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30/05/2024 | FRANCE | N°21/04047

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, 5ème chambre civile, 30 mai 2024, 21/04047


N° RG 21/04047 - N° Portalis DBX6-W-B7F-VQIV
5ème CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND





63D

N° RG 21/04047 - N° Portalis DBX6-W-B7F-VQIV

Minute n° 2024/00



AFFAIRE :


S.C.I. BARRIO ALTO, [W] [G] [B] [L] épouse [N] [Y], [T] [N] [Y]

C/

S.A.S. BANQUE BCP











Grosses délivrées
le

à
Avocats : Me Bruno DAMOY
la SELARL DUCOS-ADER / OLHAGARAY & ASSOCIES




TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
5ème CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 30 MAI 2024<

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COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Marie WALAZYC, Vice-Présidente
Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président
Angélique QUESNEL, Juge


Greffier, lors des débats et du prononcé
Pascale BU...

N° RG 21/04047 - N° Portalis DBX6-W-B7F-VQIV
5ème CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

63D

N° RG 21/04047 - N° Portalis DBX6-W-B7F-VQIV

Minute n° 2024/00

AFFAIRE :

S.C.I. BARRIO ALTO, [W] [G] [B] [L] épouse [N] [Y], [T] [N] [Y]

C/

S.A.S. BANQUE BCP

Grosses délivrées
le

à
Avocats : Me Bruno DAMOY
la SELARL DUCOS-ADER / OLHAGARAY & ASSOCIES

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
5ème CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 30 MAI 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :

Marie WALAZYC, Vice-Présidente
Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président
Angélique QUESNEL, Juge

Greffier, lors des débats et du prononcé
Pascale BUSATO, Greffier

DÉBATS :

A l’audience publique du 21 Mars 2024
Délibéré au 30 mai 2024
Sur rapport conformément aux dispositions de l’article 785 du code de procédure civile

JUGEMENT:

Contradictoire
Premier ressort
Prononcé publiquement par mise à disposition du jugement au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile

DEMANDEURS :

S.C.I. BARRIO ALTO ayant pour gérants Madame [W] [N] [Y] et Monsieur [T] [N] [Y]
101 avenue Jules Guesde
33110 LE BOUSCAT

représentée par Me Bruno DAMOY, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

Madame [W] [G] [B] [L] épouse [N] [Y]
née le 26 Mai 1969 à PAREDES DE COURA
de nationalité Portugaise
101 avenue Jules Guesde
33110 LE BOUSCAT

représentée par Me Bruno DAMOY, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
N° RG 21/04047 - N° Portalis DBX6-W-B7F-VQIV

Monsieur [T] [N] [Y]
né le 16 Janvier 1965 à Val Paços
de nationalité Portugaise
101 avenue Jules Guesde
33110 LE BOUSCAT

représenté par Me Bruno DAMOY, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DÉFENDERESSE :

S.A.S. BANQUE BCP
126 cours Alsace Lorraine
33000 BORDEAUX

représentée par Maître Clément GERMAIN de la SELARL DUCOS-ADER / OLHAGARAY & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats postulant, Me Marie-Carmen GALLARDO-ARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

******

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur et Madame [N] [Y] ont le 23 octobre 2018 signé deux promesses de vente portant sur l’acquisition de deux lots dans un lotissement sis à Bassens au prix global de 210 000 € et sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt bancaire.

Les époux [N] [Y] ont crée une SCI, sous le nom de “SCI BARRIO ALTO” le 15 janvier 2017.

Le 2 février 2019, la SCI BARRIO ALTO a sollicité auprès de la SAS banque BCP l’obtention de deux prêts bancaires pour un montant total de 380 000 €.

Le 28 août 2019, la SAS Banque BCP a émis un avis défavorable pour les demandes de prêt.
La SCI BARRIO ALTO a été contrainte de renoncer au projet de construction, malgré les frais engagés pour une somme de 8 500 €.

Le 12 octobre 2020, par l’intermédiaire de leur conseil, Monsieur et Madame [N] [Y] ont mis en demeure la SAS banque BCP de les indemniser pour le préjudice subi. Cette mise en demeure est restée vaine.

