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04/06/2024 | FRANCE | N°23/03297

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Jex droit commun, 04 juin 2024, 23/03297


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 04 Juin 2024


DOSSIER N° RG 23/03297 - N° Portalis DBX6-W-B7H-XU26
Minute n° 24/ 193


DEMANDEUR

Monsieur [K] [R]
né le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 6] ([Localité 6])
demeurant [Adresse 1]
[Localité 4]

représenté par Maître Marie POMMIES, avocat au barreau de BORDEAUX


DEFENDEUR

Madame [H] [E] épouse [X]
née le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 7] ([Localité 7])
demeurant [Adresse 9]
[Localité 5]

représentée p

ar Maître Camille BAILLOT, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant, Maître Camille DESBOUIS de la SCP LACROIX DESBOUIS, avocat au barreau de D...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 04 Juin 2024

DOSSIER N° RG 23/03297 - N° Portalis DBX6-W-B7H-XU26
Minute n° 24/ 193

DEMANDEUR

Monsieur [K] [R]
né le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 6] ([Localité 6])
demeurant [Adresse 1]
[Localité 4]

représenté par Maître Marie POMMIES, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR

Madame [H] [E] épouse [X]
née le [Date naissance 2] 1971 à [Localité 7] ([Localité 7])
demeurant [Adresse 9]
[Localité 5]

représentée par Maître Camille BAILLOT, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant, Maître Camille DESBOUIS de la SCP LACROIX DESBOUIS, avocat au barreau de DOUAI, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 07 Mai 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 04 Juin 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Le 04 juin 2024
Formules exécutoires aux avocats + dossiers
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties
EXPOSE DU LITIGE

Du mariage de Monsieur [K] [R] et de Madame [H] [E] est issu [N] [R], né le [Date naissance 8] 1999. Le divorce du couple a été prononcé par un jugement du 2 juin 2003. Par jugement en date du 29 février 2008, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Douai a fixé la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant à la somme 300 euros.

Par acte du 21 février 2023, Madame [E] a fait délivrer à Monsieur [K] [R] un commandement de payer aux fins de saisie-vente et fait diligenter en parallèle une saisie sur ses rémunérations en paiement d’une somme de 12.708,09 euros réclamée au titre d’arriérés de paiement de la contribution à l’entretien de l’enfant.

Par acte de commissaire de justice signifié le 6 avril 2023, Monsieur [K] [R] a fait assigner Madame [H] [E] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de voir prononcée la nullité du commandement de payer délivré le 21 février 2023 et subsidiairement de bénéficier d’un report de dette à deux ans en fixant le montant de la créance à la somme de 8.100 euros.

Par jugement du 5 décembre 2023, la présente juridiction a ordonné un sursis à statuer dans l’attente de la décision de la Cour d’appel de [Localité 6] à intervenir dans le litige imposant les parties au sujet de la contribution à l’entretien de l’enfant et renvoyé à l’audience du 12 mars 2024. Par un arrêt du 21 décembre 2023, la Cour d’appel de [Localité 6] a supprimé à compter du 22 mai 2023 la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant [N] fixée par jugement du 29 février 2008.

A l’audience du 7 mai 2024 et dans ses dernières écritures, Monsieur [R] sollicite à titre principal que soit prononcée la nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente en date du 21 février 2023. A titre subsidiaire, il sollicite le cantonnement du commandement à la somme de 5.254,72 euros ainsi qu’un report de deux ans pour régler la créance. En tout état de cause, il demande la condamnation de la défenderesse aux dépens et au paiement d’une somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [R] fait valoir que le commandement qui lui a été délivré le 21 février 2023 est nul car il porte une mention erronée relativement à la date du titre exécutoire, car Madame [E] ne justifie pas de sa signification et au regard de l’absence d’un décompte distinct des sommes réclamées. Il souligne qu’il a effectué divers versements qui n’ont pas été pris en compte par le commissaire de justice dans son décompte. Subsidiairement, il fait valoir que le montant de la créance doit tenir compte des versements effectués et que sa situation financière actuelle ne lui permet pas d’acquitter les sommes réclamées.

