La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2024 | FRANCE | N°24/00595

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Ppp contentieux général, 25 juin 2024, 24/00595


Du 25 juin 2024


5AA


SCI/DC


PPP Contentieux général

N° RG 24/00595 - N° Portalis DBX6-W-B7I-Y2RA



S.A. CLAIRSIENNE

C/

[Y] [E]




Expéditions délivrées à :
CLAIRSIENNE
Mme [E]

FE délivrée à :
CLAIRSIENNE

Le 25/06/2024



TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
180, rue Lecocq - CS 51029 - 33077 Bordeaux Cedex

JUGEMENT EN DATE DU 25 juin 2024



JUGE : Madame Bérengère LARNAUDIE

, Vice Présidente

GREFFIER : M. Lionel GARNIER lors des débats
Mme Dominique CHATTERJEE lors du délibéré



DEMANDERESSE :

S.A. CLAIRSIENNE - [Adresse 1]

Représenté par Monsieur [K] [Z], sal...

Du 25 juin 2024

5AA

SCI/DC

PPP Contentieux général

N° RG 24/00595 - N° Portalis DBX6-W-B7I-Y2RA

S.A. CLAIRSIENNE

C/

[Y] [E]

Expéditions délivrées à :
CLAIRSIENNE
Mme [E]

FE délivrée à :
CLAIRSIENNE

Le 25/06/2024


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
180, rue Lecocq - CS 51029 - 33077 Bordeaux Cedex

JUGEMENT EN DATE DU 25 juin 2024

JUGE : Madame Bérengère LARNAUDIE, Vice Présidente

GREFFIER : M. Lionel GARNIER lors des débats
Mme Dominique CHATTERJEE lors du délibéré

DEMANDERESSE :

S.A. CLAIRSIENNE - [Adresse 1]

Représenté par Monsieur [K] [Z], salarié de l’entreprise muni d’un pouvoir régulier

DEFENDERESSE :

Madame [Y] [E] née le 01 Juin 1992 à [Localité 3],
[Adresse 2]

Comparante en personne

DÉBATS :

Audience publique en date du 30 avril 2024

PROCÉDURE :

Articles 480 et suivants du code de procédure civile.

- -

EXPOSE DU LITIGE :

Selon contrat de bail d’habitation signé le 19 juin 2017, la SA CLAIRSIENNE a donné en location à Mme [Y] [E] un logement situé [Adresse 2] (33), moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 557,93 € charges comprises.

Par un contrat signé le 10 novembre 2020, la SA CLAIRSIENNE a donné en location à Mme [Y] [E] un emplacement de stationnement situé à la même adresse, moyennant le paiement d’un loyer de 0,34 € mensuels.

Arguant d’une dette locative malgré un commandement de payer délivré le 5 octobre 2023, la SA CLAIRSIENNE a fait assigner Mme [Y] [E] devant le Juge des contentieux de la protection par acte du 16 février 2024.

Lors de l’audience du 30 avril 2024, elle sollicite de voir :

▸ constater l’acquisition de la clause résolutoire contenue dans les deux contrats de location pour défaut de paiement des loyers et des charges ;
▸ ordonner l’expulsion sans délai de la locataire ainsi que de tous occupants de son chef avec au besoin l’assistance de la force publique ;
▸ condamner la locataire au paiement de la somme provisionnelle de 6.576,15 €, au titre des loyers, charges, pénalités et frais d’intervention, à parfaire suivant décompte produit aux débats ;
▸ condamner la locataire au paiement de la somme de 1.108,80 €, au titre des frais d’intervention (désinsectisation), à parfaire suivant décompte produit aux débats ;
▸ condamner la locataire au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges revalorisés, jusqu’à la libération des lieux  ;
▸ condamner la locataire au paiement de la somme de 150 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, et aux dépens ;
▸ ordonner l'exécution provisoire.

La SA CLAIRSIENNE donne son accord à l’octroi de délais de paiement par mensualités de 226 € en sus du paiement du loyer courant.