Par acte extra judiciaire du 19 mai 2021, la SCI BARRIO ALTO ainsi que Monsieur et Madame [N] [Y] ont fait assigner la SAS banque BCP devant le tribunal judiciaire de BORDEAUX en réparation de leur préjudice pour manquement contractuel et préjudice moral.

La mise en état a été clôturée par ordonnance en date du 6 mars 2024 et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience collégiale du 21 mars 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Aux termes de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 26 octobre 2022 par voie électronique, la SCI BARRIO ALTO ainsi que les consorts [N] [Y] demandent au tribunal, au visa des articles 1103, 1104 et 1217 du code civil, de :
Condamner la banque BCP à payer à la SCI BARRIO ALTO une somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de ses obligations contractuelles, Condamner la banque BCP à payer à Monsieur et Madame [N] une somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,Condamner la banque BCP à payer à la SCI BARRIO ALTO, à Monsieur et Madame [N] une somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et dilatoire,Condamner la banque BCP à payer à la SCI BARRIO ALTO comme à Monsieur et Madame [N] une indemnité de 5 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans caution, Condamner enfin la banque BCP aux entiers dépens en ce compris les frais honoraires éventuels de l’exécution. A l'appui de leurs demandes, la SCI BARRIO ALTO et les consorts [N] [Y] font valoir :
que la SAS Banque BCP a manqué à ses obligations contractuelles sur le fondement de l’article 1217 du code civil, en refusant l’obtention d’un prêt bancaire. Ils arguent rapporter la preuve que le conseiller clientèle, Monsieur [I] [D], a par courriel du 27 juillet 2019 accepté le prêt bancaire valant accord de principe de l’octroi du prêt. Ils exposent qu’aucune réserve n’a été exprimée. Ils soutiennent que Madame [P], qui a assisté à plusieurs rendez-vous, atteste avoir entendu le conseiller bancaire dire que “tout était ok”. Enfin, ils exposent que la SCI BARRIO ALTO a obtenu un engagement de caution en garantie des engagements souscrits auprès de l’organisme bancaire. En conséquence, en refusant d’octroyer le prêt à la SCI BARRIO ALTO sans aucun motif, la banque a méconnu ses obligations contractuelles à son égard. Elle sollicite une indemnisation du préjudice subi en raison de l’impossibilité de réaliser le projet de construction immobilière. Par ailleurs, ils indiquent qu’ils ont été contraints de prendre une assurance auprès de la société GENERALI et de payer les premières échéances par prélèvement bancaire.que la SCI BARRIO ALTO a été dans l’obligation d’engager des frais en pure perte et pour un montant minimum de 8 500€, c’est pourquoi elle sollicite des dommages et intérêts à hauteur de 10 000 €. qu’en outre Monsieur et Madame [N] [Y] estiment avoir subi un préjudice moral, faute de réalisation du projet immobilier leur tenant à coeur. Ils soutiennent que ce projet était pour leurs enfants. Ils exposent qu’ils ont crée la SCI BARRIO ALTO sur les conseils de l’organisme bancaire pour procéder à une telle opération. Malgré le suivi des indications de la banque, ils n’ont pu réaliser les deux projets immobiliers. Ils ajoutent que la santé de Madame [N] [Y] a été fortement impactée par toute cette procédure avec la banque. qu’enfin la SAS banque BCP a fait preuve d’une résistance abusive dans le traitement de ce dossier, c’est pourquoi ils sollicitent une indemnisation évaluée à 5 000 €.
Aux termes de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 22 novembre 2022 par voie électronique, la SAS banque BCP demande au tribunal de :
Débouter la SCI BARRIO ALTO, Monsieur [T] [N] [Y] et Madame [G] [N] [Y] de l’intégralité de leurs demandes,Condamner in solidum la SCI BARRIO ALTO, Monsieur [T] [N] [Y] et Madame [G] [N] [Y] à payer à la banque BCP une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, Condamner in solidum la SCI BARRIO ALTO, Monsieur [T] [N] [Y] et Madame [G] [N] [Y] aux entiers dépens, Juger que l’exécution provisoire n’est pas compatible avec la nature de l’affaire et en conséquence, l’écarter. En défense, la SAS Banque BCP fait valoir :
qu’elle n’a commis aucune faute dans l’exécution de son contrat. Elle souligne que l’argumentaire de la SCI BARRIO ALTO et des époux [N] [Y] ne repose que sur le seul courriel du 27 juillet 2019. Elle fait observer que le refus final d’accorder un prêt bancaire pour un montant total de 380 000€ est subordonné au fait que la SCI BARRIO ALTO n’a pas produit tous les documents indispensables pour l’obtention d’un prêt. Elle soutient que le courriel interne qui leur a été adressé ne contenait aucune offre de prêt (montant, durée, taux d’intérêts, garanties...). Elle expose qu’il ne s’agissait que d’un accord de principe du service central de la banque sous réserve “d’avoir une visibilité sur le projet global”. Elle rappelle que rien ne s’oppose à ce qu’une banque émette un accord de principe avec réserves en demandant notamment des éléments complémentaires. Elle fait observer que les pièces versées aux débats permettent d’établir les réserves émises. En effet, elle indique que plusieurs courriels provenant des services internes mettent en exergue des questionnements sur les moyens financiers du client pour effectuer les travaux de construction. La SAS Banque BCP fait valoir que la SCI n’a pas communiqué les devis modifiés comme exigé. Elle ajoute que la SCI BARRIO ALTO n’a pas justifié auprès d’elle les éléments nécessaires pour avoir une visibilité sur le projet global. C’est pourquoi, l’organisme bancaire a émis en définitive un avis défavorable le 28 août 2019 faute de dossier complet du projet de la SCI BARRIO ALTO. En réponse aux conclusions de la SCI BARRIO ALTO, la SAS Banque BCP soutient que l’assurance est souscrite systématiquement avant de conclure un contrat de prêt immobilier puisqu’il est nécessaire d’avoir la preuve du contrat d’assurance avant d’émettre une offre. Toutefois, elle fait observer que si la banque refuse d’octroyer le prêt, elle émet une attestation de refus qui peut être présentée à l’assurance aux fins de remboursement des sommes déjà versées. Elle précise également qu’à l’instar de l’assurance, l’émission d’un cautionnement n’oblige pas la banque à accorder un prêt.
Par conséquent, elle conclut avoir exécuté ses obligations de bonne foi, si bien qu’aucun manquement à ses engagements contractuels ne peut lui être reproché, et qu’en toute hypothèse il n’en résulte aucun préjudice pour les demandeurs.