A l’audience du 7 mai 2024 et dans ses dernières écritures, Madame [E] conclut au rejet des demandes de Monsieur [R] et à sa condamnation au paiement d’une somme de 12.754,72 euros arrêtée au 31 décembre 2023. Elle s’oppose à l’accord de tout délai de paiement et sollicite la condamnation du demandeur aux dépens et au paiement d’une somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir que l’erreur strictement matérielle affectant la date du titre exécutoire ne fait aucun grief à Monsieur [R] qui a pu contester les sommes réclamées dans le cadre de la présente instance. Elle souligne que la décision est exécutoire de plein droit et a en tout état de cause été signifiée par acte du 11 avril 2008. Elle souligne que le décompte figurant sur le commandement est détaillé et tient compte des paiements intervenus. Elle conteste tout accord tacite pour la suspension de la contribution d’entretien. Enfin, elle s’oppose à tout délai de paiement soulignant que Monsieur [R] dispose de ressources suffisantes nonobstant le fait qu’il soit au chômage et dans la mesure où il ne démontre pas en quoi un report de la dette à deux ans améliorerait sa situation.

L’affaire a été mise en délibéré au 4 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

- Sur la nullité du commandement

Les articles L221-1 et R221-1 du Code des procédures civiles d’exécution prévoient :
« Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce dernier.
Tout créancier remplissant les mêmes conditions peut se joindre aux opérations de saisie par voie d'opposition.
Lorsque la saisie porte sur des biens qui sont détenus par un tiers et dans les locaux d'habitation de ce dernier, elle est autorisée par le juge de l'exécution. »
« Le commandement de payer prévu à l'article L. 221-1 contient à peine de nullité :
1° Mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts ;
2° Commandement d'avoir à payer la dette dans un délai de huit jours faute de quoi il peut y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles. »

L’article 114 du Code de procédure civile prévoit quant à lui :
« Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public. »

Le commandement signifié le 21 février 2023 vise en effet en guise de titre exécutoire le jugement du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Douai en date du 28 février 2008 alors que celui-ci a été rendu le 29 février 2008. Monsieur [R] a pour autant pu identifier sans difficulté de quelle décision il s’agissait et contester le commandement dans le cadre de la présente instance. Il ne justifie donc pas en quoi cette erreur purement formelle lui a causé un grief.

Madame [E] produit l’acte de signification du jugement du 29 février 2008, remis à domicile entre les mains du fils du couple.

Enfin, il est constant que seule l’absence totale de décompte est susceptible d’entrainer la nullité de l’acte. Or, l’acte versé aux débats mentionne un décompte détaillé année par année ainsi que les acomptes déjà versés.

Le commandement de payer signifié le 21 février 2023 n’encourt donc aucun grief de nullité.

- Sur le montant de la créance

L’article 1353 du Code civil dispose : « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. »

Monsieur [R], à qui il appartient de prouver qu’il s’est libéré de son obligation, fait valoir qu’il a acquitté la somme de 3.600 euros pour l’année 2019. Il ne produit aucun justificatif de virement mais son avis d‘imposition, pour l’année 2019 mentionnant un montant déclaré de 3.600 euros. Madame [E] quant à elle fait état d’une perception de la somme de 1.600 euros dans ses écritures et à raison de 5.400 euros dans sa déclaration d’impôt commune avec son époux. Elle verse également aux débats les relevés de compte de l’enfant commun [N] pour cette année établissant la perception de la somme de 300 euros le 7 janvier 2019, le 4 février 2019, le 6 mars 2019, le 4 avril 2019 et 400 euros le 13 mai 2019. Aucun autre virement de Monsieur [R] n’apparait par la suite. Il sera donc considéré que Monsieur [R] a versé la somme de 1.600 euros, les déclarations de revenus des parties étant par définition purement déclaratives et n’établissant pas la réalité des paiements opérés.

