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07/05/2024 | FRANCE | N°24/01445

France | France, Tribunal judiciaire de Bordeaux, Jex droit commun, 07 mai 2024, 24/01445


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 07 Mai 2024


DOSSIER N° RG 24/01445 - N° Portalis DBX6-W-B7I-Y2GI
Minute n° 24/ 162


DEMANDEUR

Madame [N], [Y], [W] [X] épouse [M]
née le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 3]
[Localité 5]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro N-33063-2024-002252 du 04/03/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)
représentée par Maître Yasmina RACON, avocat au barreau de BORDEAUX


DEFENDEUR


URSSAF AQUITAINE, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Ma...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L'EXECUTION

JUGEMENT DU 07 Mai 2024

DOSSIER N° RG 24/01445 - N° Portalis DBX6-W-B7I-Y2GI
Minute n° 24/ 162

DEMANDEUR

Madame [N], [Y], [W] [X] épouse [M]
née le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 3]
[Localité 5]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro N-33063-2024-002252 du 04/03/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)
représentée par Maître Yasmina RACON, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR

URSSAF AQUITAINE, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Nicolas ROTHÉ DE BARRUEL de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 02 Avril 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 07 Mai 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Le 07 mai 2024
Formules exécutoires aux avocats + dossiers
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties

EXPOSE DU LITIGE

Se prévalant d’une contrainte en date du 12 décembre 2023, l’URSSAF AQUITAINE a fait diligenter une saisie-attribution sur les comptes bancaires de Madame [N] [X] épouse [M] par acte en date du 23 janvier 2024, dénoncée par acte du 24 janvier 2024.

Par acte de commissaire de justice en date du 21 février 2024, Madame [X] a fait assigner l’URSSAF AQUITAINE devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de voir ordonnée la mainlevée de cette saisie.

A l’audience du 2 avril 2024 et dans ses dernières conclusions, Madame [X] sollicite la mainlevée de la saisie-attribution réalisée sur ses comptes bancaires et la condamnation de l’URSSAF AQUITAINE aux dépens et au paiement d’une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir qu’en dépit de l’information donnée à l’URSSAF quant à son changement d’adresse dans le cadre de sa déclaration de radiation effectuée le 21 novembre 2021, cette information n’a pas été prise en compte et l’ensemble des actes ayant donné lieu à l’émission d’une contrainte lui ont été signifiés à son ancienne adresse. Elle déduit la nullité de la contrainte en l’absence de mise en demeure préalable, soulignant qu’elle n’a pu contester judiciairement cet acte dans les délais impartis.

A l’audience du 2 avril 2024 et dans ses dernières écritures, l’URSSAF AQUITAINE conclut au rejet de toutes les demandes, à la validation de la saisie-attribution réalisée et à la condamnation de Madame [X] aux dépens et au paiement d’une somme de 960 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’URSSAF AQUITAINE soutient que la déclaration de radiation n’était pas achevée et ne lui a été transmise que le 25 novembre 2022 en mentionnant l’ancienne adresse de Madame [X], de telle sorte qu’elle ignorait la nouvelle adresse de cette dernière. Elle en déduit que la contrainte a été valablement signifiée, les actes d’exécution forcée qu’elle fonde devant être déclarés valides.

L’affaire a été mise en délibéré au 7 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

- Sur la recevabilité

Les articles L211-4 et R211-11 du Code des procédures civiles d’exécution relatifs à la saisie-attribution disposent : « Toute contestation relative à la saisie est formée dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat.
En l'absence de contestation, le créancier requiert le paiement de la créance qui lui a été attribuée par l'acte de saisie.
Toutefois, le débiteur saisi qui n'aurait pas élevé de contestation dans le délai prescrit peut agir à ses frais en répétition de l'indu devant le juge du fond compétent. »

« A peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. Il remet une copie de l'assignation, à peine de caducité de celle-ci, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience. »

L’article R232-7 du Code des procédures civiles d’exécution relatif à la saisie de droits d’associés prévoit quant à lui : « A peine d'irrecevabilité, la contestation est dénoncée le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. »

Madame [X] a contesté la saisie-attribution pratiquée par une assignation délivrée le 21 février 2024 alors que le procès-verbal de saisie date du 23 janvier 2024 avec une dénonciation effectuée le 24 janvier 2024. La contestation de la saisie-attribution était donc recevable jusqu’au 24 février 2024.