Présente à l’audience, Mme [Y] [E] explique qu’elle travaille depuis le 5 mars 2024 pour un salaire mensuel net de 1224 €, elle vit en concubinage et a quatre enfants, le père de ses trois premiers enfants est redevable d’une pension alimentaire mensuelle de 50 € par enfant qu’il ne lui règle pas ; elle perçoit des prestations sociales et familiales d’environ 1300 € par mois ; son conjoint ne travaille pas.

Elle propose de régler une somme de 226 € par mois en remboursement de sa dette locative qu’elle ne conteste pas. Elle ajoute être en mesure de régler cette dette, expliquant qu’elle a délibérément retenu les sommes dues au titre des loyers en raison de l’inertie du bailleur à intervenir pour lutter contre les punaises de lit dans son logement.

La juridiction n’a pas été destinataire d’un diagnostic social et financier.

Le jugement est contradictoire. Il a été mis en délibéré au 25 juin 2024.

MOTIFS DU JUGEMENT

Sur la recevabilité de l’action :

Conformément aux dispositions de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, l’assignation a été régulièrement notifiée au représentant de l'État dans le département par courrier électronique le 16 février 2024, soit au moins six semaines avant la date de l’audience.

Le bailleur justifie également avoir saisi la Caisse d’allocations familiales depuis le 30 mai 2023 (l’allocation logement de la locataire ayant du reste été suspendue en raison des impayés de loyers), de sorte que la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) prévue à l'article 7-2 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 est réputée faite.

La procédure est donc régulière et l’action recevable au regard de ces dispositions.

Sur la résiliation du bail du logement et de l’emplacement de stationnement :

Le bail du logement signé par les parties contient une clause de résiliation pour défaut de paiement de tout ou partie du loyer à l'échéance fixée.

Il en va de même s’agissant du contrat de location de l’emplacement de stationnement, outre que ce parking constitue un accessoire du logement compte tenu notamment de son adresse et de la modicité du loyer prévu.

Par acte de commissaire de justice en date du 5 octobre 2023, le bailleur a fait délivrer à la locataire un commandement de payer la somme de 3.049,89 € au titre des loyers et charges échus au titre de ces deux contrats.

Ce commandement comporte les mentions obligatoires prescrites à peine de nullité par l’article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 ; il est régulier et ses causes selon le décompte produit n'ont pas été réglées dans les deux mois de sa signification tel que mentionné par le commandement de payer.

À l’inverse la dette locative a augmenté.

Dans ces conditions la résiliation du bail est acquise à la date du 6 décembre 2023 et sera constatée. L’expulsion de la locataire et de tout occupant de son chef sera autorisée à défaut de libération volontaire des lieux.

Il résulte de l’article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution que l'expulsion d’un local affecté à l'habitation principale de la personne expulsée ou de tout occupant de son chef, ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement de quitter les lieux.

Ce texte dispose d'une part, que le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l'article L442-4-1 du code de la construction et de l'habitation n'a pas été suivie d'effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce délai.

 
D'autre part, ce délai prévu ne s'applique pas lorsque le juge qui ordonne l'expulsion constate la mauvaise foi de la personne expulsée ou que les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux à l'aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

En l’espèce, compte tenu de la situation des parties, il n’est démontré aucune circonstance particulière justifiant la suppression ou la réduction le délai de deux mois.

Il convient de rejeter la demande.

En outre, il convient de fixer à compter de la date d’effet de la résiliation du bail une indemnité d'occupation équivalente au montant du loyer révisable selon les dispositions contractuelles et des charges que le locataire aurait payé en cas de non résiliation du bail.

Sur les loyers et les indemnités d’occupation impayés :

En application de l’article 7 de la loi du 89-462 du 6 juillet 1989 le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus. Les charges récupérables sont notamment celles liées à un service rendu en contrepartie de l’usage du logement, à l’entretien courant et petites réparations des parties communes. Le bailleur est en outre fondé à demander le remboursement des taxes et impôts dont le locataire profite directement telle la taxe d’ordures ménagères. Dès lors que l’obligation au paiement est établie, il appartient au locataire de démontrer qu’il a payé les loyers et charges dont le paiement est réclamé.

Par ailleurs il découle de ce qui précède l’obligation pour le locataire de régler une indemnité d'occupation équivalente au montant du loyer et des charges.