S’agissant de l’année 2020, Monsieur [R] verse de la même façon aux débats sa déclaration de revenus. Madame [E] produit quant à elle l’ensemble des relevés de compte de l’enfant commun [N] mentionnant un unique paiement de 300 euros le 18 mai 2020. Comme précédemment il sera donc tenu compte de ce seul paiement.

Pour l’année 2021, Monsieur [R] justifie lui-même d’un paiement de 300 euros le 2 avril 2021, de 300 euros le 4 mai 2021, de 300 euros le 2 juin 2021 et de 300 euros le 26 juin 2021. Ces paiements sont conformes au décompte de Madame [E].
Aucune somme n’a a été versée pour l’année 2022.
Pour l’année 2023, Madame [E] ne sollicite que les contributions pour l’entretien de l’enfant au prorata jusqu’au 22 mai 2023 conformément à l’arrêt de la cour d’appel de [Localité 6] du 21 décembre 2023.

Le décompte fourni par Madame [E] tient donc compte des sommes dont le versement est justifié.

Ainsi que l’a constaté la cour d’appel de [Localité 6], Monsieur [R] ne justifie pas de la convention qui serait intervenue entre les parties pour le dispenser du paiement de la contribution d’entretien dont le juge du fond a constaté qu’elle demeurait due nonobstant la procédure pénale mettant en cause [N].

Il sera donc constaté que Monsieur [R] est débiteur de la somme de 12.754,72 euros au titre des arriérés de contribution à l’entretien de l’enfant [N], cette somme étant arrêtée au mois de décembre 2023.

- Sur les délais de paiement

L’article 1343-5 du Code civil dispose :
« Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment. »

Monsieur [R] justifie percevoir l’allocation de sécurisation professionnelle de France Travail à raison de 223,30 euros journaliers à compter du 24 février 2024 soit un revenu mensuel d’environ 6.699 euros. Son épouse perçoit environ 1.916 euros d’allocations de retour à l’emploi.

Le couple justifie d’une charge de loyer de 2.200 euros outre 270 euros au titre de la scolarité en établissement privé de deux enfants communs. Il justifie enfin de plusieurs crédits à la consommation pour une charge d’endettement globale mensuelle d’environ 4.010 euros. Certains de ces crédits sont renouvelables, les échéances pouvant par conséquent être variables.

Monsieur [R] n’indique pas en quoi sa situation dans deux ans lui permettra d’apurer la dette pas plus qu’il n’explicite ce qu’il est advenu du produit de la vente de l’immeuble du couple lors de sa mutation en région bordelaise.

Le montant de l’indemnité chômage perçue et les anciens bulletins de paie versés à la procédure établissent un niveau de poste important qui devrait lui permettre de retrouver rapidement un emploi. En tout état de cause et ainsi que la cour d’appel de [Localité 6] a pu l’indiquer, le paiement de la contribution à l’entretien de l’enfant est prioritaire sur les dépenses inhérentes à la souscription de nombreux crédits à la consommation.

Madame [E] justifie de ce que [N] poursuit encore des études et de ce qu’elle perçoit un salaire de 3.600 euros, son époux percevant quant à lui des revenus de 9.500 euros. Ce dernier n’est toutefois pas débiteur d’une obligation d‘aliments à l’égard de [N].

Ainsi, au regard des situations respectives des parties, la demande de report de la dette sera donc rejetée.

Sur les autres demandes

Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

Monsieur [R], partie perdante, subira les dépens. L’équité commande par ailleurs de le condamner au paiement d’une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,
DEBOUTE Monsieur [K] [R] de toutes ses demandes ;
DIT que Monsieur [K] [R] est débiteur de la somme de 12.754,72 euros, décompte arrêté au 31 décembre 2023, au profit de Madame [H] [E] épouse [X] ;
CONDAMNE Monsieur [K] [R] à payer à Madame [H] [E] épouse [X] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [K] [R] aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Jex droit commun
Numéro d'arrêt : 23/03297
Date de la décision : 04/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-04;23.03297 ?
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