N° RG 23/00670 - N° Portalis DBX6-W-B7H-XNH7
INCIDENT
DESSAISISSEMENT
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
1ERE CHAMBRE CIVILE
N° RG 23/00670 - N° Portalis DBX6-W-B7H-XNH7
N° de Minute : 2024/00
AFFAIRE :
[A] [V]
C/
[D] [E], [W] [E] épouse [G], G.F.A. DU CHÂTEAU DE ROLLAND
Exécutoire Délivrée
le :
à
Avocats : la SELARL QUESNEL ET ASSOCIES
la SELARL RAMURE AVOCATS
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
Le DIX SEPT JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE
Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente
Juge de la Mise en Etat de la 1ERE CHAMBRE CIVILE,
Assistée de Hassna AHMAR-ERRAS, Adjoint administratif faisant fonction de greffier.
ORDONNANCE :
Contradictoire, susceptible d’appel dans les conditions prévues à l’article 795 du Code de Procédure Civile,
Premier ressort,
Par mise à disposition au greffe,
Vu la procédure entre :
DEMANDEUR
Monsieur [A] [V]
né le 25 Juin 1948 à CAUDERAN
de nationalité Française
Villa du Château de Teste, Impasse Teste n°112
33410 MONPRIMBLANC
représenté par Maître Alexandre BIENVENU de la SELARL RAMURE AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant
DEFENDEURS
Monsieur [D] [E]
né le 07 Octobre 1961 à SAINTE FOY LA GRANDE
de nationalité Française
Château de Rolland
33720 BARSAC
représenté par Maître Bernard QUESNEL de la SELARL QUESNEL ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant
Madame [W] [E] épouse [G]
née le 07 Juin 1964 à SAINTE FOY LA GRANDE
de nationalité Française
Le Bourg
33210 SAUTERNES
représentée par Maître Bernard QUESNEL de la SELARL QUESNEL ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant
G.F.A. DU CHÂTEAU DE ROLLAND
Château de Rolland
33720 BARSAC
représentée par Maître Bernard QUESNEL de la SELARL QUESNEL ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant
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EXPOSE DU LITIGE
LE GFA DU CHATEAU DE ROLLAND a été constitué par acte du 31 janvier 1979.
Suite au décès de l’un de ses associés, [Z] [V], les parts sociales de ce dernier sont devenues la propriété indivise de ses deux enfants héritiers, M. [A] [V] et Mme [X] [Y].
Contestant les résolutions adoptées par l’assemblée générale du GFA du Château de Rolland en date du 21 janvier 2020, M. [A] [V] a fait assigner le GFA Du Château de Rolland et ses cogérants, M. [D] [E] et Mme [W] [G] née [E], par actes du 20 janvier 2023, aux fins de nullité de cette assemblée générale et des quatre résolutions adoptées à cette occasion.
Par conclusions d’incident notifiées par RPVA le 26 février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé complet des moyens développés, le GFA Du Château de Rolland et ses cogérants, M. [D] [E] et Mme [W] [G] née [E] demandent au juge de la mise en état de:
- les juger recevables et bien fondés dans l’intégralité des leurs demandes, fins et prétentions,
En conséquence,
- juger que l’assignation en date du 20 janvier 2023 nulle pour vice de fond,
- Rejeter l’intégralité des demandes formées par M. [V]
- Réserver les dépens.
Par conclusions d’incident notifiées par RPVA le 22 avril 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé complet des moyens développés, M. [A] [V] demande au juge de la mise en état de:
- débouter les consorts [E] et le GFA CHATEAU DE ROLLAND de leur fin de non recevoir et/ou exception de procédure, et de toute autre demande, fin et prétention,
- renvoyer l’affaire à la mise en état,
- condamner in solidum M. [D] [E] et Mme [W] [B] née [E] au paiement de la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIVATION
sur l’exception de nullité de l’assignation pour vice de fond
Le GFA CHATEAU DE ROLLAND et M. Et Mme [E] font valoir que M. [A] [V], qui est copropriétaire indivis de 710 parts sociales avec sa soeur, ne justifie ni de la qualité de mandataire de l’indivision au sens de l’article 1844 du code civil et de l’article 11 alinéa 4 des statuts, ni du pouvoir d’agir en justice au nom et pour le compte de l’indivision.