qu’en outre, les demandeurs ne démontrent pas le lien de causalité avec le préjudice subi. En effet, elle expose que les deux promesses de vente versées aux débats ont été signées par les époux [N] [Y] en date du 23 octobre 2018 sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt devant être réalisée au plus tard à la date du 30 novembre 2018. Elle soutient ainsi que les consorts [N] [Y] n’ont pas sollicité de prêts bancaires mais c’est la SCI BARRIO ALTO à la date du 2 février 2019, soit plus deux mois après la date de réalisation de la condition suspensive. Elle fait également observer que la SCI BARRIO ALTO n’a pas signé de compromis de vente.En réponse aux conclusions de la SCI BARRIO ALTO, la SAS banque BCP soutient que si les époux [N] [Y] évoquent qu’ils ont sollicité un financement auprès du crédit mutuel Barrière du Médoc, il s’avère qu’à la lecture des pièces, ce sont eux qui ont effectué la demande et non la SCI BARRIO ALTO. Elle fait observer que cette dernière ne justifie pas avoir sollicité de prêts auprès d’autres banques donc les demandeurs sont seuls responsables du préjudice subi.
Elle en déduit que la non obtention des prêts résulte directement de la passivité de Monsieur et Madame [N] [Y] qui ne justifient pas avoir sollicité dans les délais impartis des financements auprès d’autres banques pour concrétiser leur projet immobilier.

qu’également les époux [N] [Y] ne rapportent pas non plus la preuve d’un préjudice moral. Si Madame [N] [Y] verse aux débats un certificat médical établi le 20 janvier 2021, pour une consultation du 14 octobre 2019 dans un contexte d’anxiété, elle ne rapporte pas la preuve d’un lien de causalité entre une faute de la banque et le préjudice subi.
qu’enfin, les demandeurs ne rapportent pas la preuve d’une résistance abusive de sa part. En effet, elle soutient que l’octroi de dommages et intérêts sur le fondement de la résistance abusive suppose que soient caractérisées l’existence d’un abus dans l’exercice du droit de résister ainsi que d’une préjudice subi en conséquence de cet abus, que tel n’est pas le cas.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1- Sur la demande en réparation du préjudice subi par la SCI BARRIO ALTO au titre du manquement contractuel de la SAS Banque BCP :

Selon l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Aux termes de l’article 1104 du code civil, les contrats doivent être négociés, formés, et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public.
Selon l’article 1217 du code civil :
« La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut:
- refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter».

