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14/05/2024 | FRANCE | N°24/00263

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Ppp contentieux général, 14 mai 2024, 24/00263


Du 14 mai 2024


53B


SCI/DC


PPP Contentieux général

N° RG 24/00263 - N° Portalis DBX6-W-B7I-YV7Y



S.A.S. EOS FRANCE

C/

[M] [B]




Expéditions délivrées à :
Me GERARD-DEPREZ

FE délivrée à :
Me GERARD-DEPREZ

Le 14/05/2024





TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2]

JUGEMENT EN DATE DU 14 mai 2024



JUGE : Madame Bérengère LARNAUDIE, Vice Présidente

GREFFI

ER : M. Lionel GARNIER lors des débats
Mme Dominique CHATTERJEE lors du délibéré


DEMANDERESSE :

S.A.S. EOS FRANCE EOS FRANCE dont le siège social est situé au [Adresse 4], RCS Paris n° 488 825 217 ve...

Du 14 mai 2024

53B

SCI/DC

PPP Contentieux général

N° RG 24/00263 - N° Portalis DBX6-W-B7I-YV7Y

S.A.S. EOS FRANCE

C/

[M] [B]

Expéditions délivrées à :
Me GERARD-DEPREZ

FE délivrée à :
Me GERARD-DEPREZ

Le 14/05/2024

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 2]

JUGEMENT EN DATE DU 14 mai 2024

JUGE : Madame Bérengère LARNAUDIE, Vice Présidente

GREFFIER : M. Lionel GARNIER lors des débats
Mme Dominique CHATTERJEE lors du délibéré

DEMANDERESSE :

S.A.S. EOS FRANCE EOS FRANCE dont le siège social est situé au [Adresse 4], RCS Paris n° 488 825 217 venant aux droits de CARREFOUR BANQUE en vertu d’un acte de cession de créances en date du 8 juillet 2022,

Représentée par Maître Emmanuelle GERARD-DEPREZ de la SELAS DEFIS AVOCATS, avocat au barreau de Bordeaux

DEFENDEUR :

Monsieur [M] [B] né le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]

Ni présent, ni représenté

DÉBATS :

Audience publique en date du 12 mars 2024

PROCÉDURE :

Articles 480 et suivants du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre préalable signée le 3 décembre 2021, la SA CARREFOUR BANQUE a consenti à Monsieur [M] [B] un crédit renouvelable d'un montant de 1.000 € remboursable par mensualités avec un taux nominal révisable ; ce crédit s’est vu attribuer le numéro de dossier 512 389 442 911 00.

Selon une nouvelle offre préalable signée le 5 janvier 2022 portant le même numéro, la SA CARREFOUR BANQUE a consenti à Monsieur [M] [B] un crédit renouvelable d'un montant de 2.200 € remboursable par mensualités avec un taux nominal révisable.

Des échéances étant demeurées impayées, la SA CARREFOUR BANQUE a prononcé la déchéance du terme le 10 juin 2022 après une mise en demeure infructueuse par lettre datée du 3 mai 2022 adressée en recommandé avec avis de réception.

Le 8 juillet 2022, la SA CARREFOUR BANQUE et la SAS EOS FRANCE ont conclu un acte de cession de créances, intégrant la créance détenue à l’encontre de Monsieur [M] [B]. Cette cession de créance a été notifiée à Monsieur [M] [B] par courrier en date du 18 juillet 2022.

Par acte de commissaire de justice en date du 18 janvier 2024, la SAS EOS FRANCE a fait assigner Monsieur [M] [B] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de BORDEAUX, aux fins de le voir condamner en paiement des sommes suivantes, avec exécution provisoire :

• 2.889,61 €, avec intérêts contractuels au taux de 19,15% à compter du 10 juin 2022,
• 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

A l'audience du 12 mars 2024, la SAS EOS FRANCE, représentée par son conseil, a maintenu le bénéfice de ses prétentions. Elle a précisé que la forclusion de l’action n’était pas encourue, le dépassement du découvert autorisé étant en date du 19 janvier 2022. Elle a ajouté que la déchéance du droit aux intérêts pouvait être encourue, faute pour elle de justifier de la consultation du FICP lors de la souscription du contrat.

Assigné sur la base de l’article 659 du code de procédure civile, Monsieur [M] [B] n'a pas comparu et ne s’est pas fait représenter. Conformément à l'article 473 du code de procédure civile, le jugement sera rendu par défaut.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 14 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ; le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la qualité à agir de la SAS EOS FRANCE :

Il résulte des articles 1321 et suivants du code civil que la cession de créance peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables ; elle s'étend aux accessoires de la créance ; le consentement du débiteur n'est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée incessible.