Ils concluent que son assignation est nulle sur le fondement de l’article 117 du code de procédure civile compte tenu de l’irrégularité de fond constituée par le défaut de pouvoir du coïndivisaire pour exercer cette action en justice en nullité de délibérations sociales. Ils font valoir que les actions en justice concernant la gestion des biens indivis sont considérées comme des actes d’administration.
M. [A] [V], qui soutient qu’il est cotitulaire des 769 parts sociales, oppose qu’il a la qualité d’associé et peut à ce titre exercer seul les prérogatives inhérentes à la qualité d’associé, notamment par une action en nullité de délibérations sociales contraires à des règles d’ordre public qui ne remet pas en cause la substance des parts sociales.
Il ajoute que n’est irrecevable qu’une action qui a pour conséquence d’emporter la disparition des parts sociales, telle qu’une action en dissolution judiciaire de la société. En revanche, il soutient qu’une action qui tant à faire respecter le pacte statutaire et les droits qui en résultent pour chaque associé a un caractère conservatoire. Il conclut qu’un indivisaire peut agir seul en nullité de décisions sociales prises au cours d’une assemblée générale au motif, par exemple, qu’elle a été convoquée en violation des droits des associés.
Sur ce
Si les parties divergent quant aux nombres de parts sociales indivises entre M. [A] [V] et sa soeur ( 710 ou 769), elles s’accordent sur la situation d’indivision des parts sociales suite au décès du titulaire de ces parts sociales.
Les héritiers d’un associé décédé ont la qualité d’associé. Il n’en résulte pas pour autant que, tant que dure l’indivision entre ces héritiers, chacun d’eux puisse exercer librement les droits attachés à cette qualité, cet exercice demeurant limité en vertu des règles propres au régime de l’indivision.
Si, en vertu de l’article 815-2 du code civil, tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis, en revanche, l’article 815-3 du code civil soumet à des règles de majorité ou d’unanimité les autres actes.
M. [A] [V] soutient que son action en nullité des délibérations sociales constitue un acte conservatoire alors que ses contradicteurs soutiennent qu’il s’agit d’un acte d’administration.
L’action en nullité d’une assemblée générale et des quatre résolutions adoptées relatives au rapport et comptes annuels (1er résolution), affectations des bénéfices et des pertes (2e résolution), projet et devenir du fermier ( 3e résolution), quitus de la gérance ( 4e résolution) au motif du non-respect des règles de convocation (s’agissant d’une absence de double convocation de Mme [X] [Y] au titre de ses parts indivises et de parts détenues en pleine propriété) et au motif d’un défaut de consentement des associés ( en l’absence de Mme [X] [Y] au titre de ses parts détenues en pleine propriété, et en l’état d’une erreur des associés présents qui n’ont pas eu communication des informations pertinentes concernant la situation de la société fermière sortante) ne constitue pas une action conservatoire des parts sociales indivises pour en assurer la protection et les soustraire à un péril imminent.
L’action introduite par M. [A] [V] excède, en l’espèce, les limites des actes conservatoires et ne pouvait être introduite sur sa seule initiative.
L’irrégularité de fond, constituée par son défaut de pouvoir à agir au nom de l’indivision, doit être retenue. L’assignation délivrée le 20 janvier 2023 doit par conséquent être annulée.
La demande formée par M. [A] [V] au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
Le juge de la mise en état,
- DIT que l’assignation délivrée le 20 janvier 2023 est nulle pour défaut de pouvoir de M. [A] [V] à agir ;
- DIT qu’en conséquence le tribunal est dessaisi ;
- REJETTE la demande de M. [A] [V] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- CONDAMNE M. [A] [V] aux dépens.
La présente décision est signée par Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente, et Hassna AHMAR-ERRAS, Adjoint administratif faisant fonction de greffier.
LE GREFFIERLE JUGE DE LA MISE EN ETAT