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Il incombe à chaque partie, par application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, il résulte de l’instruction du dossier que Monsieur et Madame [N] [Y] ont signé le 23 octobre 2018 une promesse de vente de deux lots dans un lotissement sis à BASSENS pour un montant global de 210 000€ sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt bancaire dont le terme est fixé au 30 novembre 2018.

Il est également relevé des deux attestions bancaires que la SCI BARRIO ALTO s’est rapprochée de la SAS Banque BCP, le 2 février 2019 pour une demande de financement. La société a sollicité deux prêts d’un montant total de 380 000€ destinés à financer l’acquisition de deux lots pour la somme de 210 000€ et des travaux de construction de deux maisons individuelles destinées à la location pour la somme de 170 000 €.

Il est établi que dans un premier temps, la SAS Banque BCP a donné le 27 juillet 2019 son accord de principe à la SCI BARRIO ALTO, puis dans un second temps le 28 août 2019, l’organisme bancaire a émis un avis défavorable à l’obtention du prêt compte tenu de l’ampleur et de la nature des travaux à réaliser.

En droit, il est de jurisprudence acquise que hors le cas où il est tenu par un engagement antérieur, le banquier est toujours libre, sans avoir à justifier sa décision qui est discrétionnaire, de proposer ou de consentir un crédit, quel qu’en soit la forme, ou encore de s’abstenir ou de refuser de le faire.

Toutefois, l’existence d’un accord de principe modifie la situation, et le refus de crédit ne pouvant plus être discrétionnaire, la responsabilité de la banque peut être engagée à la mesure du préjudice causé si la banque a manqué à la bonne foi dans la négociation ou a opposé au demandeur un refus abusif.

En l’espèce, certes, par courriel du 27 juillet 2019 (16h38), la banque BCP via un conseiller clientèle en Gestion Privée, Monsieur [I] [D] a donné un accord de principe en le rédigeant ainsi :
- “Mme et M. [N] [Y], ci-joint les messages de Paris ... Dossier accepté définitivement mais avec devis modifié en intégrant les postes manquants sans changer le prix actuel (voir postes manquants en rouge ci-dessous). Et ensuite, ils éditent les offres. / Tous les sanitaires (lavabos toilettes) ; Toute l’électricité ; La plomberie ; Le chauffage ; Les enduits ; Terrassement et raccordement”.

Néanmoins, cet accord a été assorti d’aucun détail sur les conditions relatives à l’octroi du prêt, tel que le montant, la durée, le taux d’intérêt.

Il ressort également du courriel interne de la SAS banque BCP du 27 juillet 2019 (16h13) transmis aux consorts [N] sous le message de 16h38 que l’offre de prêt n’est pas finalisée : “Merci pour ton retour rapide [I]. Le devis n’est pas clés en main si le client réalise une partie des travaux. Je te remercie de demander à la clientèle de refaire faire le devis avec tous les points de la construction. Pour les travaux qu’il va faire avec l’aide de sa famille, il va les financer comment ? Je pense qu’il faut lui demander un devis plus détaillé avec notamment les postes manquants évoqués et ceux qui restent à la charge du client. En effet, pour notre dossier nous avons besoin d’avoir de la visibilité sur le projet global. Pour tout le reste c’est nickel” que l’offre de prêt n’est pas finalisée. En effet, il est relevé de ce courriel interne que la banque a fait part de ses inquiétudes sur les financements pour concevoir et finaliser les deux projets immobiliers.

Ainsi, il résulte des différents échanges de courriels que la banque a conditionné son financement à une modification des devis déjà transmis, comme rappelé dans le courriel du 30 juillet 2019 du conseiller clientèle en Gestion Privée, Monsieur [I] [D] à l’attention de Madame [N] :”Bonjour Mme [N], suite à notre entretien téléphonique de ce jour, je vous remercie de bien vouloir me mettre par écrit ce que vous venez de me dire au téléphone concernant les postes ci-dessous : 1- Que l’artisan qui vous a fait le devis est parti en congés et qu’il ne pourra vous refaire le devis qu’en septembre. 2- Que les travaux ci-dessous vont être réaliser par vous et votre famille qui travaille dans le bâtiment (frère qui va vous faire les enduits gratuitement etc...)”.