S'agissant des conditions de forme de la cession de créance, elle doit être constatée par écrit, à peine de nullité.
L'article 1323 du code civil précise qu'entre les parties, le transfert de la créance s'opère à la date de l'acte. Il est opposable aux tiers dès ce moment. En cas de contestation, la preuve de la date de la cession incombe au cessionnaire, qui peut la rapporter par tout moyen.
Le transfert d'une créance future n'a lieu qu'au jour de sa naissance, tant entre les parties que vis-à-vis des tiers.
Selon l’article 1324, pour être opposable au débiteur, la cession doit lui avoir été notifiée ou il doit en avoir pris acte.
La SAS EOS FRANCE justifie de la cession de créance par acte du 8 juillet 2022, dont l’acte a été notifié par courrier du 18 juillet suivant à Monsieur [M] [B]. La créance détenue à l’encontre de ce dernier portant le numéro 512 389 442 911 00 est annexée à l’acte de cession de créances au sein de la liste des créances cédées.
Il convient au vu de ces documents de déclarer recevable l’action de la SAS EOS FRANCE qui a qualité à agir dans le cadre de la présente instance.
Sur la demande en paiement
Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n°2016-884 du 29 juin 2016.

L’article R.632-1 du code de la consommation permet au juge de relever d’office tous les moyens tirés de l’application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le juge à l'audience du 12 mars 2024.
En cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L'article D.312-16 du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l'article L.312-39, il peut demander une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance.
Sur la forclusion :
L'article 125 du code de procédure civile dispose que les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours.
L’article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur dans le cadre d’un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le juge des contentieux de la protection dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Cet événement est caractérisé notamment par le non paiement des sommes dues à la suite du premier incident de paiement non régularisé ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit, s’agissant des contrats de crédit renouvelable.
En l’espèce, il ressort de l’historique du compte que le dépassement non régularisé du découvert autorisé est en date du 24 janvier 2022.
L’action en paiement ayant été introduite par acte en date du 18 janvier 2024, soit moins de deux ans avant la date de l’assignation en paiement, l’action de la SAS EOS FRANCE est recevable.
Sur la déchéance du terme :
En vertu des dispositions de l’article L.312-39 du code de la consommation, si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet.
En l’espèce, compte tenu de la défaillance de l’emprunteur, malgré une mise en demeure préalable par lettre recommandée adressée au défendeur le 4 mai 2022 dont l’avis de réception a été retourné avec la mention “Pli avisé et non réclamé”, la SA CARREFOUR BANQUE a régulièrement prononcé la déchéance du terme le 10 juin 2022.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels :
Il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d’un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires, et notamment :
• la fiche d'information précontractuelle -FIPEN-
• la notice d'assurance et la fiche conseil assurance
• la justification de la consultation du fichier des incidents de paiements -FICP-
• la justification de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur et la fiche de dialogue
• la justification de la fourniture à l'emprunteur des explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière et attirant son attention sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière.
Il apparaît en l’espèce que la demanderesse ne justifie pas de la consultation du FICP préalablement à la conclusion du contrat, au demeurant pas plus celui signé le 3 décembre 2021 que celui signé le 5 janvier 2022.
Il en résulte que l’établissement de crédit doit être déchu de son droit aux intérêts à compter de la date de souscription du contrat du 3 décembre 2021.
En conséquence, il convient de ramener la créance de l’établissement de crédit à la somme de 1.959 €, correspondant à la somme prêtée (2.200 €) diminuée de l'ensemble des remboursements intervenus avant le 10 juin 2022, soit 241 €.

Par conséquent, il y a lieu de condamner Monsieur [M] [B] à payer à la SAS EOS FRANCE la somme de 1.959€ avec intérêts au taux légal à compter du 10 juin 2022.
En outre, afin d'assurer l'effectivité de la directive communautaire n° 2008/48 et notamment de son article 23, s'agissant du caractère effectif et dissuasif de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, il convient de ne pas faire application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, en prévoyant que la somme restant due produira intérêt au taux légal, mais ne sera pas majorée de cinq points.
Il résulte de l'article 1231-5 du code civil que l'indemnité contractuelle de 8 % du capital restant dû, qui a la nature d’une clause pénale, est soumise au pouvoir modérateur du juge qui constate son caractère manifestement excessif.
En l'espèce, dans la mesure où le prêteur a été déchu du droit aux intérêts et les sommes dues continuent à produire des intérêts tant qu’elles n’ont pas été entièrement payées, le taux de 8 % prévu paraît manifestement excessif et il convient de le réduire à la somme de 10 €. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du prononcé du présent jugement s'agissant d'une créance indemnitaire conformément à l'article 1231-7 du code civil.
Sur les demandes accessoires
Le défendeur qui succombe supportera les dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.
Il n’est pas inéquitable de le condamner au paiement d’une somme de 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l'article 514 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe rendu par défaut en dernier ressort,
DECLARE l’action de la SAS EOS FRANCE RECEVABLE ;
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels à comp-ter de la souscription du contrat du 3 décembre 2021 ;
CONDAMNE Monsieur [M] [B] à verser à la SAS EOS FRANCE la somme de 1.959 € avec intérêts au taux légal à compter du 10 juin 2022, et celle de 10 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
ECARTE la majoration de cinq points prévue par l’article L. 313-3 du code monétaire et financier ;
CONDAMNE Monsieur [M] [B] à verser à la SAS EOS FRANCE la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [M] [B] aux dépens ;
CONSTATE l’exécution provisoire.
Ainsi jugé et mis à disposition, les jour, mois et an susdits.
LA GREFFIERE LA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Ppp contentieux général
Numéro d'arrêt : 24/00263
Date de la décision : 14/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-14;24.00263 ?
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