action était recevable, le premier impayé non régularisé se situant à la date du 15 août 2022 et que l'ensemble des obligations précontractuelles avait été respecté, mais qu'elle ne pouvait pas justifier de la consultation du FICP. Elle s'est opposée "par principe" à l'octroi de délais de paiement.

Présent à l'audience, le défendeur n'a pas contesté sa dette. Il a exposé percevoir un salaire de 1522€ dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, être célibataire, et devoir régler d'autres dettes.
Il a sollicité l'octroi de délais de paiement, et a proposé de régler une somme de 50 € par mois.

Il est statué par jugement contradictoire.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 25 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande en paiement :

Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
L'article R.632-1 du code de la consommation permet au juge de relever d'office tous les moyens tirés de l'application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le juge à l'audience du 30 avril 2024.

En cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D.312-16 du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L.312-39, il peut demander une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance.

Sur la recevabilité de l'action en paiement :

L'article 125 du code de procédure civile dispose que les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.

L'article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le juge des contentieux de la protection dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Cet événement est caractérisé notamment par le non paiement des sommes dues à la suite du premier incident de paiement non régularisé.

En l'espèce, le premier impayé non régularisé est en date du 15 août 2022, de sorte que l'action introduite le 29 février 2024 est recevable.

Sur la signature du contrat :

Aux termes de l'article 1366 du code civil, l'écrit électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité. L'article 1367 du même code ajoute que la signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache.

En l'espèce, il y a lieu de constater que la signature électronique du contrat repose sur un certificat qualifié de signature électronique délivré au signataire par un prestataire de services de certification électronique (PSCE) notamment après identification du signataire, signature dont la fiabilité est présumée. La copie de la carte d'identité du défendeur est produite.

Dans ces conditions, et en l'absence de toute contestation du défendeur qui n'a pas contesté avoir souscrit le contrat qu'il a au demeurant exécuté partiellement, la régularité de la signature sera reconnue.

Sur la déchéance du terme :

En vertu des dispositions de l'article L.312-39 du code de la consommation, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet.

En l'espèce, compte tenu de la défaillance de l'emprunteur, la [8] a régulièrement prononcé la déchéance du terme après une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception en date du 20 avril 2023.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels :

Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d'un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires, et notamment :
• la fiche d'information précontractuelle -FIPEN-
• la notice d'assurance et la fiche conseil assurance
• la justification de la consultation du fichier des incidents de paiements -FICP-
• la justification de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur et la fiche de dialogue
• la justification de la fourniture à l'emprunteur des explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière et attirant son attention sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière.

Il est acquis que la justification de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur doit être réalisée au moyen d'un nombre suffisant d'informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur, à peine de déchéance du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, et que le prêteur ne doit pas s'arrêter aux seules déclarations de l'emprunteur compilées dans la « fiche dialogue » mais solliciter des pièces justificatives (au minimum un avis d'imposition) et être ensuite en mesure de les produire devant la juridiction saisie de son action en paiement.

En l'espèce, la [8] ne justifie pas avoir sollicité les pièces justificatives de nature à apprécier la solvabilité de l'emprunteur.

Elle a admis en outre lors de l'audience ne pas être en mesure de justifier de la consultation du FICP préalablement à l'acceptation du prêt.

Dès lors elle devra être déchue de son droit aux intérêts, en totalité.

Sur le montant de la créance :

Le prêteur a été déchu du droit aux intérêts de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande formulée au titre des intérêts échus.

En conséquence, il convient de ramener la créance de la banque à la somme de 21.868,77 €, correspondant à la somme prêtée, soit 25.000 €, diminuée de l'ensemble des remboursements intervenus avant la déchéance du terme, soit 4.610,23 €, et augmentée des mensualités d'assurance, soit 1.479 €.

Par conséquent, il y a lieu de condamner Monsieur [I] [V] à payer à la [8] la somme de 21.868,77 € avec intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2023.

En outre, afin d'assurer l'effectivité de la directive communautaire n° 2008/48 et notamment de son article 23, s'agissant du caractère effectif et dissuasif de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, il convient de ne pas faire application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, en prévoyant que la somme restant due produira intérêt au taux légal, mais ne sera pas majorée de cinq points.

Il résulte de l'article 1231-5 du code civil que l'indemnité contractuelle de 8 % du capital restant dû, qui a la nature d'une clause pénale, est soumise au pouvoir modérateur du juge qui constate son caractère manifestement excessif.

En l'espèce, dans la mesure où le prêteur a été déchu du droit aux intérêts et les sommes dues continuent à produire des intérêts tant qu'elles n'ont pas été entièrement payées, le taux de 8 % prévu paraît manifestement excessif et il convient de le réduire à la somme de 200 €. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du prononcé du présent jugement s'agissant d'une créance indemnitaire conformément à l'article 1231-7 du code civil.

Sur la demande de délais de paiement :

L'article 1343-5 du code civil permet d'accorder au débiteur impécunieux des délais de paiement, compte tenu de sa situation et en considération des besoins du créancier, sans pouvoir excéder deux ans.
En l'espèce Monsieur [I] [V] propose de régler 50 € par mois pour apurer la dette. Il ne justifie de ses ressources.
Il convient néanmoins de lui octroyer des délais de paiement selon les modalités qu'il sollicite, étant observé qu'il devra s'acquitter du solde de la dette lors du paiement de la dernière mensualité.

Sur les demandes accessoires :

Le défendeur qui succombe supportera les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

DECLARE l'action de la [8] recevable ;

PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels à compter de la signature du contrat ;

CONDAMNE Monsieur [I] [V] à verser à la [8] la somme de 21.868,77 € avec intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2023 et celle de 200 € au titre de l'indemnité de résiliation ;
ECARTE la majoration de cinq points prévue par l'article L. 313-3 du code monétaire et financier ;

AUTORISE Monsieur [I] [V] à s'acquitter de la dette par paiements mensuels de 50 €, au plus tard le 10 de chaque mois, à compter du mois suivant la signification du présent jugement, jusqu'à apurement de la dette, la dernière mensualité correspondant au solde de la somme due ;

DIT que le défaut de paiement d'un seul règlement à l'échéance prescrite entraînera la déchéance du terme et que la totalité du solde restant dû deviendra immédiatement exigible ;

RAPPELLE que l'application des dispositions de l'article 1343-5 du code civil suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant les délais accordés ;

CONDAMNE Monsieur [I] [V] aux dépens ;

DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONSTATE l'exécution provisoire.

Ainsi jugé et mis à disposition, les jour, mois et an susdits.

LA GREFFIERE LA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Ppp contentieux général
Numéro d'arrêt : 24/00687
Date de la décision : 25/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-25;24.00687 ?
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