A la suite de courriel, la SCI BARRIO ALTO n’a fourni aucun autre document justifiant la totalité des travaux prévus pour le projet des constructions immobilières.

Il en résulte que si la banque avait donné son accord pour l’octroi d’un prêt bancaire à la SCI BARRIO ALTO, les conditions définitives de ce concours devaient encore être finalisées par l’apport de devis complété par la société, ce qu’elle ne justifie pas.

Il convient de relever des pièces de la procédure que c’est parce que la SCI BARRIO ALTO envisageait des travaux de construction de deux maisons individuelles et sollicitait un financement pour un projet global non clairement identifié dans les devis, que le prêt lui a été refusé par la banque.

En effet, les échanges de courriel entre le conseiller clientèle et les consorts [N] révèlent que la SAS Banque BCP était en attente de devis identifiant les travaux relevant des entreprises et artisans et, les travaux réalisés par Monsieur et Madame [N] avec l’aide de leur famille.

Si la SCI BARRIO ALTO avait transmis l’ensemble des devis nécessaires pour évaluer concrètement l’ampleur du projet immobilier, la SAS Banque BCP aurait alerté sa cliente sur les risques de refus de l’obtention du prêt.

La SCI BARRIO ALTO ne peut non plus sérieusement reprocher à la banque d’avoir exigé la remise des documents usuellement nécessaires au montage d’un dossier de prêt, tels qu’une assurance et une caution.

Dans ces conditions, la SAS banque BCP pouvait légitimement modifier sa position sur son offre de prêt, et ce d’autant plus qu’elle avait constaté que les travaux prévus à la charge de la famille [N] [Y] étaient beaucoup plus importants que prévus initialement. Elle retrouvait ainsi toute sa liberté de lui accorder ou de lui refuser un prêt bancaire.

Par ailleurs, la contradiction des parties sur l’origine de la création de la SCI BARRIO ALTO selon les conseils de la banque BCP est inopérante pour invoquer une faute de la banque. En effet, la création de la SCI BARRIO ALTO date du 15 janvier 2017 alors que la signature de la promesse de vente a été effectuée le 23 octobre 2018, soit plus d’un an et demi après.

Dès lors, la SCI BARRIO ALTO échoue à prouver la faute de la banque et elle sera déboutée de sa demande de constater que la banque a commis une faute envers elle en ne finalisant pas l’obtention des prêts.

Par conséquent, la SCI BARIO ALTO sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre d’un prétendu manquement contractuel. Subséquemment, en l’absence de faute de la banque, les demandes de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel, du préjudice moral et au titre de la résistance abusive seront rejetées.

2 -Sur les autres demandes

Sur les dépensAux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
En l’espèce, la SCI BARRIO ALTO et les consorts [N] [Y], parties perdantes, seront condamnées aux dépens de la présente procédure.

Sur l'article 700 du code de procédure civileAux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
En l’espèce, la SCI BARRIO ALTO et les consorts [N] [Y] seront condamnés à payer à la SAS banque BCP la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur l'exécution provisoireAux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
En l’espèce, aucun motif ne justifie d’écarter l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Déboute la SCI BARRIO ALTO de sa demande de réparation au titre d’un manquement contractuel de la SAS banque BCP,
Déboute Monsieur et Madame [N] [Y] de leur demande de réparation au titre du préjudice moral,
Déboute la SCI BARRIO ALTO et les consorts [N] de leur demande de réparation au titre de la résistance abusive,

Condamne in solidum la SCI BARRIO ALTO et les consorts [N] aux entiers dépens de la présente instance,
Condamne in solidum la SCI BARRIO ALTO et les consorts [N] à payer à la SAS banque BCP la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute la SCI BARRIO ALTO et les consorts [N] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Rappelle que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire.

Le présente jugement est signé par madame Marie WALAZYC, Vice-Présidente et par madame Pascale BUSATO, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : 5ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/04047
Date de la décision : 30/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-30;21.04047 ?
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