Du 28 mai 2024
5AC
SCI/
PPP Contentieux général
N° RG 23/02746 - N° Portalis DBX6-W-B7H-YE22
S.A. DOMOFRANCE
C/
[O] [K]
- Expéditions délivrées à
- FE délivrée à
Le 28/05/2024
Avocats : la SELARL DUCOS-ADER / OLHAGARAY & ASSOCIES
Me Eric FOREST
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2]
JUGEMENT EN DATE DU 28 mai 2024
JUGE : Monsieur Edouard DE LEIRIS
GREFFIER : Madame Françoise SAHORES
DEMANDERESSE :
S.A. DOMOFRANCE
RCS de BORDEAUX sous le n° 458 204 963
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Marie-José MALO, Avocat au barreau de BORDEAUX
DEFENDERESSE :
Madame [O] [K]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentée par Me Eric FOREST, Avocat au barreau de BORDEAUX
DÉBATS :
Audience publique en date du 28 Mars 2024
PROCÉDURE :
Articles 480 et suivants du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE
Par actes des 12 octobre 2000 et 7 janvier 2005, la société DOMOFRANCE (DOMOFRANCE) a donné à bail à [U] [K] et [Y] [D] un bien à usage d’habitation, situé à [Adresse 5].
Les locataires sont décédés, respectivement les 2 avril 2021 et 25 avril 2022, et leur fille, Mme [O] [K], est restée dans les lieux.
DOMOFRANCE lui a fait signifier, le 16 mai 2023, une sommation d’avoir à quitter les lieux puis, le 22 mai 2023, une sommation de payer la somme de 8284,07 euros.
Le 1er août 2023, DOMOFRANCE a ensuite fait assigner Mme [O] [K] devant le juge des contentieux de la protection de [Localité 3], sollicitant de :
- constater la résiliation de plein droit du contrat de bail portant sur l’appartement occupé par Mme [O] [K] ;
- ordonner son expulsion des lieux qu'eIIe occupe ainsi que de tous occupants de son chef et de tous biens avec au besoin le concours de la force publique et d’un serrurier ;
- dire et juger qu'en ce qui concerne le sort des meubles, il sera procédé, selon les dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d’exécution ;
- fixer le montant de l’indemnité d'occupation au montant égal à celui des loyers et des charges qu'aurait payés le locataire en cas de non-résiliation du bail à compter du 1er mai 2022 jusqu’à libération effective des lieux ;
- condamner Mme [O] [K] a paver lesdites indemnités avec intérêts au taux légal à la société DOMOFRANCE jusqu'à la libération effective des lieux ;
- la condamner à lui payer la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
- la condamner aux dépens d'instance, en ce compris le coût des sommations d'huissier des 16 et 22 mai 2023.
L'affaire, initialement appelée à l'audience du 7 novembre 2023, a été débattue à celle du 21 mars 2024.
Lors des débats, DOMOFRANCE se réfère à son assignation valant conclusions.
Le conseil de Mme [O] [K] se réfère à ses conclusions écrites, déposées à l’audience et par lesquelles il est demandé de :
- statuer ce que de droit sur les demandes de résiliation de bail, expulsion et condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation équivalente au loyer et charges à compter du 1er mai 2022, présentées par DOMOFRANCE ;
- juger que les indemnités d’occupation dues ne porteront pas intérêt ;
- rejeter les demandes plus amples de DOMOFRANCE ;
- juger que chaque partie conservera les frais irrépétibles et dépens et qu’elle aura exposés.
Il est renvoyé à l'assignation et aux conclusions en défense pour l'exposé complet des moyens des parties.
A l’audience, DOMOFRANCE a été autorisée à adresser en délibéré un décompte actualisé des indemnités d’occupation réclamées, ce qu’elle a fait le jour même, et Mme [O] [K] à produire un jugement de surendettement allégué, lequel n’a en revanche pas été produit en délibéré.
MOTIFS DE LA DECISION
- SUR LA DEMANDE TENDANT A LA RÉSILIATION DU BAIL :
Il résulte des articles 15 et 40 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, qu’en cas de décès du locataire, le contrat de location consenti par un organisme d’habitation à loyer modéré visé par le second de ces textes n’est transféré à l’un des proches du défunt mentionné au premier de ces textes qu’à la condition que le bénéficiaire du transfert remplisse les conditions d'attribution et que le logement soit adapté à la taille du ménage. Le second texte précise que lorsque le bénéficiaire du transfert est un descendant remplissant les conditions de ressources mais pour lequel le logement est inadapté à la taille du ménage, l'organisme bailleur peut proposer un relogement dans un logement plus petit pour lequel l'intéressé est prioritaire. En application du premier, à défaut de personnes remplissant les conditions, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire.