Madame [X] justifie de l’envoi du courrier recommandé en date du 21 février 2024 faisant état de la contestation portée adressée à l’huissier ayant réalisé la saisie-attribution.

La demanderesse doit donc être déclarée recevable en sa contestation de la saisie-attribution.

- Sur la nullité de la saisie-attribution

L’article L211-1 du Code des procédures civiles d’exécution dispose :
« Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail. »

Les articles L244-2 et L244-9 du Code de la sécurité sociale disposent :

« Toute action ou poursuite effectuée en application de l'article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d'un avertissement par lettre recommandée de l'autorité compétente de l'Etat invitant l'employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n'a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l'employeur ou le travailleur indépendant.
Le contenu de l'avertissement ou de la mise en demeure mentionnés au premier alinéa doit être précis et motivé, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. »

« La contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, dans les délais et selon des conditions fixées par décret, tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire.
Le délai de prescription de l'action en exécution de la contrainte non contestée et devenue définitive est de trois ans à compter de la date à laquelle la contrainte a été notifiée ou signifiée, ou un acte d'exécution signifié en application de cette contrainte. »

L’URSSAF AQUITAINE justifie de l’envoi d’une mise en demeure en date du 2 juin 2023 à l’ancienne adresse de Madame [X] à [Localité 6] et d’une signification de contrainte à cette même adresse par acte transformé en procès-verbal de recherches infructueuses.

Les deux parties produisent une déclaration de radiation d’activité d’autoentrepreneur n°[Numéro identifiant 8] (formulaire P4PL) datée du 24 novembre 2021, établie par Madame [X] déclarant sa cessation d’activités et sa nouvelle adresse à [Localité 5]. L’URSSAF fournit également une capture d’écran indiquant que cette déclaration n’a pas été finalisée. Madame [X] produit quant à elle une capture d’écran d’un message lui indiquant qu’elle a procédé à une télédéclaration de radiation (du même numéro) et va recevoir un récépissé, ce message laissant tout à fait entendre que la déclaration a bien été reçue.

Pour autant l’URSSAF produit une deuxième déclaration en date du 21 novembre 2021(formulaire P4 CMB) avec le même numéro d’identifiant d’entreprise mentionnant l’adresse de [Localité 6].

Madame [X] établit donc avoir déclaré son changement d’adresse, un message lui ayant confirmé la prise en compte de sa déclaration. Le formulaire dont se prévaut l’URSSAF n’établit donc pas à lui seul la méconnaissance de la nouvelle adresse de la demanderesse alors qu’il a en outre été établi de façon concomitante.

L’URSSAF n’a donc pas valablement mis en demeure Madame [X] alors qu’elle était en possession de sa nouvelle adresse. La contrainte doit dès lors être annulée ainsi que tous les actes d’exécution forcée subséquents au premier chef duquel la saisie-attribution pratiquée le 23 janvier 2024 dont la mainlevée sera ordonnée.

Sur les autres demandes
Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
L’URSSAF AQUITAINE, partie perdante, subira les dépens et sera condamnée au paiement d’une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,
ANNULE la contrainte délivrée par l’URSSAF AQUITAINE à l’encontre de Madame [N] [X] épouse [M] le 12 décembre 2023, signifiée par acte du 18 décembre 2023 ;
ANNULE le procès-verbal de saisie-attribution pratiquée à la diligence de l’URSSAF AQUITAINE sur les comptes bancaires de Madame [N] [X] épouse [M] par acte du 23 janvier 2024, dénoncée le 24 janvier 2024 ;
ORDONNE la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée à la diligence de l’URSSAF AQUITAINE sur les comptes bancaires de Madame [N] [X] épouse [M] par acte du 23 javnier 2024, dénoncée le 24 janvier 2024 ;
CONDAMNE l’URSSAF AQUITAINE à payer à Madame [N] [X] épouse [M] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE l’URSSAF AQUITAINE aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Formation : Jex droit commun
Numéro d'arrêt : 24/01445
Date de la décision : 07/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-07;24.01445 ?
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