Il résulte du décompte fourni par la SA CLAIRSIENNE qu’il est dû par Mme [Y] [E] la somme de 7.654,47 €, à la date du 30 avril 2024, les frais de procédure et les pénalités pour enquête sociale figurant dans ce décompte devant être déduits.

Mme [Y] [E] sera en conséquence condamnée à payer cette somme, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement, ainsi qu’au paiement des indemnités d’occupation continuant à courir à compter du mois de mai 2024.

Sur la demande de délais de paiement :

Aux termes de l’article 24 V) de la loi du 6 juillet 1989, « Le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative ».

Selon le VII) de ce même article « Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais accordés par le juge dans les conditions prévues aux V et VI du présent article. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.
Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet ».

En l'espèce, Mme [Y] [E] sollicite des délais de paiement.

Le bailleur ne s'oppose pas à l'octroi des délais demandés.

Faute de paiement d’une quelconque somme depuis le mois d’août 2023, et alors en outre qu’elle ne verse aux débats aucune pièce de nature à justifier la situation économique et familiale qu’elle allègue, les délais qui pourront lui être accordés ne pourront avoir pour effet de suspendre l'application de la clause résolutoire.

Dans ces conditions, il convient d'accorder à la locataire des délais de paiement suivant les modalités décrites au dispositif du jugement.

La clause résolutoire n’étant pas suspendue, l’expulsion de la locataire sera en conséquence ordonnée.

Sur les autres demandes :

Mme [Y] [E] qui succombe sera condamnée aux entiers dépens, lesquels incluront l’assignation et le commandement de payer du 5 octobre 2023.

L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’exécution provisoire est constatée.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

DECLARE recevable la demande de la SA CLAIRSIENNE aux fins de constat de l’acquisition de la clause résolutoire du contrat de bail d’habitation et du contrat de location d’un emplacement de parking ;

CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies, et CONSTATE en conséquence la résiliation des contrats de bail d’habitation et d’emplacement de parking à la date du 6 décembre 2023 ;

ORDONNE, à défaut de départ volontaire des lieux, l'expulsion de Mme [Y] [E] ainsi que de tout occupant de son chef, dans un délai de deux mois à compter de la signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, avec l’assistance de la force publique si besoin est, ainsi que le transport des meubles laissés dans les lieux loués, conformément aux dispositions des articles L433-1 et L433-2 du code des procédures civiles d’exécution ;

REJETTE la demande de suppression du délai de deux mois prévu par l’article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution ;

CONDAMNE Mme [Y] [E] à payer à la SA CLAIRSIENNE la somme de 7654,47 €, au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation impayés, arrêtés au 30 avril 2024, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

FIXE le montant de l'indemnité d'occupation due par Mme [Y] [E] à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération définitive des lieux, à une somme égale au montant mensuel du loyer indexé et des charges qui auraient été dus en cas de non-résiliation du bail, et l’y CONDAMNE en tant que de besoin ;
ACCORDE à Mme [Y] [E] des délais de paiement pour s’acquitter de sa dette locative ;

L’AUTORISE à s’acquitter de cette dette à compter du présent jugement dans un délai de 33 mois par versements mensuels de 226 €, le dernier étant augmenté du solde de la dette en principal, intérêts et frais, le loyer courant et les charges devant être en outre versés à leur date d’échéance ;

DIT que les paiements s’imputeront d’abord sur la dette au titre des loyers, charges ou indemnités d’occupation puis sur les intérêts, dépens ;

RAPPELLE que la présente décision suspend la procédure d'exécution,

DIT qu’à défaut de paiement du loyer courant et des charges ou d’une seule mensualité à sa date d’échéance, l'échelonnement sera caduc, la totalité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible, 15 jours après l’envoi d’une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception restée sans effet,

DIT n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONSTATE l’exécution provisoire ;

CONDAMNE Mme [Y] [E] aux dépens, lesquels incluront l’assignation et de sa dénonciation au Préfet, et le commandement de payer du 5 octobre 2023.

Ainsi jugé et mis à disposition, les jour, mois et an susdits.

LA GREFFIERE LA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Ppp contentieux général
Numéro d'arrêt : 24/00595
Date de la décision : 25/06/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-25;24.00595 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award