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17/06/2024 | FRANCE | N°24/01198

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Referes 2ème section, 17 juin 2024, 24/01198


TRIBUNAL JUDICIAIRE

DE BORDEAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

74C

Minute n° 24/


N° RG 24/01198 - N° Portalis DBX6-W-B7I-ZGYN

3 copies















GROSSE délivrée
le17/06/2024
àMaître Jean-Marc DUCOURAU de la SARL CABINET DUCOURAU AVOCAT
Maître Clotilde CAZAMAJOUR de la SELARL URBANLAW AVOCATS

COPIE délivrée
le
à

Rendue le DIX SEPT JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE

Après débats à l’audience publique du 10 Juin 2024,

Par mise à disposition au greffe, le

s parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Par Jacqueline DESCOUT, Vice-Présidente au tribunal judic...

TRIBUNAL JUDICIAIRE

DE BORDEAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

74C

Minute n° 24/

N° RG 24/01198 - N° Portalis DBX6-W-B7I-ZGYN

3 copies

GROSSE délivrée
le17/06/2024
àMaître Jean-Marc DUCOURAU de la SARL CABINET DUCOURAU AVOCAT
Maître Clotilde CAZAMAJOUR de la SELARL URBANLAW AVOCATS

COPIE délivrée
le
à

Rendue le DIX SEPT JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE

Après débats à l’audience publique du 10 Juin 2024,

Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Par Jacqueline DESCOUT, Vice-Présidente au tribunal judiciaire de BORDEAUX, assistée de Charlène PALISSE, Greffière.

DEMANDEURS

Monsieur [L] [H]
né le 27 Juin 1963 à [Localité 5]
[Adresse 4]
[Localité 6]

Madame [Y] [Z] épouse [H]
née le 11 Février 1966 à [Localité 7]
[Adresse 4]
[Localité 6]

Tous deux représentés par Maître Jean-Marc DUCOURAU de la SARL CABINET DUCOURAU AVOCAT, avocats au barreau de BORDEAUX

DÉFENDEURS

Monsieur [V] [U]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Monsieur [D] [M]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Tous deux représentés par Maître Clotilde CAZAMAJOUR, avocat au barreau de BORDEAUX

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Se plaignant de la survenance prochaine de différents préjudices consécutifs au projet de surélévation du bâtiment sis sur la parcelle EP[Cadastre 2] contiguë à la leur numérotée EP[Cadastre 3] et de dégradations sur un mur séparatif selon eux privatif , les époux [H] ont par acte du 3 juin 2024 assigné leurs voisins les consorts [U] [M] devant le Juge des Référés du Tribunal Judiciaire de Bordeaux, aux fins de :

- JUGER que le projet de surélévation du bâtiment sis sur la parcelle EP n° [Cadastre 2], autorisé par l’arrêté de permis de construire n° PC 033 063 23 Z 0399, délivré sous réserve du droit des tiers dont les époux [H], va générer :
Une perte d’ensoleillement et de luminosité, tant depuis le jardin-cour intérieure, que des pièces de vie du bâtiment principal et de sa dépendance, le tout propriété de Monsieur et Madame [H] ;Une perte de vue depuis le jardin-cour intérieure, la chambre de Monsieur et Madame [H] sise dans le bâtiment principal, et depuis le balcon de la dépendance ;L’enfermement et l’emmurement du fonds de Monsieur et Madame [H] ;La dévalorisation financière de la propriété bâtie de Monsieur et Madame [H] section EP n° [Cadastre 3] ;
JUGER que les travaux de surélévation d’ores et déjà engagés et en cours de Monsieur [U] et Madame [M] vont être à directement à l’origine de troubles anormaux de voisinage, au sens de l’article 1253 du Code civil, en tant qu’ils excèdent les inconvénients normaux de voisinage devant être supportés par les époux [H] ;
JUGER que les travaux de démolition partielle du bâtiment « [U]-[M] », préalablement aux travaux de surélévation, ont conduit à l’arrachage des couvertines protégeant le mur de clôture non-mitoyen des époux [H], sans leur autorisation préalable, affectant d’ores et déjà son étanchéité ;
CONDAMNER au titre de l’article 1240 du Code civil les Consorts [U]-[M] à réparer le mur de clôture non-mitoyen des époux [H] en apposant les couvertines irrégulièrement arrachées, à l’identique ;
JUGER que la parfaite étanchéité du mur de clôture non-mitoyen des époux [H] suppose qu’une lame d’air soit prévue entre ledit mur existant et le nouveau mur de la surélévation « [U]-[M] » ;
ORDONNER et PRESCRIRE, au titre de l’article 835 du Code de procédure civile, les mesures conservatoires qui s’imposent pour prévenir le dommage imminent, inhérent au projet de surélévation autorisé par l’arrêté de permis de construire n° PC 033 063 23 Z 0399 et en cours de réalisation.
Pour ce faire,

ORDONNER la suspension des travaux en cours, ainsi que la modification du projet aux fins que la surélévation du bâtiment EP n° [Cadastre 2] ne génère aucun trouble anormal de voisinage à l’encontre du fonds EP n° [Cadastre 3] propriété de Monsieur et Madame [H] dans laquelle ils ont élu leur résidence principale.