En l’espèce, Mme [O] [K] ne conteste pas qu’en application de ces dispositions le bail a été résilié de plein droit par le décès de ses parents, colocataires du logement.
Il convient par conséquent de constater la résiliation du bail.
L’expulsion de Mme [O] [K] sera donc ordonnée en tant que de besoin.
Par ailleurs, il n’y a pas lieu de statuer sur le sort des meubles éventuellement laissés dans les lieux, qui demeure à ce stade purement hypothétique et qui se trouve spécifiquement organisé aux articles R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution au titre des opérations d'expulsion, dont le contrôle juridictionnel appartient au seul juge de l’exécution.
- SUR LES DEMANDES EN PAIEMENT :
Il résulte des dispositions des articles 544 et 1240 du code civil, que l'occupation d'un logement par une personne dépourvue de titre est constitutive d’une faute civile ouvrant droit pour le propriétaire à réparation du préjudice subi.
En l’espèce, DOMOFRANCE produit le bail ainsi qu'un décompte des loyers et des charges qui auraient été dues par l’occupant des lieux si un bail d’habitation avait été conclu. L’analyse du décompte permet de fixer la dette locative exigible auprès de Mme [O] [K] sur le fondement de la responsabilité délictuelle depuis qu’elle occupe le logement à titre personnel, soit à compter de l’échéance de mai 2022, à la somme de 12557,48 euros (décompte arrêté au 31 mars 2024, échéance de mars 2024 comprise). Mme [O] [K] ne justifiant pas du paiement de cette somme, elle doit, par conséquent, être condamnée au paiement de cette somme qui, s’agissant d’une indemnisation, portera intérêts au taux légal à compter du présent jugement.
Sur ce même fondement, elle sera également condamnée au paiement d'une indemnité mensuelle d’occupation pour la période courant du 1er avril 2024 à la date de la libération effective et définitive des lieux. Au regard du montant habituel du loyer et de la provision pour charge, cette indemnité mensuelle d'occupation sera fixée à la somme forfaitaire de 588,74 euros.
En application du principe de réparation intégrale, sans perte ni profit, cette condamnation ne saurait, comme sollicité, porter intérêt à compter de l'assignation, les indemnités d'occupation devant porter intérêts au taux légal qu'au fur et à mesure de leur exigibilité.
- SUR LES MESURES ACCESSOIRES :
Mme [O] [K], partie perdante, supportera la charge des dépens. En revanche, aucun élément en droit ne justifie d’inclure dans ces dépens le coût des sommations qui lui ont été délivrées.
En outre, sa situation économique et l'équité commandent de rejeter la demande formée par DOMOFRANCE au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est de plein droit exécutoire à titre provisoire.
PAR CES MOTIFS :
Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort :
CONSTATE, à la date du 25 avril 2022, la résiliation du bail conclu les 12 octobre 2000 et 7 janvier 2005 et liant en dernier lieu la société DOMOFRANCE à [Y] [D], concernant le bien à usage d’habitation, situé à [Adresse 5] ;
ORDONNE en conséquence à Mme [O] [K] de libérer ces lieux, avec restitution des clés, dès la signification du présent jugement ;
DIT qu’à défaut pour Mme [O] [K] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, la société DOMOFRANCE pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;
DIT n'y avoir lieu de statuer sur le sort des meubles éventuellement laissés sur place ;
CONDAMNE Mme [O] [K] à payer à la société DOMOFRANCE la somme de 12557,48 euros, à titre d’indemnités d'occupation (décompte arrêté au 31 mars 2024, échéance de mars 2024 comprise), avec les intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
CONDAMNE Mme [O] [K] à payer à la société DOMOFRANCE une indemnité mensuelle d’occupation, à compter du 1er avril 2024 et jusqu’à la date de la libération des lieux ;
FIXE cette indemnité mensuelle d'occupation, exigible à terme échu, à la somme forfaitaire de 588,74 euros ;
ASSORTIT la condamnation au paiement de cette indemnité mensuelle d’occupation des intérêts au taux légal, à compter de la date d’exigibilité de chaque indemnité mensuelle ;
REJETTE la demande formée par la société DOMOFRANCE au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE les plus amples demandes des parties ;
CONDAMNE Mme [O] [K] aux dépens ;
RAPPELLE que le présent jugement est de plein droit exécutoire à titre provisoire ;
Ainsi jugé et mis à disposition, les jour, mois et an susdits.
LE GREFFIERLE JUGE