ORDONNER une mesure d'expertise et DÉSIGNER, pour y procéder, tel expert qu'il plaire au juge des référés avec notamment pour mission de :

Sitôt aviser du versement de la consignation, convoquer et entendre les parties ;Se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission ;Se rendre sur les lieux litigieux – EP n° [Cadastre 2] et EP n° [Cadastre 3], les visiter et les décrire ;Apprécier que le jardin-cour intérieure de la parcelle EP n° [Cadastre 3] de M. et Mme [H] se trouve à près de 1 mètre en contre-bas du niveau de la rue et du terrain EP n° [Cadastre 2], ce qui aura pour effet de renforcer et aggraver l’impact de la surélévation sur leur qualité de vie au point de générer des troubles anormaux de voisinage ;Décrire la teneur et l’impact de la surélévation autorisée par l’arrêté de permis de construire n° PC 033 063 23 Z 0399, notamment compte tenu du niveau du jardin-cour intérieure de M. et Mme [H] ; Donner tous les éléments permettant de déterminer les troubles excédants les inconvénients normaux de voisinage à l’encontre du fonds EP n° [Cadastre 3], inhérents aux travaux de surélévation d’ores et déjà engagés sur le fonds EP n° [Cadastre 2] ;Faire part au juge des référés du fait que le projet de surélévation proposé par M. et Mme [H], dans leurs lettres officielles des 10.01.2024 et 30.01.2024, à l’attention de leurs voisins, Monsieur [U] et Madame [M], permettrait de considérablement diminuer les troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage ;Fournir tout élément technique et de fait de nature à permettre à la juridiction de déterminer les responsabilités encourues et d’évaluer les préjudices subis par M. et Mme [H].
CONDAMNER Monsieur [V] [U] et Madame [D] [M], au titre de l’article 700 du CPC, à verser 3.000 euros à Monsieur et Madame [H] et aux entiers dépens de l’instance.

Aux termes de leurs dernières conclusions , les consorts [U] [M] sollicitent de :


• A TITRE PRINCIPAL

- SE DECLARER INCOMPETENT à l’égard de l’action formée par Monsieur [L] [H]
et Madame [Y] [Z] en matière de trouble anormal de voisinage ;
- JUGER irrecevable les demandes de Monsieur [L] [H] et Madame [Y]
[Z] en l’absence de justification d’une tentative de résolution amiable du différend;
- DEBOUTER en tout état Monsieur [L] [H] et Madame [Y] [Z] de
l’intégralité de leurs demandes en l’absence de trouble manifestement illicite et de dommage imminent ;

• A TITRE SUBSIDIAIRE, SUR LES DEMANDES MONSIEUR [L] [H] ET MADAME [Y] [Z]

- Sur la demande d’expertise judiciaire, DEBOUTER Monsieur [L] [H] et
Madame [Y] [Z] de leur demande de désignation d’un expert judiciaire compte tenu de l’inutilité d’une telle mesure d’instruction ;

- Sur la demande de modification du projet, DEBOUTER Monsieur [L] [H] et Madame [Y] [Z] en l’absence de trouble manifestement illicite et de dommage imminent, la mesure sollicitée ne constituant pas en outre une mesure conservatoire ;

• A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE, POUR LE CAS OU IL SERAIT FAIT DROIT A LA DEMANDE D’EXPERTISE,

- DONNER ACTE à Monsieur [U] et Madame [M] qu’ils
formulent toutes protestations et réserves quant à leur responsabilité ;

- ORDONNER que la provision à valoir sur les honoraires de l’Expert devra être réglée par Monsieur [L] [H] et Madame [Y] [Z], demandeurs ;

• EN TOUT ETAT DE CAUSE, CONDAMNER Monsieur [L] [H] et Madame [Y] [Z] au paiement d’une somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.


MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’irrecevabilité invoquée par les consorts [U] [M]

Les consorts [U] [M] invoquent une irrecevabilité tirée de l’incompétence du Juge des Référés pour statuer sur l’exisence de troubles anormaux du voisinage dont se plaignent les requérants.
Or, si effectivement les époux [H] invoquent l’existence future de troubles anormaux du voisinage découlant de la construction des consorts [U] [M], il reste que les demandeurs se fondent sur l’existence d’un dommage imminent et de trouble manifestement illicite pour demander au Juge des Référés leur cessation.

En application de l’article 835 du code de procédure civile compétent, le Juge des Référés est donc bien compétent.

Sur l’exception de nullité

Les consorts [U] [M] invoquent le non respect des dispositions de l’article 750-1 du code de procédure civile reprochant dès lors aux époux [H] de ne pas avoir rédigé de convention de procédure participative destinée à mettre fin à leur différend .

Aux termes de l’article 750-1 du Code de procédure civile, modifié par décret du 11 mai 2023,:
“..à peine d’irrecevabilité que le Juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à l’une des actions mentionnées aux articles R 211-3-4 et R 211-3-8 du Code de l’organisation judiciaire, ou à un trouble anormal du voisinage.”

Ces dispositions légales n’exigent qu’une tentative de procédure participative et non la rédaction d’une convention et ce d’autant plus que l’instance a été introduite devant le Juge des Référés.

En l’espèce, il résulte des échanges de correspondances entre les parties ou leurs conseils respectifs qu’une tentative d’accord s’est mise en place préalablement à la saisine du présent Juge des Référés.

En conséquence, l’exception de nullité sera rejetée.

Sur le trouble manifestement illicite et le dommage imminent invoqués par les époux [H]:

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 11 décembre 2019 le juge des référés peut, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire toute mesure conservatoire ou de remise en état qui s’impose, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Il résulte des éléments de ce dossier que les époux [H] ne rapportent pas la preuve, avec l'évidence requise devant le Juge des Référés , de l'existence d'un trouble manifestement illicite ni d'un dommage imminent pour la sécurité des personnes ou des biens résultant des travaux entrepris par les consorts [U] [M] sur leur parcelle contiguë à celles des demandeurs , dès lors qu'ils se fondent principalement sur une lettre de Monsieur [P] Expert judicaire mandaté par époux [H], une étude d’ensoleillement non signée et donc anonyme ainsi que des photographies ne permettant pas d’établir l’anormalité d’un trouble de voisinage consécutif à une surélévation dans un espace urbain dense, étant précisé au surplus, que la construction entreprise par les consorts [U] [M] est conforme à l’ arrêté de permis de construire délivré par la mairie de [Localité 6] .

En outre, la nature de mur non mitoyen revendiquée par les époux [H] n’est pas démontrée Dès lors, en l’absence de production par les requérants d’un titre contraire de propriété la mitoyenneté du mur est présumée en application des dispositions de l’article 653 du Code civil.

La démonstration d’un trouble manifestement illicite ou d’un dommage imminent n’étant pas rapportée , la demande de suspension à titre conservatoire des travaux en cours et la demande de prescription de mesures conservatoires ne sont donc pas fondées et il n’y sera pas fait droit .

IL sera par ailleurs constaté que les époux [H] se désistent de leur demande relative à l’existence d’une lame d’air entre le mur séparatif et le nouveau mur de surélévation .

Les prétendues dégradations du mur séparatif ne sont pas d’avantage prouvées au sens de l’article 9 du code de procédure civile et la demande de réparation formulée par les époux [H] sera donc rejetée .

Enfin , les différents préjudices invoqués par les époux [H] n’étant pas réalisés mais seulement hypothétiques au stade de ce référé , il est prématuré de juger de leur existence et de leur lien de causalité avec les travaux des consorts [U] [M] .

S’agissant de la demande d’expertise judiciaire, il ne sauraît d’avantage y être fait droit puisque les époux [H] ne démontrent pas, en l’état de leur dossier, l’existence d’un motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile de nature à justifier l’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire.

L’équité conduit à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de 2 000 €.

Les époux [H] succombant à l’instance seront condamnés aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS :

Le Juge des Référés du Tribunal Judiciaire de Bordeaux, statuant par une ordonnance contradictoire et en premier ressort,

REJETTE l’irrecevabilité et l’exception de nullité invoquées par les consorts [U] [M].

DEBOUTE les époux [H] de l’intégralité de leurs demandes.

CONDAMNE les époux [H] à payer aux consorts [U] [M] la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE les époux [H] aux entiers dépens.
La présente décision a été signée par Jacqueline DESCOUT, Vice-Présidente, et par Charlène PALISSE, Greffière.
Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Referes 2ème section
Numéro d'arrêt : 24/01198
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;24.01198 ?
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